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LA RÉGLEMENTATION INTELLIGENTE
Une stratégie réglementaire pour le Canada PARTIE IVUE D'ENSEMBLELe Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente recommande dans le présent rapport un changement majeur de la perspective et des pratiques canadiennes en matière de réglementation. Le Canada a de solides assises réglementaires qui, toutefois, selon les observations du Comité, sont soumises à des pressions constantes en vue d'accroître l'efficacité, l'adaptabilité, l'efficience, la transparence et l'imputabilité du système réglementaire envers les Canadiens. Le contexte dans lequel le système réglementaire s'applique a évolué de telle sorte qu'il est aujourd'hui de plus en plus exigeant d'assurer la protection des citoyens, des consommateurs et de l'environnement naturel. Dans une économie internationale hautement intégrée, les entreprises doivent accroître leur efficience et leur créativité. Il n'est peut-être donc pas étonnant que le Comité ait entendu chaque secteur d'importance lui signaler que le système réglementaire actuel constitue souvent un obstacle à l'innovation, à la compétitivité, à l'investissement et au commerce.
Cependant, selon la définition du Comité, la réglementation intelligente n'est pas synonyme de déréglementation. La réglementation intelligente ne diminue en rien la protection, comme certains peuvent le craindre. Au contraire, elle renforce le système réglementaire de manière à ce que les Canadiens puissent continuer à jouir d'un niveau de vie élevé au XXIe siècle. Le Comité croit que la réglementation devrait soutenir des réalisations à la fois sociales et économiques - offrant aux citoyens la protection dont ils ont besoin pour se sentir en sécurité, soutenir la transition vers le développement durable, favoriser une économie plus dynamique et créer des possibilités pour les Canadiens tout en devenant un modèle d'excellence à l'échelle internationale. Le Comité avait pour principal défi de déterminer des façons d'améliorer le système réglementaire en vue de préserver le bien-être du Canada dans l'avenir. Il a conclu que cet objectif ne peut être atteint sans la coopération des gouvernements, de l'industrie et des citoyens. C'est pourquoi la coopération est au coeur de la nouvelle stratégie réglementaire proposée par le Comité et présentée en détail dans la partie I du présent rapport. La coopération est le point d'ancrage de la vision et des principes du Comité et sous-tend bon nombre de ses recommandations. Le Comité croit fermement que pour rehausser le rendement du système réglementaire au XXIe siècle, il faut que les partenaires - les gouvernements, les ministères, l'industrie, les citoyens, les consommateurs et les autres parties concernées - établissent entre eux des relations plus harmonieuses et plus étroites fondées sur l'amélioration de l'information, de la transparence et de la confiance. Le Comité croit que le gouvernement fédéral devrait utiliser la réglementation de façon plus stratégique au XXIe siècle, dans le but de promouvoir les intérêts et les priorités du Canada. L'approche du Canada sur le plan de la réglementation devrait être d'emblée considérée comme un soutien de ses orientations nationales. Comme en témoigne la partie II du rapport, il faut faire en sorte que notre système réglementaire permette l'atteinte des meilleurs résultats possibles en santé pour les Canadiens, qu'il favorise l'innovation, la durabilité et les occasions d'investissement dans les secteurs de la fabrication et des ressources naturelles, qu'il permette le développement économique des Premières nations et qu'il contribue à promouvoir de nouvelles industries d'importance, comme la biotechnologie. Quelles sont les conséquences de l'inaction?
La réglementation est un outil puissant du gouvernement. Le Comité a toutefois observé qu'elle ne fait pas l'objet de la même attention que les dépenses de programmes et la fiscalité. Selon le Comité, la réglementation intelligente devrait devenir une priorité majeure du gouvernement, car le système réglementaire n'est pas viable au niveau souhaité par les Canadiens si des changements fondamentaux et systémiques ne lui sont pas apportés. Si le système n'est pas axé sur les innovations et les pratiques du XXIe siècle, il peut mettre la sécurité des Canadiens en péril et amoindrir la confiance des citoyens envers le gouvernement. Par ailleurs, si aucune modification ne lui est apportée, le système réglementaire limitera l'accès des Canadiens notamment à de nouveaux médicaments, à des carburants moins polluants et à de meilleurs emplois. Un système réglementaire désuet est un obstacle à l'innovation et au développement économique, car il freine la compétitivité, la productivité, les investissements et la croissance de secteurs clés. D'autres pays procèdent actuellement à la réforme de leur système réglementaire et le Canada doit absolument emboîter le pas. D'où vient le besoin de changement?Le Comité a conclu que certaines réalités du XXIe siècle rendent nécessaire une réforme réglementaire. Il a constaté que la nécessité de modifier le système pour tenir compte de ces réalités fait l'objet d'un consensus général au sein du gouvernement. Cette reconnaissance ne s'est toutefois pas encore traduite dans la pratique quotidienne.
Qu'est-ce qui doit être amélioré?L'analyse et les recommandations d'amélioration du Comité sont décrites dans les chapitres qui suivent. Plusieurs messages clés ont émergé des délibérations du Comité et de ses discussions avec les parties intéressées et les représentants du gouvernement :
Réglementer dans l'intérêt publicEn règle générale, la réglementation a pour but de servir l'intérêt public. Le Comité a constaté que les divers ministères ne partagent pas une même définition de l'intérêt public. Par conséquent, il a consacré une partie de ses efforts à une meilleure compréhension globale de l'intérêt public canadien au XXIe siècle1 et à la recherche de moyens d'évaluer l'intérêt public en certaines circonstances (voir l'annexe II, Cadre d'imputabilité relatif à l'intérêt public). De récentes études ont démontré que les opinions des Canadiens sur la réforme réglementaire avaient considérablement évolué depuis la fin des années 80. Les Canadiens sont plus pragmatiques qu'idéologiques. Leurs exigences en matière de protection ont augmenté avec le temps, surtout en ce qui concerne la santé, la sécurité et l'environnement. Cependant, leurs commentaires indiquent qu'un accroissement purement quantitatif des mesures réglementaires ne les satisferait pas pleinement. Les Canadiens considèrent actuellement que les objectifs sociaux, environnementaux et économiques sont interdépendants. Ils pensent qu'un fardeau réglementaire excessif est imposé aux entreprises. Ils acceptent en outre que les marchés, le commerce et la concurrence servent à la fois l'intérêt public et l'intérêt privé. C'est un changement important. Les Canadiens pensent que le gouvernement assume la responsabilité ultime de leur santé et de leur sécurité, et celle de la protection de l'environnement, mais ils sont disposés à faire preuve de souplesse relativement aux approches adoptées à ces fins, pour autant que l'industrie et le gouvernement leur rendent des comptes et atteignent des résultats. Leur confiance dans le système dépendra de la qualité du processus; ils s'attendent à ce qu'il soit équitable, ouvert, transparent, et qu'il favorise l'imputabilité. Les Canadiens ont peu de tolérance envers les conflits fédéraux-provinciaux et souhaitent que les divers ministères d'un même ordre de gouvernement coordonnent leurs activités. Dans une perspective internationale, ils sont généralement en faveur d'une coopération accrue, plus particulièrement par le biais d'organes internationaux multilatéraux, et ils appuient aussi la coopération bilatérale, dont celle entre le Canada et les États-Unis sur le plan de la réglementation, pour autant que celles-ci donnent lieu à un renforcement des normes réglementaires ou se révèlent un moyen plus rentable d'obtenir les résultats escomptés. Qu'est-ce que la réglementation intelligente?Après avoir examiné les pratiques actuelles de réglementation du Canada et d'autres pays de l'OCDE et avoir recueilli les commentaires des parties intéressées et d'autres gouvernements, le Comité a conclu que la réglementation intelligente comporte trois caractéristiques fondamentales : La réglementation intelligente assure la protection et crée des conditions propices. Elle suppose le recours au système réglementaire pour générer des avantages sociaux et environnementaux tout en renforçant les conditions propices à une économie concurrentielle et innovatrice qui attirera l'investissement et les travailleurs qualifiés et permettra aux Canadiens de maintenir un niveau de vie élevé. La réglementation doit demeurer aussi efficace que possible et n'être jamais plus compliquée ou coûteuse que nécessaire. La réglementation intelligente est une réglementation davantage adaptée aux réalités. Un système réglementaire efficace doit se renouveler constamment et suivre le rythme des progrès scientifiques et technologiques et du développement des marchés mondiaux. La réglementation intelligente intervient rapidement et délibérément pour limiter ou éliminer les risques et pour favoriser l'innovation et les débouchés afin de permettre aux Canadiens de tirer parti des nouvelles connaissances. Il s'agit également de donner aux personnes ou aux organisations touchées par la réglementation davantage de latitude en ce qui concerne la façon d'obtenir les résultats, pour autant qu'on maintienne des normes élevées et que des mesures de reddition de comptes appropriées soient en place. La réglementation intelligente consiste à gouverner de façon coopérative dans l'intérêt public. Dans un système réglementaire moderne, la réglementation est une responsabilité partagée, c'est-à-dire que les gouvernements, les citoyens et le secteur industriel contribuent tous à rendre le système plus efficace. La réglementation intelligente tient compte des opinions des citoyens et est attentive aux besoins des entreprises et aux défis auxquels elles font face dans une économie d'envergure internationale. Elle suppose qu'on soit conscient du fait que le système réglementaire fait partie d'un système mondial complexe qui exige que les gouvernements et les ministères et organismes gouvernementaux unissent davantage leurs efforts pour atteindre des objectifs communs. Quels sont les avantages et les possibilités pour le Canada?En résumé, la réglementation intelligente offre au Canada la possibilité :
2. VISION ET PRINCIPESLe Comité propose que la stratégie de réglementation intelligente du Canada repose sur la vision et les principes qui suivent. VisionLes gouvernements, les citoyens et les entreprises collaboreront à la mise en place d'un système national de réglementation qui maximise les avantages de la réglementation pour tous les Canadiens, qui leur permet de mettre à profit les nouvelles connaissances et qui favorise la participation du Canada à l'économie internationale. Cette vision comporte trois composantes : CONFIANCE - Le système réglementaire doit, tant au pays qu'à l'étranger, être crédible et susciter la confiance à l'endroit des produits et services, des marchés et des institutions gouvernementales. INNOVATION - Le système réglementaire doit rehausser la performance des marchés et faciliter l'innovation, la compétitivité, l'esprit d'entreprise et l'investissement dans l'économie canadienne. PROTECTION - Le système réglementaire doit démontrer aux citoyens que l'intérêt public, par exemple en ce qui a trait à la santé et à la sécurité des personnes et à la protection de l'environnement, sera protégé au sein de marchés mondiaux dynamiques. PrincipesOn peut concrétiser cette vision en faisant en sorte que notre système réglementaire, depuis la conception de la réglementation jusqu'à son application et son exécution, se conforme aux principes suivants :
STRATÉGIE RÉGLEMENTAIRE POUR LE XXIE SIÈCLEIntroductionComme première partie de son mandat, le Comité s'est vu demander de fournir des conseils sur une nouvelle stratégie réglementaire pour le Canada. On lui a demandé d'étudier comment la réglementation peut mieux contribuer à l'atteinte des objectifs sociaux, environnementaux et économiques du Canada dans ce XXIe siècle caractérisé par les avancées scientifiques et technologiques rapides, les risques transfrontaliers pour la santé et l'environnement, l'intégration accrue des marchés et des sociétés et les attentes de plus en plus grandes des citoyens envers le gouvernement. Le Comité reconnaît que cet environnement politique en évolution rapide pose des défis au système réglementaire, sur tous les fronts, et qu'il nécessite en même temps l'élaboration de normes de rendement de plus en plus élevée.
La stratégie que propose le Comité repose sur la vision et les principes de la réglementation intelligente définis au chapitre précédent. En fait, la stratégie décrit comment mettre les principes en pratique et réaliser la vision de la réglementation intelligente au Canada au cours des trois à cinq prochaines années. Elle propose des orientations et formule des recommandations relatives à la coopération internationale, à la coopération fédérale-provinciale-territoriale et à la coordination fédérale en matière de réglementation, à la gestion du risque, aux instruments d'action gouvernementale, au processus réglementaire et aux capacités gouvernementales. Les sept composantes de la stratégie répondent à des questions clés sur les pratiques réglementaires du Canada au XXIe siècle :
Le Comité constate que les éléments de la stratégie sont hautement interdépendants. Par exemple, l'adoption d'une approche plus stratégique à l'égard de la coopération internationale nécessitera une plus grande coordination entre les ministères fédéraux, une meilleure coopération fédérale-provinciale-territoriale et une utilisation plus souple des instruments. De même, la coopération accrue à l'échelle internationale devrait enrichir les pratiques nationales de gestion du risque et renforcer et accélérer le processus réglementaire. Puisque l'environnement politique est en constante évolution, le Comité est d'avis qu'il est essentiel que le système réglementaire se renouvelle automatiquement, qu'il fasse continuellement l'objet d'une adaptation aux leçons tirées de l'expérience et aux résultats atteints, et qu'il soit mieux adapté aux nouvelles réalités scientifiques, commerciales et sociétales. 3.1 Coopération internationale en matière de réglementation
La coopération internationale en matière de réglementation suppose qu'on ne se limite pas à ses mécanismes nationaux pour satisfaire aux plus importants des objectifs canadiens, notammentassurer des niveaux de protection élevés pour les consommateurs, la société et l'environnement ainsi que promouvoir l'innovation, le commerce et l'investissement. La coopération peut permettre de mobiliser des ressources internationales dans le but de s'attaquer aux importants problèmes locaux, nationaux et internationaux. Nul pays ne peut aujourd'hui réglementer efficacement sans avoir recours à l'expertise des autres pays. La coopération internationale peut prendre diverses formes : mise en place d'un réseau informel de responsables de haut niveau, collaboration aux activités d'un groupe de travail multilatéral chargé d'un dossier en particulier, ou participation aux activités d'un organisme international de normalisation. Elle peut comprendre l'échange de renseignements, la réalisation de travaux scientifiques en collaboration, la détermination de méthodes communes de collecte de données et d'évaluation des risques, l'exécution d'examens conjoints et l'élaboration de normes communes ou internationales. Le Canada et les autres pays sont actuellement liés par un véritable réseau de relations internationales qui mènent de nombreux aspects de nos vies. Les normes internationales offrent au Canada des balises ou des repères pour bon nombre de ses règlements. Il existe des normes pour la salubrité des aliments, la santé des plantes et des animaux, la biodiversité, le transport, le contrôle des émissions, la gestion des produits pharmaceutiques et des produits toxiques, et la sécurité des appareils électriques, médicaux et électroniques. Au fur et à mesure que de nouveaux produits apparaissent et que de nouveaux risques se révèlent, de nouvelles institutions mondiales sont créées pour gérer et atténuer les préjudices potentiels. La coopération internationale est de plus en plus importante pour édifier une économie concurrentielle. Une réglementation inefficace entrave le commerce et l'innovation et détourne l'investissement. Des exigences réglementaires qui sont différentes d'un pays à un autre, au Canada et aux États-Unis par exemple, peuvent augmenter les coûts de conception, de production et d'administration d'une entreprise. Ces différences peuvent dissuader certaines entreprises étrangères de prendre de l'expansion sur notre marché ou d'y investir et les amener à plutôt axer leurs efforts sur les marchés américains, européens ou asiatiques plus vastes et plus lucratifs. 3.1.1 Principaux enjeuxDepuis les années 50, le Canada joue un rôle dynamique et influent dans l'élaboration de normes internationales et la promotion de leur application. Notre présence sur la scène internationale s'affirme de plus en plus au fil des ans. Le Comité a constaté, toutefois, qu'une bonne partie de cette activité est menée au cas par cas et qu'elle n'est pas coordonnée. Dans ce contexte, toutes les initiatives sont traitées comme ayant une égale importance. Qui plus est, le gouvernement est incapable de déterminer avec précision dans quelle mesure ses initiatives internationales ont contribué à l'atteinte des objectifs canadiens. On peut dès lors se demander si l'activité réglementaire internationale du gouvernement est bien centrée sur nos priorités nationales et si les ressources sont utilisées de façon optimale. Il importe aussi de signaler que le Canada, dans ses efforts de coopération à l'échelle internationale, doit composer avec d'importantes différences entre sa réglementation et celle de ses principaux partenaires commerciaux, notamment les États-Unis. La circulation transfrontalière des produits est toujours régie par une foule d'exigences réglementaires différentes. La coordination pose problème non seulement entre les ministères fédéraux, mais aussi entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. De nombreuses normes internationales touchent des domaines qui relèvent de la compétence exclusive ou partagée des gouvernements provinciaux et territoriaux. Il importe que les responsables fédéraux de la réglementation collaborent avec leurs homologues provinciaux et territoriaux pour s'assurer que les obligations et les exigences internationales sont respectées (voir à ce sujet la section 3.2, « Coopération fédérale-provinciale-territoriale en matière de réglementation »). 3.1.2 Création d'un cadre stratégique pour la coopération internationale en matière de réglementationLe Comité est d'avis que la coopération internationale en matière de réglementation devrait constituer un volet distinct de notre politique étrangère. Dans cette optique, le gouvernement fédéral devrait élaborer un cadre stratégique pour la coopération internationale en matière de réglementation indiquant aux ministères les objectifs que le Canada veut atteindre et comment il compte y arriver. Le but visé est d'assurer une protection élevée de l'environnement, de la santé et des consommateurs tout en préservant le dynamisme de l'économie. Le cadre devrait aussi préciser quelles sont les priorités et quels sont les principaux partenaires en cause. Le Comité pense que ce cadre stratégique devrait, à court terme, être axé principalement sur les États-Unis et l'Amérique du Nord, mais qu'il devrait également toucher à d'autres mécanismes bilatéraux et multilatéraux de coopération en Amérique du Nord et à l'échelle internationale, et établir les paramètres d'un leadership canadien à l'étranger. Le cadre devrait reposer sur les principes suivants :
Le Comité propose d'examiner en priorité les questions suivantes :
Au fur et à mesure qu'il élabore ce cadre, le gouvernement fédéral doit être en mesure de distinguer parmi ses activités de réglementation internationales celles qui ont donné de bons résultats et celles qui n'y sont pas parvenu. Il doit évaluer systématiquement ses activités de façon à tirer les leçons qui s'imposent et à apporter les améliorations nécessaires. L'évaluation des initiatives de coopération internationale du Canada aidera le gouvernement à respecter ses priorités dans les domaines qui sont les plus pertinents, principalement au titre de ses efforts pour supprimer les obstacles réglementaires et promouvoir les examens conjoints.
Élaboration d'une réglementation canadienne En plus de déployer des efforts accrus au chapitre de la coopération internationale, le gouvernement devrait également, de l'avis du Comité, limiter le nombre des exigences particulières au Canada. Cela permettrait de réduire l'impact cumulatif des différents régimes sur le commerce international. Il n'est pas question, toutefois, de compromettre nos chances d'atteindre nos objectifs sociaux et environnementaux. La coopération internationale n'entraîne pas une diminution des normes. On remarque plutôt que l'apparition de nouveaux marchés mondiaux et la nécessité de collaborer à la gestion des problèmes internationaux font en sorte que les solutions particulières à chaque pays perdent de leur efficacité et constituent un pourcentage de plus en plus réduit du bassin de la réglementation. Le Canada devrait élaborer des exigences réglementaires qui lui sont propres que lorsque l'atteinte de ses objectifs nationaux et le respect de ses valeurs le requièrent. Les normes internationales sont bien souvent assez élaborées pour que le Canada puisse atteindre ses objectifs stratégiques personnels sans ajouter d'exigences qui lui soient propres. Dans les quelques cas où une norme ne fait pas l'objet d'un consensus à l'échelle internationale, il conviendrait d'adopter l'approche de nos principaux partenaires commerciaux si elle correspond à nos normes de protection. Divers facteurs propres au Canada, comme le climat et la topographie, pourraient rendre nécessaires des ajustements aux normes internationales ou aux approches de nos principaux partenaires commerciaux. Dans le secteur de l'automobile, par exemple, les besoins canadiens en matière de sécurité des véhicules sont déterminés à partir de facteurs locaux tels que les conditions climatiques nordiques, le réseau routier canadien et le taux d'utilisation de la ceinture de sécurité. Pour que le nombre des exigences réglementaires propres au Canada soit limité, les ministères devraient indiquer clairement comment ces exigences servent l'intérêt public. Ils pourraient notamment expliquer les résultats visés par un règlement en spécifiant pourquoi la meilleure façon de les atteindre passe par des instruments législatifs. Ils devraient aussi démontrer que ces résultats compensent largement l'impact du règlement sur la compétitivité économique canadienne et se traduisent par des avantages nets marqués.
