CMAJ/JAMC Special supplement
Supplément spécial

 

Lignes directrices sur la transfusion de globules rouges et de plasma aux adultes et aux enfants

Enjeux liés au consentement éclairé

Le texte qui suit constitue une discussion générale des enjeux liés au consentement éclairé. Pour une analyse plus complète, on renvoie les médecins au document intitulé Le consentement -- Guide à l'intention des médecins du Canada8.

Qu'est-ce que le consentement éclairé?

Le consentement éclairé est une démarche par laquelle un patient et un médecin en arrivent à une décision thérapeutique. Il permet au patient de protéger son rôle prépondérant dans la décision de recevoir un traitement ou une intervention8­12. Dans le cadre de cette démarche, le médecin doit se conformer à une norme sur la divulgation des risques et des avantages d'un traitement ou d'une intervention en particulier13 : la norme consiste à divulguer les renseignements que le médecin connaît ou devrait connaître et qu'une personne raisonnable dans la situation du patient voudrait connaître avant de prendre la décision.

Dans la mesure du possible, les discussions sur la transfusion devraient avoir lieu assez tôt pour donner aux intéressés le temps de trouver des solutions de rechange possibles comme une transfusion de sang autologue14. La terminologie devrait être facile à comprendre pour le patient : un feuillet d'information destiné au patient peut être utile, mais il ne peut remplacer la discussion. La discussion doit porter sur les aspects suivants : description du produit ou du composant sanguin à transfuser; avantages attendus, y compris ce qui pourrait se passer si l'on n'administre pas la transfusion; risques connexes, y compris ceux qui peuvent être mortels, et solutions de rechange appropriées. Le patient doit avoir la chance de poser des questions et le médecin doit s'assurer que le patient comprend l'explication. Il est préférable de consigner au dossier (hospitalier) du patient qu'il y a eu discussion sur le consentement. La signature d'un formulaire distinct de consentement à une transfusion sanguine ne présente aucun avantage particulier et ne peut remplacer la discussion qui doit avoir lieu15.

La transfusion de produits sanguins soulève une foule de questions éthiques, dont les suivantes : accès aux ressources; accès à d'autres traitements; mieux-être social, psychologique, physique et affectif du patient; perceptions différentes du risque; conflit possible d'avis et de croyances entre le médecin et le patient. Le médecin doit être conscient de ces enjeux, ainsi que des différences et croyances culturelles diverses dans notre société, et agir en conséquence. Souvent, une transfusion sanguine ne représente qu'un aspect d'une intervention médicale ou chirurgicale plus importante et il se peut que les risques posés par la transfusion soient faibles comparativement au risque total lié à l'intervention. Au cours de la discussion sur le consentement, il peut convenir d'insister sur les divers risques (de la transfusion sanguine) selon leur importance relative dans tout le processus.

Situations spéciales : urgences, enfants et adultes inaptes

Urgences

Les médecins peuvent traiter un patient sans son consentement lorsque le traitement est nécessaire pour préserver la vie ou la santé de l'intéressé et que :

  • l'on ne peut obtenir son consentement parce qu'il est inapte physiquement ou mentalement à l'accorder (à cause soit d'une incapacité inhérente, soit de son état médical);

  • aucun autre décideur n'est disponible;

  • l'on ne sait pas s'il existe un «testament biologique» ou des directives préalables10,12.

Ces principes valent aussi dans le cas d'urgence impliquant des enfants s'il est impossible de communiquer avec leurs parents ou leur tuteur. Lorsque le consentement est refusé, aucun traitement ne peut être administré, mais le médecin alors doit s'assurer que le patient possède la compétence nécessaire pour refuser le traitement.

Enfants et adolescents

C'est normalement aux parents ou aux tuteurs légaux d'un mineur qu'incombe la responsabilité des décisions. Lorsque les parents sont divorcés, la décision appartient au parent qui a la garde légale d'un mineur. Les décisions doivent être fondées sur le meilleur intérêt ou le bien-être de l'enfant plutôt que sur celui des parents. Les tribunaux canadiens n'ont pas permis à des parents de refuser, pour des raisons religieuses, des transfusions (ou tout autre traitement) qui pourraient sauver la vie de leur enfant12. Si un médecin croit que le refus d'une transfusion pourrait mettre en danger la vie ou la santé d'un enfant et si les discussions avec les parents ou les tuteurs ne réussissent pas à les faire changer d'avis, le médecin est en général tenu, en vertu des lois provinciales sur la protection de l'enfance, de prévenir les autorités compétentes et de leur demander leur aide.

