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CHAPITRE I *
REVUE DE NOTRE TÂCHE
NOTRE MANDAT
NOTRE tâche n'était pas de portée
modeste ni d'exécution facile. Les questions que nous avons examinées ressortissent au
domaine tout entier des lettres, des arts et des sciences, dans la mesure où il relève
de l'État fédéral. Mais, si nombreuses et variées qu'elles soient, elles n'en font pas
moins partie d'un même tout. Nous nous sommes intéressés, pendant tout le cours de
cette étude, aux besoins et aux aspirations du citoyen en ce qui concerne les sciences,
la littérature, les arts, la musique, le théâtre, le cinéma et la radiodiffusion.
Conformément aux prescriptions de notre mandat, nous avons également abordé la question
des rapports entre la recherche savante et le bien-être du pays, et celle du
perfectionnement de l'individu au moyen de bourses du gouvernement fédéral. L'enquête
dont on nous a confié le soin est peut-être unique en son genre; il est certain, en tout
cas, que jamais rien de tel n'a été entrepris au Canada.
2. Notre mandat précisait la nature de notre tâche principale. On nous a
enjoint d'étudier certaines institutions, certaines fonctions d'ordre national et de
présenter des recommandations touchant leur organisation et les principes directeurs dont
elles doivent s'inspirer. On trouvera la liste de ces sujets dans le texte du décret du
conseil créant la Commission. Certains autres y ont été ajoutés conformément à une
lettre du premier ministre, jointe à notre mandat et reproduite à la page xix. Quant à
nos recommandations elles seront énoncées dans la deuxième partie du présent Rapport.
3. Sur cette tâche principale venait s'en greffer une autre. Les organismes et
les fonctions dont on nous demandait de nous occuper ne sont que les parties d'un vaste
ensemble. Pour apprécier leur signification et leur importance, nous avons dû
considérer cet ensemble. Pour les comprendre, autrement dit, il nous a fallu les étudier
dans leur contexte. C'est pourquoi nous avons cru indispensable d'entreprendre une étude
générale de la
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situation des arts, des lettres et des sciences au Canada, de juger des réalisations
actuelles et du progrès futur. Le lecteur trouvera dans la première partie
de notre Rapport le résultat de cet inventaire.
4. Dans l'exposé des motifs de notre enquête figure le passage suivant :
« Il importe que les Canadiens connaissent, le plus possible, leur propre pays,
qu'ils soient renseignés sur son histoire et ses traditions, et qu'ils soient éclairés
sur la vie et sur les réalisations collectives de leur propre nation.[sic]
« Il est dans l'intérêt national d'encourager les institutions qui expriment le
sentiment de la collectivité, favorisent la bonne entente, et apportent de la variété
et de l'abondance à la vie canadienne, tant dans les régions rurales que dans les
centres urbains ».
Souvent, par le passé, on a voulu établir l'inventaire de nos ressources physiques.
Notre étude a porté sur des richesses humaines, sur ce qu'on pourrait appeler, en un
sens large, des ressources spirituelles qui pour être moins tangibles n'en ont pas moins
une importance sur laquelle il serait oiseux d'insister.