Engagement à l'échelle internationale A) Coopération nord-américaine Le libre-échange se situe au coeur de notre politique publique. Depuis la signature de l'Accord de libre-échange (ALE) entre le Canada et les États-Unis, en 1989, la valeur des échanges bilatéraux de biens et de services a plus que doublé pour atteindre 644,6 milliards $ (1,8 milliard $ par jour). Aujourd'hui, 79,7 % des exportations canadiennes sont destinées aux États-Unis2. L'ALE et l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) mettaient tous deux l'accent sur la circulation des biens. Plus récemment, cet accent s'est déplacé du côté des services et des technologies, reflet des changements dans les économies nord-américaines. L'ALENA a marqué le début d'une nouvelle ère de coopération réglementaire entre le Canada, les États-Unis et le Mexique. Ces trois pays ont institué plusieurs groupes de travail techniques pour faciliter la collaboration. Cependant, le Canada devra encore franchir deux obstacles importants pour améliorer sa performance en matière de réglementation et accroître sa compétitivité économique.
Premier obstacle : le Canada et les États-Unis maintiennent l'un et l'autre des processus et des structures parallèles dans pratiquement tous les secteurs de l'activité réglementaire. Malgré une convergence au niveau des objectifs poursuivis, l'existence de deux systèmes parallèles crée des chevauchements, étant donné surtout la nature intégrée du marché nord-américain. Cette situation risque de produire de piètres résultats sur les plans réglementaire et économique, et d'entraîner des coûts supplémentaires pour les gouvernements, les consommateurs et les entreprises, comme en témoigne l'encadré sur les pesticides. Deuxième obstacle : la circulation transfrontalière des biens et services est toujours régie par une foule d'exigences réglementaires, un phénomène que le Forum des politiques publiques a nommé « la tyrannie des petites différences ». Des exemples à ce titre sont exposés dans la partie II du présent document, section 1.1, « Fabrication et approbation de produits. » Certaines de ces différences dans la réglementation sont dues à des objectifs stratégiques différents, mais la plupart d'entre elles sont liées à la classification des produits, aux exigences en matière de procédure et aux processus décisionnels qui sont sans rapport avec les résultats sur le fond. Les impacts cumulatifs de la prolifération de ces différences peuvent avoir des conséquences marquées sur la capacité commerciale d'une entreprise et peuvent dès lors entraver le commerce et l'investissement. Le Comité pense que le Canada doit opter pour une approche méthodique et stratégique en ce qui concerne la coopération en matière de réglementation avec ses partenaires de l'ALENA, sans quoi nous devrons nous contenter d'une performance sociale, environnementale et économique bien inférieure à ce qu'elle pourrait être. L'objectif à court terme devrait être d'obtenir des normes et des règlements compatibles dans des secteurs qui accroîtraient l'efficacité de l'économie canadienne et assureraient un degré de protection élevé pour la santé humaine et l'environnement. À cette fin, il faut supprimer les obstacles réglementaires à un marché nord-américain intégré et mettre fin à la tyrannie des petites différences. À plus long terme, le Canada devrait, avec le concours de ses partenaires de l'ALENA, surtout des États-Unis, rehausser la compréhension et la confiance mutuelles par rapport aux mécanismes et aux décisions de chaque partenaire en matière de réglementation; il faudrait en outre créer des institutions ou des processus réglementaires communs ou conjoints dans certains secteurs clés. Étant donné la multitude de règlements en Amérique du Nord, il est préférable de répartir la coopération en matière de réglementation en plusieurs segments axés sur des questions bien précises. Une telle approche facilite le rapprochement des principaux partenaires, y compris les gouvernements provinciaux et territoriaux, les Premières nations, les groupes de citoyens et les industriels. Les parties concernées et les ministères fédéraux ont constaté qu'il est parfois difficile de faire participer les États-Unis à des initiatives de coopération en matière de réglementation. Dans les cas où les différences sont minimes et les risques faibles, il serait peut-être préférable, dans l'intérêt public, que le Canada soit pragmatique et adapte de son propre chef son approche à celle des États-Unis. Le Comité pense que l'approche intelligente, dans ces cas, consiste à éviter les chevauchements inutiles et à affecter les ressources consacrées à la réglementation aux situations qui exigent une solution propre au Canada.
Dans les domaines où les intérêts du Canada s'écartent de ceux des États-Unis et où la politique des deux pays comporte des différences importantes, il pourrait être impossible d'harmoniser les réglementations. Il sera alors nécessaire de prendre des mesures telles que des ententes d'échange d'information, la mise en oeuvre d'un mécanisme commun de cueillette des données, de procédures d'évaluation des risques et de procédures décisionnelles, ainsi que des examens conjoints, pour réduire l'impact de ces différences. Un bon exemple à ce titre est l'entente Four Corners négociée en 1996 entre Environnement Canada, Santé Canada et l'Environmental Protection Agency des États-Unis (EPA) (voir l'encadré à ce sujet). Des mécanismes semblables sont en place pour l'examen conjoint des pesticides. Des mesures d'échange d'information et des mesures décisionnelles devraient être élaborées de façon à accroître la confiance dans les processus réglementaires et décisionnels de l'autre partie. Ces mesures devraient également nous aider à prendre conscience du fait que les normes, les processus et les décisions des deux pays en matière de réglementation produisent des résultats semblables. Ce constat devrait permettre la mise en marché d'un même produit dans tous les pays d'Amérique du Nord après un seul examen et une seule approbation. Les pesticides, les vaccins à usage vétérinaire et les produits pharmaceutiques pourraient être des candidats de choix à la mise en application d'examens uniques pour le marché nord-américain. (Voir la section 1.1, partie II, « Fabrication et approbation de produits ».) Les États-Unis pourraient être intéressés à collaborer avec le Canada pour atteindre leurs objectifs sociaux, économiques et environnementaux. Le Comité pense que le Canada et les États-Unis ne devraient pas se contenter d'harmoniser les cadres réglementaires, mais qu'ils devraient aussi déterminer dans quels domaines ils pourraient mettre en place des institutions et processus réglementaires intégrés. Par exemple, l'intégration est particulièrement importante dans les domaines où les enjeux environnementaux, économiques et sanitaires convergent, comme la qualité de l'air, la santé des animaux et la sécurité alimentaire. Puisque les industries de transformation agricole et alimentaire nord-américaines sont intégrées, les Canadiens et les Américains auraient peut-être intérêt à mettre en place une politique commune de gestion du risque, des systèmes conjoints d'inspection et de surveillance et des mesures d'urgence conjointes. Les cas récents d'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) dans les deux pays le démontrent. De même, le Canada et les États-Unis pourraient collaborer pour instaurer dans tous les points d'entrée nord-américains un système de sécurité visant à enrayer la propagation des risques pour la santé humaine, la santé animale et l'environnement. La coopération entre le Canada et les États-Unis en matière de réglementation devrait alors avoir pour objectif l'adoption de régimes de réglementation efficaces garantissant un degré élevé de protection de l'environnement, de la santé et des consommateurs.
B) Relations bilatérales et multilatérales clés Bien que la coopération avec les États-Unis en matière de réglementation soit d'une importance primordiale, le Canada ne saurait réduire sa collaboration de longue date au sein d'organismes de normalisation internationaux et avec d'autres instances. La collaboration avec plusieurs autres pays est essentielle pour un grand nombre de questions environnementales et sanitaires actuelles, voire la plupart. Il est important aussi d'assurer aux biens et aux services canadiens un meilleur accès aux marchés internationaux. L'Europe aussi bien que les nouveaux marchés comme la Chine, l'Inde et le Brésil sont autant de cibles importantes pour le Canada. Le Canada doit continuer à rechercher des possibilités ciblées de coopération bilatérale avec l'Union européenne qui s'offriront à lui. L'Union européenne est le plus important marché unique mondial. Sa population et ses exportations surpassent celles des États-Unis et son produit intérieur brut rivalise avec celui de cette nation. À la suite de l'adhésion de nouveaux pays en mai 2004, l'Union européenne a vu sa population de 377 millions d'habitants grimper à 450 millions. L'Europe vient au deuxième rang parmi les partenaires commerciaux du Canada puisque la valeur des exportations canadiennes sur ce marché s'élève à 33,6 milliards $, soit environ 3,5 % du PIB du Canada. Les relations du Canada avec l'Union européenne ne sont pas stratégiques que pour des motifs commerciaux. L'Union européenne est en voie de devenir un acteur important sur la scène internationale de la réglementation. Tant l'Union européenne que ses États membres ont entrepris plusieurs innovations et efforts de renouvellement en matière de réglementation ces dernières années (p. ex. le Better Regulation Task Force au Royaume-Uni). L'Union européenne peut être une alliée incontournable pour le Canada lorsqu'il est question des normes internationales. Lorsqu'il y va de l'intérêt général du Canada, celui-ci, avec le concours de ses homologues européens, devrait travailler à supprimer les différences entre l'Amérique du Nord et l'Union européenne. Lors du Sommet Canada-Union européenne de décembre 2002, le Canada et la Commission européenne ont convenu « d'élaborer un nouveau type d'accord bilatéral axé sur l'avenir et de portée très vaste, visant à renforcer le commerce et l'investissement (ARCI) » et « d'intensifier le dialogue sur la réglementation et de s'efforcer d'adopter avec succès un nouveau cadre dans ce domaine ». Le cadre de coopération sur la réglementation constituera le point de départ de la mise en oeuvre d'une coopération volontaire entre les organismes de réglementation de l'Union européenne et du Canada. Il y aurait lieu de finaliser ces deux ententes. La collaboration du Canada avec des organismes internationaux permet également d'atteindre l'important objectif d'améliorer l'uniformité et la prévisibilité de la réglementation à l'échelle internationale en élaborant des normes internationales et des procédures décisionnelles communes. Les normes et procédures communes aident à réduire les obstacles au commerce et encouragent l'investissement. En même temps, le Comité pense qu'il est essentiel que le gouvernement oriente ses activités sur les secteurs où les avantages qu'il pourrait en retirer sont les plus grands. Un secteur clé qui se prête bien à la coopération multilatérale est celui de l'approbation de technologies et de produits nouveaux et innovateurs (voir la section 1.2, « Biotechnologie/Sciences de la vie », dans la partie II). Pour des pays de taille moyenne comme le Canada, la capacité d'élaborer des cadres réglementaires et d'évaluer chaque produit nouveau pose de plus en plus problème. Le Canada devrait militer activement en faveur de l'élaboration de normes internationales pour la sécurité des produits et de l'adoption d'un concept d'examen unique pour des produits commercialisés à l'échelle mondiale. Ce concept d'examen unique nécessite un degré de confiance élevé dans les procédures décisionnelles et les mécanismes de réglementation des autres pays. La confiance s'acquiert grâce à un processus fondé sur l'échange d'information et la collaboration scientifique, la mise en oeuvre de mécanismes communs de collecte de données et d'évaluation des risques, la participation à des examens conjoints et l'évaluation de la performance par le biais, notamment, d'études de marché. Dans certains cas, le Canada devrait accepter les décisions des autorités réglementaires d'autres pays, en particulier de l'Union européenne et des États-Unis, sans que soit entrepris un processus de mise en confiance mutuelle et que soient compromises ses normes élevées sur les plans de la santé, de la sécurité et de l'environnement. Les meilleurs candidats sont les produits des secteurs dans lesquels des procédures d'évaluation de la conformité sont déjà bien établies et reconnues à l'échelle internationale. Dans ces cas-là, le Canada devrait conclure des ententes avec les autorités réglementaires étrangères pour examiner et surveiller leurs procédures décisionnelles et leur performance en matière de réglementation.
Un autre défi de taille qui se pose au gouvernement consiste à cerner le moment opportun pour jouer un rôle d'instigateur à l'échelle internationale. Il pourrait ne pas être avantageux pour le Canada d'être le premier pays à instaurer une norme ou un cadre réglementaire en l'absence d'un processus international ou de la participation de ses principaux partenaires. Certes, l'exercice d'un leadership est important, mais le gouvernement doit l'exercer de façon ciblée et faire un usage stratégique des ressources pour en tirer le maximum sur le plan de l'intérêt national. Plutôt que d'être le premier à élaborer un cadre réglementaire, le Canada devrait avoir recours à la collaboration bilatérale et multilatérale pour réduire les écarts entre les systèmes réglementaires nationaux en l'absence de consensus à l'échelle internationale. L'accroissement de l'uniformité et de la prévisibilité de la réglementation à l'échelle internationale peut aider à réduire les obstacles au commerce et à faire du Canada un pays plus attrayant pour l'investissement dans la recherche-développement. Le gouvernement devrait axer principalement ses efforts sur les secteurs où des normes sont nécessaires pour protéger la santé et la sécurité des Canadiens, où le Canada est un innovateur important et où des investissements de recherchedéveloppement considérables ont été faits, ou bien dans des secteurs où il s'est fixé des objectifs stratégiques nationaux importants. La promotion de la diversité culturelle est un domaine où le leadership du Canada a apporté une contribution à l'échelle nationale aussi bien qu'internationale. À la suite de ses différends avec certains de ses partenaires, différends qui ne se sont pas toujours réglés en sa faveur, le Canada a milité activement à l'échelle internationale pour la mise en place de règles de base claires qui pourraient servir de guide au Canada et à d'autres pays pour mettre en place des cadres réglementaires, afin de préserver et d'encourager les cultures nationales tout en respectant les règles du système commercial international. Le leadership du Canada dans ce domaine a bien servi les intérêts des gouvernements fédéral et provinciaux et ceux des groupes culturels. Le Canada ne cherchait pas à créer une approche de réglementation nationale unique, mais bien à favoriser la cohérence et la prévisibilité à l'échelle internationale. Le Canada devrait maintenant concentrer ses efforts sur les secteurs qu'il considère comme des priorités nationales et dans lesquels le potentiel d'innovation est considérable, comme la biotechnologie.
3.2 Coopération fédérale-provinciale-territoriale en matière de réglementationAu Canada, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se partagent des responsabilités réglementaires dans divers domaines, tels que l'agriculture, l'environnement, la sécurité alimentaire, les médicaments et les transports3. Ainsi, dans le domaine des médicaments, il incombe au gouvernement fédéral d'approuver les produits qui seront mis sur le marché, tandis que les gouvernements provinciaux réglementent ceux qui sont couverts par le régime de soins médicaux qu'ils administrent. La responsabilité partagée dans une gamme de domaines est enchâssée dans la Constitution. Sans une coordination minutieuse entre les deux ordres de gouvernement, toutefois, il y a risque élevé de double emploi et d'inefficacité, ce qui pose problème. Des examens du système réglementaire canadien ont révélé des problèmes de chevauchement des compétences et de double emploi depuis au moins les années 80. Les principes directeurs en matière de réglementation publiés en 1986 promettaient que le gouvernement fédéral allait coopérer davantage avec les provinces pour alléger le fardeau général de la réglementation en éliminant les chevauchements coûteux. Après cet examen, on a ajouté à l'Étude d'impact de la réglementation fédérale l'exigence de tenir des consultations auprès des provinces. Dans les années 90, les gouvernements fédéral et des provinces et territoires ont déployé des efforts considérables pour harmoniser leurs processus réglementaires; dans cette optique, ils ont conclu l'Accord sur le commerce intérieur et l'Accord sur l'harmonisation environnementale. Au cours de cette même décennie, la plupart des provinces et des territoires ont réformé leurs processus réglementaires et ont supprimé des milliers de règlements désuets et inutiles. Pourtant, la coordination entre les gouvernements en matière réglementaire demeure un problème sérieux au Canada. Les parties consultées pour les besoins du présent rapport ont toutes souligné la nécessité d'améliorer grandement la coopération entre les autorités fédérales et provinciales/ territoriales à cet égard. Bon nombre d'entre elles ont souligné que l'absence de coopération - entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux et entre les provinces et les territoires - entraîne des coûts importants pour l'économie canadienne. D'après le commentaire entendu le plus fréquemment, le Canada « doit mettre de l'ordre dans ses affaires » s'il veut créer un système plus vigoureux et plus uniforme à l'échelon national, et contribuer aux efforts internationaux. 3.2.1 Principaux enjeux
L'absence de coordination entre les gouvernements peut hypothéquer sérieusement l'efficience et l'efficacité globale d'un système réglementaire. S'il faut en croire les consultations menées par le Comité et de récents sondages, les Canadiens sont de plus en plus frustrés et manifestent une impatience croissante au vu de la stagnation dans ce domaine. On estime que l'absence de coopération fait grimper les coûts et limite les possibilités tant pour les consommateurs que pour les entreprises. Les représentants de l'industrie ont souligné que les sociétés canadiennes avaient besoin d'un système réglementaire national qui soit plus prévisible et plus efficient et comporte des délais raisonnables; selon eux, il y va de leur compétitivité sur le marché international. Les dirigeants d'entreprise s'inquiètent de l'opinion tenace qui prévaut, à l'étranger, quant à la nature exagérément complexe du contexte réglementaire du Canada, élément qui peut nuire à l'expansion des affaires et aux investissements au pays. Des études récentes confirment ces préoccupations et étayent la nécessité d'un changement. Dans l'examen de la réforme réglementaire au Canada qu'elle a effectué en 2002, l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), tout en émettant un jugement globalement positif, a souligné que la coopération fédérale-provinciale-territoriale devait figurer parmi les priorités absolues. Dans la Stratégie d'innovation fédérale de 2002, on relevait que l'existence de plusieurs mécanismes de réglementation entraîne des coûts de conformité élevés pour les entreprises et freine notre potentiel d'innovation. Un rapport publié par les Partenaires pour l'investissement au Canada en 2003 et portant sur les opinions des chefs de grandes sociétés internationales et des principaux investisseurs étrangers établissait que l'absence de coordination intergouvernementale est, au Canada, un obstacle majeur à l'investissement. L'inexistence d'un processus ou d'un mécanisme officiel de coopération représente un des principaux défis de la coordination intergouvernementale. Des conseils ministériels fédéraux-provinciaux-territoriaux ont été établis dans la plupart des grands secteurs de dépenses (marché du travail, santé, environnement et transports), mais les représentants des gouvernements se réunissent rarement pour discuter des politiques réglementaires. Selon des fonctionnaires fédéraux, on ne peut espérer rectifier le tir en créant simplement un autre processus fédéral-provincial; à leurs yeux, on ne réussira à s'écarter du statu quo que s'il y a volonté de le faire aux plus hauts échelons et si on se dote d'un mandat clair assorti de priorités en matière de réforme. À ce problème s'ajoute - comme il est mentionné à plusieurs reprises dans le présent document - le manque de coordination entre les ministères fédéraux. Les autorités provinciales et territoriales consultées à propos de la coopération intergouvernementale ont plusieurs fois souligné ce problème. On a soutenu que la coopération avec un ministère fédéral pouvait souvent être minée par les actions d'une autre entité ministérielle. Enfin, le Comité relève un thème récurrent dans les discussions avec les parties concernées : le besoin pressant d'accélérer la mise en oeuvre immédiate de l'Accord sur le commerce intérieur. Les questions provinciales-territoriales comme le commerce intérieur débordaient du mandat du Comité. Ce dernier reconnaît toutefois l'importance que revêt ce dossier pour le Canada et voit d'un bon oeil le fait que le commerce intérieur figure à l'ordre du jour du nouveau Conseil de la fédération. 3.2.2 Renforcement de la coopération
Le Comité a la ferme conviction qu'une coopération intergouvernementale accrue est un élément essentiel à l'instauration, au Canada, d'un régime de réglementation intelligente. La vision et les principes du Comité ne sont guère reflétés dans les accords actuels entre les gouvernements intéressés. Comme il a été souligné lors des consultations menées par le Comité, les intervenants gouvernementaux pourraient participer au processus de renforcement de la coopération, puisqu'ils ont de l'expérience et connaissent les obstacles à surmonter, et qu'ils savent dans quels domaines il existe des chevauchements. En outre, le Comité estime que l'uniformité de la réglementation au Canada est un facteur important de l'élaboration d'une approche plus stratégique en matière de réglementation internationale. Comme il est suggéré dans la section 3.1, il faudrait faire participer les gouvernements provinciaux et territoriaux à l'élaboration de nouvelles approches internationales dans les domaines qui les touchent. En fait, selon les résultats de la Table ronde de recherche-action sur les relations canado-américaines, dirigée par l'École de la fonction publique du Canada, la plupart des provinces ont établi d'étroites relations avec certains états américains au cours des dernières années, et ce, dans de nombreux domaines. Le Comité est en faveur d'une approche plus systématique de la coopération fédérale-provinciale-territoriale en matière de réglementation, une approche qui, en même temps, tiendrait compte des compétences respectives en la matière. Cela dit, le statu quo n'est pas une solution acceptable. Le Comité est d'accord avec les parties concernées qui font valoir la nécessité d'adopter des solutions pragmatiques et concrètes qui vont au-delà des questions d'autorité. Certains intervenants ont même suggéré d'envisager sérieusement la substitution et la délégation des responsabilités réglementaires aux divers gouvernements et agences. L'idée mérite d'être analysée attentivement par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Le Comité est d'avis que les gouvernements devraient échanger davantage l'information dont ils disposent et tirer parti des innovations et des pratiques exemplaires des provinces et des territoires en matière réglementaire. Le gouvernement fédéral pourrait par exemple tirer d'importantes leçons de deux initiatives provinciales : le gouvernement de la Colombie-Britannique a mis en place un processus d'approbation de projets (p. ex. développement d'un centre de ski) en régime accéléré, qui vise à rationaliser les processus réglementaires; le gouvernement de l'Alberta, pour sa part, collabore actuellement à la rationalisation et à l'amélioration des systèmes de réglementation touchant la gestion de l'énergie, de l'environnement et des ressources, de manière à protéger efficacement la qualité de l'environnement. Réalisations prometteuses Le Comité prend acte de certaines réalisations récentes prometteuses à l'égard de la coopération en matière réglementaire. En mars 2003, après la publication du rapport de consultation de la Stratégie d'innovation, les sous-ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables de l'innovation et du commerce ont mis sur pied un groupe de travail sur la réforme réglementaire. Coprésidé par Industrie Canada et par la Colombie-Britannique, ce groupe a cerné les pratiques exemplaires et les principes directeurs de la réforme et isolé des priorités en vue de la coopération future. Il a transmis son rapport au Comité, pour examen, en janvier 2004. Dans ce rapport, on juge prioritaires deux domaines exigeant la collaboration des gouvernements : les évaluations environnementales d'une part, la biotechnologie et les nouvelles technologies de l'autre. Même si le gouvernement fédéral a signé avec plusieurs provinces et territoires des accords de coopération sur les évaluations environnementales, les consultations menées auprès de porte-parole de l'industrie, des autorités provinciales et territoriales et d'autres parties intéressées donnent à entendre que des difficultés non négligeables perdurent. Il faudrait d'une part permettre une participation accrue des communautés autochtones à ces évaluations. D'autre part, il y aurait lieu, pour améliorer les décisions réglementaires et la mise en application des règlements sur le plan de la biotechnologie, de consulter les autorités provinciales et territoriales dès le début du processus. La biotechnologie est en effet considérée comme une technologie naissante dont l'impact pour les gouvernements provinciaux et territoriaux est important. Ces deux domaines prioritaires font l'objet d'un examen plus détaillé dans la partie II du présent document.
