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Nouvelles de la Bibliothèque nationale
Septembre 1999
Vol. 31, no 9



Ce n’est pas sorcier

Cheryl Jaffee,
conservateur, Collection Jacob M. Lowy


Jérusalem. Sha'ar Ruah ha-Kodesh de
Hayim Vital. Jérusalem, 1912.

En parcourant les titres des rubriques culturelles dans un récent numéro du New Yorker, la rubrique Musées et bibliothèques ressortait parmi la douzaine de théâtres, cinémas, salles de concerts et galeries d’art. Je jubilais. À New York, on sait très bien ce que sont des bibliothèques. Le fait de voir des bibliothèques se distinguer parmi les superbes installations culturelles de la ville représentait un moment exaltant pour une bibliothécaire qui organise des expositions à intervalles réguliers à la Bibliothèque nationale, et qui doit, plus souvent qu’autrement, lorsqu’elle consulte les journaux de la région, jouer à la devinette quant à l’endroit où l’on pourrait avoir mentionné l’activité en cours à la Bibliothèque.

Les bibliothèques et musées abritent nos trésors culturels, nos nombreux « patrimoines » et ils conservent une grande diversité d’artefacts. La prestation de services de base auprès de la clientèle des bibliothèques ne saurait prédominer sur l’ensemble des fonds que nous possédons, ni l’accessibilité à ses trésors diminuer leur valeur. La nature démocratique de l’établissement fait sa force. Mais l’établissement prospère grâce au travail d’interprétation de ses bibliothécaires et conservateurs. Ses œuvres les plus belles et les plus intéressantes sont mises en valeur par le support éloquent des expositions. De façon moins officielle, ses trésors sont mis à la disposition du public par l’entremise de petits séminaires, de visites privées et de visites de groupes.

La salle Lowy abrite la Collection Jacob M. Lowy de documents hébraïques et judaïques rares. Cette salle belle et sereine permet à de petits groupes de se rassembler autour d’une grande table en bois, pour voir de près le papier, la typographie et les reliures de livres vieux de centaines d’années. Pour certaines personnes, il s’agit d’un premier regard sur l’antiquité et l’occasion de constater la différence entre ce qui est ancien et ce qu’est un fac-similé, et pourquoi cela importe. Pour d’autres personnes, il s’agit d’une première rencontre avec l’hébreu et d’autres langues juives, et l’endroit pour apprendre au sujet du contexte historique dans lequel les imprimeurs et les propriétaires de livres vivaient et mouraient. Il est des moments, quand on se plonge dans l’étude de l’histoire, où l’on se sent bien humble.

Dernièrement, une chercheuse consultant la Collection Jacob M. Lowy me rappelait à quel point il est exceptionnel et précieux d’être en mesure de s’asseoir dans la salle Lowy, entouré de livres et de manuscrits rares. Cette personne, qui a beaucoup voyagé, s’émerveillait du fait qu’elle pouvait feuilleter les documents et obtenir l’aide de la conservatrice au besoin, sans avoir à présenter une demande, à supplier ou à attendre. Nous servons de passerelles entre les usagers et les collections et nous nous sentons privilégiés de gagner ainsi notre vie.

Mon rôle à titre de bibliothécaire de documents hébraïques et judaïques rares est polyvalent. Selon les circonstances, je suis une conservatrice, une conteuse et une écrivaine, une détective bibliographique ou une adjointe de recherche. Nous pavons la voie aux chercheurs, livre par livre. Ce faisant, nous reconstruisons également l’énorme casse-tête de notre passé. Quelle justification de plus est nécessaire pour que les bibliothèques prennent la place qui leur revient de droit parmi les centres culturels de pointe dans notre ville?


Droit d'auteur. La Bibliothèque nationale du Canada. (Révisé : 1999-9-1).