5. Le passage liminaire précité contient, nous semble-t-il, deux données
fondamentales qui constituent la raison d'être même de notre tâche. Tout d'abord, il
laisse clairement entendre que certains éléments essentiels de la vie d'une nation ne
sauraient être pesés ni mesurés avec une exactitude scientifique. Ces éléments
impondérables ne sont pas seulement importants en eux-mêmes. Ils peuvent encore inspirer
des sentiments de dévouement national et inciter la population à l'action. En 1940,
lorsque M. Churchill conviait le peuple britannique à un effort suprême, il invoquait
les traditions de son pays, fondant son appel sur le passé commun d'où ses compatriotes
tiraient leur caractère et leur mode d'existence. C'est du patrimoine spirituel de la
Grande-Bretagne qu'ont surgi les réserves d'énergie nécessaires pour surmonter les
dangers de cette heure périlleuse. Rien de plus pratique que cet appel à la réflexion
et à l'émotion. Cette vérité trouve confirmation dans notre propre histoire. Si le
Canada de langue française connaît une vie si authentique, s'il constitue une
collectivité si véritablement cohérente, il le doit à sa loyauté envers certaines
valeurs spirituelles et, pardessus tout, à sa fidélité à une tradition historique. Les
Loyalistes ont pu traverser les périls et les misères de leur établissement en
Amérique britannique du Nord grâce à leur adhésion collective à un ensemble de
croyances communes. Si le Canada lui-même est devenu une entité nationale, c'est parce
que ses habitants partageaient certaines convictions, s'attachaient à certaines habitudes
intellectuelles auxquelles ils refusaient de renoncer. C'est la puissance de ce patrimoine
moral qui a permis à notre pays de franchir des passes difficiles. Il progressera, à
l'avenir, dans la mesure exacte où il gardera sa foi en lui-même. Ces valeurs
intangibles non seulement donnent à une nation son caractère original, mais encore
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lui communiquent sa vitalité. Certaines choses peuvent paraître sans importance,
voire superflues en regard des exigences de la vie quotidienne, mais il se peut que ce
soit précisément celles qui durent, qui confèrent à la collectivité sa puissance de
survie.
6. Mais qui dit tradition dit chose vivante. Cela nous amène à la seconde
donnée. Notre tradition future s'élabore en ce moment au sein de ces innombrables
institutions, mouvements et groupes ainsi que chez tous ces citoyens qui, dans les
diverses parties du pays s'intéressent aux arts, aux lettres et aux sciences. À travers
la complexité et la diversité de race, de religion, de langue et de géographie, les
éléments dynamiques qui ont fait du Canada une nation et qui, seuls, pourront lui
conserver son unité, prennent forme en ce moment. Ce n'est pas uniquement sur le plan
matériel qu'on les trouve. Sans doute, les liens physiques sont-ils indispensables à
l'élaboration de l'unité mais la véritable unité relève du domaine des idées. Elle
réside au cur et dans l'esprit des hommes. C'est ce que pensent les Canadiens et
ils ont conscience de l'importance de cette tradition nationale en gestation.
7. Certains caractères particuliers de la vie moderne ont rendu notre tâche
opportune. L'un d'entre eux est l'augmentation des loisirs. Aujourd'hui, l'uvre des
artistes, des écrivains et des musiciens importe à un nombre plus considérable que
jamais d'individus. La plupart d'entre nous avons maintenant plus de loisirs que n'en
avaient les générations précédentes. C'est ce phénomène, joint à ceux de
l'instruction obligatoire et de l'extension des moyens de communication, qui nous permet
de jouir de ce qui, jusqu'ici, était réservé au petit nombre. Loisir est bien autre
chose que temps libre. Son emploi judicieux permet à chacun de se procurer la
satisfaction intime qu'on ne peut éprouver dans un travail ennuyeux ou routinier. Ce fait
accroît l'importance d'une enquête qui s'occupe de questions relevant de la
littérature, du théâtre, de la peinture, du cinéma et de la radio.
8. Au début de notre enquête, on nous a demandé si nous entendions éduquer
le public, en ce sens que, dans le domaine des lettres, de la musique et des arts, nous
allions statuer sur ce qu'il convenait de lui montrer ou de lui faire entendre. Nous avons
répondu que, s'il était une chose à laquelle nous ne songions pas, c'était bien de
définir les canons du goût, du haut d'une stratosphère culturelle. Un témoin, citant
un correspondant, rapportait que celui-ci se plaignait de ce qu'il ne trouvait à la radio
que du « fatras culturel ». Si ce correspondant se plaignait de ne pouvoir satisfaire son
goût pour autre chose que des émissions sérieuses, du fait qu'on ne présentait que des
programmes de ce genre, son point de vue peut se défendre. Nous espérons cependant que,
de plus en plus, le public canadien aura l'occasion de trouver plaisir à des uvres
d'un réel mérite, dans quelque sphère que ce soit, mais il faut que cela procède d'un
libre choix.
