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Maladie de Creutzfeldt-Jakob (MCJ)

Information de la maladie à prions

Table of content

La MCJ et les maladies humaines à prion

Introduction

Les maladies à prion sont des affections rares du cerveau qui frappent les humains et certains animaux et dont l'issue est fatale. Bien qu'elles soient dues à différentes causes, ces maladies, une fois installées, peuvent se transmettre (comme les infections) entre individus de la même espèce ou d'espèces différentes. Les maladies à prion ont commencé à retenir l'attention de la population au milieu des années 80, par suite de l'épidémie d'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine), une maladie à prion qui s'attaque aux bovins. Même si l'origine de cette maladie demeure inconnue, on sait que les aliments pour bétail contaminés par des tissus bovins infectés par l'ESB ont contribué à la propagation de l'épidémie d'ESB.

Chez les humains, la maladie à prion la plus connue est la MCJ (maladie de Creutzfeldt-Jakob), qui touche environ une personne pour un million chaque année, soit environ 35 nouveaux cas par an au Canada. La MCJ peut être divisée en trois sous-types différents - génétique, acquise et sporadique - d'après l'étiologie de la maladie. La MCJ sporadique, qui survient de façon imprévisible, est à l'origine de 90 p. 100 des cas de MCJ au Canada. Au moins 7 p. 100 des cas de maladies humaines à prion au Canada sont causés par des anomalies génétiques (mutations) et appartiennent à la catégorie des maladies génétiques à prion. Une maladie à prion est dite acquise lorsqu'elle est transmise entre des membres de la même espèce ou d'espèces différentes. Au Canada, quelques cas de MCJ ont été associés à la transmission accidentelle d'infections durant des interventions médicales; la MCJ est alors qualifiée d'iatrogène. La variante de la MCJ (vMCJ), qui touche principalement les personnes plus jeunes, est presque certainement causée par une exposition à des aliments contaminés par l'agent de l'ESB. Des cas sont survenus au Canada, mais ils sont extrêmement rares.

On observe dans le cerveau des personnes ou des animaux atteints d'une maladie à prion des lésions appelées « modification spongiforme » ou « spongiose » parce qu'à l'examen microscopique, le tissu ressemble à une éponge percée de nombreux petits trous. En outre, le tissu cérébral contient des dépôts anormaux d'une protéine particulière appelée PrP. Dans la vMCJ, une distribution caractéristique des modifications spongiformes est visible, les trous étant particulièrement nombreux autour de dépôts microscopiques denses de protéines appelés plaques. Ces structures, qui sont parfois baptisées « plaques florides » parce que les dépôts autour des trous évoquent la forme d'une fleur, aident l'anatomopathologiste à distinguer la vMCJ des autres formes de MCJ.

La MCJ entraîne la mort de nombreux neurones, et de multiples zones cérébrales responsables de différentes fonctions peuvent être atteintes. C'est ce qui explique la diversité des symptômes observés chez les patients, allant de la démence (troubles de la mémoire et de la pensée) à des troubles moteurs comme l'ataxie (problèmes de locomotion et d'équilibre) ou à des myoclonies (mouvements saccadés des membres). À cause de cette symptomatologie variée, il est très difficile pour un médecin de diagnostiquer une MCJ, en particulier dans les premiers stades de la maladie. Certaines méthodes spécialisées et tests de laboratoire peuvent être utilisés pour faciliter le diagnostic, mais une décision finale quant à la présence ou non d'une MCJ ne peut être prise qu'après examen du cerveau de la personne décédée.

Les différentes formes de maladies humaines à prion, ainsi que leurs caractéristiques principales, sont résumées dans le tableau ci-dessous.

