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A la
recherche d'Adriaen Honing par
Marcel Röthlisberger
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Summary
Pages 1 | 2
| 3 L'acquisition faite par la Galerie Nationale du Canada du beau
dessin de Honing (fig. 1) (1) invite à s'arrêter sur cet artiste
peu connu, dont les quelques oeuvres conservées sont singulièrement
captivantes. Que connaissons-nous de lui? Sa date de naissance, un
tableau de jeunesse, une quinzaine de dessins - voilà ce qui reste
d'une activité sans doute brève, puisque nous n'avons aucune trace
de l'artiste après sa 40e année. Le peu que nous savons de sa vie
se résume en deux mots: né à Dordrecht en 1644, Honing est
documenté à Paris en 1663 (nous ignorons s'il s'agissait d'un
voyage ou d'un séjour prolongé) puis à Rome de 1667 à 1683. Il vécut
là dans le quartier des artistes et fut membre de la confrérie des
artistes néerlandais qui lui donna le surnom de Lossenbruy. C'est
ce nom que nous trouvons inscrit d'une même main, grande et régulière,
sur le revers de plusieurs de ses dessins - une identification postérieure,
semblerait-il, plutôt qu'une signature authentique.
La nouvelle feuille d'Ottawa nous montre un paysage montagneux de
caractère italien et de goût romantique. Il s'agit
vraisemblablement d'une composition et non pas d'une étude de
nature. La montagne à droite et l'arabesque de l'arbre courbé découlent
par trop de la convention pour avoir été pris sur nature. Une
poussée en diagonale débutant par la masse d'arbres au premier
plan à droite conduit au massif du centre puis au loin. Seul le côté
gauche reste ouvert, donnant au dessin une touche légère. Le
catalogue de Colnaghi, d'où provient ce dessin, mentionne l'influence
de Rosa (1615-1673), représentant par excellence du paysage que
l'on peut appeler romantique, puisque tant de ses éléments prédisent
ce qui marquera le goût du début du 19e siècle. Le dessin est en
fait une copie d'un tableau de Rosa (2) (fig. 2). Le composition de
la toile est élargie d'un premier plan, qui est omis du recto du
dessin, mais y figure dans le croquis du verso (sans la partie supérieure
du feuillage et les figures); quelques traits légers au crayon noir
indiquent cette partie sur le recto. Honing a donc réparti l'image
de Rosa sur les deux faces de sa feuille, la retransposant, pour
ainsi dire, en guise d'étude de nature. Le tableau n'ayant pas été
gravé, Honing doit s'être servi directement de ce tableau ou, ce
qui est moins probable, d'un dessin préparatoire de Rosa. Quant à
la date, il n'y a aucune difficulté, la seule feuille datée de
Honing venant de l'année de la mort de Rosa.
Au moins trois autres dessins de notre artiste, dont deux sur papier
bleu-vert, montrent le même caractère: une composition schématique
pareille et la même écriture. Ce sont le paysage plus grand de la
coll. Lugt (MJBK fig. 6), (3) le paysage de la coll. Witt à Londres
(MJBK fig. 7) et un paysage assez ordinaire de l'Albertine (inv.
10892). Ces pages sont également fort proches des tableaux et
gravures de Rosa, quoique nous n'ayons pas trouvé pour elles de modèles
identiques. De toute façon nous pouvons affirmer que le cas du
dessin d'Ottawa n'est pas unique, et que Honing s'inspire de Rosa. (4)
Cela vaut-il aussi pour sa technique?
Le graphisme de Rosa, comme d'ailleurs le style de ses tableaux,
comprend à différentes époques les possibilités les plus variées,
allant d'une fougue romantique à la sécheresse de l'imitateur de
Poussin. Dans notre dessin, le tracé à la plume reflète certains
dessins de Rosa. Mais nous ne trouvons pas chez celui-ci de feuilles
aussi pittoresques. Les dessins du hollandais, de grand format, sont
minutieusement exécutés, des images complètes qui n'ont pour but
qu'elles-mêmes. Ce caractère d'oeuvres autonomes commence par le
fond - le papier blanc teinté, ou le papier bleu ou turquoise que
Honing a presque toujours employé - travaillé à la plume, le
lavis brun et le rehaussé blanc. Ce procédé donne à l'oeuvre une
note de couleur. Il n'a d'ailleurs rien de neuf, étant déjà en
vogue dès le début du 15e siècle. La plume décrit un zigzag
nerveux dans le feuillage, de petits traits parallèles dans les
rochers, un pointillé délicat dans le lointain.
Disons d'emblée que cette technique schématique et détaillée
ressort beaucoup plus de la tradition du paysage hollandais en
Italie que de Rosa. Le fondateur, pour le 17e siècle, en est Bril,
suivi de Breenbergh et d'autres maîtres tels que van Nieuwlandt et
Swanevelt. Cela se passa cinquante ans avant Honing. La même petite
manière fit école et les dessinateurs hollandais à Rome l'adoptèrent
généralement. Nous pourrons en observer les variantes
individuelles vers Both, Hackaert, Neyts, Roghman et tant d'autres.
Plus le siècle avance, plus la découverte de la réalité et la
recherche de la lumière naturelle, qui passionne la génération de
1600, sont remplacées par une convention raffinée qui manque au
brio du début du siècle. L'oeuvre de Honing appartient à cette génération
tardive - la dernière qui traite le paysage hollandais - exprimant
un contenu pré-dix-huitième dans une technique ancienne. Car voilà
bien comment il faudra caractériser cette écriture. Au-delà de la
verve d'un Claude ou d'un Carracci, elle rappelle, consciemment ou
non, la manière de l'école du Danube du siècle précédent -
Altdorfer, Buber, Lautensack, etc - chez qui les effets de rehaussés
sur fond sombre abondent plus que dans le paysage du 17e siècle. On
se souviendra également que le paysage montagneux fut une spécialité
flamande des environs de 1600 avant d'avoir été adoptée par Rosa.
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