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![]() Instruments économiques pour la protection et la conservation de l'environnement : Leçons pour le Canada
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Annexe A : Types d'instruments économiquesLa présente annexe donne des exemples de l'éventail des instruments économiques les plus couramment utilisés par les gouvernements pour tirer parti des forces du marché afin d'encourager les changements voulus. La figure A résume les catégories d'instruments et en donne des exemples. Figure A : Exemples d'instruments économiques
Droits de propriété1 On utilise divers types de mécanismes de droits de propriété pour favoriser la gestion responsable des ressources. Ces mécanismes reposent sur l'hypothèse que les propriétaires ou utilisateurs ayant obtenu un droit exclusif de propriété ou d'utilisation absorberont les coûts et avantages de l'épuisement des ressources. En revanche, dans le cas des régimes d'accès libre, l'utilisateur n'est pas vraiment concerné par le coût d'épuisement des ressources. S'il absorbe cette conséquence, l'utilisateur n'épuisera pas une ressource donnée, à moins que le prix de la ressource ne couvre non seulement le coût d'extraction de celle-ci mais aussi le coût de son épuisement, ce qui représente la perte des bénéfices futurs par suite de l'utilisation actuelle de la ressource. Les droits de propriété ne sont pas utiles pour gérer les effets sur l'environnement de l'utilisation d'une ressource. Ils conviennent plutôt principalement à la promotion de la gestion responsable des terres et des sols (droits fonciers), des ressources en eau (droits d'usage de l'eau), des minéraux (droits miniers) et d'autres ressources naturelles qu'on peut répartir et délimiter ou dont on peut démarquer et défendre facilement les frontières. Ils sont moins adaptés aux situations où les ressources se déplacent en traversant des frontières (p. ex. la pêche marine), où la qualité d'une ressource est tributaire des actions de tiers (p. ex. lorsque la pêche est affectée par le ruissellement à partir des terres agricoles en amont). Il existe trois grands types de droits de propriété : les droits de propriété, comme les titres fonciers et droits d'usage de l'eau; les droits d'utilisation, comme les permissions, les offres de concession, les actes d'usufruit et les droits d'accès (p. ex. l'accès aux routes, parcs, etc.); et les droits d'aménagement. Pour tenir compte d'objectifs environnementaux (et autres objectifs), ces trois types de droits peuvent faire l'objet de règlements ou d'instruments économiques, comme des taxes différentielles sur l'utilisation des sols, des droits d'aménagement ou des frais d'impact. Parmi les modes d'atténuation des droits de propriété, mentionnons la séparation des droits d'aménagement d'avec les droits de propriété, grâce à l'application de droits d'aménagement transférables (DAT). En vertu des DAT, toutes ou certaines formes de mise en valeur de sites désignés sont interdites, mais les propriétaires de ces sites peuvent transférer ou vendre leurs droits d'aménagement aux propriétaires d'autres sites, afin de recouvrer la pleine valeur marchande de leur site. La demande de ces droits est assurée par l'autorisation des détenteurs de droits d'aménagement par transfert d'accroître leurs activités de mise en valeur d'un site (au-delà de celles prescrites dans les règlements concernant les biens immobiliers ou les règlements de zonage). On a eu abondamment recours aux DAT pour préserver des bâtiments historiques, des sites archéologiques, des patrimoines culturels, des zones humides et régions côtières et, dans une moindre mesure, pour préserver les ceintures de verdure, les forêts et la biodiversité. Droits, redevances et taxes Les droits, redevances et taxes impliquent tous le paiement d'un montant précis. Ils créent un coût explicite pour l'exécution d'une activité nuisible pour l'environnement et une incitation facilement quantifiable à la réduction de l'activité. Parmi les principaux désavantages de la réclamation de paiements, il y a que, en soit, les mesures d'imposition de paiements ne garantissent pas le niveau de réduction des activités indésirables d'une source ou d'un groupe de sources de pollution. Un autre problème est que, face aux considérations politiques, il pourrait être impossible d'imposer des frais suffisamment élevés aux personnes concernées pour avoir un impact sensible en faveur de l'environnement. Il y a de nombreux types d'instruments de taxation environnementale :