Maladies humaines à prion : types, causes et caractéristiques particulières

TYPE CAUSE CARACTÉRISTIQUES PARTICULIÈRES
MCJ sporadique Inconnue
  • Touche surtout les personnes de plus de 50 ans.
  • Ataxie, démence, myoclonies.
  • Maladie de courte durée.
  • Modifications spongiformes, rarement des plaques.
Maladies génétiques à prion Inherited genetic abnormalities (mutations)
  • Apparaît à un âge légèrement plus jeune que dans les cas de MCJ sporadique.
  • Symptomatologie qui dépend du type de mutation, mais ressemble parfois à celle de la MCJ sporadique.
  • Durée de la maladie qui peut être plus longue.
Maladies à prion acquise

Anomalies génétiques héréditaires (mutations)

Variées (voir ci-dessous)

MCJ iatrogène

Transmission d'une infection

  • Contamination lors d'une chirurgie du cerveau, d'une greffe de cornée, d'une greffe de dure-mère, de l'administration de l'hormone de croissance.
  • Transmission de la vMCJ associée à la transfusion.
  • Apparaît à un plus jeune âge que la MCJ sporadique.
  • Ataxie plutôt que démence.
  • Les cas associés à l'hormone de croissance présentent des plaques.

     

     

Variante de la MCJ Exposition à l'ESB
  • Apparition précoce.
  • Caractéristiques psychiatriques et maladie de plus longue durée.
  • Plaques florides caratéristiques.

Prions : Protéines infectieuses dans la MCJ

Les protéines sont un type de composante biochimique sous-microscopique, fondamentale qui compose les organismes vivants. Ce sont de longues molécules linéaires constituées de centaines d'unités chimiques plus petites appelées acides aminés, qui sont liées ensemble un peu comme les maillons d'une chaîne. L'ADN, qui est également une biomolécule linéaire, porte l'information codée permettant de fabriquer chacun des dizaines de milliers de types différents de protéines synthétisées par le corps humain. Chaque protéine est codée par son propre gène, situé dans un segment spécifique de l'ADN. Les molécules de protéines sont assez flexibles et se replient en général sur elles-mêmes pour adopter un certain nombre de formes tridimensionnelles légèrement différentes. Une fois formée et repliée à l'intérieur d'une cellule, une molécule de protéine exerce une ou plusieurs des multiples activités possibles qui sont essentielles à la vie, telles que le transport de matières, la transmission de l'information ou la libération d'énergie.

La protéine prion, ou PrP, est codée par un gène appelé PRNP. Il existe deux principales formes repliées de PrP, la forme normale et la forme anormale. Par souci de commodité, on les appelle PrPC et PrPSc. La PrPC est présente dans le cerveau humain et dans d'autres régions du corps, où elle exerce une fonction qui n'a pas encore été élucidée. On retrouve également la PrPC chez tous les autres mammifères et même chez les oiseaux.

À la différence de la PrPC, la PrPSc est résistante aux processus cellulaires normaux qui devraient la dégrader et mener à son évacuation de l'organisme. Elle s'accumule donc dans le cerveau du patient atteint d'une maladie à prion. Comme nous l'avons mentionné précédemment, dans certains cas, la PrPSc forme des dépôts appelés plaques amyloïdes (agrégats de protéines) qui sont particulièrement résistants à la dégradation et à l'élimination. La présence de plaques formées de protéines mal repliées est également observée dans d'autres maladies, comme la maladie d'Alzheimer, et même dans le cerveau vieillissant normal, mais dans ces cas, d'autres protéines que la PrP entrent en jeu. La PrPSc forme également des fibres minuscules appelées fibrilles associées à la tremblante (SAF), qui sont visibles à l'aide d'un microscope puissant.

On croit en général que les formes anormales de PrP constituent, ou contiennent, les agents infectieux associés aux maladies à prion, d'où l'origine du terme « prion » - proteinaceous infectious particle (suffixe grec « -on »).

La protéine normale se transforme en protéine pathogène et se réplique, causant une spongiose dans le cerveau.
La protéine normale se transforme en protéine pathogène et se réplique, causant une spongiose dans le cerveau.
Normal Protein = Protéine normale
Disease Protein = Protéine pathogène
aggregation = agrégation
neurodegeneration = neurodégénérescence

L'idée centrale est qu'une seule molécule de PrPSc peut convertir des molécules de PrPC en molécules de forme anormale, en les incitant à adopter la conformation anormale. Ces molécules récemment converties peuvent transformer à leur tour un plus grand nombre de molécules normales, entraînant un effet en cascade qui pourrait mener à des lésions cérébrales. Dans les formes de MCJ acquise par suite de la transmission d'une infection (MCJ iatrogène et vMCJ), les molécules de PrPSc pénétreraient, semble-t-il, dans l'organisme par l'entremise d'une source externe (telle qu'un autre humain ou animal atteint) et amorceraient la conversion des molécules de PrPC de leur nouvel « hôte ». Certains soutiennent qu'il arrive parfois qu'une molécule de PrPC adopte spontanément une forme anormale, ce qui pourrait mener à une conversion plus étendue et au développement ultime de la MCJ sporadique. Dans les maladies à prion d'origine génétique, les personnes touchées sont porteuses de mutations génétiques au niveau du gène PRNP. Ces personnes qui présentent des mutations du PRNP peuvent produire des formes de la molécule de PrPC qui sont plus susceptibles de se transformer en PrPSc.

