Skip navigation links (access key: Z)Bibliothèque et Archives Canada / Library and Archives CanadaSymbol of the Government of Canada
English - English version of this Web siteAccueil - Page principale du site Web institutionnelContactez-nous - Communiquez avec l'institutionAide - Renseignements sur la façon d'utiliser le site Web institutionnelRecherche - Recherche dans le site Web institutionnelecanada.gc.ca - Site Web du gouvernement du Canada




Ruhleben

Sir Ernest MacMillan:
Portrait d'un musicien canadien (1893-1973)

Maureen Nevins


LAC-BAC

Groupe de prisonniers (MacMillan - rang de fond, à l'extrême gauche), s.d.
Photographe inconnu.

Télédéchargez l'illustration ci-dessus (167K).


Ici commence un nouveau chapitre de l'histoire d'un colon prisonnier ... Je m'attends tout à fait à être un personnage vraiment intéressant ... on peut facilement imaginer l'ingéniosité dont peuvent faire preuve plusieurs milliers d'hommes lorsqu'ils disposent de presque tout leur temps! On se fait vite une place, et je me sens presque comme chez moi(!) 1

Au début de juin 1914, MacMillan s'est embarqué pour Paris avec Mme Burgess et sa fille Barbara. Il avait l'intention d'étudier le piano avec Harold Bauer et la composition au Conservatoire national de Paris. Il a essayé de prendre des arrangements, mais il a découvert que tous les cours d'été avaient été annulés et qu'il ne pourrait pas s'inscrire aux examens d'admission avant octobre. Entre temps, MacMillan a suivi des cours privés de piano avec l'assistante de Bauer, Thérèse Chaigneau.

En juillet, MacMillan a été invité à accompagner les Burgess au festival Wagner à Bayreuth. C'est alors que la Première Guerre mondiale a éclaté. Les amies américaines de MacMillan lui ont conseillé de se rendre à Nuremberg pour prendre conseil auprès du consul des États-Unis. Le 4 août, l'Angleterre a déclaré la guerre à l'Allemagne. MacMillan, qui était sujet britannique, était considéré comme un étranger ennemi et devait s'inscrire au poste de police de Nuremberg. Après avoir obtempéré, il est retourné à Bayreuth pour le festival.

Peu après son vingt-et-unième anniversaire, les Burgess ont pris des arrangements pour quitter l'Europe. MacMillan les a accompagnées à Nuremberg pour leur départ. Il devait rester dans la ville jusqu'à ce que la situation internationale se précise et se présenter tous les jours au poste de police. Le consul des États-Unis a pris MacMillan sous sa protection et il lui a recommandé de louer une chambre à la pension Trefzer. C'est là qu'il a habité pendant les quatre mois suivants.

En janvier 1915, il a été arrêté, jugé et emprisonné pour avoir enfreint l'article 4, n° 2, de la Loi sur la défense de l'Empire, aux termes duquel tous les étrangers devaient s'inscrire auprès de la police. MacMillan a omis involontairement de le respecter. Sa connaissance de l'allemand étant limitée, il n'a pas compris la signification des avis ordonnant à tous les étrangers de se présenter quotidiennement au poste de police. Après neuf semaines de régime cellulaire, il a été transféré à Ruhleben, une piste de course convertie en camp de prisonniers de guerre civils britanniques et située près de Berlin.

À son arrivée, MacMillan a eu tôt fait de participer à la vie sociale et culturelle active du camp, notamment aux activités musicales et théâtrales. En juin 1915, la création de la société musicale de Ruhleben a permis à tous les musiciens détenus de faire connaissance. Il y avait parmi eux Benjamin Dale, Edgar Bainton, John Peebles Conn, Charles Webber et Quentin MacLean.

Le premier projet de MacMillan a été de composer et de diriger la musique d'une revue intitulée Don't Laugh. Cet événement a été important puisque ce fut pour lui sa première expérience de chef d'orchestre (mise à part la direction de ch urs d'église). Même s'il disait ne pas aimer la musique populaire, il a acquis une expérience précieuse en dirigeant des spectacles de variétés, un spectacle de Noël et une représentation de The Mikado de Gilbert et Sullivan.

À la fin de 1915, MacMillan a été chargé de la composition, des répétitions et de la direction de la musique pour le spectacle Cinderella présenté au camp. La production a été tellement impressionnante que l'ambassadeur des États-Unis, James Gerard, est venu de Berlin pour y assister.

La production musicale la plus ambitieuse présentée au camp a probablement été The Mikado. L'un des prisonniers possédait un exemplaire du livret, mais non la partition musicale. MacMillan et quatre autres musiciens détenus ont entrepris d'écrire la partition de mémoire. Bien entendu, l'orchestration devait tenir compte des talents et des ressources instrumentales du camp. MacMillan a dirigé 13 représentations de la production en décembre 1916.

Reconnu par ses collègues comme un musicien sérieux, il a été invité à diriger un certain nombre de concerts symphoniques. Au cours du premier concert, le pianiste Harry Field, lui aussi un Canadien, a présenté le Concerto en mi bémol de Liszt. MacMillan a également été accompagnateur et pianiste soliste à quelques récitals.

