30e conférence des gouverneurs de la Nouvelle-Angleterre
et des premiers ministres de l'Est du Canada
Newport (Rhode Island)
Du 11 au 13 mai 2006
Gaétan Caron, vice-président
Office national de l'énergie
La réglementation efficace en matière d'énergie est une composante essentielle d'un secteur énergétique prospère et du développement responsable des ressources énergétiques.
Parmi toutes les difficultés qui se posent en matière d'énergie, la plus déterminante est selon moi celle de la capacité de l'infrastructure. Or, presque tous les projets d'infrastructure doivent passer par un processus de réglementation locale, étatique, provinciale ou fédérale. Le développement responsable nécessite que ces mécanismes soient clairs aux yeux de ceux qui ont des intérêts dans l'infrastructure, qu'ils soient citoyens, gouvernements, organismes environnementaux ou promoteurs.
Par la réglementation, on vise entre autres à prendre des décisions dans l'intérêt public. Mais comment définir « l'intérêt public »? À titre d'exemple, voici comment, à l'Office national de l'énergie, nous avons défini ce terme.
Penchons-nous plus longuement sur les trois derniers mots : « rendre une décision ». Je crois que nous devons, en tant que société et en partie à l'aide des processus de réglementation, réapprendre l'art d'être décisif. Parmi les choix que nous devons faire chaque jour sur l'énergie, celui de différer une décision peut être lourd de conséquences. Nous devons notre prospérité actuelle en partie à des décisions difficiles qui ont été prises par le passé. La prospérité de demain et d'après-demain dépend de décisions que nous prenons aujourd'hui. Je crois que nous pouvons réapprendre à décider de manière plus efficace après avoir mené des consultations valables et approfondies. Nous devons rendre leur cohésion aux nombreux processus de décision qui l'ont perdue au fil du temps.
L'une des raisons pour lesquelles nous avons besoin d'un processus décisif est que les investisseurs doivent comprendre le fonctionnement du processus. La prévisibilité des processus et les délais à anticiper avant que lui soit transmise une réponse sont parmi les facteurs les plus décisifs considérés par un investisseur éventuel. Les autres participants au processus de réglementation apprécient aussi de connaître les mécanismes. Ils peuvent ainsi adapter leurs stratégies lorsque vient le temps de se renseigner sur un projet ou de décider de l'appuyer ou de s'y opposer.
Quotidiennement, on génère dans les organismes de réglementation de l'Est du Canada et à l'Office national de l'énergie des idées nouvelles qui permettent d'améliorer le processus. Certes, les organismes de réglementation améliorent parfois leur propre façon de travailler, mais collaboration, dialogue et concertation nous habilitent à améliorer la réglementation et à prendre de meilleures décisions. Quels sont ces organismes de réglementation?
J'ai décidé de parler de « famille » parce que nous ne travaillons pas en vase clos et que nous avons beaucoup en commun. Des discussions continuent de se dérouler à tous les niveaux, entre autres au sein des nombreux comités et lors d'activités organisées par l'Association canadienne des membres des tribunaux d'utilité publique, l'organisme canadien se comparant à la National Association of Regulatory Utility Commissioners (NARUC), autre organisme avec lequel nous collaborons.
Les processus de réglementation sont souvent en interaction avec le processus d'évaluation environnementale. Deux agences de l'Est du Canada sont mentionnées sur cet écran. Bien sûr, il y en a beaucoup d'autres.
De nombreux projets sont réalisés des deux côtés de la frontière internationale. C'est pourquoi les organismes de réglementation du Canada et des États-Unis sont engagés dans un dialogue perpétuel, entre autres par le biais de CAMPUT et d'ententes officielles comme le Protocole d'entente qui a été signé par la FERC et l'ONÉ.
La coexistence de ces organismes représente un avantage pour tous les citoyens. On dit souvent qu'une grande partie de leur qualité de vie repose sur la qualité de leurs institutions publiques, ce que les organismes de réglementation de l'énergie illustrent bien. Leur personnel est dévoué et compétent. Un bon nombre de ces régies sont quasi judiciaires, c'est-à-dire que leur travail est indépendant et soumis à des règles strictes d'équité procédurale et de justice naturelle. Elles ont été conçues pour rendre des décisions difficiles ou controversées à l'abri de l'influence politique. Les élus peuvent donc se concentrer sur les politiques et laisser les organismes de réglementation, en vertu de lois habilitantes, se charger des détails de la mise en oeuvre de ces politiques.