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Nous croyons, néanmoins, que l'appétit vient en mangeant. Il faut que ceux qui ont le
goût des plus belles choses puissent en jouir dans une plus large mesure. Si notre
enquête a pu achever quoi que ce soit en ce sens, elle aura au moins une importante
réalisation à son actif.
9. Aujourd'hui, dans les domaines dont nous nous sommes occupés, les
gouvernements jouent un rôle auquel ne songeait pas la génération qui nous a
précédés. La plupart des États modernes possèdent un ministère des « beaux-arts »
ou des « affaires culturelles ». Tous les pays civilisés, quelle que soit la doctrine
politique qui y prévale, se reconnaissent une certaine mesure de responsabilité
officielle en ce domaine. En Grande-Bretagne, afin d'éviter les dangers de la direction
bureaucratique ou de l'ingérence politique, on a constitué des corps à demi
indépendants, dont il sera question plus loin dans le présent Rapport. Ces corps sont
chargés de favoriser les arts et les lettres. Nous avons étudié soigneusement cette
expérience à la lumière d'une éventuelle application au Canada.
10. Deux problèmes se posent dans notre pays. L'un est commun à tous les
États, l'autre nous est particulier. Il s'agit d'abord de savoir comment l'État peut
favoriser les lettres et les arts sans étouffer des efforts qui doivent jaillir du désir
de la population elle-même. On doit ensuite déterminer comment cette aide peut
s'accorder avec notre régime fédératif et notre diversité. Nous avons reçu à ces
questions des réponses nombreuses et variées. La réaction du public montre à quel
point celui-ci a reconnu l'utilité de notre enquête et accepté le principe sur lequel
elle se fondait, savoir que le gouvernement fédéral a quelque responsabilité en ce
domaine.
LA QUESTION DE L'ÉDUCATION
11. Il est toutefois un problème qui a inquiété un certain nombre de ceux qui
nous ont présenté des mémoires. Nous jugeons qu'il est d'une importance assez grande
pour que nous nous y attachions dès les premières pages de notre Rapport. Le mot «
culture » ne figure pas dans notre mandat, mais le public, voulant, comme c'est tout
naturel, exprimer en termes généraux le caractère essentiel de notre enquête, nous a
sur-le-champ et comme instinctivement appelés « la Commission de la culture ». Nous
avons entendu l'expression de vues fort intéressantes sur le sens et l'importance de la
culture. Un groupement de langue française l'a appelée « la première grande richesse
du pays », tandis qu'un groupement analogue de langue anglaise, abordant le problème
différemment, veut qu'elle ait une « importance égale à celle des baignoires et des
automobiles » (1).
Certains témoins se sont dits enchantés de ce qu'on se livrât à une enquête sur notre
vie culturelle et ses virtualités. D'autres, pourtant, ont exprimé la crainte qu'en
étudiant notre double culture nationale nous ne touchions au domaine de l'éducation qui
de toute évidence lui est étroitement lié.
12. Nous estimons qu'en ce qui concerne le problème délicat et très
controversé de l'éducation, il règne une équivoque inutile, qu'on peut et qu'on
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doit dissiper. Une intelligence plus exacte du mot, dans ses diverses acceptions,
aidera sans doute à clarifier une atmosphère qui trouble vainement un grand nombre de
personnes sérieuses, dont certaines nous ont présenté des mémoires. « L'éducation
relève exclusivement des provinces », disent les unes. « Sans doute, répondent les
autres, mais c'est sans préjudice du droit que possède le gouvernement fédéral de
contribuer autant qu'il le peut à ses progrès ». Le dilemme peut se résoudre
facilement pour peu qu'on en précise les termes. Le malentendu vient de ce qu'on comprend
mal la nature et la fin de l'éducation, ses modalités et les différents moyens de
l'acquérir.
13. L'éducation est le développement progressif de l'individu dans toutes ses
facultés, physiques, intellectuelles, esthétiques et morales. Au terme de la croissance
disciplinée de sa personnalité tout entière, l'homme éduqué atteint un développement
équilibré de toutes ses facultés; il a réalisé au maximum ses possibilités humaines.
