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T. Elton-Marshall, Ph. D. (1,2); S. T. Leatherdale, Ph. D. (2); S. R. Manske, D. Ed. (1); K. Wong, M. Sc. (1); R. Ahmed, Ph. D. (1,3); R. Burkhalter, M. Math. (1)
Cet article a fait l’objet d’une évaluation par les pairs.
Rattachement des auteurs :
Correspondance : Scott T. Leatherdale, École de la santé publique et des systèmes de santé, Faculté des sciences de santé appliquées, Université de Waterloo, 200 University Ave West, Waterloo (Ontario) N2L 3G1; tél. : 519-888-4567, poste 37812; téléc. : 519-886-6424; courriel : sleather@uwaterloo.ca
Cet article décrit le processus d’élaboration, le plan de sondage et le protocole de collecte de données de l’Enquête sur le tabagisme chez les jeunes (ETJ) 2008-2009, de même que les modifications apportées au questionnaire et au protocole de l’Enquête d’un cycle à l’autre (5 cycles au total : 1994, 2002, 2004-2005, 2006-2007 et 2008-2009). L’Enquête sur le tabagisme chez les jeunes est une enquête canadienne en milieu scolaire représentative de la population nationale, menée auprès d’élèves (de 6e à 12e année en 2008-2009) d’établissements scolaires publics ou privés des dix provinces choisis de manière aléatoire. L’objectif principal de l’ETJ est de fournir des données de référence sur les taux nationaux de tabagisme chez les jeunes. Les principales caractéristiques de ETJ 2008-2009 sont une constance par rapport aux cycles antérieurs de l’Enquête, la multidisciplinarité de l’équipe, formée de chercheurs et d’organismes non gouvernementaux, l’établissement d’un lien avec les mesures individuelles (élèves) et les mesures relatives aux établissements scolaires, la production de rapports de rétroaction personnalisés destinés aux établissements et enfin la diffusion publique des ensembles de données.
Mots-clés : jeunes, tabagisme, Enquête sur le tabagisme chez les jeunes, cycles d’enquête, questionnaires
La réalisation d’enquêtes nationales sur le tabagisme chez les jeunes est nécessaire à la compréhension des facteurs sociaux, réglementaires, éducationnels et commerciaux associés au tabagisme; elle est également essentielle à la compilation de données servant à guider les politiques et les programmes de lutte contre le tabagisme et à surveiller la consommation de tabac au Canada1. L’Enquête sur le tabagisme chez les jeunes (ETJ) est la seule enquête nationale en milieu scolaire sur le tabagisme au Canada. Il s’agit d’une enquête transversale menée en classe auprès d’un échantillon représentatif d’établissements scolaires des 10 provinces canadiennes. À sa première édition, en 1994, l’ETJ était l’enquête la plus importante et complète sur le tabagisme chez les élèves de 5e à 9e année à avoir lieu depuis 1979. Jusqu’à présent, cinq cycles ont été réalisés (1994, 2002, 2004-2005, 2006-2007, 2008-2009) afin d’évaluer les changements observés au fil des années. En 2006-2007, la population à l’étude a été revue afin d’y inclure tous les élèves des écoles secondaires (c.-à-d. ajout des élèves de 10e à 12e année pour la plupart des provinces et, au Québec, des élèves de secondaire 4 et 5). La population ciblée par l’ETJ 2008-2009 était semblable à celle de l’ETJ 2006-2007, mais excluait les élèves de 5e année, chez qui une très faible prévalence du tabagisme est observée.
L’ETJ bénéficie de la collaboration, du soutien et du financement de la Direction des substances contrôlées et de la lutte au tabagisme (DSCLT) de Santé Canada. L’équipe de recherche interdisciplinaire pancanadienne est formée de membres provenant d’universités et d’organismes non gouvernementaux de partout au pays. L’objectif principal de l’ETJ est de fournir sur une base bisannuelle des données de référence comparables sur la prévalence nationale et provinciale du tabagisme chez les jeunes et de guider l’élaboration de politiques et la prise de décision. L’Enquête représente aussi une occasion unique de faire progresser notre compréhension des corrélats psychosociaux associés au tabagisme, notamment les facteurs qui président à l’adoption et à la cessation du tabagisme. De plus, elle permet l’examen des différences individuelles qui expliquent les effets variables que peuvent avoir les stratégies de mise en marché des produits du tabac, les mesures de contrôle dans les établissements de vente et autres initiatives stratégiques. L’ETJ fournit un portrait détaillé des méthodes employées par les jeunes pour se procurer des cigarettes, des comportements liés au tabagisme et des effets de la promotion continue des produits du tabac. Ces renseignements revêtent une importance cruciale lorsqu’il s’agit de déterminer si l’on doit intensifier les mesures réglementaires de contrôle et renforcer le soutien du public en la matière. D’ordinaire, les stratégies d’intervention ciblant les enfants et les jeunes reçoivent spontanément l’appui des législateurs et de la population, et elles permettent aussi souvent une réduction de la prévalence du tabagisme chez les adultes. L’absence d’enquêtes du type de l’ETJ rendrait impossible l’évaluation de l’efficacité des mesures de prévention adoptées dans la lutte contre le tabagisme.