Dépôts-remboursements Les dépôts-remboursement sont des systèmes de remboursement de redevances qui imposent aux producteurs ou aux consommateurs particuliers la responsabilité d'éviter de causer des dommages environnementaux. Selon des formules de dépôt-remboursement, les consommateurs doivent payer des frais supplémentaires pour l'achat de produits susceptibles de polluer. Comme un remboursement partiel ou total de ces frais est prévu, les consommateurs sont incités à retourner les produits en fin de vie en vue de leur réemploi, recyclage ou élimination appropriée. Règles de responsabilité et garanties Grâce aux règles de responsabilité pour les dommages aux ressources naturelles, à l'environnement, aux biens, à la santé humaine ou pour des pertes de vie, les entreprises et les autres acteurs ont une incitation puissante à tenir compte des répercussions environnementales possibles de leurs décisions. Comme ces régimes de responsabilité reposent sur le risque de litige, ils concernent des transactions coûteuses, qui soulèvent principalement des dangers aigus. L'Allemagne, la Belgique, la France, les Pays-Bas et les pays nordiques imposent tous la responsabilité absolue pour diverses activités polluantes (OCDE ou Organisation de coopération et de développement économiques 1995, 1996, 1997a, 1997b, 1998). Aux État-Unis, la Comprehensive Environnemental Response, Compensation et Liability Act de 1980 impose une responsabilité rétroactive aux entreprises jugées responsables d'un site qui doit être nettoyé. De même, la Oil Pollution Act et la Clean Water Act attribuent aux pollueurs la responsabilité de payer les coûts de nettoyage et les autres dommages causés par des déversements. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement, 1999 contient des dispositions similaires concernant la responsabilité pour des dommages causés par des urgences environnementales. Garanties – Ce sont notamment des garanties de bonne exécution, de remise en état des terres, d'acheminement de déchets et de couverture des coûts d'accidents environnementaux, qui peuvent être imposées afin de s'assurer que les entreprises d'extraction de ressources et les pollueurs potentiels prennent des mesures adéquates pour prévenir ou réduire au minimum les dommages environnementaux et pour assurer le nettoyage et la remise en état des dommages résiduels. Permis négociables Il existe deux grands types de systèmes de permis négociables. Le système de plafonnement et d'échange de crédits d'émission de polluants (non plafonnés) et le système de crédits (plafonnés). Le premier constitue un mécanisme permettant de réduire au minimum les coûts globaux nécessaires pour respecter le plafond réglementaire des émissions. Des permis d'émissions futures sont vendus ou accordés aux sources existantes. Le deuxième système n'impose pas de plafond, les émissions totales pouvant augmenter, à mesure que les sources existantes augmentent leur production et que de nouvelles sources entrent sur le marché. Des crédits sont alloués si le niveau de réduction de la pollution est supérieur au niveau de référence spécifié dans le permis donné. Ces deux types de systèmes de permis négociables sont utilisés de plus en plus couramment aux États-Unis. Au niveau fédéral, ils sont appliqués à l'échelle du pays, notamment dans le cadre d'échanges de crédits d'utilisation de CFC, du programme d'élimination progressive de l'essence avec plomb, du programme d'échange de crédits d'émission de gaz produisant des pluies acides et des normes CAFE (Corporate Average Fuel Economy) de réduction de consommation du carburant. À l'échelle des États, mentionnons le programme RECLAIM du sud de la Californie, le programme du Colorado visant les appareils de chauffage au bois (en vertu duquel des permis sont attribués aux appareils existants et deux permis existants sont retirés lors de la mise en service d'un