La société actuelle distingue deux façons d'arriver à ce résultat, outre
l'expérience de la vie quotidienne, bien entendu. Ce sont, premièrement, l'éducation
académique telle qu'on la dispense dans les écoles et les universités, et, en second
lieu, l'éducation générale, extra-scolaire, qui s'acquiert par la lecture des livres et
périodiques, par l'audition d'émissions radiophoniques, par la fréquentation des
musées, des galeries, des conférences et des cercles d'étude. Ce sont là autant
d'instruments d'éducation. Il arrive souvent que ce soient les écoles elles-mêmes qui
les utilisent, auquel cas ils sont intégrés à l'enseignement académique. Mais, le plus
souvent, ils servent au perfectionnement de l'individu après les heures de cours et,
encore davantage, après qu'il a définitivement terminé ses études.
14. Ceci nous amène aux rapports entre la culture et l'éducation. La culture
est la partie intellectuelle et artistique de l'éducation. C'est le perfectionnement de
l'esprit par les arts, les lettres et les sciences. Sans doute, ce perfectionnement
commence-t-il à se produire dans l'éducation académique. Mais il se poursuit, en outre,
dans la vie de l'adulte, il y donne des fruits grâce, surtout, aux instruments de
l'éducation générale. C'est cette culture ou éducation générale, extra-scolaire,
dont nous sommes appelés à connaître.
15. Cette distinction essentielle entre éducation académique et éducation
générale ou extra-scolaire a d'ailleurs été mise en lumière dans les mémoires qui
nous ont été remis et dans les témoignages qui nous ont été présentés en séances
publiques. C'est ainsi que, dans son mémoire la Conférence catholique canadienne
déclare :
« ... Nous devons remarquer qu'il ne saurait être question ici pour nous d'aborder
le problème spécifique de l'éducation scolaire à ses différents degrés. Cette
considération relève de la compétence provinciale . . . nous voulons parler surtout de
ce genre d'éducation qu'on appelle ordinairement l'éducation des adultes » (2).
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Entendue à Québec, la délégation du Comité permanent de la survivance
française formulait l'observation suivante :
« . . . L'éducation académique relève des provinces. Cependant à côté de
l'éducation académique il y a l'éducation ou culture générale et c'est là le domaine
sur lequel vous êtes appelés à faire enquête. Nous estimons que cette culture
générale est aussi un sujet d'intérêt fédéral et même international » (3).
16. Il n'est peut-être pas indispensable de rappeler, dans un pays qui
s'enorgueillit d'une liberté fondée sur la loi et inspirée de principes chrétiens, que
l'éducation ne relève pas avant tout de l'État, provincial ou fédéral. Elle
constitue, d'abord, une responsabilité personnelle, non moins qu'un droit imprescriptible
de l'individu, considéré en tant qu'être libre et rationnel. Bien entendu, et c'est une
loi de sa nature, l'homme ne peut se réaliser lui-même qu'en tant que membre de la
société. Son éducation relèvera d'abord des parents, puis de groupes sociaux plus ou
moins officiels, y compris ceux qui ressortissent aux administrations municipale,
provinciale et fédérale. Soutenir que l'éducation suppose avant tout et toujours une
responsabilité personnelle et familiale, ce n'est pas nier à ces groupes ni à leurs
gouvernements des fonctions supplémentaires et essentielles à la fois non plus que
l'intérêt naturel et permanent qu'ils doivent porter à l'éducation de l'individu. Ces
fonctions, il appartient aux lois de les préciser dans chaque pays.
17. Le droit canadien ne comporte aucune disposition générale aux termes de
laquelle il serait interdit à un organisme quelconque, officiel ou bénévole, de
contribuer à l'éducation de l'individu, le mot étant entendu dans son sens le plus
large. C'est pourquoi l'activité du gouvernement fédéral et d'autres organismes dans
les domaines de la radio, du cinéma, des musées, des bibliothèques, des instituts de
recherches, etc. n'entre en conflit avec aucune loi actuelle. Bien plus, toutes les
sociétés civilisées doivent rechercher le bien commun, non seulement du point de vue
matériel, mais encore du double point de vue intellectuel et moral. Si le gouvernement
fédéral doit renoncer au droit de s'associer avec d'autres groupes sociaux, de
caractère public ou privé, en vue de l'éducation générale du citoyen canadien, il
faillit à son but intellectuel et moral, perd complètement de vue la véritable notion
du bien commun, et le Canada, considéré comme nation, se transformera en société
matérialiste.