Cet article décrit le processus d’élaboration, le plan de sondage et le protocole de collecte de données de l’ETJ 2008-2009, de même que les modifications apportées à l’Enquête par rapport à ses quatre cycles antérieurs. Il est possible d’obtenir des renseignements supplémentaires sur le plan de sondage, les mesures et les protocoles du cycle 2008-2009 de l’ETJ et des cycles antérieurs sur Internet*.
L’ETJ 2008-2009 a été mise en œuvre par un regroupement pancanadien d’universités et d’organismes non gouvernementaux, dont la direction principale était assurée par les membres de la Youth Health Team du Propel Centre for Population Health Impact de l’Université de Waterloo (Ontario), les membres des 9 autres provinces assurant la direction dans leurs provinces respectives. Les membres ont déterminé le contenu du questionnaire au cours de téléconférences en tenant compte de l’avis des absents, qui leur avait été préalablement communiqué. De cette façon, les intervenants provinciaux et les représentants du gouvernement fédéral ont pu veiller à ce que le questionnaire mesure des variables pertinentes pour chaque province et que les éléments de base (nécessaires au calcul des taux de prévalence du tabagisme et d’autres variables clés comparables) soient conservés. Les questions ajoutées au questionnaire existant ont été choisies selon leur pertinence, la priorité étant accordée aux questions liées aux programmes d’action alors en cours. Les membres du regroupement ont déterminé par consensus le contenu final du questionnaire après avoir évalué par téléconférence chaque question proposée.
Chaque cycle de l’ETJ permet l’ajout de quelques nouveaux éléments; ce faisant, il faut en retrancher un nombre équivalent au questionnaire afin de ne pas l’allonger. Certains éléments sont classés dans la catégorie des « items périodiques », qui n’apparaissent pas à tous les cycles, tandis que d’autres sont complètement supprimés s’ils ne sont plus pertinents. Cette méthode permet de repérer les nouvelles tendances à surveiller tout en suivant l’évolution des tendances avec le temps grâce au maintien des éléments de base du questionnaire (pour consulter la liste des éléments du questionnaire à chaque cycle, voir le guide de l’utilisateur de l’ETJ 2008)2.
L’élaboration du contenu de l’ETJ 2008-2009 a été guidée par quelques principes clés :
Les versions préliminaires (anglaise et française) du questionnaire ont été testées préalablement à la mise en œuvre de l’ETJ. Au cours de séances de deux heures, des élèves fumeurs et non fumeurs de toutes les années scolaires ont rempli le questionnaire de manière individuelle en notant leurs questions et commentaires. Ils ont ensuite participé à une rencontre de 75 minutes en groupe de discussion, tenue dans leur langue maternelle, sous la direction d’un modérateur ayant recours à un guide conçu à cette fin. Le modérateur a évalué la compréhension des questions par les élèves (en portant une attention particulière à toutes les nouvelles questions), la logique et l’ordre des questions et la fluidité générale du questionnaire. Les objectifs de ces séances pilotes étaient d’évaluer 1) le temps pris par les élèves pour remplir le questionnaire, 2) la compréhension des questions par les élèves (notamment des nouvelles questions) et 3) la logique et l’ordre des questions de même que la fluidité générale du questionnaire. Santé Canada et l’équipe de mise en œuvre de l’ETJ se sont ensuite conjointement fondés sur les conclusions tirées de ces rencontres afin d’apporter des modifications aux questionnaires.
Un grand nombre d’éléments employés dans le cadre d’autres enquêtes sur le tabagisme chez les jeunes (Global Youth Tobacco Survey3, Ontario Student Drug Use and Health Survey4) ont été jugés fiables (p. ex. les questions sur la consommation actuelle d’alcool, de marijuana et de tabac du Questionnaire sur les comportements à risque des jeunes)5,6, et ont été validés par d’autres études (p. ex. l’évaluation de l’attitude vis-à-vis du tabagisme et l’intention de fumer)7.