nouvel appareil) et le programme de Spokane County pour l'échange de droits de brûler des herbes sèches. La formule des permis négociables a également été élargie à la gestion de ressources. Notons les programmes de contingents de captures négociables et de parts de ressources négociables, notamment en eau, ainsi que les droits d'aménagement transférables (voir l'information sur les DAT dans la section ci-dessous traitant des droits de propriété). Selon une étude (National Center for Environnemental Economics, 2001) qui a été réalisée récemment par l'Environnement Protection Agency (EPA), les programmes d'échange de crédits d'émission de polluants présentent des caractéristiques qui sont de plus en plus prisées aux États-Unis. Dans le cadre d'un programme d'échange de crédits d'émission de polluants, les capitaux se déplacent entre les entreprises commerçantes. Les entreprises entrepreneuriales novatrices peuvent donc profiter de réductions peu coûteuses d'émissions polluantes. De plus, les programmes de plafonnement et d'échange de crédits d'émission de polluants offrent une plus grande certitude de l'ampleur des améliorations environnementales qui seront réalisées. Toutefois, les programmes d'échange de crédits d'émission de polluants présentent plusieurs inconvénients, comme le risque de coûts élevés des transactions (en raison du besoin de vérifier chaque possibilité de réduction avant d'autoriser un échange de permis) et l'existence de marchés inactifs, surtout dans le cas des systèmes de crédits ou de marché libre. Subventions Tous les gouvernements, partout dans le monde, utilisent un vaste éventail de subventions pour favoriser la protection de l'environnement. Par exemple, ils offrent des prêts à faible intérêt, des fonds renouvelables, des incitations à la localisation/délocalisation, des traitements fiscaux favorables et des politiques préférentielles d'achats de produits semblant présenter moins de risques pour l'environnement. Ils utilisent des subventions pour soutenir la mise au point de nouvelles technologies et techniques, la prévention de la pollution et la lutte antipollution, le nettoyage de sites industriels contaminés, la préservation de l'agriculture et des terres, la gestion des déchets de consommation et le traitement des eaux usées municipales. Les subventions pour la gestion de l'environnement sont critiquables parce que les gouvernements les octroyant – et, au bout du compte, les contribuables - aident à supporter des coûts qui devraient être assumés par les pollueurs. 1 Panoyotou (1994) fournit une excellente description des droits de propriété. Annexe B : Expériences en matière d'écologisation de la fiscalitéB.1 ContexteAu cours des années 90, le débat sur l'utilisation d'instruments économiques pour répondre à des besoins environnementaux a été élargi pour englober la question des taxes vertes, de l'écologisation de la fiscalité (ÉF), ou de la répercussion de l'impôt. L'ÉF implique non seulement la taxation des « choses mauvaises », mais aussi la réduction ou l'élimination des subventions ayant un effet pervers sur l'environnement. Il comprend aussi l'utilisation des revenus provenant de taxes vertes pour réduire les taxes sur les activités socialement souhaitables (p. ex. la main-d'oeuvre et les économies) ou pour encourager l'adoption de technologies souhaitables pour l'environnement (p. ex. les énergies renouvelables). Bien plus des trois quarts des taxes vertes appliquées par les pays de l'OCDE visent les véhicules motorisés et la consommation d'énergie22. Jusqu'à présent, l'ÉF a surtout été une tentative pour encourager l'efficacité énergétique et la réduction d'émissions dans l'atmosphère. En fin de compte, la plupart des pays n'ont pas exploré pleinement les possibilités de l'ÉF. Par conséquent, les leçons que le Canada peut tirer de l'expérience internationale sur l'ÉF non liée à l'énergie sont limitées. Il existe une documentation considérable sur les taxes vertes et l'ÉF, mais elle traite surtout de questions de méthodologie, comme les considérations de conception, l'atténuation des répercussions indésirables et l'analyse de leur efficacité. En revanche, cette section porte sur le fonctionnement de l'ÉF. Au