18. Conformément à ces principes, nous sommes convaincus que notre travail
n'a, en aucune manière, empiété sur les droits des provinces, mais qu'au contraire, il
aura peut-être eu l'utilité d'indiquer quelques modes de collaboration avec elles. Nous
sommes heureux que plusieurs ministères provinciaux de l'Instruction publique aient
confirmé le bien fondé de cette opinion. En nous présentant des mémoires et en
étudiant librement ces aspects généraux de l'éducation dont ils se préoccupent comme
nous, ils
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nous ont fourni une aide précieuse et donné de grandes marques d'encouragement dans
notre travail.
LA CONDUITE DE L'ENQUÊTE
19. Pour accomplir notre tâche, nous avons tenu des séances publiques dans
seize villes des dix provinces. Nous avons parcouru près de 10,000 milles, dont plus de
1,800 par avion. En tout, la Commission a tenu 224 séances, dont 114 ouvertes au public.
Nous avons reçu 462 mémoires, qui ont nécessité la comparution de plus de 1,200
témoins. Les mémoires comprenaient ceux de 13 institutions du gouvernement fédéral, de
7 gouvernements provinciaux, de 87 associations de caractère national, de 262 organismes
locaux et de 35 postes de radio privés. Nous avons reçu, dans notre travail, l'aide de
quatre comités consultatifs, dont le premier faisait enquête sur les bourses et les
recherches, le deuxième sur les musées, le troisième sur l'institution d'une
bibliothèque nationale et sur les archives nationales et le quatrième, sur les sites et
monuments historiques. Nous avons chargé un certain nombre de Canadiens éminents, dont
chacun fait autorité dans son domaine particulier, de préparer des études critiques sur
divers sujets, afin de nous fournir une documentation utile à notre travail (4). Un certain nombre de ces
études sont publiées dans un autre volume.
20. Au cours de notre voyage à travers le Canada, nous nous sommes efforcés,
pour autant que le permettait un lourd programme de séances publiques, d'entrer en
contact personnel avec les organismes dont l'activité ressortit à notre mission. Il est
utile de voir ce qui s'accomplit aussi bien que d'en entendre parler. C'est ainsi que nous
avons profité de l'occasion pour visiter des universités, des musées régionaux, des
archives provinciales, des monuments historiques, des centres artistiques locaux, des
expositions d'artisanat, des collections particulières de tableaux canadiens. Nous en
avons profité aussi pour visiter des postes de radiodiffusion, privés ou publics, pour
assister à des démonstrations de télévision et à une représentation typique de
l'Office national du film dans un village des Prairies, à la répétition d'un opéra
monté par Radio-Canada, à une émission d'un poste de radio privé qui présentait des
artistes du cru, à une représentation d'une troupe canadienne de danse, à une pièce
d'une troupe typique d'amateurs et à des concerts donnés par deux orchestres
symphoniques. Nous aurions aimé que notre programme nous permît d'en voir davantage.
21. Nous tenons à exprimer ici notre profonde reconnaissance de la chaleureuse
collaboration que nous avons reçue de gouvernements provinciaux. Nous avons beaucoup
apprécié l'intérêt qu'ils ont pris à notre travail, ainsi que la collaboration et
l'hospitalité qu'ils nous ont si généreusement offertes. Municipalités et universités
nous ont également fait un bon accueil. Grâce à l'aimable initiative de nombreuses
personnes, nous avons eu l'occasion de rencontrer des groupes de citoyens représentatifs
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dont les vues et les opinions nous ont été fort utiles. Nous voudrions exprimer aussi
notre gratitude pour la franchise avec laquelle les témoins qui ont comparu devant nous
ont répondu aux questions que nous leur posions. Nous sommes très reconnaissants de
l'amicale collaboration des journaux. L'intérêt actif que nous a manifesté le public en
général, durant toute la période de l'enquête, nous a fortement encouragés et a
souligné l'importance de la tâche qu'on nous a fait l'honneur de nous confier (5).