Tous les protocoles et instruments, dont la version définitive du questionnaire, ont reçu l’approbation de l’Office of Research Ethics de l’Université de Waterloo de même que des comités d’examen locaux, lorsque nécessaire (p. ex., à certains endroits, obtention de l’approbation de l’établissement hôte provincial et du conseil scolaire).
Variables de base. Afin d’assurer une constance entre les cycles, les variables de base sont demeurées inchangées d’un cycle à l’autre. Il s’agissait entre autres des variables employées pour définir le statut du répondant en matière de tabagisme selon les définitions de Santé Canada, des indicateurs clés sur le plan de la prévention comme la susceptibilité au tabagisme, l’âge d’adoption du tabagisme et la quantité de cigarettes fumées, et des variables démographiques clés. Les résultats de base mesurés par l’ETJ étaient la susceptibilité au tabagisme chez les jeunes n’ayant jamais fumé et le statut en matière de tabagisme. L’algorithme validé de Perce et collab. a été employé afin de mesurer la susceptibilité au tabagisme chez les jeunes n’ayant jamais fumé (même pas quelques bouffées)8 à partir des réponses aux questions suivantes, notées sur une échelle de Likert en 4 points : « Penses-tu qu’à l’avenir, tu pourrais essayer de fumer des cigarettes? », « Si un de tes meilleurs amis t’offrait une cigarette, la fumerais-tu? » et « Penses-tu qu’au cours de la prochaine année, tu fumeras une cigarette? ». Les jeunes n’ayant jamais fumé qui ont répondu « non, sans aucun doute » à chacune de ces trois questions ont été considérés comme non vulnérables au tabagisme, tandis que les jeunes ayant coché une réponse positive à au moins une de ces questions ont été considérés comme vulnérables au tabagisme.
Le statut en matière de tabagisme a été déterminé en demandant aux élèves s’ils avaient déjà essayé de fumer une cigarette (même seulement quelques bouffées), s’ils avaient déjà fumé une cigarette entière, s’ils avaient jusqu’à présent fumé plus de 100 cigarettes entières au cours de leur vie et combien de fois au cours des 30 jours précédents ils avaient fumé une cigarette entière ou plus d’une cigarette. Les répondants ont été regroupés dans les huit catégories suivantes en fonction des définitions opérationnelles du tabagisme de Santé Canada pour l’ETJ9 : fumeur quotidien actuel (a fumé au moins 100 cigarettes et fume actuellement tous les jours), fumeur occasionnel actuel (a fumé au moins 100 cigarettes et fume actuellement, mais pas tous les jours), ancien fumeur (a fumé au moins 100 cigarettes mais n’a pas fumé du tout au cours des 30 derniers jours), fumeur à titre expérimental (a fumé au cours des 30 derniers jours mais n’a pas fumé au moins 100 cigarettes), ancien fumeur à titre expérimental (a déjà fumé une cigarette entière mais n’a pas fumé au cours des 30 derniers jours et n’a pas fumé au moins 100 cigarettes), jeune n’ayant pris que des bouffées (a essayé la cigarette mais n’a jamais fumé une cigarette entière) et jeune n’ayant jamais fumé (n’a jamais essayé la cigarette, pas même quelques bouffées).
Variables secondaires. Les variables secondaires ont permis de recueillir des renseignements sur la manière dont les jeunes se procurent des cigarettes, l’endroit où ils se les procurent, leur exposition à la fumée secondaire, leur sensibilisation aux effets du tabagisme sur la santé et leurs attitudes et croyances face au tabagisme et les comportements liés à la santé qui en découlent. Les réponses obtenues participent à la compréhension du tabagisme et de son adoption chez les jeunes ainsi qu’à la compréhension d’autres comportements associés (p. ex. temps passé devant la télévision ou à jouer à des jeux vidéo). (L’annexe A du Guide de l’utilisateur des microdonnées 2008 présente une liste complète des questions posées aux élèves dans le cadre de l’ETJ, selon le cycle2).
Enchaînement des questions. Le questionnaire destiné aux élèves a été intentionnellement conçu sans sauts de questions pour que les fumeurs ne puissent pas être identifiés en classe selon le temps pris pour remplir le questionnaire. Ainsi, toutes les questions sur les habitudes en matière de tabagisme comportaient un choix de réponse du type « Je ne fume pas ». Cependant, en raison de l’ordre logique des questions, certaines d’entre elles étaient rendues superflues par la réponse à une question précédente. Dans ces cas, un saut de question a été imposé selon les définitions opérationnelles applicables à certaines variables dans le fichier de microdonnées à grande diffusion (FMGD), à savoir l’ensemble de données anonymes accessible par les chercheurs. Ainsi, lorsqu’une question aurait pu être sautée si la structure du questionnaire l’avait permis, elle recevait le code 96, 996 ou 9996 dans le FMGD. Par exemple, les fumeurs répondaient tout de même aux questions sur la susceptibilité au tabagisme, mais les réponses à ces questions recevaient un code de « saut valide » et étaient exclues des analyses relatives à la susceptibilité de fumer.