Le groupe de travail a également mentionné qu'il serait sans doute utile d'effectuer une étude conjointe de la gouvernance réglementaire. Au Canada, la réforme de la réglementation a donné naissance à de nouvelles pratiques de gestion axées sur la qualité : l'élaboration de politiques et d'outils, et la mise en place d'institutions visant l'amélioration continue de la qualité dans le milieu de la réglementation. Ce phénomène est commun aux pays membres de l'OCDE et de l'APEC. Les travaux de l'OCDE à cet égard font valoir d'importantes retombées, dont une meilleure performance économique, des activités gouvernementales plus efficaces et efficientes, et un plus grand respect de principes démocratiques comme la transparence, la participation de la population et la réactivité. Dès le début des travaux du Comité, le président de celui-ci a écrit aux plus hauts fonctionnaires de chacun des gouvernements des provinces et territoires, et a rencontré leurs représentants. Ces échanges ont confirmé que les provinces et les territoires étaient fortement intéressés à collaborer pour régler des questions de réglementation communes. En se fondant sur les résultats de ces consultations et d'entretiens avec, entre autres, des représentants des Premières nations et du secteur industriel, le Comité estime que les conditions et le moment sont favorables à l'élaboration d'un plan d'action qui viserait à élargir et à renforcer la coopération en matière de réglementation au Canada.
3.3 Coordination fédérale en matière de réglementationTrès peu de questions réglementaires relèvent du mandat d'un seul ministère fédéral. Dans le secteur de la transformation des aliments, par exemple, jusqu'à trois ministères et agences fédéraux distincts peuvent assumer des responsabilités réglementaires - Santé Canada, Environnement Canada et l'Agence canadienne d'inspection des aliments - sans compter Agriculture et Agroalimentaire Canada, qui détient la responsabilité générale de la politique de ce secteur. Des personnes et organismes touchés par la réglementation et d'autres parties intéressées ont exprimé à maintes reprises leur frustration d'avoir à traiter simultanément avec différentes autorités réglementaires fédérales qui ont parfois des exigences contradictoires. Ce manque de coordination en matière réglementaire a des incidences réelles sur l'augmentation des coûts de production de l'industrie. De plus, il donne l'impression que le Canada et la réglementation canadienne sont trop complexes, ce qui peut freiner l'investissement au Canada. Enfin, une telle multiplicité d'organismes de réglementation fédéraux crée un obstacle à la participation des citoyens au processus réglementaire. Les hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral reconnaissent que le manque de coordination est un enjeu important, non seulement à l'égard de la réglementation, mais aussi en ce qui concerne d'autres aspects des activités gouvernementales. Ils le désignent comme le défi de la « gestion horizontale » et y ont consacré d'importantes discussions et études5. Malgré ces efforts, les progrès réalisés s'avèrent insuffisants et - pour emprunter le titre d'une des études portant sur le sujet - la coordination efficace entre les ministères fédéraux représente toujours un « effort héroïque ». La promotion de la croissance économique et l'atteinte d'objectifs réglementaires visant à protéger la santé, la sécurité et l'environnement et à assurer un marché équitable et efficient doivent reposer sur un environnement constructif qui soutient une plus grande coordination en matière de réglementation. Le Comité croit que si les actions du gouvernement fédéral étaient mieux coordonnées et que le gouvernement parlait d'une seule voix sur les questions réglementaires, il serait mieux en mesure de nouer le dialogue avec des partenaires internationaux et d'accroître sa collaboration avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et les gouvernements des Premières nations. De plus, en démontrant sa détermination à mieux coordonner son approche réglementaire, le gouvernement fédéral augmenterait sa crédibilité lorsqu'il prône la coopération et le recours accru aux partenariats avec l'industrie et d'autres parties intéressées pour soutenir les objectifs des politiques d'intérêt public. Fondamentalement, le Comité plaide en faveur d'un changement de culture au sein de la fonction publique fédérale, changement qui mènera à une réforme gouvernementale du processus d'élaboration, de mise en oeuvre et d'application de la réglementation. Le Comité considère que le défi posé par la coordination fédérale est un élément central de l'initiative de réglementation intelligente et pense que si des progrès peuvent être réalisés à ce chapitre, le paysage réglementaire au Canada en sera grandement amélioré. 3.3.1 Principaux enjeuxUne des principales constatations initiales du Comité sur la question de la coordination fédérale en matière de réglementation était à l'effet que les ministères fédéraux travaillent toujours principalement en « silos », c'est-à-dire à l'intérieur des monopoles que leur confèrent leur mandat et leur expertise juridiques. Cette approche fait en sorte que la réglementation est utilisée pour soutenir un mandat restreint d'un ministère plutôt que comme outil permettant de soutenir les priorités sociales, environnementales et économiques de l'ensemble du gouvernement. Le Comité pense qu'il s'agit là d'un obstacle crucial et qu'il faudra le surmonter. Il ne faut pas que les agents de la réglementation aient l'impression de compromettre le mandat réglementaire de leur ministère s'ils visent parallèlement l'atteinte d'objectifs nationaux plus généraux. Un deuxième défi important posé par la coordination découle de l'infrastructure même du gouvernement. Le Comité a remarqué qu'il manquait de mécanismes gouvernementaux pouvant favoriser et faciliter la coordination interministérielle en matière de réglementation. Aucun centre gouvernemental n'a pour mandat d'assurer une telle coordination - même lorsque divers ministères peuvent avoir des points de vue contradictoires sur une même question - et de voir à ce que la réglementation soit harmonisée de manière à soutenir les priorités du gouvernement. Comme il a été signalé dans un rapport de 2004 publié par l'École de la fonction publique du Canada, il y a une « incapacité à se rendre compte que les ministères ne disposaient que de compétences limitées pour surmonter les divergences interministérielles » et à réaliser que les agences centrales auraient un rôle à jouer « dans le lancement, le maintien, le ressourcement, la coordination et la surveillance des initiatives horizontales 6 ». La troisième observation principale faite par le Comité est l'absence d'une politique claire et d'orientations stratégiques sur de nombreux fronts. Le Comité énonce nombre de recommandations à ce sujet tout au long de son rapport, et surtout à la section 3.1, partie I, « Coopération internationale en matière de réglementation » et à la section 1.5, partie II, « Exploration et mise en valeur des ressources pétrolières et gazières ». On a souvent associé la gestion horizontale à un processus (c.-à-d. à la création d'un comité interministériel) plutôt qu'à un moyen d'atteindre des objectifs collectifs. Sans orientation concrète, ce processus engendre une grande frustration chez les participants et les observateurs, mais aussi chez ceux qu'il est supposé servir. 3.3.2 Mécanismes de coordinationÉtant donné la diversité de leurs mandats respectifs, les ministères fédéraux ont parfois des vues différentes ou même contradictoires sur une même question réglementaire. Cela fait en sorte que le gouvernement ne s'exprime pas d'une seule voix lorsqu'il traite avec l'industrie ou avec d'autres parties intéressées. Le Comité a été en mesure d'observer directement ce phénomène, car divers ministères lui ont présenté des points de vue différents sur certaines questions réglementaires tout au long du processus ayant mené à la préparation du présent rapport. Les mémoires au Cabinet prévoient la tenue d'une consultation interministérielle visant l'atteinte d'un consensus sur une politique donnée. Cependant, rien n'assure que la coordination établie à cette étape se prolongera tout au long de l'élaboration et de la mise en oeuvre des règlements. Tel que mentionné précédemment, la « gestion horizontale » dans la fonction publique « en est encore à ses premiers balbutiements… Trop souvent aussi, les gestionnaires semblent contraints de surmonter des obstacles que le 'système' pourrait réduire ou lever 7 ». À ce titre, le Comité reconnaît que les ministères ont besoin d'un forum où ils peuvent débattre de questions réglementaires particulières et élaborer des positions communes. Le Comité constate que les normes de gestion du processus de réglementation du gouvernement du Canada prévoient une certaine coordination interministérielle à l'étape de l'élaboration des nouveaux règlements afin de « chercher à savoir s'il existe déjà une réglementation dans ce domaine ». Par ailleurs, ces normes prévoient également que les organismes de réglementation « doivent ensuite s'efforcer d'harmoniser la nouvelle réglementation avec la réglementation existante afin d'en accroître le plus possible l'efficacité et d'éviter les dédoublements8 ». Malgré ces exigences, on a souligné au Comité que, dans les faits, le ministère qui détient l'autorité réglementaire a la discrétion de consulter les autres ministères sur des questions de nature réglementaire et qu'il n'y recourt pas systématiquement. Le Comité est d'avis qu'une telle approche n'est pas satisfaisante et ne va pas assez loin. Il envisage plutôt la mise en place d'un processus ou d'un mécanisme qui garantirait que tous les ministères qui ont un intérêt dans une question de nature réglementaire soient présents, s'il y a lieu, que ce soit à l'étape de l'élaboration de la politique, de l'élaboration des règlements, de l'administration des programmes réglementaires ou de l'application et de l'évaluation de ces règlements. Il est nécessaire de mettre en place un processus ou un mécanisme qui permettra aux ministères d'examiner ensemble les questions réglementaires et d'en discuter, en ce qui concerne notamment les questions qui relèvent des incidences ou de la pertinence de la réglementation actuelle et de la création de nouvelles réglementations. Le Comité est d'avis que ce rôle de coordination devrait être assumé par le Bureau du Conseil privé (BCP), car il est l'agence centrale responsable de la réglementation.
3.3.3 Cadres stratégiquesLa coordination en matière réglementaire serait grandement facilitée par la détermination d'orientations politiques claires, appliquées de façon régulière, pour permettre la prise de décisions cohérentes dans l'ensemble du gouvernement. Des cadres stratégiques pourraient servir à coordonner la réglementation de plusieurs ministères oeuvrant dans certaines activités ou certains secteurs. Ils pourraient couvrir un domaine réglementaire général, comme la participation d'un ministère à une initiative de coopération internationale en matière de réglementation, ou un secteur spécifique, comme une activité réglementaire liée au développement des ressources naturelles dans le Nord du Canada. En exposant clairement les objectifs politiques généraux du gouvernement, les cadres stratégiques fourniraient des directives aux organismes de réglementation - avec des objectifs concrets et des normes servant à mesurer les résultats - et assureraient une cohérence à long terme à la gouvernance dans un secteur donné. Les cadres stratégiques pourraient également accorder une grande importance à la reddition de comptes et prévoir que les ministères assurent un suivi tout au long de la mise en oeuvre de leur réglementation, y compris à l'échelon régional. On a mentionné au Comité que la mise en place de tels cadres stratégiques permettrait de réduire l'incohérence dont font montre les bureaux fédéraux régionaux du pays lorsqu'ils appliquent les politiques et les règlements (l'atteinte d'un tel résultat serait particulièrement utile au regard de l'application du processus d'évaluation environnementale). Le Comité pense également qu'à l'échelon régional, les orientations stratégiques doivent être accompagnées d'une forte responsabilisation régionale et d'un solide leadership central.
3.3.4 Guichets uniques et coordonnateurs fédérauxL'industrie et les ONG ont fait mention du manque de guichets uniques permettant de nouer le dialogue avec le gouvernement fédéral sur la réglementation d'un domaine ou d'un secteur donné. Comme le démontre le secteur de la transformation des aliments, les parties intéressées doivent parfois traiter avec une multitude d'organisations fédérales - et parfois même un certain nombre de points de liaison au sein de chaque ministère. Cette situation est particulièrement démotivante pour les citoyens ou les petites et moyennes entreprises qui souhaitent participer au processus réglementaire, mais ne possèdent pas les ressources juridiques ou financières leur permettant de naviguer dans le système pour s'assurer du respect des règlements fédéraux. L'utilisation de guichets uniques sur des questions réglementaires spécifiques (les évaluations environnementales, par exemple) ou à l'échelle d'un secteur industriel (l'industrie automobile, par exemple) constituerait une étape importante et nécessaire menant à l'amélioration de la coordination. Par l'expression « guichet unique », le Comité entend un point de liaison unique au sein du gouvernement fédéral, pour assurer la liaison avec un secteur de l'industrie. L'adoption d'une telle approche devrait aller de pair avec l'utilisation du cybergouvernement pour s'assurer que toute la documentation réglementaire nécessaire est disponible en direct et facile à utiliser. Le Comité croit en outre que l'utilisation de guichets uniques à l'échelon fédéral pourrait éventuellement amener le gouvernement fédéral à assumer un rôle prépondérant lorsqu'il collabore avec d'autres ordres de gouvernement pour créer un service de guichet unique sur des questions spécifiques dans l'ensemble du Canada. À la mise en place de ces guichets uniques devrait s'ajouter la nomination de coordonnateurs fédéraux responsables de projets d'investissement spécifiques de grande envergure, tels que le projet de gazoduc de la vallée du Mackenzie. Un coordonnateur fédéral serait doté de pouvoirs décisionnels clairs et aurait l'obligation de rendre compte aux ministères fédéraux concernés en vue de mettre en place un mécanisme de prise de décision en matière réglementaire qui soit efficient et transparent pour chaque projet. Ce coordonnateur fédéral garantirait également que le gouvernement fédéral n'a qu'un porte-parole lorsqu'il prend part à un projet auquel participent aussi d'autres instances, parties intéressées et intervenants. La création de guichets uniques et la nomination de coordonnateurs fédéraux sont deux mesures qui permettraient de réduire considérablement les coûts des transactions des parties intéressées et des gouvernements. Certaines de ces questions sont traitées plus à fond dans la partie II du rapport.
3.4 Gestion du risqueLes responsables de la réglementation doivent agir en dépit des incertitudes et de l'information incomplète dont ils disposent par rapport aux problèmes ou aux risques susceptibles de se poser. Étant donné que leurs ressources sont limitées et que les risques potentiels sont pratiquement infinis, ils doivent faire des choix difficiles quant aux priorités, à la nature des interventions et à l'attribution des ressources. En même temps, les citoyens exigent des niveaux de protection de plus en plus élevés contre un nombre toujours croissant de risques et les industries entendent se livrer à leurs activités dans un environnement prévisible. Les responsables de la réglementation doivent pouvoir recourir à un processus décisionnel et de résolution de problèmes fondé sur des principes, cohérent et transparent.
La gestion du risque est centrée sur l'idée qu'une démarche rationnelle, délibérative et fondée sur des faits donnera, avec le temps, des résultats plus satisfaisants. Elle reconnaît que tous les risques ne peuvent être totalement éliminés, mais qu'ils peuvent être gérés de manière à atténuer ou réduire les préjudices dans la mesure la plus large et pratique possible. Compte tenu de l'élargissement des connaissances et des compétences techniques, allié à une diffusion large et rapide de renseignements sur des risques concrets ou perçus, les tâches liées à la gestion du risque sont devenues plus importantes pour les responsables de la réglementation, surtout pour ceux dont le travail est lié à des régimes fondés sur des études scientifiques. Le Comité est donc d'avis que l'application des principes de gestion du risque à l'élaboration ainsi qu'à l'administration et à la mise en oeuvre des programmes réglementaires doit faire partie intégrante d'une stratégie de réglementation intelligente. Les exemples utilisés dans la présente section concernent essentiellement les règlements fondés sur des données scientifiques (p. ex., ceux liés à la santé, à la sécurité et à l'environnement). La gestion du risque s'avère appropriée pour tous les programmes de réglementation, et l'approche proposée pourrait donc s'appliquer à d'autres domaines. 3.4.1 Principaux enjeuxL'environnement dans lequel les responsables de la réglementation doivent prendre des décisions est caractérisé par la complexité, l'incertitude et la fragmentation des renseignements (voir le tableau 3.1). Les questions dont ils sont saisis sont de plus en plus interdépendants et d'envergure internationale. Par exemple, pour assurer la sécurité de l'approvisionnement alimentaire en Amérique du Nord, il est essentiel de tenir compte de plusieurs facteurs, notamment des incidences des produits chimiques et de la biotechnologie sur la santé humaine et sur l'environnement, des échanges commerciaux internationaux et des pratiques en matière de fabrication et d'étiquetage. Ce défi est également accentué par le fait que les risques peuvent souvent avoir simultanément des conséquences bénéfiques et négatives. Prenons, par exemple, la mise au point d'un nouveau produit thérapeutique. Tableau 3.1 Questions liées au risque et environnement réglementaire
Sa disponibilité peut améliorer considérablement la santé et la qualité de vie de nombreuses personnes. Toutefois, sa fabrication et son élimination peuvent avoir des répercussions néfastes qu'il est nécessaire de gérer et de réglementer.