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Caractéristiques spécifiques des sous-types de MCJ

MCJ sporadique

« Sporadique » signifie « qui survient à l'occasion ou de façon imprévisible ». Aucun facteur de risque évident n'a été mis au jour pour la MCJ sporadique.

La MCJ sporadique touche le plus souvent le groupe des 45 à 75 ans. Elle est rare en dehors de ce groupe d'âge, l'âge maximal d'apparition oscillant entre 60 et 65 ans. Le taux général d'incidence (nouveaux cas) de la MCJ sporadique se situe à environ un pour un million d'habitants par année - soit environ 35 nouveaux cas au Canada chaque année.

De longues recherches n'ont pas permis de déceler des facteurs de risque évidents (causes contribuant à la maladie) de MCJ sporadique. Les hommes courent le même risque que les femmes et il n'existe aucun lien avec une profession donnée. On a bien sûr porté une grande attention à l'alimentation des personnes atteintes de toutes les formes de MCJ, afin de détecter un lien avec des aliments tels que le boeuf. Ces recherches n'ont pas démontré que l'alimentation est associée à un risque de MCJ sporadique.

Bien qu'elle ne soit pas causée directement par des mutations génétiques, la MCJ sporadique est influencée par la génétique. Deux versions normales (allèles) du gène PRNP (appelées 129M et 129V, respectivement) sont très répandues dans la population humaine. Ces variants ne causent pas la maladie à prion, mais influent plutôt sur le risque de contracter la maladie et sur la forme que prend la maladie une fois installée. Chaque personne hérite de deux copies du gène PRNP - l'une de son père et l'autre de sa mère. Elle peut donc soit porter deux copies de 129M (génotype « MM »), deux de 129V (génotype « VV ») ou une de chaque (génotype « MV »). De 70 à 80 % des gens atteints de MCJ sporadique sont porteurs du génotype MM, ce qui indique que quelle que soit la cause de cette maladie rare, celle-ci risque davantage de se développer dans ce contexte génétique.

Quels sont les symptômes de la MCJ sporadique et comment la maladie évolue-t-elle?

La MCJ sporadique apparaît sans avertissement et la symptomatologie peut varier d'une personne à l'autre.

  • Les premiers symptômes ressemblent à ceux de la dépression - sautes d'humeur, oublis, retrait social et manque d'intérêt.
  • Après cette brève période, la maladie progresse rapidement. On peut observer certains symptômes associant : une démence rapidement progressive (troubles de la mémoire et de la pensée); l'ataxie (patient qui a de la difficulté à se tenir sur ses jambes, manque de coordination et est très malhabile); des troubles de la vision, notamment la cécité; une rigidité des membres et des myoclonies (mouvements saccadés). Le patient peut éprouver des troubles d'élocution et avoir la bouche pâteuse. Il peut avoir des problèmes à avaler et une alimentation au moyen d'une sonde peut être requise.
  • Finalement, le patient n'est plus capable de se déplacer ni de parler et requerra des soins infirmiers à plein temps. Dans cet état de mutisme akinétique, les yeux du patient peuvent toujours bouger et il peut sembler suivre ce qui se passe autour de lui, mais en fait il n'a pas conscience de son environnement.
  • 65 p. 100 des cas de MCJ sporadique meurent dans les six mois suivant l'apparition des symptômes. Dans 15 p. 100 des cas, la maladie dure plus de 1 an. Il est rare que la MCJ sporadique dure plusieurs années.
Les mutations du gène PRNP dans l'ADN d'une personne sont à l'origine de maladies à prion hériditaires
Les mutations du gène PRNP dans l'ADN d'une personne sont à l'origine de maladies à prion hériditaires
Cell = Cellule
DNA = ADN
PRNP Gene = Gène PRNP

Maladies génétiques à prion

« Génétique » signifie que la maladie est causée directement par des anomalies génétiques au niveau du gène PRNP qui code la protéine prion.