Depuis le cycle 2004-2005, l’ETJ emploie le Système d’intervention, de planification et d’évaluation de la santé dans les écoles (SIPÉSÉ) pour la collecte de données en milieu scolaire. Par conséquent, tous les établissements scolaires ont reçu un rapport de rétroaction personnalisé et un sommaire des résultats dans les 10 semaines suivant la collecte des données. Ce rapport fournit de l’information propre à l’école sur la prévalence du tabagisme et sur d’autres facteurs comportementaux (p. ex. temps consacré à la lecture) et environnementaux (p. ex. consommation de tabac sur le terrain de l’école). En guise de supplément à l’ETJ, des renseignements sur l’environnement scolaire (programmes, politiques et cadre bâti) ont aussi été recueillis†.
† Il est possible d’obtenir de plus amples renseignements sur le SIPÉSÉ et des exemples de rapports à l’adresse suivante : www.shapes.uwaterloo.ca
La population visée par l’ETJ est formée de tous les jeunes habitants du Canada fréquentant une école publique ou privée dans l’une ou l’autre des 10 provinces canadiennes. Les habitants du Yukon, du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest, les personnes vivant en établissement et les habitants des réserves des Premières nations sont exclus du champ de l’Enquête, tout comme les jeunes fréquentant une école spéciale (p. ex. écoles pour les aveugles ou les sourds et muets) ou une école située sur une base militaire.
L’équipe ETJ du Propel Centre a compilé une liste exhaustive de tous les établissements scolaires canadiens par l’entremise des sites Internet des ministères de l’Éducation provinciaux. L’échantillonnage a été réalisé selon un plan stratifié à plusieurs degrés, la stratification étant effectuée selon la prévalence du tabagisme dans la région sanitaire et le type d’école (primaire ou secondaire). Pour le degré 1, l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) a été employée afin de déterminer la prévalence du tabagisme chez les jeunes de 15 à 19 ans dans chaque région sanitaire. Les listes des écoles obtenues des ministères de l’Éducation des 10 provinces comportaient des données sur l’inscription par année scolaire pour chaque école, ce qui a permis une pondération selon le nombre total d’élèves admissibles à l’Enquête par région sanitaire dans le calcul de la prévalence médiane du tabagisme dans chaque province. Le code postal à six caractères de chaque établissement scolaire a servi à déterminer la région sanitaire d’appartenance des écoles. Ces dernières ont ensuite été réparties en deux strates en fonction du taux de prévalence du tabagisme de leur région sanitaire à la médiane, « faible prévalence du tabagisme » et « forte prévalence du tabagisme », cette strate regroupant les écoles pour lesquelles la prévalence était égale ou supérieure à la médiane.
Dans le degré 2, les écoles ont été réparties dans deux strates selon qu’il s’agissait d’écoles primaires ou secondaires (statut déterminé en fonction du nombre d’élèves inscrits en 6e, 7e et 8e année par rapport au nombre d’élèves inscrits en 9e, 10e, 11e et 12e année). Les écoles primaires et secondaires ont été échantillonnées selon un ratio de 2:1 en raison des effectifs inférieurs des écoles primaires. De plus, un suréchantillonnage a été effectué dans chaque province en fonction des taux provinciaux de participation des écoles observés pour les cycles 2004-2005 et 2006-2007 de l’ETJ.
En Ontario, le plan de sondage du cycle 2008-2009 prévoyait l’emploi d’une troisième strate relative à la région sanitaire, la « région du Grand Toronto » (RGT), en raison de la taille de la RGT et de l’importance de pouvoir sonder des écoles du Grand Toronto même en cas de refus des grands conseils scolaires de la ville de Toronto.
La sélection des écoles privées a été effectuée par échantillonnage simple aléatoire dans chaque province. Le nombre d’écoles retenu était plus ou moins proportionnel au nombre d’élèves inscrits dans les écoles privées de la province en comparaison avec les écoles publiques. Le plan d’échantillonnage de l’ETJ a été conçu de manière à permettre l’obtention d’un échantillon représentatif de l’ensemble des jeunes habitants des provinces canadiennes.