Par ailleurs, le fait que le risque ne connaisse pas les frontières entre les ministères constitue un autre élément important dont doivent tenir compte les responsables de la réglementation. Par conséquent, il faut adopter une approche intégrée pour véritablement protéger l'intérêt public. La coordination des efforts est particulièrement cruciale lorsque les responsabilités politiques et réglementaires dans un certain domaine relèvent de plusieurs ministères à la fois (p. ex., les questions de l'agriculture et de l'alimentation relèvent à la fois d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, de Santé Canada et d'Environnement Canada). Dans de tels cas, le gouvernement doit mettre en place des approches coordonnées en matière de détection, d'évaluation et de comparaison des risques en plus de mettre en oeuvre et d'évaluer des politiques et des programmes réglementaires connexes. Certaines questions peuvent également nécessiter la participation des gouvernements provinciaux et territoriaux. Par exemple, l'amélioration de la qualité et de la salubrité de l'eau au Canada nécessite la coordination des efforts d'au moins cinq ministères fédéraux ainsi que des gouvernements provinciaux et territoriaux. Un autre enjeu vise l'adoption d'un processus transparent de prise de décisions et la façon dont le public perçoit le risque et qui, précisons-le, diffère de celle des gouvernements. En effet, les citoyens ont tendance à s'intéresser surtout à des facteurs plus personnels, comme les conséquences possibles d'un préjudice qui les touche eux-mêmes ou encore des membres de leur famille ou des amis. Par ailleurs, les citoyens veulent pouvoir prendre leurs propres décisions par rapport à nombre de risques, comme ceux liés au transport et aux aliments, et les responsables de la réglementation doivent s'assurer que la population a accès à l'information relative aux risques inhérents à certaines décisions. Ces mêmes responsables ne peuvent décider à huis clos en quoi consiste le meilleur intérêt des citoyens. Il incombe donc aux responsables de la réglementation de faire preuve de transparence dans leurs prises de décisions et de faire participer les citoyens de façon constructive. La capacité du responsable de la réglementation à communiquer efficacement et à engager les citoyens, et toute autre partie, constitue un facteur de réussite crucial pour effectuer une gestion du risque efficace et continuer de susciter de la confiance à l'égard du système de réglementation. 3.4.2 Cadre de gestion du risque pour la réglementationLe Comité est d'avis que le gouvernement fédéral doit élaborer un cadre de gestion du risque pour la réglementation qui servirait de guide aux ministères dans la préparation d'approches de gestion du risque spécifiques. Il importe que les agents de réglementation puissent recourir à un cadre d'orientation qui les aide à prendre leurs décisions en toute transparence, celles-ci ne devant pas être assujetties à leur propre évaluation du risque. L'élaboration d'un tel cadre de gestion permettrait d'aider les responsables de la réglementation à effectuer une analyse approfondie, à agir avec discernement et à prendre des décisions judicieuses dans des situations incertaines. Le Comité estime qu'il faudrait plus d'uniformité dans les approches de gestion du risque des divers ministères et est conscient que des risques différents nécessiteront des stratégies de gestion différentes. Par exemple, pour chaque programme de réglementation, il faudrait procéder à la classification des risques selon leur gravité et l'intervention nécessaire (p. ex., le recours à différents outils), et notamment établir des seuils en deçà desquels le gouvernement n'interviendra pas par le biais d'un règlement. Il y aurait lieu d'accorder plus d'attention et d'affecter davantage de ressources, proportionnellement, aux risques considérés comme d'importantes priorités ministérielles ou gouvernementales. En ce qui concerne les risques les plus faibles, il conviendrait d'avoir recours à des mécanismes de conformité nécessitant moins de ressources (p. ex., des programmes d'information). Cette classification devrait être systématiquement tenue à jour à la lumière des nouvelles données scientifiques, des changements de comportement et des résultats obtenus au moyen des programmes.
L'élaboration et l'adoption par les ministères d'une norme de gestion du risque, comme la norme Q-850 de l'Association canadienne de normalisation (voir l'encadré), faciliteraient l'adoption d'une approche uniforme à l'échelle des divers ministères. Pêches et Océans Canada a établi une excellente matrice de la priorité du risque qui fixe des seuils pour divers types de mesures réglementaires. Un tel cadre peut s'appliquer à une très vaste gamme de risques (voir la section 1.4, partie II, « Processus d'évaluation environnementale »). Le cadre de gestion du risque pour la réglementation devrait donc s'appuyer sur trois éléments de base : le classement des risques par priorités, l'évaluation des risques ainsi que la communication et la consultation sur le risque. Les principaux objectifs de ce cadre sont les suivants :
Classement des risques par priorités Le Canada dispose de ressources limitées pour réaliser un nombre croissant d'objectifs stratégiques; par ailleurs, l'environnement réglementaire doit faire face aux exigences croissantes de la population à l'égard de la reddition de comptes et de la gestion responsable des finances publiques. Il est par conséquent essentiel que le gouvernement applique les principes de gestion du risque lorsqu'il prend des décisions concernant l'affectation des ressources consacrées à la réglementation. Il devrait affecter les ressources à des priorités qui permettraient d'en tirer le meilleur parti sur les plans social et environnemental, au moindre coût.
Certains ministères ont décidé d'élaborer des profils de risque en tenant compte de divers facteurs politiques, sociaux, juridiques et financiers liés à l'utilisation efficace des ressources pour la gestion du risque. L'identification du risque et l'évaluation des priorités devraient être exécutées de manière cohérente, en tenant compte non seulement du mandat d'un ministère, mais aussi de celui de l'ensemble de la fonction publique, étant donné qu'un même risque doit souvent être géré par plus d'un ministère et que les activités d'atténuation du risque dans un secteur donné sont de plus en plus susceptibles d'accroître un risque dans un autre secteur. Les exercices de détection du risque devraient être pluridisciplinaires afin d'utiliser comme levier et de mettre en commun les connaissances et la capacité de réglementation. Outre les fonctionnaires, on pourrait faire participer des scientifiques canadiens et étrangers de divers établissements de recherche et d'enseignement universitaire, des représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux, des agents de réglementation étrangers, des représentants de l'industrie, des organisations non gouvernementales, des groupes de citoyens ainsi que des groupes de réflexion. Les responsables de la réglementation doivent donc établir leurs priorités en matière de risque, les rendre publiques ainsi que les raisons qui justifient leurs décisions. Les rapports annuels des ministères sur les plans et les priorités doivent présenter l'affectation corrélative des ressources et les rapports sur le rendement des ministères doivent faire valoir les progrès réalisés afin de minimiser le nombre de risques classés par priorités.
Évaluation du risque Les responsables de la réglementation doivent bien comprendre la nature du problème ou du danger sur lequel ils doivent se pencher. Cette démarche signifie en fait d'entamer les travaux de recherche et d'analyse requis et d'évaluer et de quantifier le risque en jeu. Les travaux scientifiques sont essentiels à l'élaboration d'options et à la prise de décisions liées à la réglementation, tant pour ce qui est des stratégies que de la mise en application. Ils doivent être effectués par un service indépendant et examinés par les pairs au besoin. Il s'agit là d'une étape cruciale du processus de gestion du risque qui fournit une excellente base fondée sur des faits à l'évaluation du risque. En ce qui a trait à la réglementation fondée sur des données scientifiques, il importe que les évaluateurs du risque puissent avoir accès aux plus fiables et aux plus récentes données scientifiques afin que la réglementation puisse refléter en tout temps les connaissances à la fine pointe. Précisons qu'à une époque où les connaissances évoluent à un rythme effréné, cela n'est pas une mince tâche. De toute évidence, le gouvernement doit pouvoir compter sur suffisamment de connaissances et d'expertise à l'interne de la part de scientifiques et d'autres professionnels afin que les évaluations du risque reposent sur des données adéquates et des études indépendantes. Les compétences scientifiques du gouvernement doivent donc être évaluées régulièrement pour s'assurer que l'assise scientifique est adéquate. À cet égard, l'option de faire appel, périodiquement, aux services d'une institution scientifique indépendante afin qu'elle puisse procéder à une évaluation rigoureuse ne doit pas être exclue. Attirer et garder des scientifiques de renom au sein du gouvernement constitue un impératif constant, étant donné la concurrence féroce qui prévaut entre les employeurs potentiels pour mettre la main sur des scientifiques hautement qualifiés. Comme cela a été discuté à la section consacrée à la coopération internationale en matière de réglementation, les responsables de la réglementation devront également entretenir de plus en plus de liens et échanger des renseignements avec leurs collègues en poste dans d'autres pays, en plus de tâcher d'avoir accès à des réseaux scientifiques internationaux. Il importe aussi d'intensifier la collaboration avec la communauté scientifique canadienne (p. ex., le Conseil national de recherches du Canada, l'Institut de recherche en santé du Canada et les nombreuses universités) en vue d'une réglementation générale et d'une évaluation du risque en particulier. En plus des données scientifiques, les responsables de la réglementation doivent également comprendre l'environnement public. En élaborant une intervention réglementaire, ils doivent tenir compte des questions liées notamment aux valeurs, au seuil de tolérance du public face au risque, aux priorités stratégiques et à l'environnement social, culturel, politique et financier qui ne cesse d'évoluer. Actuellement, nous n'avons toujours pas mis en place de normes ou de lignes directrices fédérales établissant des exigences minimales en ce qui concerne l'évaluation des risques et les interventions réglementaires. Par conséquent, les évaluations effectuées dans l'ensemble du gouvernement, qui indiquent de façon explicite et transparente comment les données empiriques et l'environnement public éclairent et influencent les décisions, manquent encore d'uniformité. Le problème est d'autant plus grave que, comme nous l'avons mentionné précédemment, le risque doit constamment faire l'objet d'une évaluation interministérielle. En outre, les ministères n'ont toujours pas adopté de stratégie coordonnée pour les évaluations du risque qui leur permettrait d'atténuer de nouvelles sources de risque pour la santé, la sécurité et l'environnement et d'établir des priorités, surtout lorsque les risques touchent bon nombre de ministères. L'adoption de mesures visant à accroître l'uniformité et la coordination au sein des divers ministères serait donc souhaitable. Précaution Il est important que les décisions en matière de réglementation soient fondées sur des données scientifiques. Cependant, lorsque les responsables de la réglementation ne peuvent pas compter sur des données scientifiques entièrement fiables alors qu'ils doivent prendre une décision parce qu'il y a un risque de préjudice grave ou irréversible, ils peuvent recourir au principe de « précaution ». Le recours à la précaution est d'ailleurs prescrit dans plusieurs lois canadiennes importantes, notamment dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), aussi connue sous l'appellation LCPE (1999), la Loi sur les espèces en péril et la Loi sur les océans. Sur une base quotidienne, les agents ou les inspecteurs de la réglementation ont recours à la précaution en prenant leurs décisions. Il incombe aux responsables de la réglementation d'anticiper les problèmes et de les prévenir. Le fait d'appliquer le principe de précaution peut être dans l'intérêt du public et correspond en tous points avec l'approche de réglementation intelligente. Toutefois, la façon dont le principe de précaution est intégré dans le processus décisionnel est cruciale. Si le concept est utilisé de manière abusive, il peut y avoir augmentation des risques et imposition de coûts inutiles à tous ceux qui entrent en ligne de compte dans le système réglementaire, y compris les gouvernements. Le Cadre d'application de la précaution dans un processus décisionnel scientifique en gestion du risque, récemment publié par le Bureau du Conseil privé, constitue un excellent moyen d'aider le gouvernement à utiliser adéquatement le concept de précaution. Il convient que les ministères puissent expliquer la manière dont ils entendent mettre en oeuvre cette nouvelle politique. Le Comité ne voit aucune raison de donner un caractère officiel au principe de précaution dans la vaste majorité des circonstances quotidiennes où il n'existe qu'une petite part d'incertitude quant aux données scientifiques. Néanmoins, il existe des situations (voir l'encadré sur le New Directions Group) qui nécessitent l'élaboration et l'établissement de processus spécifiques pour l'application du principe de précaution.
Ces situations spéciales requièrent souvent une participation accrue de la part des parties concernées, y compris les entreprises et les organismes non gouvernementaux. Certains croient qu'un tel processus retarde la prise de décisions. Le Comité est d'avis que la participation de nombreuses parties, lorsqu'elle repose sur la coopération et une volonté de trouver des solutions, peut accélérer le processus décisionnel, contribuer à maintenir la confiance à l'égard du système réglementaire et faire en sorte que les objectifs visant la protection puissent être atteints sans étouffer l'innovation. Pareils processus doivent être guidés par le principe de la transparence et celui de l'imputabilité. Les décisions prises à la lumière du principe de précaution doivent reposer sur les connaissances scientifiques les plus récentes. Ces situations particulières nécessitent souvent d'être documentées et révisées davantage. Bien des pays font appel à une institution scientifique nationale afin que leur gouvernement puisse obtenir des conseils d'ordre scientifique. En raison de l'absence d'une telle institution au Canada, il serait souhaitable de soumettre à un examen par les pairs, à la fois des experts canadiens et étrangers, les cas où le principe de précaution est utilisé pour justifier une mesure réglementaire importante. Les décisions émanant de ces processus doivent être reconsidérées périodiquement en tenant compte des progrès scientifiques, de l'acquisition de nouvelles connaissances et du changement constant de l'environnement public.
Communication et consultation sur le risque Le gouvernement ne peut protéger les citoyens contre tous les types de préjudices. Les pesticides, par exemple, améliorent la qualité des fruits et des légumes et les rendent accessibles à des prix raisonnables. Ces aliments, quant à eux, diminuent de nombreux risques pour la santé dont celui de certains types de cancer. Par contre, les pesticides peuvent accroître les risques de contracter d'autres types de cancers. Un des principaux défis qui se pose aux responsables de la réglementation dans le contexte de la mise en oeuvre des régimes de gestion du risque est lié à la difficulté des citoyens et des parlementaires à comprendre ou accepter le fait que le risque puisse avoir des incidences bénéfiques et néfastes à la fois. C'est particulièrement le cas dans une situation qui pourrait être interprétée à tort comme un échec (p. ex., le retrait d'un médicament du marché). Cette attitude entraîne un accroissement de la demande d'intervention réglementaire traditionnelle qui n'est pas toujours rationnel. Le Comité est d'avis que la gestion du risque doit être considérée comme une tâche devant être exécutée conjointement par le gouvernement, l'industrie et les citoyens afin que nous puissions atteindre des niveaux de risque acceptables et gérables. La capacité du gouvernement à transmettre efficacement de l'information sur les risques et à inciter les citoyens, les médias et les parlementaires à collaborer au processus de gestion du risque constitue un des principaux éléments d'une réglementation intelligente efficace. La communication dans ce domaine est primordiale pour établir la confiance à l'égard du marché canadien et de ses institutions. Il est intéressant de signaler que l'augmentation de la consommation de boeuf après l'incident de l'ESB, à l'été 2003, démontre qu'une stratégie axée sur la prévention et sur la coopération en matière de communication peut contribuer à maintenir la confiance des Canadiens. Il suffit d'un bon jugement professionnel et de la mise en oeuvre de certaines mesures de la part des responsables de la réglementation pour dissiper l'incertitude quant aux sources de préjudice. Par ailleurs, la confiance du public peut être maintenue et intensifiée en jetant la lumière sur certaines incertitudes. En outre, la transparence du processus décisionnel contribue à la prévisibilité de l'environnement commercial, ce que l'industrie apprécie beaucoup. Il est par conséquent important que les responsables de la réglementation expliquent clairement leurs décisions, les facteurs qui ont été analysés et les options qui ont été examinées. Les consultations publiques sont essentielles, car la gestion du risque est plus efficace lorsque le gouvernement collabore avec les citoyens et l'industrie. Le gouvernement ne peut assurer seul la gestion du risque. La participation du public complète les analyses scientifiques, économiques et sociales. Les citoyens et l'industrie ont un rôle important à jouer dans l'identification et l'évaluation des priorités, des niveaux de tolérance au risque et de la façon dont le gouvernement et l'industrie devraient réagir. Il est essentiel que les responsables de la réglementation trouvent des façons novatrices de faire participer les citoyens pour mieux comprendre leur tolérance au risque, et pour obtenir leur opinion sur les priorités en matière de risque et sur les options en ce qui concerne sa gestion, ainsi que sur l'affectation des ressources nécessaires. La confusion des citoyens lorsqu'il s'agit de faire un choix comportant un risque peut être accentuée par la rapidité des progrès scientifiques et par un accès accru à l'information. Par exemple, pendant des années, les médecins ont considéré que le cholestérol était mauvais et ils recommandaient à leurs patients de l'exclure de leur régime alimentaire. À présent, ils disent qu'il y a aussi du « bon cholestérol », ce qui rend les choix en matière d'alimentation plus complexes. Les citoyens ne savent pas toujours qui croire ni où trouver de l'information précise et objective. Un des rôles du gouvernement, à titre de gestionnaire du risque, est de veiller à ce que les citoyens aient accès à de l'information pertinente pour les aider à faire des choix éclairés.