fonds, l'introduction d'une taxe verte ou d'une ÉF constitue un processus politique dont le succès dépendra autant du leadership, du moment choisi et de sa promotion dynamique que de sa conception. Au cours des dix dernières années, plusieurs pays de l'OCDE (la Belgique, le Danemark, la Finlande, l'Islande, l'Italie, le Japon, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède) ont formé des « commissions des taxes vertes » chargées d'examiner les occasions d'introduire des taxes et redevances en faveur de l'environnement et les répercussions de celles-ci. Le mandat et la composition de ces commissions ont varié d'un pays à l'autre; p. ex. des pays comme la Norvège ont créé des commissions multilatérales alors que des pays comme la Finlande en ont constitué qui étaient composées uniquement de représentants gouvernementaux. Ces commissions ont connu un succès mitigé. Quant à des pays comme l'Italie23 et l'Allemagne, ils ont traité de divers aspects de l'ÉF par des mesures exécutives et législatives directes, sans recourir à la création de commissions des taxes vertes. Bien que l'expérience européenne et américaine soit variée, les observateurs et participants ont tiré plusieurs enseignements communs sur l'introduction réussie de l'ÉF, qui sont intéressants pour le Canada. B.2 Expérience de l'Europe avec l'ÉFEn général, les pays européens ont embrassé un concept vaste de l'ÉF, qui comprend la répercussion fiscale, alors que les États-Unis ont eu tendance à mettre l'accent sur le choix d'instruments pour répondre à des problèmes environnementaux précis. Les aspects du processus de répercussion fiscale et la conception des instruments diffèrent entre l'Europe et les États-Unis. Il n'est pas étonnant que l'Europe ait plus d'expérience des consultations publiques sur l'ÉF que les É.-U. Vous trouverez ci-après un résumé des méthodes employées par quatre pays européens pour introduire une ÉF. AllemagneEntre le début et le milieu des années 90, les universitaires et les ONG allemands ont été parmi les premiers à lancer et à populariser le concept de répercussion fiscale. L'ÉF réelle a été introduite dans le cadre d'un processus politique explicite en tant que prix à payer pour l'adhésion du Parti vert à l'accord pour la formation d'une coalition gouvernementale à la suite des élections de 199824. L'ÉF allemande avait pour objet : i) d'améliorer l'efficacité énergétique (et de réduire les émissions de gaz à effet de serre) en augmentant le coût d'autres formes d'énergie; ii) d'accroître l'emploi en réduisant les coûts sociaux du travail25. Plus précisément, l'ÉF devait aider à hâter les changements structurels de l'économie, à encourager les investissements dans l'efficacité énergétique et à soutenir l'introduction de procédés de production respectueux de l'environnement. En Allemagne, l'ÉF s'est traduite par une hausse progressive des taxes sur l'énergie, assortie d'exemptions pour atténuer les conséquences négatives pour la compétitivité de l'industrie (y compris celle de l'agriculture et de la foresterie). L'Allemagne a haussé les taxes sur l'énergie et instauré, dans un même temps, des incitatifs fiscaux à l'utilisation d'énergies renouvelables, à l'efficacité énergétique et à l'utilisation de transport public. Il a également consacré ses recettes énergétiques supplémentaires à la réduction des charges sociales. Le Parlement allemand a promulgué deux lois sur l'ÉF en 1999. La deuxième, la loi pour poursuivre l'écologisation fiscale, prévoit des hausses de taxes sur l'énergie et des réductions des primes de prévoyance vieillesse sur une période de quatre ans, afin d'établir un environnement stable de planification26. En Allemagne entre 1970 et 1997, les recettes publiques tirées des taxes sur le travail et des taxes vertes sont passées respectivement de 54 % à 66 % et de 7 % à 5 %. L'ÉF en Allemagne aura pour effet de renverser cette tendance : sur cinq ans, l'Allemagne prévoit déplacer 2 % de ses recettes fiscales au moyen de l'ÉF, ce qui représente une évolution importante mais non pas radicale. Les Pays-BasLes Pays-Bas ne se sont pas engagés explicitement dans la voie de l'ÉF. Néanmoins, sur 30 ans, ils ont introduit progressivement plusieurs taxes