Le taux de participation au cycle 2008-2009 a été de 84 % pour les conseils scolaires (nombre de conseils ayant accepté de participer à l’ETJ/nombre de conseils sollicités), de 59 % pour les écoles (nombre d’écoles ayant accepté de participer à l’ETJ/nombre d’écoles sollicitées) et de 73,2 % pour les élèves (nombre de questionnaires remplis/nombre d’élèves admissibles, les élèves absents recevant le statut de non-répondant).
Dans toutes les provinces, les coordonnateurs de l’ETJ ont d’abord communiqué soit avec les conseils scolaires, dans le cas du système public, soit directement avec les écoles privées, en raison de l’absence, dans ce cas, de conseils chargés d’approuver les demandes d’étude auprès de ces établissements. Les communications ont été effectuées par l’entremise d’un formulaire officiel propre à chaque conseil scolaire ou d’une trousse normalisée de recrutement des conseils contenant une lettre d’invitation destinée aux écoles, une brochure explicative, un questionnaire de l’élève, des documents explicatifs et un formulaire d’autorisation à l’intention des parents, et un exemple de rapport de rétroaction à l’école‡. Les coordonnateurs provinciaux ont ensuite assuré un suivi par téléphone auprès des conseils abordés afin de répondre à leurs questions et, idéalement, d’obtenir leur accord au recrutement des écoles. Lorsqu’un conseil autorisait la tenue de l’étude, des trousses d’information identiques aux trousses destinées aux conseils étaient envoyées aux écoles concernées et un suivi par téléphone était assuré. L’obtention de l’autorisation des écoles était nécessaire à la tenue de l’ETJ auprès des élèves admissibles.
Dans chaque école participante, tous les élèves des années admissibles (6e à 12e année) recevaient une demande de participation à l’Enquête. Un protocole d’approbation parentale active a été employé par les conseils ou les écoles dans 62 % des classes de 6e à 8e année (n = 913) et dans 19 % des classes de 9e à 12e année (n = 372). Les élèves apportaient alors à la maison une lettre d’information présentant l’ETJ en détail, et ils devaient rapporter à l’école un formulaire parental et un formulaire de l’élève signés pour être en mesure de remplir le questionnaire. Dans 81 % des classes du secondaire (n = 1 631), un protocole d’approbation parentale passive a été employé afin de réduire le fardeau imposé aux établissements scolaires et d’améliorer le taux de participation à l’ETJ. Ce protocole prévoyait l’envoi par la poste d’une lettre d’information détaillée aux parents, qui devaient appeler un numéro sans frais s’ils refusaient que leurs enfants participent à l’Enquête. Les élèves concernés étaient inscrits sur une liste spéciale et, le jour de la collecte des données, ils ne recevaient pas le questionnaire, qui était remis à tous les autres élèves. À ce moment, tous les élèves étaient libres de refuser de remplir le questionnaire, et ce, que l’on ait reçu ou non l’autorisation de leurs parents.
Les coordonnateurs provinciaux de l’ETJ ont communiqué avec une personne-ressource de chaque établissement scolaire afin de prendre les arrangements nécessaires en vue de la collecte des données. À la date et à la période convenues, les enseignants ont fait remplir le questionnaire par les élèves conformément aux protocoles normalisés qui leur avaient été remis. Afin d’assurer la confidentialité et l’honnêteté des réponses, les enseignants avaient reçu la directive d’éviter de circuler dans la classe pendant que les élèves répondaient au questionnaire. À la fin de la période, les élèves devaient placer le questionnaire rempli dans une enveloppe et la cacheter avant qu’un de leurs collègues ne passe la ramasser. Lorsqu’il était prévu que les parents répondent à certaines questions, un consentement actif était exigé, et une feuille détachable sur laquelle était inscrit le nom de l’élève était jointe au questionnaire. L’élève devait détacher cette feuille de son questionnaire; un numéro de série inscrit sur les deux documents permettait de lier les réponses de l’élève à celles de ses parents pour les cycles prévoyant la réalisation conjointe d’une interview auprès des parents. Les données établissant le lien entre le nom de l’élève et ses réponses ont été retirées de tous les ensembles de données rendus accessibles au public, et seuls les intervenants appelés à jouer un rôle direct dans l’Enquête ont eu accès à ces données nominatives. En moyenne, les élèves ont pris entre 30 et 40 minutes pour répondre au questionnaire. Une personne-ressource chargée de la collecte des données était présente dans l’établissement pendant que les élèves remplissaient le questionnaire afin de répondre à leurs questions et de recueillir les questionnaires remplis.