Les maladies génétiques à prion sont à l'origine d'au moins 7 p. 100 de tous les cas de maladies humaines à prion au Canada. Dans les maladies génétiques à prion, on observe une mutation (anomalie de codage) dans la séquence d'ADN du gène PRNP, qui mène à une différence de structure de la protéine PrP dans toutes les cellules de l'organisme et peut accroître la probabilité d'une conversion de la forme normale de la PrP à la forme anormale. Plus de 20 mutations différentes du gène PRNP ont maintenant été identifiées. Les maladies génétiques à prion regroupent trois formes : la MCJ génétique, le syndrome de Gerstmann-Sträussler-Scheinker (SGSS) et l'insomnie familiale fatale (IFF) qui est très rare.

Le risque de maladies génétiques à prion diminue plus la parenté génétique avec une personne touchée est lointaine.
Le risque de maladies génétiques à prion diminue plus la parenté génétique avec une personne touchée est lointaine.
CJD-affected (with mutation) = Atteinte de la MCJ (avec mutation)
Niece = Nièce
Children = Enfants
Nephew = Neveu
Normal = Normale
Normal = Normal
At Risk = À risque
Normal = Normale
At Risk = À risque
At Risk = À risque
0% = 0 % 50% = 50 % 25% = 25 %

Comme nous l'avons déjà mentionné, les humains héritent de deux copies (allèles) du gène PRNP - une de leur mère et l'autre de leur père. La MCJ génétique, le SGSS et l'IFF sont tous des maladies héréditaires à transmission autosomique dominante. Autrement dit, une personne ne doit posséder qu'un allèle anormal du gène PRNP transmis par son père ou sa mère pour développer la maladie. Le risque qu'une personne porteuse d'un allèle muté le transmette à chacun de ses enfants est de 50 p. 100. Comme la MCJ ne se développe habituellement que tard dans la vie, les personnes qui possèdent un allèle muté du PRNP peuvent le transmettre à un ou plusieurs de leurs enfants avant d'apprendre qu'elles en sont porteuses, ou même avant de savoir que cette maladie génétique sévit dans leur famille. Dans une étude effectuée récemment au Royaume-Uni, on a découvert que la majorité des familles atteintes de formes familiales de la MCJ ne connaissaient pas le risque qu'elles couraient.

La présence de mutations dans le gène PRNP peut être démontrée ou exclue par un test sanguin. Les personnes dont un parent a souffert de la MCJ et était porteur d'une mutation du PRNP peuvent donc décider de subir un test pour déterminer, avant que des symptômes n'apparaissent, si elles sont ou non à risque. Dans la plupart des cas où l'on détecte une mutation, la personne qui en est porteuse développera la maladie. En outre, il peut également être possible de savoir d'après la mutation du PRNP trouvée, quels symptômes risquent de se manifester lorsque la maladie se déclarera.

La décision de subir un test de détection du gène PRNP en est une de taille parce qu'à l'heure actuelle, comme pour la plupart des autres maladies d'origine génétique, il n'existe aucun moyen de prévenir ou de guérir la MCJ. Avant de faire passer des tests, il faut obtenir le consentement plein et éclairé du patient ou de son représentant légal reconnu, et des services de soutien et de counselling avant et après le test doivent être offerts par un spécialiste en génétique concernant des questions comme le planning familial, l'assurance et l'emploi. Vu que les résultats obtenus par une personne peuvent avoir un retentissement sur de nombreux membres de la famille, ces membres devraient, dans la mesure du possible, participer également aux discussions.

En principe, on peut également effectuer des tests prénatals lorsqu'un foetus risque d'être porteur d'une mutation du PRNP. Le couple peut choisir d'interrompre la grossesse lorsqu'on détecte une mutation, évitant ainsi de transmettre à un enfant la prédisposition à la maladie. C'est une décision éthique difficile, car l'enfant qui naît porteur d'un gène PRNP muté vivra probablement en bonne santé pendant de nombreuses années avant l'apparition des symptômes.