3.5 Instruments d'action gouvernementale
Les gouvernements ont à leur disposition un large éventail d'instruments et d'outils pour les aider à atteindre leurs objectifs stratégiques. Parmi ces outils, mentionnons, outre les instruments législatifs traditionnels, les règlements fondés sur le rendement, les instruments économiques, les programmes d'information et d'éducation, les initiatives volontaires et les normes. Chacun exige la collaboration des parties concernées à divers degrés, comme celle de l'industrie dans le cas des codes de pratiques volontaires, et chacun a aussi ses mérites et ses limites. Le Comité reconnaît les bénéfices liés à l'utilisation d'une combinaison d'instruments. Cette approche permet à l'organisme de réglementation d'adapter son intervention selon les circonstances de manière à tirer parti des avantages des instruments les plus appropriés à la situation. Dans certains cas, une approche réglementaire traditionnelle, bien conçue, peut être plus efficace et efficiente, surtout si elle est accompagnée de programmes de surveillance et de promotion, et de programmes de soutien. Dans d'autres cas cependant, il peut y avoir des avantages à utiliser d'autres instruments, soit comme initiative indépendante, soit comme complément à l'approche traditionnelle. À titre d'exemple, une étude menée par le ministère de la Justice portant sur la conduite avec facultés affaiblies a démontré que, bien que des dispositions législatives soient nécessaires, l'approche complémentaire qui consiste à modifier les attitudes sociales grâce à des programmes efficaces d'éducation et de sensibilisation (comme dans le cas du programme Les mères contre l'alcool au volant) joue un rôle dissuasif essentiel dans la diminution de l'incidence de la conduite avec facultés affaiblies. 3.5.1 Principaux enjeuxDurant la majeure partie du siècle dernier, on avait largement recours à des mesures réglementaires d'injonction et de contrôle de l'exécution qui reposaient principalement sur des règles visant à définir le comportement dans l'espoir de produire les résultats escomptés. Malgré les efforts du gouvernement fédéral pour encourager les ministères à examiner et à utiliser une plus grande variété d'instruments non législatifs, dans le cadre notamment d'ateliers de formation offerts aux fonctionnaires fédéraux, il n'y a pas eu beaucoup de progrès dans ce domaine. Les ministères ont encore trop souvent recours aux lois comme instruments de premier choix et ne prennent pas suffisamment en considération d'autres instruments. Cela est particulièrement vrai dans le cas des instruments économiques, dont il est question à la fin de la présente section. Le Comité aimerait aussi qu'on ait davantage recours à la réglementation axée sur le rendement. À l'heure actuelle, le manque de sensibilisation et d'expérience fait obstacle à l'utilisation accrue d'une variété d'instruments non législatifs. Par ailleurs, le fait que le gouvernement fédéral n'ait pas encore encadré l'utilisation d'instruments pour aider les responsables de la réglementation, en particulier ceux qui conçoivent et mettent en oeuvre des stratégies d'application et de contrôle, représente un défi supplémentaire. Il n'y a donc pas de cadre qui pourrait servir de feuille de route et les décisions relatives au choix d'instruments sont peu débattues et ne sont pas soumises à un processus permanent de remise en question, y compris la décision initiale de réglementer ou non. Sans directives claires de la part du gouvernement, les fonctionnaires qui participent à la mise en place de la réglementation (par ex. les avocats, les analystes de politiques, les agents de réglementation) doivent se fier à leur expérience et à leur expertise pour prendre des décisions par rapport aux instruments. Peu de choses les incitent à innover. En outre, il a été soulevé que des contraintes législatives à l'égard de la création et de la mise en oeuvre de combinaisons d'instruments seraient parmi les principaux obstacles à l'utilisation accrue d'instruments non législatifs. Par ailleurs, l'absence de politiques claires dans certains cas rend difficile la prise en considération et l'utilisation judicieuse d'instruments non législatifs. Le Comité reconnaît que sans objectifs clairs il est beaucoup plus difficile de prendre en considération et d'évaluer de façon efficace des instruments potentiels et de concevoir la combinaison d'instruments la plus appropriée. Cet objectif est également entravé par la possibilité que les discussions sur le choix des instruments se transforment en discussions sur les politiques. Le Comité a aussi remarqué que des préoccupations par rapport à l'efficacité faisaient aussi obstacle à la conception et à la mise en application d'instruments non législatifs novateurs. Il s'est rendu compte, au cours des consultations, que des organisations non gouvernementales (ONG) et des citoyens perçoivent encore le gouvernement comme le « gardien » de leur santé, de leur sécurité et de l'environnement, et comptent sur lui à ce titre. Plusieurs d'entre eux, tout comme certains fonctionnaires, considèrent donc que les mesures réglementaires normatives traditionnelles d'injonction et de contrôle de l'exécution sont les plus efficaces et les plus fiables pour atteindre ces objectifs, malgré qu'on ait de plus en plus de preuves à l'effet que d'autres formes de réglementation puissent, si elles sont bien conçues, produire de meilleurs résultats. Ce point de vue est même partagé, à l'occasion, par certains parlementaires. Au cours des consultations, les ONG ont à plusieurs reprises indiqué qu'ils doutaient que les codes volontaires au sein de l'industrie puissent par exemple permettre la protection des consommateurs ou l'atteinte d'objectifs de sécurité. Le Comité reconnaît que, et c'est le cas pour toutes les mesures, les instruments non législatifs, dont les codes volontaires, comportent des limites. Celles-ci ne devraient cependant pas empêcher l'étude minutieuse de ces instruments, ni leur utilisation judicieuse. Le Comité croit qu'il est essentiel de renforcer les mécanismes de reddition de comptes pour accroître la confiance de la population. Tel que mentionné à la section 3.6.3 « Nouvelles approches réglementaires », le gouvernement devrait expliquer de quelle façon les instruments proposés aideront à atteindre les résultats escomptés. Il devrait procéder à l'évaluation continue des stratégies réglementaires, présenter des rapports sur le rendement au public, tirer les conclusions qui s'imposent des résultats et modifier son approche au besoin. 3.5.2 Encadrer le choix des instrumentsÀ l'heure actuelle, il n'y a aucun cadre pour aider les décideurs dans leur analyse des politiques et leur examen de différents instruments. Le Comité reconnaît qu'il n'y a pas une seule méthode valable pour créer la combinaison optimale d'instruments. Il n'y a pas non plus d'outil universel qui permette la sélection d'instruments d'intervention. Il faut évaluer chaque situation en tenant compte des risques inhérents, du cadre législatif ainsi que du rôle, des responsabilités, des besoins et des obligations de toutes les parties concernées. Or, le Comité estime qu'un cadre de travail analytique pourrait aider les décideurs à prendre en considération un éventail varié d'instruments et à trouver la combinaison d'instruments la plus appropriée en regard des objectifs visés, dès la prise de décision initiale de réglementer ou non et tout au long de l'examen de diverses stratégies de contrôle et d'application. Un tel cadre de travail pourrait comporter de l'information relativement aux caractéristiques de chaque instrument et décrire les liens entre ceux-ci. Il pourrait aussi énoncer des critères et un ensemble de facteurs méthodologiques qui constitueraient une feuille de route pour les décideurs dans leur évaluation de la pertinence des instruments et de leur compatibilité avec les objectifs visés. Les fonctionnaires pourraient par exemple être tenus de prendre en considération des éléments tels que le risque pour la société, la structure de l'industrie, son homogénéité ou sa diversité, ses antécédents par rapport au respect des exigences, la pression exercée par les parties intéressées ou le public en faveur de la résolution du problème, la compétence administrative du gouvernement, etc. Le Comité croit également qu'il faut débattre de façon plus exhaustive du choix des instruments dès le début du processus d'élaboration des politiques. En ce qui concerne la conception des programmes de réglementation et le choix des instruments, le gouvernement devrait coopérer avec l'industrie et les citoyens et instaurer un climat de confiance dès le début du processus d'élaboration des politiques. En outre, pour éviter que les décisions relatives au choix des instruments ne soient prises isolément, le gouvernement devrait mettre en place des mécanismes qui garantiraient la participation à la conception des stratégies réglementaires de tous les membres pertinents de la collectivité de la réglementation fédérale, y compris les avocats des services juridiques ministériels. Enfin, le Comité est d'avis que les ministères utiliseraient un plus large éventail d'outils si le choix des instruments risquait d'être davantage remis en question tout au long du cycle d'élaboration des politiques. Selon le Comité, il faudrait consolider les mécanismes qui permettent la remise en question des décisions et la suggestion de modifications dans les cas où il a été décidé de recourir à la loi pour résoudre une question de politique publique. À cet effet, on pourrait renforcer les fonctions d'analyse et de remise en question du Bureau du Conseil privé, notamment en exigeant que ces fonctions soient exercées plus tôt dans le processus. Dans le nouveau modèle de mémoire au Cabinet, on suggère de discuter « des instruments qui sont disponibles pour atteindre les objectifs en matière de politiques ». Cela dénote qu'on commence à reconnaître l'importance d'évaluer les instruments au moment de l'élaboration et de la mise en oeuvre des politiques. En outre, lors du dépôt d'un projet de loi au Parlement, le gouvernement devrait fournir une description des principaux instruments d'intervention à utiliser et un exposé des projets de règlements de fond dont l'adoption est prévue au cours de l'année suivant l'adoption de la loi, de même que des résultats escomptés. Ces renseignements permettraient au Parlement de mieux comprendre toute l'importance d'un projet de législation.
3.5.3 Accroître les efforts de sensibilisationAu cours des dernières années, le gouvernement fédéral a offert de la formation et de l'information sur le choix d'instruments afin d'encourager les fonctionnaires (p. ex. les avocats, les analystes de politiques, les agents de réglementation) à utiliser un plus large éventail d'instruments. Certains ministères ont réussi à créer des combinaisons d'instruments novatrices et à travailler de concert avec l'industrie et les citoyens. Ainsi, au titre de la prévention de la pollution et de la protection de l'environnement et de la santé humaine, Environnement Canada n'a pas uniquement recours à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) et ses règlements, mais aussi à une gamme d'autres outils non législatifs comme les Recommandations canadiennes pour la qualité de l'environnement, des codes de pratique ainsi que des plans de prévention de la pollution conçus par l'industrie. Le Comité constate cependant que, malgré tous ces efforts, l'utilisation d'instruments non législatifs n'a pas beaucoup progressé. Cela semble attribuable à des habitudes ancrées au sein de la collectivité de la réglementation et au fait qu'on soit pris dans un « cercle vicieux » au Canada alors qu'on demeure réticent à s'éloigner des méthodes de réglementation plus traditionnelles compte tenu du manque d'expérience pratique et de sensibilisation. Le gouvernement fédéral devrait poursuivre ses efforts pour aider les fonctionnaires qui participent à l'élaboration, à la mise en oeuvre et à l'application des règlements à se familiariser avec les avantages potentiels de l'utilisation d'instruments non législatifs. Selon le Comité, le gouvernement devrait s'efforcer de mettre à leur disposition des renseignements et des ateliers de formation pratiques et ciblés. L'intégration, dans les évaluations du rendement des fonctionnaires, d'un critère d'innovation en matière de réglementation pourrait aussi inciter les responsables de la réglementation à prendre en considération des instruments ou combinaisons d'instruments novateurs. De plus, afin de sensibiliser davantage la collectivité de la réglementation par rapport aux divers instruments, il faudra davantage souligner les pratiques exemplaires dans le choix des instruments et veiller à leur mise en commun entre les ministères. En complément, on pourrait effectuer des études de cas concernant différents instruments non législatifs. Les résultats de ces études pourraient ensuite être mis en parallèle avec ceux d'autres pays.
3.5.4 Supprimer les obstacles législatifsLes instruments sont souvent sélectionnés en fonction de leur disponibilité. Selon la conception traditionnelle du rôle du gouvernement et de la réglementation, on favorise l'utilisation des lois et des règlements comme principaux outils d'intervention. Par conséquent, les lois fédérales assurent souvent l'application des régimes législatifs par voie de règlements conventionnels plutôt que d'autres outils qui pourraient mieux répondre aux objectifs en matière de politiques. Les lois les plus anciennes, surtout, exigent souvent que les détails des régimes législatifs soient prescrits par règlements. Le problème réside dans le fait que lorsqu'une loi exige que le gouverneur en conseil établisse des règlements pour régir des questions ou des activités précises, il n'est pas possible d'avoir recours à d'autres instruments pour ce faire, notamment des codes volontaires. Ce principe est illustré dans l'affaire Aucoin c. Canada (Ministre des Pêches et des Océans)9, dans laquelle la Cour d'appel fédérale a déclaré illégal un accord de partenariat avec des pêcheurs de crabe des neiges parce qu'il n'était pas autorisé par la Loi sur les pêches. En concluant cet accord, le ministre des Pêches et des Océans avait outrepassé ses pouvoirs légaux.
Le même problème existe en ce qui concerne les règlements axés sur le rendement, un type de règlement que favorisent grandement les plus grandes entreprises, mais au titre duquel les plus petites entreprises ont besoin d'encadrement. Ce type de règlement définit une norme de performance visée et laisse aux parties réglementées le soin de déterminer comment l'atteindre. Par exemple, un règlement environnemental peut définir le niveau maximal de rejet d'effluents, mais chaque entreprise peut choisir la méthode qu'elle préfère pour atteindre les objectifs visés. Lorsqu'une loi exige que le gouverneur en conseil établisse les méthodes ou les moyens à utiliser par les parties réglementées pour atteindre certains résultats, les règlements doivent indiquer quelle méthode sera utilisée. Les organismes de réglementation n'ont donc pas le droit d'avoir recours à des règlements axés sur le rendement. Le Comité estime que si les fonctionnaires fédéraux avaient plus de latitude dans l'élaboration de stratégies réglementaires et que les lois existantes ne restreignaient pas les choix, ils prendraient en considération des instruments non législatifs et y auraient recours plus souvent. Par conséquent, on devrait demander aux organismes de réglementation d'identifier les obstacles législatifs auxquels ils font face lorsqu'ils envisagent le recours à des instruments non législatifs ou à des règlements axés sur le rendement, et les éliminer dès que possible au moyen de projets de loi autonomes ou omnibus. On devrait aussi exiger des ministères qui désirent présenter de nouvelles lois qu'ils déterminent la combinaison d'instruments à utiliser au tout début du processus (c'est-à-dire avant la rédaction du mémoire au Cabinet), afin que les pouvoirs appropriés soient enchâssés dans la loi et que les outils nécessaires soient à leur disposition pour usage ultérieur.
3.5.5 Accroître la visibilité et l'utilisation des instruments économiquesAprès avoir étudié globalement la question des instruments, le Comité s'est penché sur l'utilisation d'instruments économiques pour atteindre des objectifs environnementaux. Les ambitieux objectifs environnementaux du Canada, son expérience restreinte de l'utilisation des instruments économiques et le retard qu'il accuse par rapport à la majorité des pays de l'OCDE, qui ont bien davantage recours aux instruments économiques pour atteindre des objectifs environnementaux, ont incité le Comité à pousser sa réflexion à ce chapitre. Dans son Étude économique du Canada 2000, l'OCDE a conclu qu'il faut accroître le recours aux instruments économiques afin de renforcer le principe du pollueur payeur. Le Comité estime que le gouvernement du Canada devrait adopter une approche plus novatrice dans l'exercice des pouvoirs réglementaires qui comporterait l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques à l'échelle de l'administration fédérale dans son ensemble. Les instruments économiques sont des compléments, non pas des solutions de rechange, aux instruments législatifs. Ils utilisent des signaux axés sur le marché pour inciter à la prise de décisions selon des modes voulus. L'adoption du comportement visé donne lieu à une récompense, celle d'un comportement indésirable à une sanction. Les instruments économiques favorisent le recours accru à la méthode de la capitalisation du coût entier, selon laquelle tous les coûts d'un projet sont capitalisés (p. ex. le principe du pollueur payeur). Ils comprennent l'attribution de droits de propriété, des mesures à base de redevances, des régimes de responsabilité et d'assurance ainsi que des permis échangeables. Le gouvernement pourrait notamment envisager le recours à des mesures de consignation ou de taxes avec remise pour encourager la gestion du cycle de vie des biens de consommation recyclables; à une redevance pour pollution qui pénaliserait ceux qui créent ou émettent des polluants; à une restructuration des taxes d'accise sur le carburant (par exemple, étendre l'application de cette taxe au-delà des carburants de transport, au charbon, et aux autres carburants pour véhicules routiers et tous terrains), des dépenses et de la conditionnalité du programme d'infrastructure; et à des crédits d'impôt et des subventions pour l'utilisation de sources et de technologies d'énergies renouvelables. Les instruments économiques sont un élément clé de l'écologisation de la fiscalité (EF), qui suppose la réorientation des programmes d'imposition et de dépenses de manière à créer un ensemble intégré de mesures incitatives pour atteindre des objectifs environnementaux. Bien qu'un grand nombre de pays européens aient réussi à mettre en oeuvre divers volets de l'EF au cours de la dernière décennie, le Canada possède très peu d'expérience dans ce domaine. Les instruments économiques peuvent présenter d'importants avantages par rapport aux autres outils. Certaines études10 révèlent en effet qu'ils peuvent donner lieu à des coûts de conformité sensiblement inférieurs à ceux d'autres outils. Ils peuvent aussi récompenser l'amélioration continue et favoriser l'innovation environnementale et technologique. Les réussites internationales obtenues au moyen des instruments économiques montrent clairement ces avantages. Par exemple, les États-Unis ont mis en oeuvre avec succès un programme d'échange de droits d'émission visant les émissions de dioxyde de soufre des services publics d'électricité. Aux termes de ce programme, la limite annuelle sur les émissions de dioxyde de soufre sert de norme de rendement, tandis que la négociabilité des droits d'émission permet aux entreprises de décider comment elles souhaitent s'y conformer. Pendant la phase 1 du programme - qui a eu lieu entre 1995 et 1999 - le coût pour les participants de la réduction d'émissions au niveau souhaité était de 1/7 à 1/3 du coût anticipé notamment par l'Environmental Protection Agency (EPA) des États-Unis. Plusieurs études ont évalué le coût annuel de la phase 1 pour les participants à environ 1,2 milliard $, ce qui est de beaucoup inférieur à l'estimation initiale de 5 milliards $11. Les émissions ont été réduites de quatre millions de tonnes par année pendant cette période. On s'attend à ce que ce chiffre double au cours de la phase 2 qui a commencé en 2000. Comme dans le cas d'autres instruments non législatifs, les principaux obstacles à l'utilisation des instruments économiques au Canada semblent provenir de deux sources : le manque de sensibilisation et d'expérience de la collectivité de la réglementation et, dans le cas des frais et des taxes, la résistance face à ce qui est perçu dans la population comme des mesures fiscales additionnelles. Le Comité constate que le règlement des questions de politique environnementale entraîne des coûts plus élevés qu'il ne devrait au Canada, compte tenu de l'utilisation restreinte d'instruments économiques et de l'EF. Selon le Comité, le Canada devrait sérieusement envisager le recours à des instruments économiques, combinés à d'autres instruments, pour atteindre ses objectifs environnementaux. Une des étapes clés en ce sens pourrait être de procéder à un examen approfondi à la fois l'EF et des instruments économiques. Pour que leur utilisation soit fructueuse au Canada, il faudra que tous les ministères fédéraux collaborent, y compris Environnement Canada, Ressources naturelles Canada et Finances Canada. Le Comité reconnaît que certaines préoccupations concernant l'utilisation d'instruments économiques et de l'EF sont fondées. Il est possible, par exemple, que les écosystèmes régionaux, les contextes politiques ou les principes fiscaux variés du Canada rendent difficile l'établissement d'une approche « universelle ». Il semble y avoir aussi un manque de connaissances approfondies chez les décideurs, les parties concernées et le public sur la portée et le fonctionnement de l'EF et des instruments économiques. Ces facteurs ne devraient cependant pas empêcher l'examen de ces instruments au cas par cas.