‡ Il est possible d’obtenir un exemplaire des documents employés (p. ex. questionnaires, rapports de rétroaction) à l’adresse : http://yss.uwaterloo.ca/fr/?section=1003&page=254&CFID=3322583&CFTOKEN=12861849
Les données ont été compilées électroniquement à l’aide de la technologie de lecture optique des marques (OMR). Des mesures de contrôle de la qualité (inspection visuelle, lecture optique double à la recherche d’anomalies) ont été employées afin d’en assurer la fidélité. Un système en ligne de mise en œuvre de l’Enquête (OSIS) a permis une gestion centralisée des processus de recrutement, de mise en œuvre, d’analyse et de rétroaction.
Des coefficients de pondération ont été employés afin d’assurer la représentativité des résultats en fonction de la population générale visée, à savoir les jeunes Canadiens qui fréquentent un établissement scolaire. La pondération s’est faite en deux temps. Premièrement, on a créé un coefficient (W1) pour tenir compte de la sélection d’écoles dans les strates relatives à la région sanitaire et au type d’établissement scolaire, puis un coefficient (W2) a été calculé pour prendre en compte le taux de non-réponse des élèves. Les coefficients ont ensuite été ajustés en fonction de la distribution provinciale des élèves selon le sexe et l’année scolaire afin que les totaux pondérés selon le sexe, l’année scolaire et la province égalent le nombre réel d’inscriptions à l’école selon ces catégories. Finalement, des coefficients de pondération ont été déterminés pour chaque province à l’aide de la méthode bootstrap afin d’estimer l’erreur d’échantillonnage.
Les protocoles décrits dans les sections précédentes ont été employés pour la mise en œuvre du cycle 2008-2009 de l’ETJ. La constance des protocoles employés est reconnue comme une force de l’ETJ puisqu’elle permet la comparaison des données issues de ses différents cycles. Quelques modifications ont toutefois été apportées aux protocoles et aux stratégies d’échantillonnage au fil des années en fonction de l’expérience acquise d’un cycle à l’autre. Ces modifications ont principalement visé à améliorer les taux de recrutement et de participation des élèves et à réduire le fardeau imposé aux établissements scolaires participants. Cette section décrit quelques-uns des changements d’importance qui ont été apportés à l’ETJ au fil des années.
Modifications relatives à l’Enquête. L’un des plus importants changements apportés à l’ETJ concerne le cycle 2004-2005, qui marque le moment où la direction de l’Enquête est passée de Statistique Canada à l’Université de Waterloo. En 1994 et 2002, le contenu de l’ETJ avait été élaboré par le Bureau de contrôle du tabac de Santé Canada, et les données avaient été compilées par Statistique Canada. Comme mentionné précédemment, le Propel Centre for Population Impact de l’Université de Waterloo (anciennement le Population Health Research Group et le Centre for Behavioural Research and Program Evaluation) assure depuis 2004-2005 la direction centrale de l’ETJ.
Modifications relatives au questionnaire. Le tableau 1 présente un résumé des différences observées d’un cycle à l’autre de l’Enquête. Jusqu’en 2006-2007, l’échantillonnage était effectué auprès des élèves de 5e à 9e année seulement. En 1994, tous les élèves ont répondu au même questionnaire tandis qu’en 2002 et en 2004-2005, les élèves de 7e à 9e année ont répondu à des questions supplémentaires sur la consommation d’alcool et de drogues. En 2006-2007, des élèves de 7e à 12e année ont aléatoirement reçu l’une ou l’autre de deux versions du questionnaire; même si la majorité des questions étaient identiques d’une version à l’autre, notamment les questions relatives à la consommation d’alcool et de drogues, les deux questionnaires comportaient chacun un ensemble de questions supplémentaires différentes (p. ex., un questionnaire comportait des questions sur la consommation de tabac sur le terrain de l’école, tandis que, dans l’autre, on cherchait à se renseigner sur les croyances des élèves relativement aux effets nocifs de la cigarette). Tous les autres élèves (5e et 6e année) sondés au cours du cycle 2006-2007 ont reçu un questionnaire ne comportant pas de questions sur la consommation d’alcool et de drogues. Comme deux questionnaires ont été employés au cours de ce cycle, deux pondérations des données ont été effectuées, et deux Guides de l’utilisateur des microdonnées ont été produits afin de faciliter l’utilisation des données recueillies.