vertes – ainsi que des mesures correctives pour régler les problèmes qui en découlaient – qui ont légitimé l'utilisation d'une politique fiscale pour favoriser l'atteinte d'objectifs environnementaux et permis d'établir les taxes vertes comme source importante de recettes publiques27 (Commission des taxes vertes des Pays-Bas, 2001). La première commission des taxes vertes, qui a été constituée en 1995, avait recommandé la création d'un régime fiscal qui combine une incitation négative modeste et une incitation positive importante en vue de favoriser l'adoption de comportements souhaitables pour l'environnement. L'idée que les pollueurs devraient aider à payer le coût des investissements écologiques s'est révélée intéressante du point de vue politique, et elle a aidé à faire accepter ces propositions par le public. Le taux élevé de chômage observé au milieu des années 90 a poussé les gouvernements successifs à déplacer une partie du fardeau fiscal du travail vers l'énergie, les taxes vertes étant considérées non seulement comme un instrument de politique environnementale mais aussi comme un instrument de politique sociale. En 1997, la commission des taxes vertes a publié un troisième rapport qui a amené la publication d'un livre blanc gouvernemental (Taxes au 21e siècle) qui énonce les possibilités de réformes fiscales importantes. L'un des principaux éléments de la réforme était de hausser les taxes sur la consommation d'énergie par les ménages, de réduire l'impôt sur le revenu et de créer des incitations à des investissements pour faire des économies en énergie. La commission avait également formulé des recommandations pour distinguer les traitements fiscaux nuisibles pour l'environnement de ceux qui sont inoffensifs pour l'environnement. En 2000, les Pays-Bas ont établi une deuxième commission des taxes vertes pour examiner les résultats de l'ÉF jusqu'à cette date et distinguer les autres subventions qui ont des effets nuisibles pour l'environnement et de nouvelles mesures possibles d'ÉF. Tout comme la première commission, la deuxième commission était composée de fonctionnaires et représentants d'établissements de recherche, d'ONG et du secteur privé. Elle relevait de cinq ministres (Finances, Environnement, Transport, Agriculture et Affaires économiques). Chaque membre de la commission pouvait soumettre des propositions pour discussion. Ces dernières entraient généralement dans l'une des catégories suivantes :
La commission a publié un rapport, qui a suscité un consensus assez large, sur les mesures qui devraient être mises en oeuvre ou rejetées et sur les mesures sur lesquelles il existe trop peu d'information pour se prononcer sur leur valeur. Elle était divisée sur la question de savoir s'il fallait étendre les règlements fiscaux sur l'énergie aux grands consommateurs industriels. Le gouvernement a demandé à la commission de lui soumettre un rapport au milieu de 2001, dont les conclusions pourraient influer sur la préparation des plateformes des partis en prévision des élections de 2002. DanemarkParmi tous les pays de l'OCDE, le Danemark est celui qui a le plus explicitement déplacé le fardeau fiscal du revenu vers les taxes vertes. Pourtant, ce déplacement a été de faible ampleur : entre 1994 et 2000, les recettes fiscales tirées du revenu ont baissé d'environ 1 % du PIB (pour atteindre moins de 26 %), alors que les taxes vertes ont augmenté d'un peu moins de 1 % (pour atteindre 5 % du PIB). Le Danemark a utilisé les recettes de la hausse des taxes sur l'énergie pour réduire la cotisation de l'employeur à la sécurité sociale et au régime de pensions et pour octroyer des subventions d'investissement dans des technologies favorisant l'efficacité énergétique. Bien que l'ÉF du Danemark couvre un vaste éventail de produits, les recettes générées proviennent en grande majorité de produits d'énergie. Lorsque le Parlement danois a adopté son « programme énergétique » en 1995, il avait précisé que la nouvelle législation qui en découlait serait réévaluée en 1998. Cet engagement a contribué à augmenter l'acceptabilité politique des mesures (qui ont entraîné une hausse des taxes sur les CO2 et l'élargissement des taxes sur l'énergie à d'autres secteurs).