Il faut aussi souligner que la croissance du nombre de régies et l'apparition d'organismes d'évaluation environnementale ayant pour mandat de faire des recommandations sur les aspects environnementaux des projets ont créé des défis stimulants. Les prochains écrans comprendront quelques exemples de tels défis, dont un se rapporte au Nord et les autres à l'Est du Canada. Ils illustrent bien comment nous avons surmonté la difficulté que pose la collaboration avec d'autres organismes dans le cadre de grands projets.
Plusieurs organismes avaient un intérêt dans un aspect ou un autre du projet de l'île de Sable. Parmi eux, l'ONÉ et l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers qui, comme l'Office Canada-Terre-Neuve-et-Labrador des hydrocarbures extracôtiers, illustre bien les partenariats entre le fédéral et le provincial au large des côtes. Au moins trois organismes provinciaux étaient également parties prenantes dans le projet. Nous aurions pu nous retrouver avec cinq audiences, ou même plus. Mais, grâce au bon vouloir de tous les participants, les parties intéressées ont trouvé le moyen d'arriver au résultat escompté en un seul processus, sans s'écarter des lois et des règlements en vigueur. Les cinq membres de la commission ont été nommés en vertu des lois régissant leur organisme respectif. Même les gouvernements en sont sortis gagnants, tout comme le demandeur et les intervenants, ce qui, je crois était véritablement conforme à l'intérêt public. Le gaz s'écoule maintenant depuis plusieurs années et est une composante essentielle des réseaux énergétiques canadien et nord-américain.
Parlons maintenant de la planification d'une audience qui n'a pas eu lieu, parce que la demande n'a pas été déposée, mais pour laquelle nous étions tout à fait préparés. Le projet Deep Panuke consistait à mettre en valeur d'autres ressources en gaz naturel au large de la Nouvelle-Écosse. Encore là, les organismes en présence auraient pu tenir au moins deux audiences, mais nous nous sommes entendus pour qu'un commissaire de l'OCNHE et un membre de l'ONÉ entendent la demande et la renvoient à leur organisme d'appartenance respectif afin que chacun rende sa décision.
Voici un sommaire de notre démarche.
Bien que la bonne volonté des membres de nos organismes puisse engendrer des solutions qui répondent aux exigences des cadres législatif et réglementaire, ces solutions sont parfois complexes et exposent le processus à des risques, en plus de comporter une part d'incertitude.
On a aussi proposé des solutions inusitées dans le cadre des projets de pipelines du Nord. On voit ici certains des projets les plus célèbres : à gauche, le pipeline que l'on propose de construire pour apporter le gaz de l'Alaska aux marchés nord-américains. À droite, le projet gazier Mackenzie, qui fait actuellement l'objet d'audiences de l'ONÉ et de la Commission d'examen conjoint, laquelle s'attarde surtout à ses aspects environnementaux et socio-économiques.
En signant un plan de coopération, 14 organisations gouvernementales se sont engagées à mener deux processus parallèles d'examen public du projet gazier Mackenzie. Ainsi, chacune joue un rôle légitime dans le processus. Plusieurs d'entre elles ont été créées selon les dispositions d'une loi bien précise, et certaines sont le résultat d'une entente de revendication territoriale avec les peuples autochtones.
Voici un graphique simplifié qui illustre le fonctionnement du processus pour tous ses participants.
Pour nous qui sommes chargés de la réglementation et pour les spécialistes, conseillers ou avocats qui participent au processus, sa complexité n'impressionne plus.
Ce n'est pas le cas des intervenants, ni des citoyens qui cherchent à s'engager dans un débat public sur un projet, ni des investisseurs ou des promoteurs. Le mécanisme d'examen public adopté pour un projet ne fonctionnera pas nécessairement pour un autre. Les solutions adoptées dans les cas précédents sont très différentes. Ces groupes ne peuvent prévoir avec certitude le mécanisme d'un projet. Ils n'en connaissent pas la durée et ne savent pas qui prendra la décision, qui fera des recommandations ou qui donnera des conseils. C'est ainsi que la prise de décision se fragmente et que s'infiltre l'incertitude. Notre société court le risque de perdre lentement sa capacité de décider. Cette perte nuira aux nouvelles idées en matière d'énergie et à notre prospérité économique, sociale et environnementale.
L'incertitude à propos du mécanisme et des délais prend une importance particulière pour les investisseurs qu'elle peut dissuader de se lancer dans un projet. J'ai souvent entendu des gens d'affaires dire « Bon, le processus n'est pas parfait, mais si on me l'explique et qu'on me dit combien de temps il prendra, je peux m'y habituer ».
En concentrant bien nos efforts, je suis convaincu que nous trouverons des éléments de solutions, dont certains sont en voie d'être mis en pratique.