En 2008-2009, les élèves de 5e année ont été exclus du champ de l’Enquête, principalement en raison de la faible prévalence du tabagisme observée dans ce groupe et de la difficulté qu’avaient les élèves à remplir le questionnaire dans le temps alloué. Les élèves de 6e année ont reçu un questionnaire ne comportant pas de questions sur la consommation d’alcool et de drogues, tandis que les élèves de 7e à 12e année ont dû répondre à de telles questions.
Collaboration. Dans la mesure du possible, l’ETJ a été réalisée au même moment que d’autres collectes de données. En 2006-2007, l’équipe de l’ETJ a collaboré avec le Groupe de recherche en santé et en éducation (GRSÉ) de l’Université du Nouveau-Brunswick et avec le Comprehensive School Health Research Group de l’Île-du-Prince-Édouard pour la mise en œuvre de leurs enquêtes provinciales 2008-2009 (NB Wellness Survey et SHAPES-PEI, respectivement). Les deux enquêtes visaient la collecte de données sur le tabagisme (ETJ), l’alimentation saine (AS), l’activité physique (AP) et la santé mentale (SM) auprès d’élèves de 5e à 12e année (de 6e à 12e année dans le cas de la NB Wellness Survey, à l’exception des écoles échantillonnées par l’ETJ, qui visait les élèves de 5e à 12e année). Les données recueillies comprenaient un recensement des écoles admissibles dans chaque province. L’ensemble de données de l’ETJ ne comprenait pas les données recueillies dans le cadre des modules supplémentaires de la NB Wellness Survey ou de SHAPES-PEI, mais il incluait toutefois les données relatives aux élèves additionnels ayant répondu à l’ETJ. Les procédures de collecte de données employées étaient donc légèrement différentes dans le cas du Nouveau-Brunswick et de l’Île-du-Prince-Édouard. Le tableau 1 présente un résumé des différences relatives à la collecte des données.
En 1994, le plan d’échantillonnage consistait en un plan à deux degrés stratifié avec grappes dans lequel les écoles constituaient l’unité d’échantillonnage primaire et les classes, l’unité secondaire. Le plan d’échantillonnage comportait deux niveaux de stratification. Chaque province représentait la strate principale, puis une stratification implicite par niveau de scolarité était employée. Les écoles étaient sélectionnées systématiquement selon une probabilité proportionnelle à leur taille (nombre total d’élèves de chaque année). Les classes étaient ensuite sélectionnées aléatoirement, et tous les élèves d’une classe choisie faisaient partie de l’échantillon final.
En 2002, le plan d’échantillonnage comportait trois niveaux de stratification. Chaque province représentait la strate principale, puis une stratification implicite par niveau de scolarité était employée. Les écoles étaient ensuite stratifiées selon leur appartenance ou non à une région métropolitaine de recensement (RMR). Dans le cas du Québec (Montréal) et de l’Ontario (Toronto), des strates supplémentaires ont été ajoutées. Un échantillon indépendant a ensuite été sélectionné dans chaque strate, ce qui signifiait que certaines écoles pouvaient être sélectionnées plus d’une fois, pour des niveaux de scolarité différents. Les classes étaient ensuite sélectionnées aléatoirement dans les écoles recrutées.
En 2004-2005, l’échantillonnage a été réalisé selon un plan à deux degrés. Dans le degré 1, les conseils scolaires ont été échantillonnés dans chaque province. L’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) a servi à déterminer la prévalence estimative du tabagisme dans chaque région sanitaire, puis on a estimé le taux de prévalence du tabagisme chez les adultes pour chaque conseil scolaire, ce qui a permis un classement des conseils et leur répartition dans deux strates, à savoir la « strate supérieure » et la « strate inférieure ». Dans le degré 2, les écoles ont été échantillonnées à partir de la liste des conseils scolaires choisis, ces derniers ayant été sélectionnés en fonction du taux de tabagisme chez les adultes. Dans chaque conseil scolaire, les écoles ont été réparties dans deux strates : la strate « senior » (élèves des dernières années du primaire ou élèves du secondaire) et la strate « junior » (élèves des écoles ne comportant que des classes de 5e, 6e, 5e-6e, 5e-7e et 6e-7e année). Lorsque cela était possible, les écoles de la strate « junior » ont été suréchantillonnées. On a fait passer le questionnaire aux élèves de toutes les années scolaires ciblées à l’intérieur des écoles, et pas simplement à certaines classes choisies aléatoirement.
Le plan d’échantillonnage employé pour le cycle 2006-2007 était le même que pour le cycle 2008-2009, à quelques exceptions près. Le calcul des taux de tabagisme dans la province et la région sanitaire était fondé sur le taux de tabagisme chez les adultes, et il n’y avait pas de strate additionnelle pour la région du Grand Toronto. Tout comme en 2004-2005, on a distribué le questionnaire aux élèves de toutes les classes des années scolaires ciblées faisant partie des écoles retenues.