3.6 Processus réglementaireLa présente section porte sur la manière dont la réglementation, dans son sens le plus large, est élaborée, mise en oeuvre et évaluée. Le Comité croit que le gouvernement fédéral doit améliorer le processus d'élaboration des règles qui influent sur la vie et les intérêts des Canadiens. La réforme du processus effectuée selon les valeurs et les principes d'une réglementation intelligente renforcera la confiance qu'a le public dans le système réglementaire canadien et permettra aux citoyens et aux entreprises d'en retirer les avantages. Le processus réglementaire est à la base de toutes les activités d'un gouvernement moderne. Élaborer une politique réglementaire, mettre en application les lois à caractère réglementaire, veiller au respect des lois par le public et évaluer l'efficacité des mesures de réglementation, toutes ces fonctions font partie des rôles premiers du gouvernement dans sa poursuite de l'intérêt public. Le Comité a élaboré un ensemble de recommandations qui, selon lui, rendent compte de l'interdépendance de toutes les composantes du système réglementaire. Améliorer une seule partie d'un système risque de dégrader plutôt que d'accroître la performance générale du système. Comme dans tous les régimes, l'amélioration du système repose sur la notion d'équilibre. Il est inévitable que la conception et l'application du processus réglementaire reflètent des objectifs et des intérêts contradictoires. Il importe, d'une part, que les décisions soient prises en temps opportun et que les coûts du processus soient raisonnables, et d'autre part, que les parties concernées soient consultées et que l'analyse soit rigoureuse. Un rôle accru du public et du Parlement est souhaitable, mais le processus devrait éviter que l'accroissement de leur rôle entraîne des délais et ralentisse la résolution d'importantes questions d'intérêt général. La souplesse est un autre attribut souhaitable, mais la prévisibilité et l'équité le sont également. Le Comité propose des mécanismes qui permettent d'établir un juste équilibre entre ces objectifs contradictoires, équilibre qui est essentiel à la concrétisation d'un processus de réglementation intelligente. 3.6.1 Principaux enjeuxLe Comité a entendu les commentaires suivants au sujet du processus réglementaire :
3.6.2 Cadres stratégique et juridique des activités réglementairesPolitique de réglementation intelligente La principale politique gouvernementale en matière de réglementation est la Politique fédérale de réglementation, dont la première version a été conçue en 1986, à une époque où la réglementation connaissait une croissance à tous les niveaux. Cette politique est surtout axée sur l'élaboration et l'approbation de règlements (législation déléguée). Elle ne s'applique pas à l'élaboration des lois (qui est régie par la Directive du Cabinet sur l'activité législative) ni aux autres phases du cycle de vie des mesures réglementaires, par exemple l'évaluation et l'abolition de programmes réglementaires. De plus, dans le système fédéral de gestion de la réglementation, les fonctionnaires qui élaborent et évaluent des options politiques pour leur ministre doivent consulter une multitude d'énoncés de politiques pour y trouver les directives à suivre. Le Comité croit qu'une approche intelligente pour le système de gestion de la réglementation consisterait à relier les différentes composantes du système entre elles et à les intégrer au sein d'une politique commune régissant l'ensemble des modes d'intervention gouvernementale. De plus, une nouvelle politique réglementaire, plus apte à réagir aux changements, donnerait clairement le signal que la priorité est donnée aux principes de la réglementation intelligente et insufflerait un nouveau souffle et une nouvelle direction au système de gestion de la réglementation. Le gouvernement devrait adopter une nouvelle politique fédérale de réglementation qui s'appliquerait d'une manière générale à toute la législation, qu'il s'agisse de lois ou de règlements (voir l'annexe III, Projet de politique de réglementation intelligente pour le Canada). Certains instruments de nature quasi législative devraient être soumis à de meilleurs contrôles lorsqu'ils ont une incidence importante sur les parties réglementées. Par ailleurs, on devrait évaluer, sous l'angle des objectifs d'une réglementation intelligente, les positions de négociation à adopter pour les traités, les conventions, les accords internationaux et les normes internationales qui obligeront le Canada à prendre des mesures réglementaires. Le Comité reconnaît qu'on assujettirait ainsi la définition des positions de négociation à de nouvelles exigences, mais les accords internationaux jouent un rôle tel dans la forme et le contenu des règlements qu'il faut prêter une attention accrue aux conséquences et impacts possibles des positions de négociation. La nouvelle politique devrait aussi inclure l'obligation de fournir une explication claire quant à la notion « d'intérêt public » lors des interventions réglementaires. Le but ultime de la réglementation intelligente est de bien servir l'intérêt public et, par conséquent, une justification en ce sens devrait être un élément clé de toute décision réglementaire importante. Un cadre de travail unique qui encouragerait les organismes de réglementation à expliquer les considérations liées à l'intérêt public qui sous-tendent leurs décisions contribuerait à une meilleure compréhension et à une confiance accrue du part du public à l'endroit des activités de réglementation. L'annexe II du rapport en propose un modèle. Le Comité croit aussi que la notion de proportionnalité en matière d'exigences procédurales est un élément essentiel du succès d'un nouveau cadre stratégique. Actuellement, la Politique de réglementation et les exigences procédurales qui en découlent s'appliquent généralement à tous les règlements (voir le diagramme à la dernière page de la présente section qui illustre le processus réglementaire actuel). La politique et les exigences ne tiennent pas compte des niveaux de risque qui entrent en jeu, des impacts économiques ou sociaux des projets, de l'étendue de la consultation nécessaire ou du niveau de controverse entourant les projets. Dans le système actuel, les ressources ne sont pas utilisées de façon aussi « intelligente » qu'elles pourraient l'être. Il en résulte que des projets sans impact ou de peu d'importance sont soumis à des exigences analytiques beaucoup trop complexes, tandis que des projets ayant d'importantes répercussions sur les parties concernées font l'objet d'une analyse insuffisante. Selon les principes de la réglementation intelligente, les exigences du processus devraient être proportionnelles à l'impact prévu du règlement, ce qui permettrait au gouvernement et aux parties concernées qui souhaitent participer aux décisions en matière de réglementation de cibler leurs ressources en conséquence. Il s'agit de trouver le juste équilibre entre d'une part les risques que le règlement prévoit contrôler, ou l'impact du règlement, et d'autre part le temps et les ressources que le gouvernement et les parties concernées consacrent au processus réglementaire. L'application des exigences prévues par la Politique fédérale de réglementation devrait être ciblée, c'est-à-dire que l'analyse, les consultations ou la prépublication de projets de règlement devraient varier ou être modulée en fonction des impacts, des niveaux de risque des projets, du niveau de controverse les entourant, ainsi que du besoin d'information des parties concernées. Le Comité reconnaît que le Bureau du Conseil privé et les ministères travaillent déjà ensemble à faire en sorte que le niveau d'effort et d'analyse qui est requis pour les projets de règlements soit proportionnel à leur portée et à leur impact. Par exemple, le Guide de l'analyse avantages-coûts pour les programmes réglementaires classe les projets de réglementation d'après leur coût et le degré d'acceptation par le public. De la même façon, un Test de l'impact sur les entreprises est exigé pour les projets de réglementation « importants ». Cependant, le Comité croit que le ciblage devrait viser davantage d'exigences procédurales. Par ailleurs, le Comité croit que des « niveaux » et des critères plus clairement définis amélioreraient le système. Il sera particulièrement important de rationaliser le processus pour les règlements dont l'impact est négligeable ou qui portent sur des domaines présentant un faible risque, encore que le processus ainsi rationalisé doive demeurer transparent et favoriser l'imputabilité. Parallèlement, les règlements « importants » et « très importants » doivent être definis et traités comme tels en ce qui concerne leur élaboration et le processus qu'ils doivent suivre. Des lignes directrices définissant « moins important », « important » et « très important » devront être élaborées, à l'aide de critères tels que le niveau de risque, le coût prévu pour les entreprises, l'incidence sur les citoyens, les répercussions sur l'économie, la concurrence, le commerce, les investissements, l'innovation, l'emploi ou la durabilité, le degré de controverse et d'incertitude concernant le risque ou les méthodes de réduction du risque. D'autres pays, comme les États-Unis et la Corée, utilisent déjà des critères tels que les incidences des projets sur la concurrence, l'emploi, l'investissement, la productivité et l'innovation. Le Comité croit aussi que l'importance stratégique de règlements « très importants » devrait être reconnue et qu'ils devraient être soumis à un processus réglementaire comparable à celui qui est suivi pour l'élaboration des projets de loi . Dans ce cas, le comité du Cabinet compétent approuve la politique législative et les directives de rédaction. Les règlements « très importants » ne sont pas fréquents, mais le Comité croit qu'une véritable intervention politique est indiquée pour ces règlements dont la substance, à une autre époque, se serait probablement retrouvée dans la loi.
Législation intelligente Toute mesure de réglementation repose sur une loi. Or, les lois peuvent contenir des obstacles à l'application des principes de réglementation intelligente. Le gouvernement devrait cerner ces obstacles et étudier divers moyens de les éliminer de façon à ce que le Canada dispose d'une législation moderne, souple et efficace lui permettant d'atteindre ses objectifs en matière de réglementation intelligente.
L'un des obstacles à la réglementation intelligente vient de la confusion entourant la portée de la Loi sur les textes réglementaires. Le gouvernement devrait adopter une loi qui en clarifierait la portée afin de dissiper toute confusion à cet égard et de réduire les ressources et le temps consacrés à cette question. Comme il est expliqué à la section 3.5, il existe d'autres obstacles à la réglementation intelligente, notamment les contraintes auxquelles les ministères et agences font face lorsqu'ils envisagent d'utiliser des instruments non législatifs ou des règlements axés sur le rendement. Le Comité a déjà suggéré dans cette section d'éliminer ces obstacles par voie législative. Les lois et règlements devraient être clairement rédigés et être accessibles. À cette fin, le gouvernement devrait s'assurer que les fonctionnaires qui préparent les textes législatifs, y compris les chargés de projet, reçoivent une formation adéquate quant à la conception et à la rédaction de textes législatifs et documents connexes qui soient clairs. Plus le libellé des textes législatifs sera clair, plus on accroîtra la transparence et la conformité et plus les parties réglementées et le gouvernement épargneront de temps et d'argent. Les lois et règlements devraient aussi être rédigés de manière à favoriser l'emploi de techniques de réglementation modernes, comme l'incorporation par renvoi de normes établies par des organismes non gouvernementaux ou internationaux, ou encore d'autres gouvernements, avec leurs modifications successives. La technique de l'incorporation par renvoi permet d'avoir une réglementation à jour, surtout dans les domaines où les normes techniques changent souvent, et d'harmoniser les normes canadiennes avec les normes établies par d'autres instances. Le gouvernement devrait se doter d'une politique claire en ce qui a trait à l'incorporation par renvoi dans la réglementation canadienne de normes et de codes établis par d'autres autorités, avec leurs modifications successives, et confirmer par voie législative la légalité de cette technique.
3.6.3 Nouvelles approches réglementairesLe Comité croit qu'il faudrait améliorer le cadre initial d'élaboration de la réglementation et qu'il faudrait tenir compte de certains facteurs au tout début du processus d'analyse et de planification. Tel qu'il est expliqué ci-dessous, les analyses de politiques fondées sur les risques, les plans de mesure du rendement et les plans de conformité favorisent la réflexion sur la réglementation. En ce sens, ils peuvent tous être considérés comme des outils permettant d'améliorer le processus d'élaboration de la réglementation. La réglementation fondée sur l'analyse des risques Le Comité suggère une révision importante des exigences analytiques et d'information applicables aux projets d'intervention réglementaire, qu'il s'agisse de projets de loi ou de règlements « importants » ou « très importants », et recommande que tous les projets soient axés sur le concept de la gestion du risque. Le principe de l'examen des risques élargirait et complèterait les exigences analytiques existantes (qui se fondent principalement sur l'analyse économique des coûts et des avantages) pour fournir aux décideurs l'information dont le Comité pense qu'ils ont besoin. L'analyse de politiques fondée sur les risques, telle que recommandée, devrait fournir, pour chaque projet de réglementation, des projections explicites, et quantifiables de préférence, des avantages du point de vue de la réduction des risques et des retombées économiques (en précisant clairement le degré d'incertitude), en particulier :
Les analyses préliminaires axées sur les risques et les analyses des autres incidences (y compris les coûts de conformité, l'incidence prévue sur la dynamique de la concurrence, la capacité d'investir dans l'innovation et d'autres conséquences dynamiques) peuvent constituer un fondement utile au processus de consultation. Des analyses secondaires pourront avoir lieu compte tenu des connaissances acquises lors du processus de consultation. Le Comité reconnaît que l'analyse des risques n'est pas uniquement un processus mathématique, mais qu'elle fait appel à la faculté de jugement. Il est en outre conscient qu'une approche axée sur les risques en matière d'élaboration des politiques réglementaires implique une plus grande clarté et une plus grande transparence en ce qui concerne les hypothèses, les limites de nos connaissances, les incertitudes inhérentes à l'élaboration de la politique gouvernementale et les contraintes exercées sur notre capacité de préparer l'avenir. Cependant, le Comité estime qu'en adoptant une discipline qui met l'accent sur le pourquoi et le comment de l'évolution des risques et sur les moyens par lesquels l'action gouvernementale peut influer sur l'évolution des risques, on améliorera la transparence, la communication et l'imputabilité de la gestion du processus réglementaire. De l'avis du Comité, cette façon de procéder fournira aux décideurs le type de renseignements dont ils ont besoin pour prendre des décisions judicieuses dans l'intérêt public - des décisions qui se traduiront par une amélioration des résultats de l'intervention réglementaire et de la performance économique. Or, toutes ces caractéristiques sont justement celles d'une « réglementation intelligente ».
Meilleure planification de la mesure du rendement La mesure du rendement est essentielle à la mise en oeuvre d'une stratégie de réglementation intelligente. Les responsables de la réglementation devraient annoncer dès le début d'un processus réglementaire, quels sont les résultats qu'ils souhaitent obtenir, de quelle façon et à quelle fréquence ils entendent en rendre compte. Ils doivent démontrer les progrès accomplis au regard de l'atteinte de ces résultats et rectifier le tir, le cas échéant. Il est essentiel de démontrer le rendement des mesures adoptées pour maintenir la confiance du public. La recommandation relative à la mesure du rendement vise à améliorer le cadre initial d'évaluation du rendement réglementaire, de sorte que le gouvernement et les parties concernées soient mieux informés des objectifs de la réglementation. Elle vise par ailleurs à assurer que les objectifs soient mesurés de façon plus précise et qu'on puisse continuellement améliorer la législation et les programmes réglementaires, ce qui est tout aussi important. La recommandation relative à la mesure du rendement est intimement liée à la recommandation 28 sur l'analyse des politiques axées sur les risques, de même qu'à la recommandation 36 concernant l'évaluation de la réglementation actuelle. Le Comité recommande que les projets de loi à caractère réglementaire et les règlements «importants » et « très importants » soient accompagnés d'un plan de mesure du rendement public prévoyant une réduction des risques mesurables, des mesures du rendement, des exigences en matière de collecte des données, une stratégie de contrôle permanent du rendement et une ébauche de programme d'évaluation. Ces plans pourraient être utilisés pour toute évaluation future de la législation et des programmes.
Plus d'attention à la conformité et à la mise en application La crédibilité de la loi et la confiance des citoyens diminuent quand le gouvernement adopte des lois qui ne peuvent être mises en application. Des évaluations réalistes doivent être faites sur le potentiel de mise en application de nouvelles lois et les effets de leur mise en application sur les lois existantes, selon les ressources disponibles. La Politique de réglementation fédérale exige déjà que les organismes de réglementation présente dès l'élaboration des projets réglementaires leurs politiques de conformité et de mise en application. Mais les résumés d'études d'impact de la réglementation préparés par les ministères relativement aux projets de réglementation manquent souvent de détails sur les stratégies de conformité et de mise en application, surtout quant aux ressources qui seront dévolues au programme. La mise en oeuvre, la conformité et le contrôle d'application doivent recevoir plus d'attention au début de l'élaboration des politiques de manière à générer une réglementation intelligente. Pour ce faire, le Comité recommande que chaque projet de règlement « important » et « très important » soit accompagné d'un plan de conformité décrivant les mécanismes de conformité et de contrôle d'application qu'il est prévu de mettre en place, y compris les nouveaux types de sanctions qu'il est prévu d'utiliser. Le plan de conformité devrait souligner les exigences du nouveau programme réglementaire, en termes de ressources, et les impacts de ces exigences sur les programmes existants.
La conformité devrait être basée sur une approche de gestion du risque. Puisque le gouvernement n'a pas les ressources pour inspecter ou mettre en application tous les règlements, une relation de confiance devrait se bâtir entre le gouvernement, les citoyens et les entreprises, relation qui pourrait permettre, par exemple, d'offrir des incitatifs aux entreprises et aux citoyens qui se conforment volontairement. Les sanctions devraient aussi être suffisamment sévères pour empêcher, notamment, que la nonconformité devienne plus rentable que la conformité. De plus, le Comité croit que la conformité serait améliorée si les fonctionnaires avaient un choix plus vaste de réponses possibles à la non-conformité; ils pourraient ainsi élaborer une « pyramide d'exécution » qui leur fournirait des réponses plus rigoureuses au fur et à mesure que la nonconformité devient plus grave. Les lois devraient plus souvent inclure des mesures de redressement, comme les mesures de rechange prévues à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999), ou la Loi sur les espèces en péril. Le gouvernement pourrait aussi déposer un projet de loi qui donnerait plus de souplesse à tous les ministères lorsqu'ils élaborent les stratégies de conformité, en autorisant une gamme d'outils de conformité et de contrôle d'application, y compris des modes alternatifs de poursuites réglementaires, qui pourraient être utilisés par tous les ministères. Une telle loi permettrait à tous les ministères de profiter de nouveautés administratives, de solutions de rechange au titre de la conformité et de pénalités additionnelles ou de rechange (sanctions administratives pécuniaires, mesures correctives volontaires ou obligatoires, suspension ou révocation de permis, règlement des différends, etc.) au fur et à mesure qu'elles évoluent, que ces outils soient ou non expressément prévus dans les lois qu'ils administrent. Les questions de conformité et d'application méritent une attention plus importante que celle que le Comité a pu leur accorder, compte tenu de son mandat. D'ailleurs, le Comité suggère au gouvernement de poursuivre le travail et d'entreprendre des analyses plus poussées sur ce qui pourrait être amélioré.
3.6.4 Transparence et consultationLe Comité estime que la transparence est un élément clé pour un environnement de réglementation intelligente. La transparence doit être portée à son maximum, tant au sein du gouvernement que dans l'industrie, pour favoriser l'apprentissage et l'échange d'information et pour bâtir la confiance du public à l'égard de l'intégrité du système. Les recommandations suivantes complètent celles faites ailleurs dans ce rapport afin d'accroître les niveaux de transparence du système réglementaire. La consultation en tant que dialogue d'apprentissage L'OCDE et d'autres commentateurs ont reconnu le rendement élevé du Canada en matière de consultation sur les questions de réglementation. La consultation fait maintenant partie intégrante de la culture réglementaire canadienne et a considérablement modifié la façon de procéder du gouvernement au cours des 25 dernières années. Pourtant, le Comité a souvent entendu des cas d'insatisfaction à ce sujet. Ainsi, on s'est plaint du fait que la consultation a lieu trop tard dans le processus d'élaboration des politiques, que les efforts de consultation du gouvernement ne sont pas coordonnés, et que certaines parties sont désavantagées lorsqu'il s'agit de faire face aux exigences de la consultation. On a aussi soulevé le fait que certains intervenants considèrent le processus de consultation comme un processus contradictoire, ce qui n'est pas propice à la résolution des problèmes. Le gouvernement doit améliorer sa capacité d'aborder la consultation comme un dialogue et faciliter l'apprentissage collectif en ce qui concerne les risques, les options en matière d'instruments, les stratégies de conformité efficaces et les incidences possibles de l'intervention réglementaire. Le gouvernement devrait adopter un cadre précis pour tous les processus de consultation. Ce cadre devrait comprendre les objectifs de la consultation, le type de commentaires qu'il souhaite obtenir et par quels moyens, ainsi qu'un calendrier de consultation. Un tel document devrait comporter des règles claires d'engagement pour les parties intéressées et les aider à décider si elles participeront et, le cas échéant, de quelle manière. Afin de faciliter l'engagement des citoyens, le Comité croit que le public devrait avoir toute l'information pertinente dont il a besoin au cours du processus de consultation, notamment les motifs à l'appui des décisions, l'information technique ou scientifique, les résultats d'analyses, les coûts et avantages, les options envisagées, l'évaluation des risques, les effets et les conséquences potentiels et les autres solutions étudiées. Le public a besoin de savoir sur quels problèmes se penche le gouvernement et ce qui le pousse à y chercher des solutions. Pourtant, il arrive souvent que les parties intéressées n'aient pas accès à cette information sous prétexte qu'elle est sous la protection de la confidentialité du Cabinet. Le Comité reconnaît que la confidentialité du Cabinet est un volet essentiel du système de gouvernement responsable du Canada. Toutefois, l'étendue du secret accordé aux documents confidentiels du Cabinet est limitée à l'information qui fait partie du conseil donné à un ministre ou à tout autre document énuméré à l'article 69 de la Loi sur l'accès à l'information. Le gouvernement devrait élaborer des principes directeurs rigoureux définissant l'information qui peut être divulguée dans le contexte d'une consultation et celle qui doit être protégée à titre de document confidentiel du Cabinet. L'un des objectifs des consultations publiques relatives à des questions de réglementation consiste à s'assurer que les autorités de réglementation ont un éventail de perspectives et d'idées à considérer. À cet effet, les organisations de consommateurs demeurent sous-représentées dans les processus de consultation et ne possèdent pas les ressources nécessaires pour effectuer de la recherche et développer l'expertise appropriée pour contribuer aux consultations relatives à des questions réglementaires. On pourrait, par exemple, leur accorder une aide financière sélective pour qu'elles améliorent leur capacité de dialogue constructif. Afin de s'assurer que l'aide financière aux participants ne fausse pas le niveau d'intérêt suscité par une proposition en créant un incitatif financier à l'intervention, l'allocation de fonds devrait être conditionnelle à l'exécution d'une recherche et d'une analyse de qualité. De plus, les critères quant à l'admissibilité et au montant maximal disponible devraient être clairement énoncés. Comme solution à court terme, des fonds supplémentaires pourraient être ajoutés au Programme des contributions pour les organismes sans but lucratif et les bénévoles d'Industrie Canada, lequel jouissait d'un montant de 1,69 million $ en 2003-2004. Les sommes additionnelles pourraient être attribuées directement à des projets relatifs à des questions de réglementation ayant des répercussions importantes sur les consommateurs. Un des modèles de financement des participants intéressant est celui du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Selon ce modèle, le Conseil peut rembourser une partie ou toutes les dépenses d'un intervenant prenant part à une cause concernant les télécommunications. Le CRTC peut autoriser le remboursement de ces frais lorsque les intervenants représentent un groupe de consommateurs qui sont touchés par les résultats de la cause; qu'ils y ont participé de façon responsable; et qu'ils ont contribué à une meilleure compréhension des questions à l'étude. Il n'existe pas de fonds comme tel; ce sont plutôt les compagnies de télécommunications concernées qui dédommagent les intervenants. Le CRTC fixe le montant maximal des dédommagements, désigne les compagnies de télécommunications responsables de même que le montant (ou pourcentage) que chacune doit verser. Comme les citoyens s'attendent de plus en plus à être entendus et à participer au processus d'élaboration de politiques, le gouvernement devra trouver de nouvelles techniques de consultations et des façons innovatrices pour rehausser, en nombre et en qualité, la participation des citoyens. Le Comité reconnaît qu'il s'agit la d'un défi important et difficile - un défi qu'affrontent tous les gouvernements de sociétés pluralistes. Le gouvernement devra se pencher sur cette question d'importance qui fait désormais partie du développement de politiques. Dans ce domaine, il nous sera nécessaire de tenter des expériences et d'apprendre. Il serait enfin sage de surveiller les expériences en cours dans d'autres organisations (p. ex. Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques), d'autres gouvernements (p. ex. gouvernement de l'Ontario) ou d'autres pays.