Royaume-UniEn 1997, le gouvernement du Royaume-Uni a émis un « énoncé d'intention » concernant l'écologisation fiscale. En 1998, le chancelier de l'Échiquier a nommé un groupe de travail chargé d'examiner les meilleurs moyens d'utiliser les instruments économiques pour améliorer la consommation d'énergie et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Lord Marshall a dirigé ce groupe de travail, qui était composé de quatre fonctionnaires issus des ministères gouvernementaux concernés. Avant de déposer son rapport final en novembre 1998, le groupe a préparé un document de consultation (Marshall, 1998) qui a suscité des commentaires de 143 organisations et particuliers. En 1999, le gouvernement a annoncé qu'il imposerait, à partir de 2001, une taxe sur la consommation d'énergie par les entreprises en vue de lutter contre le changement climatique. Les revenus tirés seraient affectés en partie à la réduction des cotisations des employeurs au fonds d'assurance nationale et en partie aux investissements dans les énergies renouvelables et technologies énergétiquement efficaces. De plus, le gouvernement a négocié des accords sur l'énergie et sur les émissions avec divers secteurs industriels, en contrepartie d'un allégement des taxes imposées aux entreprises atteignant les objectifs négociés de réduction des émissions. Pour faire accepter sa proposition de taxer l'énergie consommée par l'industrie et les commerces, le gouvernement du Royaume-Uni a :
Comme de nombreuses autres mesures d'intérêt public, l'introduction de l'ÉF en Europe a été controversée. En 2000, face à l'opposition féroce des entreprises de transports et à la hausse du prix du carburant, le gouvernement du Royaume-Uni a abandonné son projet d'indexation des taxes de carburant de transport routier, qui aurait permis d'augmenter le droit d'accise sur le carburant de 6 % par année. Le gouvernement de l'Italie a, quant à lui, retardé son ÉF, en partie en raison de la hausse des prix internationaux du pétrole enregistrée depuis 1999. En 1999, le Parlement français a approuvé une restructuration importante des taxes et redevances environnementales, qui a par la suite été jugée inconstitutionnelle28. La Suisse a organisé un référendum en septembre 2000 qui a abouti au rejet de deux projets de réforme en faveur de l'application de taxes vertes. B.3 Expérience des États-Unis avec l'ÉFBien que les É.-U. soient un chef de file mondial de l'application de divers types de régimes d'échange et d'un vaste éventail de taxes et de frais environnementaux, ils ont peu d'expérience en matiere de répercussion fiscale en faveur de l'environnement. Dans l'environnement politique américain, les gouvernements fédéral et d'États ont amplement recours à des redevances, frais et taxes sur la pollution. Selon un sondage réalisé en 1998, alors que les États n'appliquaient presque aucune disposition fiscale à caractère environnemental dans les années 70, ils en imposent couramment depuis le milieu des années 90 (Hoerner, 1998). Le sondage a recensé 462 dispositions en vigueur en 1996 et seulement cinq États qui en appliquaient moins de cinq. Dans son rapport de 2001, le National Center for Environnemental Economics de l'EPA a dénombré de nombreux types de redevances, de droits et de taxes, dont les suivants : des droits d'évacuation indirecte et d'utilisation des eaux, des droits d'évacuation directe d'eaux usées, des droits d'autorisation d'évacuation d'effluents, des droits de traitement des eaux de ruissellement, des droits d'autorisation pour les émissions atmosphériques, des droits régionaux de non-respect des valeurs limites d'ozone, des prix modulés pour l'élimination des déchets solides, des taxes sur les décharges, des taxes sur les déchets dangereux et des redevances pour les produits, qui sont imposés au niveau fédéral et des États. Bien que certaines redevances, surtout des redevances pour des produits, aient été imposées par le fédéral, la plupart ont été instituées au niveau local ou d'État. Dans le cas de la pollution de l'air et des eaux, le gouvernement fédéral a fourni des lignes directrices sur les redevances, mais les États ont élaboré et mis en oeuvre un vaste éventail de redevances, selon leurs besoins. Peu de ces redevances sont considérées comme des « taxes ». En vertu de la loi fédérale, une taxe est purement un instrument de perception de recettes, alors que les redevances ou droits ont pour objet de couvrir les coûts du gouvernement. Ainsi, les versements d'impôts entrent dans les recettes générales. Bien que de nombreuses redevances et de nombreux droits doivent être versés sur le fonds d'administration général du Trésor, certains sont retenus pour compléter les budgets des agences environnementales. La taxe verte la plus courante est la taxe sur les produits, comme la taxe fédérale sur les véhicules énergivores, la taxe sur les CFC et la taxe d'État sur les engrais. Bien qu'elles soient à des niveaux plus bas qu'en Europe, des taxes sur le carburant sont également imposées aux É.