Un des avantages qu'on peut retirer d'un dépistage génétique est la possibilité de démontrer hors de tout doute qu'il n'y a pas de mutation du PRNP chez une personne à risque ou, autrement dit, qu'il s'agit d'une maladie sporadique. Dans un tel cas, les membres de la famille courent exactement le même risque de développer la MCJ qu'une autre personne non apparentée au cas atteint, soit environ un sur un million par année.

Quels sont les symptômes des maladies génétiques à prion?

Les symptômes des maladies à prion d'origine génétique varient selon le type de mutation du PRNP en cause. Il peut même y avoir des variations dans les symptômes chez les membres de la même famille qui sont atteints.

  • Dans la MCJ génétique, les symptômes sont similaires à ceux que l'on retrouve dans la MCJ sporadique. En moyenne, la MCJ génétique apparaît plus tôt dans la vie que la forme sporadique : l'âge moyen d'apparition est de 55 ans, comparativement à 65 ans. La maladie évolue aussi sur une plus longue période, et le patient peut survivre pendant plusieurs années après l'apparition des symptômes.
  • Le SGSS débute habituellement par une ataxie et progresse vers la démence. La maladie évolue sur une plus longue période en moyenne que la MCJ, et le patient peut survivre pendant plusieurs années.
  • Dans l'IFF, le principal symptôme est une forme progressive et incurable d'insomnie. Le cerveau ne peut plus contrôler les fonctions corporelles, la maladie évolue vers le coma et la mort.

MCJ acquise

Kuru

La découverte chez les Fores de la Papouasie-Nouvelle-Guinée dans les années 50 d'une maladie neurologique étrange et fatale appelée kuru a été la première indication que des maladies humaines à prion pourraient être transmissibles. Bien que la maladie ait presque complètement disparu, les recherches sur le kuru nous ont grandement aidés à comprendre les maladies humaines à prion et, en particulier, les risque de transmission interhumaine.

MCJ iatrogène

Iatrogène signifie « causée par un traitement médical ». Plus précisément, cette forme de MCJ se transmet par contact avec le tissu infecté d'une personne atteinte de la maladie.

Les processus biochimiques menant à la production et à l'accumulation de la forme anormale et infectieuse de la PrP peuvent évoluer d'une façon sournoise pendant de nombreuses années avant qu'une personne ne tombe malade. Durant une certaine période, la maladie peut donc être transmise accidentellement à d'autres personnes, par suite d'une exposition à des tissus contaminés. Le prion survit également aux méthodes normales de désinfection qui détruisent les bactéries et les virus. Certaines interventions médicales dans le cerveau présentent ainsi un faible risque de transmission accidentelle de la MCJ. Par exemple, quelques personnes dans le monde ont contracté la MCJ après une opération au cerveau effectuée avec des instruments qui avaient déjà été utilisés chez un patient atteint de la MCJ. Dans ces cas, l'agent infectieux a été transporté de façon accidentelle directement dans le cerveau des patients qui ont contracté l'infection. Aujourd'hui, les instruments qui ont été en contact avec le cerveau de cas suspects de MCJ sont détruits. La MCJ a également été transmise lors de greffes de cornée et de greffes de dure-mère, membrane rigide et résistante qui recouvre le cerveau et qui a été utilisée pendant de nombreuses années comme matériau « de réparation » dans divers types d'interventions neurochirurgicales. La durée d'incubation de la MCJ iatrogène à transmission neurologique varie de moins de 2 ans à plus de 20 ans.

La MCJ a également été transmise par l'administration de l'hormone de croissance humaine. Avant 1985, l'hormone de croissance humaine utilisée pour traiter les enfants de petite taille était préparée à partir d'hypophyses humaines, sa source naturelle. Habituellement, 2 000 hypophyses étaient regroupées pour produire un lot d'hormone de croissance, lequel était à son tour subdivisé en des centaines de doses, puis distribué. Ainsi, l'inclusion accidentelle d'une seule hypophyse provenant d'un cas non reconnu de MCJ pouvait contribuer à l'infection de nombreuses personnes. À ce jour, aucun cas de MCJ associé à l'hormone de croissance n'a été diagnostiqué au Canada. Depuis 1985, toutes les quantités d'hormone de croissance humaine sont produites par synthèse, et il n'y a plus de risque de contracter la MCJ de cette source.

