Le 4 août 1914, la Grande-Bretagne déclarait la guerre à
lAllemagne et, en tant que membre de lEmpire britannique, le Canada se
joignait aussi au conflit. Cest à partir de la Première Guerre mondiale que
lavion devait changer à tout jamais, la façon dont les pays se font la guerre.
Ce conflit mondial a aussi enrichi le jargon de laéronautique, de nouveaux mots,
tels « avion de chasse », « as », « bombardier » et
« raid aérien ».
Au début, on confiait surtout des missions de reconnaissance aux aviateurs. Grâce à
leur « vue à vol doiseau » du terrain, ils pouvaient rapporter à leur
commandement au sol des renseignements précieux sur les positions ennemies et, plus tard,
les documenter à laide de photos. À cette époque, les pilotes ne voulaient pas
entendre parler de cabines fermées. On les comprend : cela aurait nui à leurs
observations et à lutilisation de leurs premiers moyens de défense, car cest
à coups de carabine et de pistolet, à laide de briques et même de grappins que se
déroulaient les premiers combats aériens ! Ces armes improvisées ont été rapidement
remplacées par des mitrailleuses montées sur affût.
Le chasseur français Spad VII est
un exemple classique davion monoplace de chasse de la Première Guerre mondiale.
Malgré sa structure de bois, de tissu et de fil de fer, il était robuste et réalisait
dexcellentes performances. Il a servi dans les forces aériennes françaises,
britanniques, américaines, belges, italiennes et russes.
SPAD VII
© Musée national de laviation (Canada)
Les Français appelaient déjà les pilotes qui faisaient preuve
daudace et dhabileté dans les airs des « as ». Mais, durant la guerre, ce
mot allait définitivement prendre le sens quon lui connaît aujourdhui :
pilote qui a abattu au moins cinq avions ennemis en combat aérien. Parmi les
« as » les plus célèbres, il faut compter Bishop, Ball, Guynemer,
Rickenbaker, Baracca et von Richthofen, le fameux « Baron rouge ».
Le Sopwith Triplane, un chasseur à trois ailes, comme
son nom lindique, est un autre exemple classique davion de chasse de
lépoque. Cet appareil a si fortement impressionné laviation allemande
quelle sen est inspirée pour réaliser le Fokker Dr. I, rendu célèbre par
las de la chasse allemande von Richthofen et son escadre de chasse, le
« Cirque volant ». Cest dailleurs aux commandes dun de ces
appareils que von Richthofen devait trouver la mort, sous les tirs de laviateur
canadien A. Roy Brown.
Sopwith Triplane
© Musée national de laviation (Canada)
Lorsquils étaient bien conçus car ils ne létait pas
tous , les triplans se distinguaient par leur excellente maniabilité, leur grande
vitesse ascensionnelle et une plus grande visibilité pour le pilote. Le Sopwith Triplane
du Musée, le Black Maria, est une réplique du chasseur piloté par Raymond
Collishaw, commandant du « Black Flight » (la section noire) de la 10e
Escadrille navale, dont les pilotes étaient tous Canadiens. De mai à juillet 1917, cette
section a abattu 87 appareils ennemis. Comme la écrit un historien, « La
seule vue dune formation de Sopwith Triplane suffisait souvent pour convaincre les
avions ennemis de piquer pour se mettre hors datteinte. »
Cest à bord dun Sopwith
Snipe que las canadien William Barker a livré à lui seul un des plus
spectaculaires combats aériens de la guerre, en octobre 1918.
Sopwith Snipe 7F.1
© Musée national de laviation (Canada)
Lorsque le Canada était entré en guerre, il ne disposait que dune
poignée daviateurs. En 1918, il en avait au moins 22 000. En fait, le tiers des
pilotes des forces aériennes britanniques qui ont abattu 30 avions ennemis ou plus
étaient des Canadiens. Nous avons gardé des aviateurs de la Première Guerre mondiale,
limage de héros flamboyants et chevaleresques, mais la réalité était tout autre.
Des centaines de jeunes gens ont trouvé la mort, souvent de façon horrible, dans leur
machine volante. Mille cinq cent soixante-trois Canadiens ont donné leur vie et plus de
la moitié dentre eux ont été décorés. Trois ont reçu la Croix de Victoria :
W.A. « Billy » Bishop, A.A. McLeod et W.G. Barker. Des sept pilotes
britanniques ayant à leur crédit au moins 50 victoires, quatre étaient canadiens, dont
les deux as de lempire britannique qui ont survécu au conflit; Bishop (72
victoires) et Raymond Collishaw (60 victoires).
Mais la guerre a contribué à la formation de toute une génération de pilotes
expérimentés et à la conception davions qui pouvaient voler de plus en plus vite
et de plus en plus haut, avec des charges de plus en plus lourdes. Les conflits
quil sagisse de guerre ouverte ou de guerre froide ont de tout temps
accéléré lévolution de la technologie.
Le Curtiss JN-4 (Can.) « Canuck » du Musée
est lun des 1 288 appareils produits par Canadian Aeroplanes Ltd. de Toronto, une
société que lImperial Munitions Board britannique avait mise sur pied pour
répondre aux exigences du Royal Flying Corps, puis de lU.S. Air Service, en
matière davion-école.
Curtiss JN-4 Canuck
© Musée national de laviation (Canada)
Le « Canuck », une version modifiée du Curtiss JN-3 américain, a réalisé plus de « premières » quaucun autre appareil canadien. Il a été le premier appareil fabriqué en série au Canada et le premier exporté en grand nombre. Il a effectué lun des premiers vols aéropostaux canadiens, entre Montréal et Toronto, en juin 1918, et les premiers levés aériens, au Labrador, à lété 1919. Après la guerre, le Canuck a largement servi dans un rôle civil. Cétait lavion préféré des pilotes de foire qui parcouraient les campagnes pour présenter des spectacles aériens, donnant ainsi à de nombreux Canadiens loccasion de voir un avion pour la première fois de leur vie et même de prendre leur baptême de lair.