Exploiter les possibilités du cybergouvernement Le cybergouvernement est, de l'avis du Comité, un outil fort utile pour faire participer les citoyens à la vie publique, puisqu'il permet la communication, la consultation et la collaboration et parce qu'il met à leur disposition un guichet unique pour l'accès aux programmes réglementaires du gouvernement. Par la suite, cette approche pourrait être étendue au-delà du gouvernement fédéral aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Le Comité recommande que le gouvernement crée une passerelle Internet de la réglementation intelligente qui permettrait au public d'avoir plus facilement accès à l'information par secteur, par sujet ou par ministère. Cette passerelle devrait fournir des renseignements sur les consultations en cours et comporter des liens menant aux sites Web des ministères concernés. Elle pourrait servir à promouvoir la coordination des activités de consultation de différents ministères sur divers projets de réglementation touchant des secteurs ou des groupes particuliers. Les sites Web des ministères devraient fournir de l'information sur les programmes réglementaires, les politiques de conformité et les analyses d'impacts, ainsi que les documents de base sous-tendant les analyses. De plus, tous les ministères et organismes devraient publier sur leur site Web un programme réglementaire virtuel annuel qui contiendrait des renseignements comme des préavis concernant leur intention d'élaborer des projets de règlement, le détail des processus de consultation en cours ou à venir et leurs calendriers, les examens législatifs en cours, les plans d'évaluation et les plans de mesure du rendement. Le programme contiendrait en outre les plans et calendriers relatifs aux projets d'élaboration de lois et de règlements « très importants » et « importants ».
3.6.5 Rapidité et efficacitéLa rapidité et l'efficacité sont des principes clés de la réglementation intelligente. Les organismes de réglementation doivent tout faire pour que l'élaboration de la réglementation et l'application de programmes de réglementation reflètent la vitesse à laquelle les nouvelles entreprises travaillent et le savoir nouveau se développe. Tout au long de l'exécution de son mandat, le Comité a pris connaissance d'un grand nombre de plaintes concernant des délais déraisonnables et inexpliqués dans la prise de décisions de la part des organismes de réglementation. Le Comité comprend très bien que, dans notre monde en perpétuel bouillonnement, les organismes de réglementation doivent souvent prendre des décisions difficiles basées sur de l'information incomplète et parfois contradictoires. Dans ces circonstances, il est dans l'intérêt public de prendre le temps de mener une analyse plus poussée. Afin de maintenir la crédibilité et la confiance du public dans le système de réglementation, les organismes de réglementation se doivent d'être transparents. Ils devraient expliquer clairement les raisons pour lesquelles ils ont besoin de plus de temps pour rendre leurs décisions. On saurait ainsi que le retard dans la prise de décisions n'est pas causé par une mauvaise gestion des programmes ou l'absence de normes de service, mais bien par la complexité des questions que les organismes de réglementation examinent en vue de prendre la meilleure décision possible.
Accélérer l'élaboration des règlements En général, on s'accorde pour dire que le processus réglementaire doit être rationalisé. La rationalisation est étroitement liée à la recommandation 26, qui concerne le ciblage ou la modulation des exigences de la Politique fédérale de réglementation. Tel qu'il est expliqué précédemment, l'un des moyens de rationaliser le processus est de réduire les exigences procédurales pour les règlements « moins importants ». Une autre méthode consiste à transférer, du gouverneur en conseil au ministre responsable, le pouvoir de faire des règlements de nature plutôt administrative et certains règlements « moins importants ». Ce transfert donnerait aux ministères et aux ministres davantage de flexibilité dans l'accomplissement de leurs activités et allégerait le processus réglementaire de questions qui devraient être réglées au niveau administratif. La transparence et l'imputabilité devraient cependant être préservées, en accord avec les principes de la réglementation intelligente. Pour rationaliser davantage le processus d'élaboration des règlements, le gouvernement devrait envisager des dispenses générales de prépublication dans la Gazette du Canada, partie I, notamment lorsque les normes établies en matière de consultation sont respectées. Ces normes devront être élaborées, mais elles pourraient porter sur des aspects tels que la capacité d'identifier et de faire intervenir les parties concernées, la participation continue des parties concernées à la réglementation au moyen de groupes consultatifs et de mécanismes officiels de consultation, ainsi que la qualité et l'accessibilité de l'information. Cependant, lorsque des lois internes ou des accords internationaux comportent des exigences de publication préalable, les règlements pris en vertu de ces lois ou de ces accords devraient continuer d'être prépubliés. Le gouvernement pourrait aussi envisager de rationaliser le processus de prépublication en donnant aux ministres, plutôt qu'au Cabinet, le pouvoir d'autoriser la prépublication dans la Gazette du Canada, partie I.
La planification et la gestion de projets devraient être soumises à une discipline lorsque les projets en cause sont « importants » ou « très importants ». Le Comité croit qu'en précisant les objectifs à atteindre, en établissant des échéanciers et en élaborant des normes de performance pour certaines parties du processus de gestion de la réglementation, par exemple les approbations intraministérielles, on accélérerait le processus d'élaboration des règlements, on améliorerait le service au public, on augmenterait la transparence des fonctions de gouvernance et on favoriserait l'imputabilité en ce qui a trait à la performance du processus de gestion de la réglementation.
Efficacité et rapidité dans l'application des programmes réglementaires Le Comité estime qu'il importe, lors de la conception et la mise en oeuvre des règlements et des programmes réglementaires, d'être très attentifs aux préoccupations des parties concernées en ce qui a trait à l'efficacité, la prévisibilité et la rapidité de la prestation des services gouvernementaux. Le Comité a entendu de nombreuses compagnies qui ont tenté de faire approuver un produit par le gouvernement se plaindre des délais de traitement de leur demande et du manque de transparence et de prévisibilité entourant le processus d'approbation. Par exemple, une petite entreprise a attendu plus d'un an qu'un ministère fédéral finisse de traiter une demande d'homologation d'un nouveau produit qui avait été approuvé en seulement trois mois aux États-Unis. La charge de travail et les autres priorités figuraient au nombre des raisons fournies par le ministère, mais le seul recours dont disposait l'entreprise fut d'écrire au ministre et de demander l'aide du député. Le Comité se préoccupe du fait que de tels retards dans la prestation de services gouvernementaux puissent empêcher les consommateurs d'avoir accès à des produits innovateurs, occasionner des pertes financières considérables aux entreprises et, dans certains cas, compromettre leur position sur le marché. Devant des cas comme celui-là, on pourrait demander aux ministères et aux organismes chargés d'approuver des produits d'élaborer des normes de service en ce qui a trait aux programmes réglementaires, en particulier lorsqu'il s'agit d'accorder des approbations, des licences, des permis ou d'autres types d'autorisations réglementaires.
Le Parlement a récemment reconnu, par l'adoption de la Loi concernant les frais d'utilisation (projet de loi C-212), l'importance des normes de service dans le maintien de la qualité des services, en particulier dans un contexte où des frais d'utilisation sont exigés pour ces services. Ce projet de loi établit les exigences à suivre par les organismes de réglementation lorsqu'ils établissent ou augmentent les frais d'utilisation des services. Ils sont notamment tenus « [d']établir pour l'évaluation du rendement de l'organisme de réglementation des normes comparables à celles des principaux partenaires commerciaux du Canada » en ce qui a trait aux services pour lesquels des frais sont exigés. Le Comité est d'accord avec l'idée d'établir des normes de service et considère que cellesci devraient être appliquées largement. Ce principe est fortement appuyé par des intervenants de l'industrie car, disent-ils, il n'y a souvent aucun échéancier précis pour le processus d'évaluation réglementaire ou, s'il y en a, ils ne sont pas respectés par toutes les parties. Le Comité a notamment appris que les échéances relatives aux processus d'évaluation environnementale stipulées dans la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ne sont pas toujours respectées par les parties concernées. Le gouvernement devrait également explorer d'autres moyens d'accélérer la prestation des services gouvernementaux aux parties concernées. Une idée serait d'inverser la situation de telle sorte qu'une demande serait réputée approuvée et que le produit pourrait être commercialisé lorsque le gouvernement n'a pas répondu dans un délai donné; une autre serait d'exiger des ministères qu'ils fournissent des explications motivées en cas de non-respect des normes de service. La rapidité du service resterait ainsi au premier plan des préoccupations du gouvernement. À titre d'exemple, c'est essentiellement la manière dont fonctionne le processus de déclaration des substances nouvelles dans le cadre de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999). Comme il est proposé dans la recommandation 33, le gouvernement devrait utiliser le cybergouvernement pour offrir un guichet unique donnant accès aux divers programmes réglementaires. Ce faisant, il aiderait à améliorer et à coordonner la prestation des services gouvernementaux.
3.6.6 Imputabilité, rendement et surveillanceL'imputabilité et la démonstration du rendement des programmes réglementaires sont essentielles au maintien de la confiance du public. Le Comité a déjà suggéré dans la recommandation 29 que le gouvernement améliore les mécanismes d'évaluation du rendement de la réglementation en s'assurant que les règlements « importants » et « très importants », ainsi que les projets de loi à caractère réglementaire, soient accompagnés d'un plan de mesure du rendement mis à la disposition du public. Cette recommandation ne s'appliquerait qu'aux nouveaux projets de réglementation. Les recommandations ci-dessous traitent plutôt de la revue du rendement de la réglementation existante, de la surveillance du rendement du processus réglementaire et de la surveillance de la mise en place de la stratégie de réglementation intelligente. Examen de la réglementation en place Le Comité pense que le gouvernement devrait accorder une plus grande priorité à la mise à jour et à la modernisation de la réglementation en place. Il faut veiller plus attentivement à ce que l'imposante réglementation n'empêche pas le Canada d'être un pays innovateur et concurrentiel, doté d'une réglementation moderne qui soit protectrice, à jour, souple et adaptée aux besoins. Un système de réglementation intelligente devrait pouvoir se renouveler et être amélioré constamment. Une approche basée sur l'apprentissage continu devrait y être intégrée. Tous les ministères ou organismes gouvernementaux pourraient par exemple préparer un plan annuel qui indiquerait les évaluations à achever au cours des années ultérieures. Chaque plan devrait être associé aux plans de mesure du rendement du programme ou de la législation faisant l'objet d'une évaluation. La priorité devrait être accordée aux domaines où les risques sont plus élevés, à ceux où l'évolution scientifique ou technologique est rapide, et à ceux à l'égard desquels prévalait un degré d'incertitude considérable au moment de l'élaboration du programme ou de la mesure législative, par exemple lorsqu'on a fait appel au principe de précaution. Le public pourrait également être invité à suggérer des domaines de réglementation qui devraient faire l'objet d'un examen prioritaire. Une autre possibilité serait de créer des équipes d'intervention spéciale dont les membres proviendraient de diverses parties intéressées, notamment de l'industrie, de gouvernements provinciaux et territoriaux, d'organisations autochtones, d'organisations non gouvernementales et autres. On leur demanderait d'identifier, dans un délai précis, les questions réglementaires à examiner et de proposer des solutions.
Surveillance du rendement du processus réglementaire Le Comité estime finalement qu'il faudra absolument accorder une attention soutenue à la performance du processus réglementaire pour assurer le succès de la stratégie de réglementation intelligente. Le gouvernement doit évaluer le fonctionnement de son système de gestion de la réglementation afin de déterminer si la qualité s'améliore avec le temps et si des changements s'imposent en cours de route. Le gouvernement devrait définir des critères et des indicateurs de rendement afin de surveiller, d'évaluer, de faire rapport et d'apporter les modifications nécessaires, de telle sorte que le processus favorise les principes et les objectifs de la réglementation intelligente.
A) Rôle de remise en question du BCP Au cours des consultations, les ministères fédéraux et les parties concernées externes ont souligné la nécessité d'appliquer la Politique de réglementation avec davantage de rigueur et de constance et, pour les agences centrales, d'exercer un plus grand leadership. Le Comité est d'avis que le Bureau du Conseil privé doit renforcer son rôle de remise en question, surtout si le gouvernement adopte une nouvelle politique de réglementation. Le leadership du BCP sera alors crucial pour l'adoption de la réglementation intelligente partout au gouvernement. Le BCP doit s'assurer que les ministères respectent la Politique de réglementation. À l'heure actuelle, il n'exerce sa fonction de remise en question qu'à la fin du processus d'élaboration d'une politique lorsqu'un nouveau règlement est élaboré. Il est important que le BCP et les autres agences centrales comme le Conseil du Trésor exercent les fonctions de remise en question et de surveillance de la gestion tout au long du cycle des politiques, c'est-à-dire de l'élaboration jusqu'à l'application. En tant qu'agence responsable de la politique, le BCP doit en surveiller la pertinence et veiller à ce qu'y soit continuellement apportées les modifications nécessaires. Il devrait donc jouer un rôle de premier plan dans l'élaboration et la mise en oeuvre des programmes de recherche et d'élaboration des politiques (voir la section 3.7, « Capacités gouvernementales »). Récemment, du travail a été effectué dans les domaines de la consultation et de l'évaluation du rendement. Les autres domaines d'intérêt sont la modulation du processus de soumission, les plans d'analyse de politiques fondées sur les risques et les plans de conformité. Enfin, le BCP devrait devenir un centre d'expertise de la réglementation et fournir des conseils et un appui aux ministères au chapitre de la mise en oeuvre des pratiques de la réglementation intelligente. Le BCP devrait travailler avec les responsables de la réglementation pour la création d'un programme de réglementation pangouvernemental qui viendrait appuyer les priorités du gouvernement. La mise en oeuvre des propositions en question nécessiterait toutefois des ressources additionnelles pour le BCP. B) Mécanismes de recours L'un des moyens pour rehausser la transparence et la confiance à l'égard du système de réglementation consiste à améliorer l'accès des parties concernées au gouvernement et de mettre en place des mécanismes qui leur permettraient de remettre en question les décisions des ministères. À l'heure actuelle, très peu de programmes permettent aux parties concernées ou aux citoyens de remettre en question une décision prise par un ministère ou offrent un processus de résolution des différends. Par exemple, lorsqu'une compagnie est en désaccord avec un ministère, lorsqu'un plaignant ne reçoit pas de réponse ou lorsqu'un nouveau règlement tarde à être élaboré, l'organisme de réglementation reste le seul point d'accès pour les parties concernées. La principale voie d'action de ces dernières est de porter la question à l'attention des cadres supérieurs dans l'espoir que ces derniers les aideront ou de demander l'aide de leur député. Cette situation n'assure pas la transparence et peut engendrer un manque de confiance dans le système de réglementation. La plupart du temps, le seul recours possible est le processus judiciaire. Ce processus est approprié pour des questions d'ordre juridique, mais il se révèle long et coûteux alors que parfois le recours à un médiateur pourrait suffire pour régler un différend. Les tribunaux ne sont pas nécessairement le moyen le plus approprié ou efficace pour résoudre des questions de politiques, d'absence de normes de service ou de pratiques de gestion déficientes. Le Comité croit qu'il est nécessaire de rehausser la contestabilité du système réglementaire et de mettre en place des mécanismes de recours appropriés. Ce point a été soulevé par un grand nombre de parties concernées durant les consultations du Comité. Dans son récent rapport intitulé The Competitiveness Impacts of Canada's Agricultural Products Approval Regulations, le Centre George Morris a aussi recommandé que de meilleurs mécanismes de recours soient adoptés. Ci-dessous sont énumérées différentes options pour rehausser la contestabilité du système de réglementation et l'accessibilité des parties concernées et des citoyens au gouvernement. Ces options peuvent être adoptées indépendamment les unes des autres ou en groupe et elles peuvent varier selon le cycle de vie de la réforme de la réglementation. Une tierce partie indépendante comme un groupe d'experts pourrait offrir un mécanisme de révision pour des questions controversées de nature technique, scientifique ou économique. Ce groupe pourrait revoir les présentations des organismes de réglementation et des parties concernées. Habituellement, cette approche est volontaire et les recommandations d'un tel groupe ne sont pas nécessairement exécutoires, selon les questions en cause. On peut trouver un exemple d'un tel mécanisme dans la Loi sur les frais d'utilisation (C-212), qui vient d'être adoptée par le Parlement. Cette loi exige que les organismes de réglementation qui fixent des frais d'utilisation mettent sur pied un groupe consultatif indépendant responsable des plaintes des clients relatives aux frais d'utilisation. L'adoption de cette mesure devrait être surveillée pour en retirer des leçons pertinentes qui pourraient être adoptées pour d'autres questions de réglementation. Une deuxième possibilité serait la nomination d'un ombudsman de la réglementation — au sein des ministères ou pour tout le gouvernement. Les ombudsmans ont généralement des pouvoirs d'investigation et de formulation de recommandations. Au cours des consultations, un grand nombre de parties concernées ont suggéré que le BCP devrait être responsable de la fonction de recours. Le Comité reconnaît qu'il s'agirait d'un nouveau rôle pour une agence centrale, lequel risquerait d'être incompatible avec son rôle traditionnel de remise en question. Le Comité croit que différents modèles devraient être évalués. Il y aurait peut-être lieu que le gouvernement fasse l'essai d'une approche pendant un an préalablement à son adoption. Le mécanisme pourrait comprendre les pouvoirs suivants : médiation, investigation, collecte de données, convocation d'audiences publiques et formulation de recommandations. La transparence et l'accessibilité équitable devraient guider le fonctionnement du mécanisme.