Encore une fois, les organismes de réglementation travaillent d'arrache-pied pour assurer la cohérence des lois et des processus de réglementation. Ces derniers continueront bien sûr de s'améliorer, mais je suis d'avis qu'il est préférable que notre société vise plus haut et prenne des mesures législatives ou administratives.
Voici des exemples.
Jeudi dernier, le premier ministre Charest a annoncé la nouvelle stratégie québécoise en matière d'énergie, qui comprend une volonté de moderniser le cadre législatif et réglementaire du secteur de l'énergie. En pratique, cela consiste en partie à préciser le rôle de la Régie de l'énergie dans l'évaluation de la justification énergétique et économique des projets et, en même temps, de clarifier le mandat environnemental du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.
Le projet de gazoduc Brunswick vise à transporter le gaz naturel d'une usine de GNL près de Saint John, au Nouveau-Brunswick, vers les États-Unis. Jeudi dernier, on a annoncé un projet pilote, suivant lequel le processus de l'ONÉ sera substitué à l'évaluation environnementale par une commission prescrite par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Il s'agit d'une mesure administrative conforme à la législation en vigueur.
Je vous donne en dernier lieu l'exemple du concept d'organisme directeur, mis de l'avant aux États-Unis en application d'une loi récente sur l'énergie. La FERC a été désignée, pour certaines demandes, comme organisme directeur. Ce concept vise en premier lieu à encourager les examens conjoints et à réduire au minimum le dédoublement de processus, pour ultimement réduire le temps de traitement des demandes et d'octroi d'autorisations pour les projets de gazoducs interétatiques. Ce concept rend le procédé plus prévisible, notamment quant aux délais, sans réduire le pouvoir discrétionnaire des organismes participants. À ma connaissance, ce concept n'a pas été mis à l'essai au Canada, du moins pas au fédéral, mais j'aimerais qu'on le fasse.
Pour conclure, je désire encourager les décideurs et les élus à continuer d'améliorer les mécanismes du processus de réglementation pour en mieux définir le fonctionnement et la durée. J'espère que vous saurez tirer de cette présentation l'inspiration nécessaire à trouver des idées adaptées à votre champ de compétence ou à votre région.
Cadre législatif et processus de réglementation au
Canada
Gouvernement fédéral et provinces de l'Est du Canada
Gaétan Caron
Vice-président
Office national de l'énergie
La réglementation efficace en matière d'énergie est une composante essentielle de la prospérité du secteur et du développement responsable de nos ressources en énergie.
Parmi toutes les difficultés qui s'opposent aux nouvelles idées en matière d'énergie, la plus déterminante, selon moi, est celle que pose la capacité de l'infrastructure. La plupart des projets touchant l'infrastructure sont assujettis à un processus de réglementation locale, étatique, provinciale ou fédérale. On ne peut aspirer au développement responsable sans clarifier les mécanismes de ces processus auprès de ceux qui s'intéressent à l'infrastructure, qu'ils soient citoyens, gouvernements, organismes environnementaux ou promoteurs. Des mécanismes imprécis entraînent l'incertitude quant aux procédés et aux délais qui peut dissuader les investisseurs, ce qui représente un problème d'intérêt particulier pour les promoteurs de projets énergétiques.
Quotidiennement, on génère dans les organismes de réglementation de l'Est du Canada et à l'Office national de l'énergie des idées nouvelles qui permettent d'améliorer le processus. Certes, les organismes de réglementation améliorent parfois leur propre façon de travailler, mais collaboration, dialogue et concertation nous habilitent à améliorer la réglementation et à prendre de meilleures décisions.
Il faut aussi souligner que la croissance du nombre de régies et l'apparition d'organismes d'évaluation environnementale ayant pour mandat de faire des recommandations sur les aspects environnementaux des projets ont créé des défis stimulants.
Cette présentation comprendra quelques exemples de tels défis, dont un se rapporte au Nord et les autres à l'Est du Canada. Ils illustrent bien comment, jusqu'ici, nous avons surmonté la difficulté que pose l'évaluation de grands projets énergétiques par plusieurs organismes ainsi mandatés.
En concentrant judicieusement nos efforts, nous pourrons dégager des éléments de solutions dont certains sont déjà mis en pratique. Les organismes de réglementation et agences s'acharnent à assurer la cohérence des lois et des processus de réglementation. Quoiqu'ils ne cessent de s'améliorer, nous devons viser plus haut et prendre des mesures législatives et administratives, dont je vous donnerai des exemples dans ma présentation.
Pour conclure, j'encourage les décideurs et les élus à continuer d'améliorer les mécanismes du processus de réglementation pour en mieux définir le fonctionnement et la durée.
J'espère que vous saurez tirer de cette présentation l'inspiration nécessaire à trouver des idées adaptées à votre champ de compétence ou à votre région.