Enfin, quatre cas probables de transmission de la vMCJ associée à la transfusion sanguine ont été détectés au R.-U. Sur les quatre cas infectés, trois ont développé une vMCJ clinique et le quatrième a succombé à une autre maladie mais il a été établi qu'il souffrait de la vMCJ.

Quels sont les symptômes de la MCJ iatrogène?

Lorsque le prion est transmis directement dans le cerveau, les symptômes ressemblent à ceux de la MCJ sporadique. D'autres formes de MCJ iatrogène présentent toutefois des symptômes plus apparentés à ceux du kuru, les symptômes d'ataxie prédominant et la démence étant rare.

Variante de la MCJ

La « variante de la MCJ » est ainsi appelée parce qu'elle diffère à certains égards d'autres formes de MCJ (notamment parce qu'elle survient chez les jeunes).

Depuis 1994, un nombre croissant de cas de MCJ ont été découverts chez des jeunes au R.-U. En 1996, on a reconnu, d'après l'âge des patients, les symptômes et les observations microscopiques spécifiques, qu'un nouveau type de maladie à prion était apparu en Grande-Bretagne. Ce type de MCJ a été baptisé variante de la MCJ. De 1996 à avril 2007, 165 des 200 cas de vMCJ signalés dans le monde ont été enregistrés au R.-U., 22 en France et le reste dans 9 autres pays, dont un au Canada qui a été attribué à l'exposition d'une personne à l'ESB durant un séjour au R.-U. entre 1987 et 1990.

La variante de la MCJ a été liée de façon concluante à une exposition humaine à l'ESB, fort probablement avant l'interdiction imposée en 1989 à l'égard de l'utilisation de tissus bovins à risque (p. ex. cervelle et moelle épinière) dans les aliments destinés à la consommation humaine. Toutefois, à part le fait qu'on ait démontré que la vMCJ et l'ESB étaient la même maladie, on ne connaît pas encore précisément la façon dont sont survenues les expositions critiques ni les facteurs qui déterminent pourquoi un individu a contracté la vMCJ alors que de nombreux autres qui ont été exposés aux mêmes produits alimentaires n'ont pas été infectés.

Quels sont les symptômes de la vMCJ?

Les symptômes de la vMCJ diffèrent grandement de ceux de la MCJ sporadique. Les symptômes habituels sont les suivants :

  • Elle apparaît à un âge relativement jeune, la moyenne étant de 28 ans.
  • Les premiers symptômes sont en général de nature psychiatrique : anxiété, dépression, repliement sur soi et changements comportementaux.
  • Le patient éprouve des douleurs et des sensations étranges persistantes au niveau du visage et des membres.
  • Après plusieurs semaines ou mois, des symptômes neurologiques plus définis peuvent se manifester, notamment :
    • Démarche instable, mouvements saccadés soudains.
    • Démence progressive.
    • Finalement, le patient n'est plus capable de bouger ni de parler et aura besoin de soins infirmiers 24 heures sur 24.
  • La mort survient environ un an après l'apparition des symptômes.
  • Le cerveau des personnes atteintes de la vMCJ présente à l'examen post-mortem des modifications spongiformes caractéristiques et des plaques (florides) particulières.
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Investigations possibles et diagnostic de la MCJ

La plupart des médecins connaissent la MCJ, mais comme la maladie est rare, un grand nombre n'ont jamais observé directement de cas. Dès qu'une symptomatologie suspecte est signalée, le patient devrait être orienté vers un neurologue, qui pourra effectuer un certain nombre d'investigations, notamment :