C) Mécanismes de surveillance externes Quelques parties concernées ont suggéré de créer un comité consultatif externe permanent indépendant comme le Better Regulation Taskforce en place au Royaume-Uni. Selon le Comité, la création d'équipes d'intervention spéciale multipartites — une approche de collaboration incluant diverses parties concernées ayant une expérience et des connaissances dans un secteur donné — serait plus efficace à court terme pour poursuivre la lancée de la réglementation intelligente (voir la partie III, « Passer à l'action »). Il croit également qu'il serait peut-être plus efficace de nommer un autre comité consultatif externe dans deux ans pour évaluer les progrès réalisés par le gouvernement dans le dossier de la réglementation intelligente. Le Comité remarque que les comités parlementaires étudient présentement des dispositions législatives, surtout des lois et des règlements. Au cours des dernières années, toutefois, ils ont aussi manifesté de plus en plus d'intérêt pour la réglementation. Beaucoup de parties concernées ont suggéré que les comités parlementaires contribuent et participent à la révision de programmes de réglementation précis. Le gouvernement voudra peut-être étudier cette suggestion. Le Comité constate également que la Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments exige la constitution d'un comité consultatif pour conseiller le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Ce comité veille en quelle sorte à la réalisation de la mission de l'Agence. Les membres du comité ont été nommés pour un mandat de trois ans en 1998; par contre, le comité n'a pas été renouvelé ou remplacé depuis sa dissolution.
3.6.7 Mise en oeuvre d'un système de réglementation intelligenteCertaines des recommandations figurant dans la présente section peuvent être mises en oeuvre assez rapidement sans nécessiter d'importantes réaffectation de ressources. D'autres représentent toutefois un changement important par rapport à la façon dont le gouvernement élabore la réglementation, prend les décisions dans ce domaine, met la réglementation en oeuvre, et évalue ou modernise la réglementation en place. Par exemple, une approche axée sur les risques entraînera un changement radical dans l'orientation de l'analyse des incidences éventuelles de la réglementation. En outre, la modulation des exigences procédurales obligera les fonctionnaires à déterminer le processus applicable à chaque projet de règlement. Des travaux additionnels seront nécessaires pour élaborer les politiques, les lignes directrices, les normes de rendement et les guides de mise en oeuvre indispensables à la mise en place de nombreuses recommandations. La première étape de l'implantation de la réglementation intelligente consistera en l'élaboration d'une stratégie et d'un plan de mise en oeuvre (avec des jalons spécifiques) pour la réforme du processus réglementaire. Le Comité recommande au gouvernement d'adopter une approche réaliste et transparente dans sa réforme du processus en vue de l'implantation de la réglementation intelligente. Le Comité sait que les fonctionnaires et les parties concernées n'ont pas une capacité illimitée de répondre à de nouvelles demandes. Il faut en tenir compte et trouver des moyens d'exploiter la capacité actuelle de façon plus intelligente. En outre, il est important que les nouvelles exigences, notamment en ce qui concerne l'analyse de projets de règlement « importants », n'aillent pas à l'encontre des objectifs de simplification et de réduction du fardeau interne dans d'autres domaines. Au même titre que la réglementation consiste souvent à concilier des intérêts contradictoires, la réforme du processus réglementaire doit tenir compte d'objectifs et d'intérêts contradictoires (rapidité d'intervention et collaboration accrue, meilleure information et analyse plus approfondie). Le Comité sait qu'il n'est pas toujours facile de parvenir à cet équilibre, mais cet objectif lui paraît essentiel si le Canada veut se doter d'un processus qui produira la réglementation intelligente dont il a besoin. PROCESSUS ACTUEL D'ÉLABORATION DES RÈGLEMENTS
3.7 Capacités gouvernementalesLes modifications recommandées par le Comité plaident en faveur d'un changement de culture tant à l'intérieur du gouvernement que de ses ministères de réglementation. Les fonctionnaires ont maintes fois souligné qu'il était nécessaire d'accroître le soutien offert aux responsables de la réglementation. Nombre de représentants de l'industrie et d'organismes non gouvernementaux, qui entretiennent des relations régulières avec les responsables de la réglementation et connaissent bien le contexte dans lequel ils évoluent, ont abondé dans le même sens. Le Comité constate que l'un des éléments clés de l'amélioration du rendement en matière de réglementation réside dans le renforcement des capacités ministérielles. Les responsables de la réglementation font face à des problèmes plus épineux et plus complexes que jamais auparavant. Dans le secteur de la biotechnologie, par exemple, où les enjeux tiennent à la fois de l'éthique, de la restructuration économique et des sciences, les responsables de la réglementation doivent composer avec des problèmes intellectuels délicats et doivent tenir compte des assises philosophiques sous-jacentes aux prises de décisions réglementaires dans une démocratie pluraliste. Ils doivent posséder une compréhension spécialisée à la fois du secteur - du volet scientifique qui le sous-tend jusqu'à l'aspect administratif - et des perspectives socioéconomiques plus vastes qu'exigent de bonnes décisions publiques. Le Comité propose d'apporter des changements importants au système. Il faudra moduler les priorités, affecter des ressources aux différentes tâches, acquérir de nouvelles compétences, développer les aptitudes existantes, mettre en commun pratiques exemplaires et savoir-faire et élaborer de nouveaux mécanismes, des changements qui, vraisemblablement, s'étaleront sur des années. Transformer les modes de réglementation de l'État exigera de la détermination, de l'initiative, des ressources, du temps, des appuis et la reconnaissance sous-jacente de l'importance de la réglementation pour la société canadienne. Ce sujet fait l'objet d'un examen détaillé à la partie III, « Passer à l'action ». Nous mettons ici l'accent sur les capacités gouvernementales, mais le Comité n'ignore pas qu'un système de réglementation intelligente supposera également un renforcement des capacités au sein du secteur privé, des ONG et, enfin, des collectivités autochtones. 3.7.1 Création d'une collectivité de réglementation à la fine pointe du savoir et soutien à l'apprentissagePour le système réglementaire comme pour toute entreprise axée sur le savoir, les ressources humaines représentent l'actif le plus important. Les parties concernées, notamment les représentants de l'industrie, ont insisté tant et plus, devant le Comité, sur l'importance de la qualité et de la compétence du personnel de réglementation au regard de l'efficacité du système réglementaire. On a soulevé, devant le Comité, plusieurs problèmes relatifs aux ressources humaines : le recul de la connaissance et de la compréhension des secteurs industriels chez les fonctionnaires (structure, tendances de la consommation, critères sous-tendant les décisions en matière d'investissement et nouveautés technologiques), et la difficulté d'attirer et de retenir des experts, particulièrement dans le domaine des sciences et des technologies. Par ailleurs, les parties concernées ont maintes fois déploré le manque de prestige des emplois publics associés à la réglementation et les possibilités d'apprentissage limitées offertes aux agents de la réglementation. Enfin, les agents de la réglementation qui sont chargés de la protection du consommateur ou de la santé et de la sécurité ont l'impression de vivre un conflit de valeurs lorsqu'on leur demande de collaborer plus étroitement avec les administrés ou de se montrer sensibles aux impératifs de la croissance économique. Le Comité reconnaît que les fonctionnaires qui oeuvrent au sein des programmes réglementaires sont investis d'une responsabilité importante; leurs décisions sont susceptibles d'avoir une incidence directe sur la santé et la sécurité des gens et de l'environnement, de même que sur la compétitivité de secteurs industriels ou, encore, sur la viabilité d'une entreprise. Ils doivent tenir compte à la fois d'attentes élevées et d'enjeux de plus en plus complexes. Par le passé, les ministères pouvaient compter sur des groupes de spécialistes pour réglementer des activités données (des vétérinaires étaient appelés à prendre les décisions touchant à l'hygiène vétérinaire, des ingénieurs devaient fixer les normes de sécurité automobile, etc.). Aujourd'hui, ces spécialistes ne peuvent plus se contenter d'être à la fine pointe dans leurs sphères de compétence, de plus en plus spécialisées, et de participer et d'accéder à des réseaux d'experts internationaux; ils doivent être dotés d'aptitudes significatives qui dépassent leur champ d'action habituel. Désormais, on exige des fonctionnaires qu'ils soient au fait des règles du commerce international et en mesure d'opérationnaliser des concepts comme le développement durable. Ils doivent également gérer des consultations et des négociations avec des communautés d'intervenants beaucoup plus vastes, plus averties qu'auparavant. La vision et les recommandations que propose le Comité prévoient des rôles nouveaux pour les responsables de la réglementation du XXIe siècle, qui devront nécessairement acquérir de nouvelles compétences. Les membres du Comité voient en l'apprentissage un puissant instrument de changement, un élément qui doit faire partie intégrante d'une stratégie de réglementation intelligente; ils souscrivent à l'objectif de la Politique pour l'apprentissage continu dans la fonction publique du Canada, qui stipule que la fonction publique doit devenir une organisation apprenante « si elle veut accomplir sa mission d'institution nationale à l'ère du savoir, mais aussi conserver la confiance de ceux qu'elle sert ». D'après le Comité, le gouvernement fédéral devrait adopter cette approche pour ce qui touche aux organismes de réglementation et promouvoir la mise en place d'une communauté apprenante pangouvernementale. On a déjà commencé à agir en ce sens. Ces deux dernières années, le Bureau du Conseil privé a mis sur pied des activités d'apprentissage qui ont été fort courues, ce qui témoigne du besoin et de la soif d'apprendre des agents de la réglementation. Le ministère de la Justice a également lancé des initiatives d'apprentissage axées sur les instruments. Le Comité se réjouit de telles démarches et espère que leur renforcement facilitera la mise en oeuvre d'une réglementation intelligente dans tout l'appareil gouvernemental. Le Bureau du Conseil privé a commencé à cerner les principaux éléments d'une stratégie visant à établir dans toute l'administration gouvernementale, une collectivité qui soit à la fine pointe des connaissances dans le secteur de la réglementation, ainsi qu'à instaurer une culture de l'apprentissage continu. Le gouvernement doit poursuivre sur cette lancée et se doter d'une stratégie d'apprentissage. Celle-ci pourrait englober la mise en commun des pratiques exemplaires, la mobilité interministérielle, des cours d'orientation et un système de diffusion des connaissances entre les ministères et agences responsables de la réglementation. Au besoin, les initiatives de renforcement des capacités devraient tenir compte des gouvernements provinciaux et territoriaux, des collectivités autochtones et des autres parties concernées. Bon nombre de provinces et territoires se sont dits intéressés à collaborer avec le gouvernement fédéral pour cerner les besoins en formation et y répondre, ainsi que pour contribuer à maximiser l'utilisation des maigres ressources disponibles. En même temps, le gouvernement fédéral doit avoir accès aux résultats des recherches les plus poussées et les plus récentes susceptibles d'orienter sa prise de décisions en matière de réglementation. Toutefois, vu le rythme rapide des découvertes scientifiques et la spécialisation croissante de certains domaines de recherche, il sera de plus en plus difficile de maintenir une masse critique de capacité scientifique au sein du gouvernement fédéral. Le Comité a remarqué que le Canada a dépensé des montants importants pour soutenir des réseaux de recherche dans tout le pays (p. ex. le Programme des réseaux de centres d'excellence). Il est d'avis que le gouvernement devrait tirer profit de ces réseaux nationaux, au titre des programmes réglementaires - en plus des réseaux internationaux existants - pour accroître ses connaissances scientifiquesinternes. S'il exploite toutes ces ressources existantes, le Canada sera mieux en mesure de fonder sa prise de décision en matière de réglementation sur les plus récentes percées scientifiques et sur un accès à un réseau lui permettant au besoin de procéder à des révisions scientifiques internes. 3.7.2 Renforcement de la capacité d'élaboration des politiquesPartout dans le présent rapport, le Comité a insisté sur la nature pangouvernementale de nombre des enjeux de réglementation et sur la nécessité d'une coordination accrue et plus efficace. Bien que la réglementation constitue un outil d'intervention gouvernementale majeur, le gouvernement fédéral ne dispose toujours d'aucun programme de recherche et d'élaboration de politiques en ce domaine. Selon le Comité, on ne pourra miser sur une amélioration soutenue du système, qui occupe le coeur même du concept de réglementation intelligente, que si l'on se dote de programmes continus de recherche et d'élaboration de politiques. De tels programmes stimuleraient l'innovation et la réflexion dans le domaine réglementaire. La Division des affaires réglementaires du Bureau du Conseil privé, garante de la politique de réglementation, pourrait prendre la tête d'une telle initiative. Elle pourrait collaborer avec les ministères fédéraux et créer, avec des organismes et des parties concernées en dehors de la fonction publique, les partenariats qui s'imposent si l'on veut mettre en place une compétence nationale en la matière. Sous l'angle de la recherche de politiques, on reconnaît déjà l'absence de recherche sur la gouvernance en général - comme on l'indique dans le Plan préliminaire de recherche sur la gouvernance (réalisé par l'ancien Centre canadien de gestion, en mars 2003). On constate en outre qu'il y a pénurie relative de travaux universitaires sur ce que Malcolm Sparrow appelle « l'art de la réglementation ». L'Institut d'administration publique du Canada a déjà exprimé son intérêt à participer davantage à la recherche de nature réglementaire. Il y aurait d'autres partenaires potentiels : le groupe de recherche de l'École de la fonction publique du Canada, le Projet de recherche sur les politiques, des universitaires, etc. Les chaires de recherche des domaines de réglementation, qui élaborent déjà un programme de recherches de politiques, pourraient être financées par le truchement du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada. Les deux parties tireraient sans doute profit des partenariats gouvernement/universités, des étudiants diplômés participant aux programmes réglementaires du gouvernement et des spécialistes de la réglementation agissant comme professeurs adjoints. La gestion du risque et la coopération internationale en matière de réglementation constitueraient des axes prioritaires d'intervention d'un plan d'élaboration des politiques, comme on l'a déjà mentionné ici. Un tel plan pourrait englober l'élaboration de méthodes et d'outils communs à l'intention des organismes de réglementation. Il serait utile à ce titre de consulter les gouvernements provinciaux et territoriaux, le secteur privé et les organisations non gouvernementales et de créer des liens avec des organismes internationaux, l'OCDE, par exemple. Des partenariats avec ces institutions aideraient à forger des pratiques réglementaires communes, à créer des synergies et à faciliter la mise en oeuvre d'une vision nationale en matière réglementaire. 3.7.3 Leadership au plus haut niveauCette section contient un certain nombre de recommandations, mais le Comité est d'avis qu'une volonté politique est indispensable si l'on veut réussir à créer et à administrer un système de réglementation intelligente. Les décideurs politiques doivent véhiculer un message cohérent qui fasse ressortir toute la valeur qu'ils reconnaissent au processus de réglementation intelligente; le gouvernement et les parlementaires doivent favoriser la mise en place d'une éthique et d'une culture axées sur la réglementation intelligente. Un tel changement ne va pas sans leadership et engagement soutenus aux plus hauts échelons de la fonction publique. Ainsi, des hauts fonctionnaires du Bureau du Conseil privé devront piloter ce plan d'action pour favoriser le changement au niveau général et inciter les innovateurs et les agents de changement à se manifester, à défendre des idées et des concepts inédits. Les sous-ministres auront également un rôle important à jouer en ce sens qu'il leur incombera de montrer la voie, d'orienter et d'assurer le progrès du programme de réglementation intelligente. Par le truchement d'un comité - on pense ici, par exemple, au Comité des sous-ministres sur la réglementation intelligente -, ils pourraient coordonner et faciliter l'initiative de réglementation tout en maintenant le dynamisme indispensable au changement et à une amélioration continuelle. Ils pourraient aussi défendre des initiatives qui viseraient à développer et à rehausser le profil de la profession. 3.7.4 Amélioration de la collecte et de l'analyse de renseignementsIl est admis que la fonction publique a besoin de meilleurs systèmes pour générer l'information indispensable à la prise de décisions, ce qui vaut également dans le domaine réglementaire. Le Comité reconnaît la nécessité d'améliorer les systèmes d'appui à la prise de décisions réglementaires. Lors de la phase de recherche de son travail, il n'a pu disposer que de peu de données sur les programmes réglementaires. Par exemple, il ne lui a pas été possible de déterminer combien le gouvernement fédéral dépensait pour de tels programmes ou combien de personnes évoluaient dans ce secteur. De même, rares sont les données aptes à renseigner sur la façon dont les programmes réglementaires aident le gouvernement à réaliser ses objectifs stratégiques. À l'échelle internationale, il n'existe pas de répertoire des initiatives de coopération ou de démarche systématique de contrôle/dépouillement des nouveautés de nature réglementaire dans les pays incontournables. Le Comité ne recommande pas la mise en branle d'un exercice onéreux et bureaucratique; il est toutefois d'avis que le gouvernement doit améliorer sa capacité de collecter, de diffuser, d'analyser et d'utiliser les données réglementaires pour être en mesure d'améliorer ses pratiques et d'apprendre de façon continue. La section 3.6, « Processus réglementaire », contient d'autres détails pertinents sur la mesure du rendement. 3.7.5 RessourcesDe nombreux fonctionnaires ont fait ressortir la nécessité de ressources financières accrues, particulièrement dans le contexte de la mise en oeuvre des recommandations du Comité. D'autres ont déclaré que l'absence de nouveaux fonds ne devrait pas servir de prétexte à l'inaction, étant donné qu'il est toujours possible d'agir à partir des budgets actuels, ne serait-ce qu'en réaffectant des ressources. Le Comité s'est efforcé de prendre en compte les répercussions financières de ses propositions, dont il n'a toutefois pas cherché à quantifier les coûts. Il estime que certaines des initiatives sont susceptibles d'être concrétisées grâce à la réaffectation des ressources, mais que la transition vers une nouvelle façon de réglementer au XXIe siècle sera optimisée par des ressources supplémentaires.
1 Voir Judith Maxwell et Leslie A. Pal, Le point sur l'intérêt public au XXIe siècle : Un cadre de référence; et Matthew Mendelson, La réglementation vue par l'opinion publique. 2 Ministère des
Affaires étrangères et du Commerce international,
Cinquième rapport annuel sur le commerce international du
Canada,mars 2004. 3 Les administrations municipales et certains gouvernements et institutions des Premières nations ont également des responsabilités en matière de réglementation. Le Comité n'a toutefois pas examiné les enjeux de la coopération avec les municipalités. Les questions afférentes à la réglementation qui touchent les Premières nations sont détaillées dans la partie II du présent document. 4 Par Autochtones, on entend ici les personnes qui s'identifient comme Indien de l'Amérique du Nord, Inuit ou Métis. 5Plusieurs études ont été réalisées sur ce sujet au cours des dernières années. Veuillez consulter : Herman Bakvis et Luc Juillet, Le défi de l'horizontalité : ministères responsables, organismes centraux et leadership, École de la fonction publique du Canada, 2004; Jacques Bourgault et René Lapierre, Horizontalité et gestion publique, Centre canadien de gestion (CCG), 2000; Mark Hopkins, Chantal Couture et Elizabeth Moore, De l'effort héroïque au travail quotidien : les enseignements découlant de la direction de projets horizontaux, Table ronde de recherche-action en gestion horizontale du CCG, James Lahey (président), 2001. 6 Herman Bakvis et Luc Juillet, Le défi de l'horizontalité : ministères responsables, organismes centraux et leadership, p. 3. 7 Mark Hopkins, Chantal Couture et Elizabeth Moore, De l'effort héroïque au travail quotidien : les enseignements découlant de la direction de projets horizontaux, p. v. 8 Bureau du Conseil privé, Gouvernement du Canada - Politique de réglementation, novembre 1999, p. 11. 9 Cour fédérale, Section de première instance, 2001, 800. 10 Instruments économiques pour la protection et la conservation de l'environnement : Leçons pour le Canada, Stratos, décembre 2003. 11 Voir le chapitre 6 du document de l'EPA des États-Unis intitulé The U.S. Experience with Economic Incentives for Protecting the Environment, 2001. |
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