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Vingt années de théâtre au Séminaire de Joliette
L'Estudiant
Avril 1937, Vol. 1 – No. 6
Louis J. Lefebvre, c.s.v.

Vingt années de théâtre
au Séminaire de Joliette

     […] Dans l'esprit des régisseurs et des Supérieurs, le théâtre au Séminaire est avant tout un complément de culture générale. C'est à cette fin que les soirées dramatiques et musicales ont été instituées, il y a des siècles déjà, dans les collèges des Jésuites. Dans notre pays, depuis les débuts de nos institutions d'enseignement secondaire, le théâtre de collège a vécu d'abord sans faire beaucoup de bruit, puis il a progressé, ces derniers temps, à tel point qu'on semble compter sur lui pour la formation du bon goût des générations futures. Et l'on n'a peut-être pas tort...

 

065a01.gif (14139 octets)      La construction de nouvelles salles académiques a permis de réaliser de fort beaux spectacles. Sur des plateaux plus vastes, mieux outillés, des artistes-décorateurs, des metteurs en scène ont rivalisé de zèle et d'ingéniosité pour donner plus de valeur ou de relief aux oeuvres représentées.

     Dans cette voie, le Séminaire a pris les initiatives les plus hardies. Qu’on se rassure pourtant; malgré cette évolution progressive, le but est resté le même: faire oeuvre d'éducation. […]

     Quant aux acteurs, ils répètent pendant un mois et plus. Non seulement ils assouplissent ainsi leur mémoire et leur lèvres, mais ils brisent leur caractère. Il faut se bien conduire, être exact aux répétitions, sans quoi on risque de se voir remercier: il y en a tant qui désirent “avoir un rôle”, que le régisseur peut se montrer indépendant. Ce travail préparatoire est un travail d'équipe, chacun s'aidant, avec bonne humeur, sans jalousie, en toute humilité. […]

     Et le public? Évidemment on s’en occupe et il retire de ces spectacles du plaisir sinon du profit. Depuis vingt ans on s'efforce ici de lui donner le goût du beau. Les grandes séances de fin d'année, comme on l'a vu, n'ont pas d'autre but que la formation intellectuelle, morale et esthétique des spectateurs et des acteurs. Pour cela on n’a rien épargné: décors, costumes, améliorations de la scène et de la salle.

     Il faudrait parler ici des oeuvres de moindre envergure, présentées au cours de l'année, en octobre et après les vacances de Noël par des jeunes ou des nouveaux, à la Saint-Thomas par les philosophes, juniors et dans les mois qui suivent, par les membres de “Alfred the Great Academy”, les Scouts, etc. Il faudrait au moins rappeler la part faite par la chorale, la, fanfare et l’orchestre dans toutes ces manifestations... l'espace manque. Préparer de nouveaux acteurs, illustrer une thèse de philosophie qui autrefois... mais alors tout le monde “entendait le latin sans doute”; offrir une échantillon du travail fait à l’Académie anglaise, tel est le but immédiat de ces représentations spéciales.

065a02.gif (13821 octets)     Le succès d'assistance n'a pas toujours répondu à nos efforts. Si les grandes représentations annuelles font salle comble trois ou quatre fois (cinq fois avec Jonathas), les autres ne s'adressent qu'à un petit nombre d'habitués. Excepté ces amis de toujours, le reste du public de Joliette préfère encore un théâtre plus populaire, plus tapageur, ou plus “vaudeville”. C'est son droit.

     Les résultats sont plus satisfaisants du côté des élèves et des acteurs. Ceux-ci acquièrent par la pratique une meilleure diction; pendant les répétitions et même après, ils s'efforcent de bien articuler et comme l'exemple entraîne, il est certain que le théâtre a largement contribué, avec le cours de diction, à l'amélioration du bon parler français au Séminaire. De plus, le théâtre est une école de bonne lecture; les intonations, la mise en valeur des mots, les silences, les gestes, tout cela présuppose une entière compréhension du texte.

     L'on distingue tout de suite un ancien acteur d'un nouveau, un lecteur averti d’un élève qui ne lit pas. Le premier possède plus d'assurance; son geste, son attitude, sa voix, tout s'unifie pour exprimer chaque nuance du texte. Le second cherche, tâtonne; au début, ses gestes sont imprécis, ses intonations, fausses, parce qu'il n'a pas toujours une exacte notion de ce qu'il doit exprimer. Le théâtre enseigne à lire non seulement les mots du texte, mais, entre les lignes, tout ce qui permet aux mots de passer la rampe. Plus vite que le sport, plus sûrement que l'étude, le théâtre a dégagé la personnalité de nos acteurs et leur a donné la maîtrise d'eux-mêmes. C'est grâce à son habitude du théâtre que Roch Pinard a conquis la première place au concours international d'éloquence en 1929.

     Tous ceux qui ont déjà joué sont à l'aise sur le plateau; ceux qui ont bien observé ont profité de la leçon au point de savoir prendre, dans un ensemble, la place et l'attitude qui conviennent. Il nous est arrivé souvent d'improviser des tableaux vivants, des évolutions de foules avec des nouveaux; nous n'avons jamais eu de difficulté, parce qu'il existe déjà depuis plusieurs années au Séminaire, ce qu'on pourrait appeler une tradition théâtrale.

     Cette tradition théâtrale qui donne, avec l'aisance, la distinction du geste et de la parole, se manifeste encore par un sens critique assez développé. Parce qu’ils ont joué eux-mêmes, ou vu représenter des oeuvres de réelle valeur, nos élèves ont des termes de comparaison qui leur permettent d'apprécier une pièce ou un auteur. Ils sont curieux des moeurs, des costumes, du style décoratif d'une époque. Ils se montrent de plus en plus exigeants sur le choix des pièces, sur l'interprétation des acteurs; enfin, leur goût s'affine.

[…]

Louis-J. Lefebvre, c.s.v.

 

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