-U. La plupart des taxes vertes américaines ont principalement pour objet de générer des recettes. Par conséquent, peu de ces taxes sont fixées à des niveaux suffisants pour prendre en compte les coûts totaux des dommages environnementaux ou pour changer sensiblement les comportements (Pembina Institute, 2000; Hamond et autres, 1997; National Center for Environnemental Economics, 2001). Au cours des dix dernières années, les États-Unis, comme le Canada, se sont intéressés vivement à éliminer les subventions économiquement inefficaces du budget fédéral. Alors que le Canada a accordé peu d'attention à la dimension environnementale dans son programme d'élimination de subventions, le Green Scissors Coalition, un groupe américain d'écologistes, de contribuables et de consommateurs, s'est concentré sur l'élimination de programmes inefficaces aussi bien sur le plan économique qu'environnemental. Depuis 1995, la Coalition s'est attribuée le mérite d'éliminer 28 milliards de dollars en subventions fédérales. Dans son programme pour 2003, il a recensé encore 58 milliards de dollars en subventions qui contribuent à polluer les ressources naturelles et à menacer la santé humaine.29 Malgré le recours massif à des droits et à des taxes et l'appui de certains universitaires et ONG pour une écologisation fondamentale de la fiscalité, on a accordé peu d'attention aux État-Unis au type de taxation avec remise, sans incidence sur les recettes, qui se développe en Europe ou à la nature des répercussions de l'impôt, qui commence à faire l'objet d'un examen dans d'autres pays. Au cours des dix dernières années, une poignée d'initiatives de ce genre a été proposée aux niveaux fédéral et des États, mais aucune mesure importante n'a joui d'un appui politique. La taxe sur les BTU (la consommation de BTU de carburant), proposée par l'ancien président Clinton, avait pour objet de conjuguer les objectifs de réduction du déficit et d'efficacité énergétique. Toutefois, elle n'a pas recueilli le soutien de la Chambre ou du Sénat en raison de l'opposition ferme exprimée par l'industrie et du climat politique général qui était contre l'imposition de taxes. Le président a également proposé un programme de technologies pour lutter contre le changement climatique qui regroupait des crédits d'impôt et des dépenses directes pour favoriser le développement de technologies écoénergétiques et de technologies de rechange. Bien que le programme ait été mis en oeuvre, il a été sensiblement édulcoré en raison de la crainte qu'il puisse être perçu comme un signe de soutien à l'accord de Kyoto et de l'opposition à l'idée de créer une subvention verte qui serait en somme un outil électoraliste en remplacement d'autres formes de subvention. Jusqu'à présent, le Minnesota a entrepris, à la fin des années 90, la tentative américaine la plus ambitieuse de mettre en place une fiscalité verte. Des ONG et des citoyens du Minnesota pour une économie écoénergique (Minnesotans for an Energy Efficiency Economy ou ME3) ont travaillé en étroite collaboration avec des législateurs d'État à la promotion d'une série de projets de taxation sans incidence sur les recettes, qui réunissaient une nouvelle taxe sur les combustibles fossiles à des réductions des impôts fonciers. Malgré des appuis au sein de la classe politique et l'appui assez solide du public, aucun des projets n'a été adopté. Les partisans des projets n'avaient pas été capables de dissiper les doutes exprimés sur la neutralité fiscale des projets. Par ailleurs, peu des secteurs (services de santé, commerce au détail, assurance, etc.) qui étaient susceptibles de profiter de ces projets se sont mobilisés pour les soutenir, alors que les secteurs qui risquaient d'en subir les conséquences négatives ont fait front pour s'y opposer (Noble, 1999). En 1999 et en 2000, les assemblées législatives de l'Oregon et du Vermont ont vaincu de justesse des propositions de constitution de commissions pour examiner