  • Imagerie par résonance magnétique (IRM) du cerveau. Ce type d'exploration produit des images du cerveau. L'IRM est un examen important pour écarter d'autres maladies, mais elle peut par ailleurs mettre en évidence, chez un fort pourcentage de patients atteints de la MCJ, des changements particuliers dans la couche externe (cortex) ou les zones internes du cerveau (ganglions de la base et thalamus) qui contiennent des neurones. Ces changements bien définis peuvent donner une bonne indication de la présence d'une MCJ. L'IRM aide également à distinguer la MCJ sporadique de la variante de la MCJ. Une tomodensitométrie (TDM) du cerveau est aussi fréquemment utilisée pour exclure d'autres maladies que la MCJ, mais elle ne permet pas de voir les changements particuliers observés avec l'IRM chez les patients atteints de la MCJ.
  • Électroencéphalographie (EEG). Une électroencéphalographie, qui mesure l'activité électrique du cerveau, peut révéler la présence des changements caractéristiques de la MCJ classique. Toutefois, ces changements n'ont pas été détectés dans aucun cas de vMCJ, de sorte que l'EEG n'est pas utile pour diagnostiquer ce sous-type.
  • Biopsie du cerveau. Le prélèvement d'un échantillon de tissu du cerveau peut faciliter l'établissement du diagnostic. Si le tissu présente des modifications spongiformes, le diagnostic est souvent positif. Toutefois, l'absence de modification spongiforme ne signifie pas nécessairement que la personne n'est pas atteinte de la MCJ – cela pourrait simplement dire que la maladie n'a pas encore gagné la région du cerveau où le prélèvement a été effectué. Des biopsies cérébrales ne sont pas systématiquement pratiquées dans les cas de MCJ. Elles peuvent être effectuées surtout pour exclure une autre maladie que la MCJ qui peut être traitable.
  • Biopsie de l'amygdale. On a montré récemment que la PrPSc pouvait être détectée dans le tissu amygdalien dans de nombreux cas de vMCJ; une biopsie de l'amygdale peut donc être utile pour poser un diagnostic de vMCJ. Elle n'est pas cependant utile pour la MCJ sporadique.
  • Ponction lombaire. Lors d'une ponction lombaire, un échantillon de liquide céphalo-rachidien (LCR) qui entoure le cerveau et la moelle épinière est prélevé au moyen d'une aiguille creuse insérée dans la partie inférieure de la colonne vertébrale, sous la moelle épinière. L'analyse du LCR peut être effectuée pour détecter diverses protéines servant de « marqueurs », notamment le groupe des protéines 14-3-3. Bien que ce test puisse être utilisé lorsqu'on dispose d'autres données cliniques pour renforcer le soupçon de MCJ, la détection des protéines 14-3-3 dans le LCR ne permet pas à elle seule de confirmer ou d'exclure un diagnostic de MCJ. Un examen du LCR est également effectué (à l'aide d'autres techniques) pour déterminer si une infection du cerveau (p. ex. encéphalite virale ou bactérienne) n'est pas la cause des symptômes.
  • Tests sanguins. Les tests sanguins et d'autres analyses biochimiques donnent habituellement des résultats normaux dans la MCJ. Un échantillon de sang est utilisé pour préparer l'ADN pour le séquençage génétique, qui permet de diagnostiquer les formes héréditaires de maladies à prion.
  • Autopsie. Actuellement, la seule façon de diagnostiquer avec certitude la MCJ est d'examiner le cerveau après la mort. Il faut habituellement plusieurs mois pour établir le diagnostic. Cinq caractéristiques principales peuvent être observées au microscope dans le tissu cérébral d'une personne atteinte de la MCJ :
    • Il y a presque toujours des signes de modification spongiforme dans le cerveau.
    • On observe souvent dans le cerveau une augmentation du nombre d'astrocytes – cellules nourricières et de soutien des neurones.
    • Une perte neuronale est visible.
    • Des plaques (dépôts de protéines prions anormales) sont observées dans seulement 10 p. 100 des cas de MCJ sporadique. Toutefois, dans certains cas de MCJ héréditaire et dans tous les cas de MCJ iatrogène causée par l'administration de l'hormone de croissance, des plaques sont visibles. Dans la vMCJ, les atteintes cérébrales sont très caractéristiques, un type particulier de plaque, appelée plaque floride, étant propre à la maladie.
    • On peut détecter l'accumulation de PrPSc au moyen d'une technique appelée immunohistochimie, qui utilise un anticorps réagissant spécifiquement avec la PrP.
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Traitement de la MCJ

Il n'existe pour le moment aucun traitement ni remède spécifique contre la MCJ. La conduite adoptée au moment de l'admission à l'hôpital peut varier, tout dépendant du patient, des points de vue de la famille et du type d'hôpital. Après l'hospitalisation, une investigation et des tests seront effectués pour l'établissement du diagnostic, des soins infirmiers généraux de soutien et plus tard des soins palliatifs seront offerts. Des recherches sont en cours sur les causes de la MCJ et sur des traitements potentiels.