En plus de la société musicale de Ruhleben, il y avait un certain nombre de cercles qui permettaient aux prisonniers de mener une vie intellectuelle active. Citons, notamment, le Corner House, l'Arts and Sciences Union et le Historical Circle. MacMillan a présenté plusieurs conférences. Il a puisé dans les connaissances acquises au cours de ses études en histoire à l'Université de Toronto pour présenter, le 13 mai 1916, une conférence sur les jalons de l'évolution constitutionnelle du Canada devant le Historical Circle. Une autre conférence, prononcée le 15 juin pour ce cercle, a porté sur la musique (les classiques viennois). En avril 1917, sa conférence pour l'Arts and Sciences Union portant sur la musique russe («A Sketch of Russian Music») a servi à préparer l'auditoire à un concert de musique de compositeurs russes. De même, en 1918, deux conférences ont précédé des concerts consacrés à la musique de compositeurs anglais. La série de conférences la plus importante a eu lieu en mai 1917 lorsque MacMillan et Benjamin Dale ont présenté dix conférences illustrées sur les symphonies de Beethoven. La première conférence était une introduction; les neuf autres ont porté chacune sur une des neuf symphonies. Dans chaque cas, MacMillan a présenté une analyse de l' uvre, suivie de l' uvre complète interprétée au piano par Dale et par lui-même.

MacMillan a également participé aux activités de la société dramatique de Ruhleben (le théâtre du camp), principalement en tant qu'acteur. En avril 1916, les détenus ont commémoré le tricentenaire de la mort de Shakespeare en présentant les pièces Twelfth Night (La Nuit des rois) et Othello. MacMillan a joué le rôle de Maria dans Twelfth Night et le petit rôle de Gratiano dans Othello. Ayant conservé une apparence jeune, il jouait souvent des personnages féminins. Dans la pièce L'Enfant prodigue de Michel Carré, il a joué le rôle de la lavandière Phrynette. Pour cette représentation spéciale, l' uvre a été orchestrée en entier par Bainton, Dale, Webber et MacMillan sur une musique originale d'André Wormser. En 1915, il a joué le rôle de lady Bracknell dans la comédie d'Oscar Wilde, The Importance of Being Earnest (De l'importance d'être constant), et le rôle de la femme de chambre Sheeler dans The Silver Box de John Galsworthy. Dans la comédie de R.C. Carton écrite à la fin de l'époque victorienne, Mr. Preedy and the Countess, il était la bonne, Harriet Budgeon. Au cours de sa carrière théâtrale, il a signé une production, soit Fanny's First Play de George Bernard Shaw, dans laquelle il a joué le rôle de Darling Dora.

MacMillan avait hâte de commencer à travailler en vue de l'obtention de son doctorat en musique à Oxford. En mai 1915, l'Université de Toronto lui a conféré in abstentia un baccalauréat en arts compte tenu des résultats exceptionnels obtenus au cours de ses trois premières années d'études. Au début de 1916, il a commencé à se préparer aux examens d'admission à Oxford, après la fin de la guerre. M. Logie, un ami prisonnier ayant de nombreux contacts à Oxford, a encouragé MacMillan à présenter une demande et il a fait pression pour que l'université examine son dossier pendant son internement. À sa grande surprise, la permission demandée a été accordée. MacMillan a été exempté de l'examen écrit et il a été tenu seulement de composer l'exercice musical. En outre, si l'exercice était accepté, il serait exempté de tout autre examen et obtiendrait son diplôme.

En avril 1918, MacMillan a terminé son exercice, une mise en musique pour ch ur et orchestre de l'ode «England» d'Algernon Charles Swinburne. Pendant qu'il attendait les résultats, il a continué à se préparer pour les examens finaux. Deux mois plus tard, MacMillan a été informé que son exercice avait été jugé satisfaisant par les examinateurs.

Ce n'est qu'à la fin de l'été 1918 que les prisonniers ont compris que la fin de la guerre approchait. Après la signature de l'armistice, les restrictions imposées aux déplacements des détenus de Ruhleben ont été pratiquement abolies, et MacMillan a pu assister à plusieurs concerts présentés à Berlin.

À la fin de novembre, il a été envoyé à Copenhague, d'où il s'est embarqué pour Leith, la banlieue portuaire d'Édimbourg. Plusieurs semaines plus tard, il s'est rendu à Londres pour rencontrer l'éditeur de musique Novello afin de prendre des arrangements en vue de la publication de son Ode England et Henry Coward, chef de la Sheffield Musical Union, pour la première représentation de cette uvre. Il est rentré au Canada en janvier 1919.

Notes

1. Traduction de : lettre à Elsie Keith, le 25 mars 1915. Fonds sir Ernest MacMillan, Section des manuscrits, Division de la musique, Bibliothèque nationale du Canada.


LAC-BAC[Marche arrière] www[Marche avant] notes[ACCUEIL]