L’ETJ est une enquête en milieu scolaire représentative de la population nationale menée auprès des jeunes Canadiens. Elle a été conçue de manière à permettre la compilation de données nationales (excluant le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut) et provinciales sur la prévalence estimative du tabagisme, de même que la surveillance des connaissances, des attitudes et des comportements des jeunes Canadiens en matière de tabagisme. L’ETJ permet aussi un soutien à l’élaboration de programmes de sensibilisation du public et de politiques de lutte contre le tabagisme et une évaluation de ceux-ci, ce qui en fait plus qu’un simple outil de surveillance. De plus, l’association du SIPÉSÉ et de l’ETJ a accru la capacité de l’Enquête à intégrer les politiques de lutte contre le tabac à la pratique et à évaluer l’efficacité des stratégies antitabac par la production de rapports de rétroaction destinés aux établissements scolaires.
En comparaison avec d’autres enquêtes canadiennes, l’ETJ 2008-2009 présente plusieurs caractéristiques uniques :
L’ETJ a servi à guider l’élaboration de politiques et de programmes de lutte contre le tabagisme nationaux. Ainsi, les données issues du cycle 2008-2009 de l’ETJ ont joué un rôle essentiel dans la décision du gouvernement fédéral de modifier la Loi sur le tabac en 2009 par le projet de loi C-32, qui visait à interdire l’utilisation d’arômes de fruits dans les cigares et les cigarillos11. Les résultats de l’ETJ ont aussi servi à orienter l’élaboration de politiques et de stratégies de lutte contre le tabagisme à l’échelle provinciale. Par exemple, à l’occasion du renouvellement de la stratégie Ontario sans fumée, en 2010, les données issues de l’ETJ ont joué un rôle clé dans l’élaboration des recommandations stratégiques présentées dans le chapitre 5 du nouveau guide de lutte globale contre le tabagisme en Ontario12. Les données recueillies par l’ETJ ont aussi été utilisées par les chercheurs désirant accroître les connaissances sur le tabagisme chez les jeunes Canadiens, cibler les priorités de lutte contre le tabagisme et orienter les progrès en la matière, notamment en ce qui concerne le tabagisme chez les jeunes des Premières nations du Canada habitant à l’extérieur des réserves13, la consommation de cigarettes de contrebande14, la consommation de bidis et de tabac hookah15, la consommation d’alcool et de substances illicites16-19, la préférence pour une marque de cigarettes et le prix des cigarettes20, la taxation des produits du tabac21, l’exposition à la fumée secondaire22,23, l’accessibilité des cigarettes24, l’effet des politiques scolaires sur le tabagisme25, la socialisation par le tabagisme26,27 et le tabagisme chez les adolescentes28.
L’ETJ a été bonifiée afin de permettre la collecte de données pertinentes sur des facteurs de risque supplémentaires (activité physique, obésité, alimentation saine), données qui pourront à l’avenir orienter les décisions relatives aux politiques et aux programmes axés sur des enjeux de santé autres que le tabagisme. Le cycle 2010-2011 de l’ETJ est actuellement en cours de réalisation, et nous espérons que les chercheurs et les décideurs continueront à se fonder sur les résultats importants issus de l’Enquête pour mieux comprendre le tabagisme et les autres facteurs de risque chez les jeunes Canadiens.
§ http://www.propel.uwaterloo.ca/index.cfm?section=28&page=377
** http://www.statcan.gc.ca/dli-ild/dli-idd-fra.htm
Les auteurs tiennent à remercier le Propel Centre for Population Health Impact de son soutien au projet. S. Leatherdale est titulaire de la Chaire de recherche sur l’étude de la population à Action Cancer Ontario. L'Enquête sur le tabagisme chez les jeunes 2008-2009 est le fruit d'un projet pancanadien de renforcement des compétences faisant appel à des chercheurs canadiens de l'ensemble des provinces et offrant des possibilités de formation aux étudiants universitaires de tous les niveaux. La production de cet article a été rendue possible grâce à une contribution financière de Santé Canada. Les opinions exprimées ici ne reflètent pas nécessairement celles de Santé Canada. Les auteurs souhaitent souligner le rôle clé que Murray Kaiserman, anciennement directeur du Programme de la lutte au tabagisme et de la Direction des substances contrôlées et de la lutte au tabagisme de Santé Canada, a joué dans la mise sur pied de l’ETJ et l’obtention du soutien financier continu dont elle bénéficie.
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