22. Des représentants de tous les secteurs de la population canadienne ont
comparu devant nous. De fait, c'est le grand public qui nous a tracé notre programme. La
réponse à nos efforts a dépassé nos espérances. À mesure que progressait notre
travail, l'intérêt porté à l'enquête augmentait. Cet intérêt s'est traduit par
l'aide amicale que nous avons reçue de toutes parts. Nous avons pu constater que, dans
tout le pays, on désire vivement profiter davantage de ce que peut produire l'écrivain,
l'artiste, le musicien. On semble avoir généralement reconnu que l'enquête arrivait au
bon moment, que le Canada était mûr pour une telle étude. On a clairement compris que
notre puissance économique, notre maturité politique ne suffisent pas, à elles seules;
il faut des progrès correspondants dans d'autres domaines.
23. Nous nous sommes occupés et des producteurs et des consommateurs de
culture. Les mémoires dont nous avons été saisis exposaient heureusement d'une façon
à peu près égale le point de vue de chacun des deux groupes. Nous avons été sans
cesse frappés par la nécessité de multiplier les chances offertes aux gens qui, au
Canada, se consacrent aux arts, aux lettres et aux sciences. À cet égard, nous avons des
arrérages à solder. Les députations de groupes professionnels de peintres,
d'écrivains, de musiciens, d'artistes, d'architectes, d'instituteurs ont parfaitement
exposé la situation existant dans leurs champs d'action respectifs, mais, partout où
nous avons siégé, nous avons entendu aussi le citoyen moyen. À dire vrai, grâce aux
mémoires présentés par les principales confessions religieuses du Canada, par les
syndicats ouvriers, les chambres de commerce, les universités, les groupements agricoles,
les associations féminines et de nombreuses sociétés nationales de tous genres, une
grande partie du public canadien s'est fait directement représenter.
24. Apparemment, certains observateurs croient que les mémoires de la plupart
des groupements d'initiative privée qui ont comparu devant nous comportent une demande
d'aide fédérale. Ce n'est pas exact. Sauf de rares exceptions, ces organismes ont bien
compris que les attributions de la Commission ne lui permettaient pas de proposer l'octroi
de deniers publics à de telles fins. Si diverses organisations ont mentionné, dans leurs
mémoires, leurs difficultés financières, elles ne pouvaient que trop rarement se
prétendre riches, cela provenait naturellement de ce qu'elles essayaient de mettre
la Commission royale au courant de leurs affaires. Le tableau serait resté incomplet s'il
n'avait pas été question de finances. Ce qui nous a
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impressionnés, c'est l'effort désintéressé que représentaient ces mémoires. Ceux
qui ont comparu devant nous ne demandaient rien pour eux-mêmes. Dans chaque cas, ils
étaient les interprètes d'une cause en laquelle ils avaient foi. Bien souvent même, les
délégués ont dû parcourir de grandes distances pour assister à nos séances, ce qui
leur occasionnait personnellement des frais et des dérangements. Un Indien noutka a
parcouru 125 milles pour nous parler de l'art indigène de sa tribu en voie de disparition
et nous exposer le moyen de le conserver.
25. Cette longue et pénétrante enquête, ainsi que la généreuse
collaboration que nous avons reçue nous ont permis de voir dans une perspective
différente les divers organismes et services d'ordre national dont nous devions faire
l'étude. Nous y avons puisé une conception nouvelle de leur utilité dans la vie
canadienne, ainsi que de leurs possibilités d'accroissement et de développement. Dans la
première partie du Rapport, nous décrivons l'activité et les besoins de ces
institutions. Dans la deuxième partie, nous formulons les recommandations qui nous
semblent dérouler naturellement de notre enquête.
[page 12 blanche]
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