les possibilités de transferts d'impôts. La commission d'étude des impôts environnementaux de l'Oregon (projet de loi HB 2473) avait proposé de créer une commission qui serait chargée d'élaborer des propositions « de mise en oeuvre de taxes vertes qui déplacent le fardeau fiscal de l'État vers des activités indésirables et qui permettraient de réduire le taux d'imposition d'activités favorisant l'hygiène de l'environnement de l'Oregon ». Le comité d'examen de la politique fiscale, nommé par le gouverneur, avait proposé de créer cette commission dans son rapport de 199930. Le projet de loi a été rejeté parce que le comité des voies et moyens (Ways and Means Committee) a refusé de débloquer 200 000 $ pour la constitution du comité. Au Vermont, une proposition similaire a été faite (projet de loi H.0477) en vue de créer un comité qui serait chargé « d'étudier les répercussions de possibilités d'impositions qui favorisent aussi bien une économie vigoureuse qu'une utilisation efficace des ressources naturelles ». Le projet de loi proposait aussi l'imposition de frais supplémentaires sur les véhicules énergivores et un remboursement de taxe sur les véhicules économes en énergie. Face à la forte opposition au volet économie d'énergie du projet de loi, la résolution proposant l'étude des répercussions de l'impôt a été rejetée par une voix au conseil législatif en 1999. À la lumière d'un examen récent de l'expérience américaine, il ressort que le principal enseignement qu'on peut en tirer est le besoin de progresser par étapes, afin de développer le soutien essentiel ou la crédibilité de l'ÉF et la confiance envers celle-ci (Institut Pembina, 2000). Malgré l'utilisation assez généralisée de redevances et de taxes et les progrès accomplis en Europe en ce qui a trait aux répercussions de l'impôt, il existe toujours beaucoup de scepticisme et de craintes à l'égard de toute proposition importanteen matière fiscale. Afin d'assurer le soutien pour la plupart des nouvelles mesures d'ÉF, il faut unir les efforts pour montrer les progrès accomplis progressivement en vue d'apaiser les inquiétudes particulières concernant notamment les effets distributifs et l'impact sur la compétitivité. À court terme, il est peu probable que les États-Unis, surtout à l'échelle fédérale, instaurent une ÉF significative. L'adoption de nouvelles mesures fiscales serait contraire à l'idéologie de l'administration fédérale actuelle, qui a introduit consécutivement deux grosses baisses d'impôts. Toutefois, à moyen terme, face à la hausse de leur déficit budgétaire, les État-Unis pourraient voir se développer un climat politique qui est plus favorable à l'adoption de nouvelles taxes en général et d'une ÉF en particulier. B.4 Expérience du Canada avec l'ÉFBien que, contrairement à certains pays européens, le Canada n'ait pas établi une commission des taxes vertes, il a lancé, aux niveaux fédéral et provincial, les processus de consultation multilatérale suivants qui sont de nature similaire :
22 La plupart des autres taxes vertes n'allient pas des recettes fiscales importantes avec des effets environnementaux sensibles. 23 Plus de la moitié des recettes fiscales tirées par l'Italie des combustibles fossiles en 1999 a été affectée à la réduction des coûts de la main-d'oeuvre, Majocchi (2000). 24 La Belgique a également introduit des taxes vertes en 1993, à l'instigation du Parti vert. 25 En Suède, le gouvernement conservateur nouvellement élu s'est tourné vers l'ÉF pour augmenter les taxes sur l'énergie et le transport afin de réduire les taux très élevés imposition sur le revenu marginal. 26 De même, la loi financière de 1999 en Italie énonce des hausses prévisibles des droits d'accise qui sont appliqués à la consommation de pétrole et des réductions des cotisations obligatoires de la main-d'oeuvre sur une période de plusieurs années. 27 13,7 % du total des recettes fiscales en 2002 28 À noter qu'à l'automne 2001, le budget français comprenait tout de même de nombreuses mesures d'ÉF. 29 www.greenscissors.org 30 Oregon Tax Review Policy Committee, Governor's Tax Review Phase II Policy Recommendations. Janvier, 1999. 31 Voir, par exemple, la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie (2002). 32 La taxe pour la conservation du carburant est un impôt uniforme applicable à certains types de véhicules énergivores : voir www.trd.fin.gov.on.ca/userfiles/HTML/nts_3_19281_1.html. [ << ] [ Table des matières ]
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