En général, les mineurs peuvent refuser un traitement médical ou y consentir s'ils sont compétents et aptes à comprendre pleinement la nature et les conséquences du traitement ou du refus du traitement. Même s'il lui incombe de déterminer la capacité d'un mineur, le médecin doit savoir que les lois provinciales peuvent fixer des âges présomptifs de compétence, ainsi que des conditions particulières dans lesquelles il faut prévenir les parents, les tuteurs ou les organismes de protection de l'enfance16. Dans la plupart des provinces, les lois sur la protection de l'enfance obligent les médecins à prévenir les autorités s'ils pensent, par exemple, que la vie, la santé ou la sécurité d'un enfant est en danger. Certaines lois rendent de tels rapports obligatoires pour les mineurs qui ont moins d'un certain âge, même si le mineur aurait autrement suffisamment de maturité pour refuser le traitement ou y consentir.

Adultes inaptes

Dans le cas des adultes qui n'ont jamais été compétents, les décisions doivent être prises dans le meilleur intérêt du patient. Dans celui des adultes qui l'ont déjà été mais qui sont devenus inaptes temporairement ou définitivement, il faut respecter leurs désirs préalables au sujet du traitement, dans la mesure où ils sont connus ou peuvent être déterminés. Des provinces et des territoires ont adopté des mesures législatives qui prévoient le consentement par substituts et le respect des «testaments biologiques» ou directives préalables. Les médecins doivent connaître les dispositions des lois de leur province ou territoire. Les collèges des médecins des provinces et l'Association canadienne de protection médicale sont des ressources utiles en l'occurrence.

Information aux transfusés

Dans la mesure du possible, il faut informer les patients (ou leur tuteur) qu'ils ont reçu une transfusion de globules rouges ou de plasma. En fournissant ces renseignements au patient, on respecte son autonomie et l'encourage davantage à assumer la responsabilité de ses soins de santé.

Refus de transfusion

Un adulte compétent a le droit de refuser tout traitement ou d'y mettre fin pour quelque raison que ce soit. Ce sont les Témoins de Jéhovah qui refusent le plus souvent un traitement, car leur religion leur interdit de recevoir des produits sanguins. Le refus est valide dans n'importe quelle circonstance, même lorsqu'il entraîne la mort du patient. Il convient de signaler que ce principe ne s'applique pas aux enfants (voir Enfants et adolescents, ci-dessus). Le médecin doit s'assurer que le refus du patient est entièrement éclairé et que le patient connaît les conséquences de sa décision, et le consigner par écrit si possible. Il faut étudier des aspects comme la dépression qui peuvent jouer sur la capacité et le choix du patient. Même si le médecin qui donne au patient des conseils appropriés n'est pas responsable des conséquences d'un refus12, on recommande aux médecins de demander un deuxième avis et de consulter un avocat si le refus risque d'entraîner une morbidité grave ou la mort.

Recommandations relatives au consentement éclairé

  1. Il faut informer les patients qu'ils pourraient recevoir une transfusion de globules rouges, de plasma ou des deux au cours de l'intervention médicale ou chirurgicale prévue et les informer des risques, des avantages et des solutions de rechange disponibles.
         Niveau des données probantes : S/O

  2. Dans la mesure du possible, on devrait obtenir le consentement du patient à une transfusion de globules rouges, de plasma ou des deux, et le consigner dans son dossier médical.
         Niveau des données probantes : S/O

  3. Le médecin responsable des soins doit se charger d'obtenir le consentement éclairé du patient avant de lui transfuser des globules rouges ou du plasma.
         Niveau des données probantes : S/O

  4. Il faut informer les patients qu'ils ont reçu une transfusion de globules rouges ou de plasma après l'avoir administrée.
         Niveau des données probantes : S/O

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| CMAJ June 1, 1997 (vol 156, no 11) / JAMC le 1er juin 1997 (vol 156, no 11) |
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