« Les perspectives d'avenir du Canada : réaliser le
progrès »
Notes pour une allocution de
l'honorable Michael D. Chong,
Président du Conseil privé de la Reine pour le Canada,
ministre des Affaires intergouvernementales et
ministre des Sports
Discussion en groupe
Conférence annuelle Couchinching
Orillia (Ontario)
Le 13 août 2006
L'allocution
prononcée fait foi
Introduction
Je remercie les organisateurs de m'avoir invité à cette rencontre importante. À titre de ministre de la
Couronne et de citoyen, c'est un honneur de participer à cette conférence et d'avoir l'occasion d'aborder
la question du progrès dans le contexte canadien.
Je sais que la conférence de cette année réunit bon nombre d'étudiants – signe que le thème choisi
est très à propos.
Inculquer aux jeunes le sens civique est un noble objectif – une démarche importante pour notre progrès
collectif. Je me réjouis du fait que madame Martha Rogers, directrice de l'enseignement pour l'Upper Grand District
School Board, ait pu se joindre à nous pour cette discussion de grande valeur.
Chacun de mes coéquipiers parlera des éléments clés du progrès dans le monde d'aujourd'hui :
- la vigueur de l'économie et la capacité de concurrencer;
- le pouvoir de s'adapter et de s'ouvrir aux autres dans notre quête de
réussite;
- la croissance durable pour offrir des possibilités aux générations futures.
Nous sommes engagés dans un dialogue primordial sur l'avenir de notre pays – ce qui est une bonne chose.
Le progrès pour le Canada dans XXIe siècle
À presque tous les égards, le Canada fait bonne figure quant aux progrès réalisés sur les plans social et
économique.
Les Canadiens profitent aujourd'hui des avantages de la prospérité économique : une économie stable et
croissante, de faibles taux d'intérêt et des niveaux de chômage peu élevés.
Le Canada est considéré comme un leader économique parmi les pays du G7. Il est celui dont la dette
nette est la moins élevée, et l'OCDE estime qu'il sera le seul gouvernement du G7 à afficher un excédent
budgétaire en 2006 et 2007.
Sur le plan social, le Canada a fait des progrès considérables depuis la Seconde Guerre mondiale.
Il s'est doté d'un système de soins de santé public et d'un régime de pension, et a privilégié une approche
de la citoyenneté qui fait place à la diversité. Comme pays, nous croyons à la nécessité de tendre la main à
ceux qui ont besoin de notre aide partout dans le monde.
Je pourrais vous parler plus longtemps de nos réussites, mais je vous recommande plutôt le livre de John Ibbitson
intitulé The Polite Revolution1, dont les 12 premières pages font amplement état de nos succès en tant que nation.
Je me contenterai de dire que nous avons de nombreuses raisons d'être fiers.
Si la barre du progrès futur est si haute, c'est peut-être dû à tout ce que nous avons réalisé dans la
brève histoire de notre pays.
À mon avis, une simple définition du progrès est d'avoir dans l'avenir une meilleure société que
celle que nous avons d'aujourd'hui. Pour une nation, cela signifie léguer à nos petits enfants un monde plus
propre, plus sécuritaire et plus prospère – et, de ce fait, une meilleure qualité de vie – que celui dont nous avons hérité.
Où allons-nous avec ce que nous avons acquis? Quels défis devons-nous relever pour passer d'un pays prospère à
un pays encore plus prospère dans les années futures?
Pour un instant, j'aimerais mettre de côté les relations fédérales-provinciales-territoriales et laisser
le sport aux athlètes afin d'aborder une réalité canadienne qui me frappe chaque fois que je me rends à Ottawa à
partir de ma ferme à Fergus en passant par Toronto. Il s'agit du défi que pose l'évolution rapide de nos collectivités.
La croissance et l’urbanisation du Canada d’aujourd’hui
À plusieurs égards, les générations qui nous ont précédés auraient peine à reconnaître le Canada tel qu'il
existe de nos jours. En 1921, 49 pour 100 des Canadiens vivaient en zone urbaine par rapport à 80 pour 100 en 2001,
selon les recensements des deux époques.
La croissance économique vigoureuse dans les centres urbains transforme nos paysages et nos vies.
Lorsque je me déplace entre l'aéroport Pearson et ma ferme, j'aperçois un microcosme de cette réalité canadienne.
Je vois le dynamisme du plus grand centre urbain du pays et la prolifération de ses banlieues. Je remarque toute
l'activité et l'infrastructure qui sont le moteur de notre économie. Je constate la transformation en subdivisions des
collectivités rurales qui, autrefois, étaient le centre agricole de l'Ontario.
Je ne suis pas le seul à réfléchir aux défis et aux possibilités que tout cela suppose.
Nos collectivités en mutation et les défis connexes font de plus en plus l'objet d'éditoriaux, d'articles
de journal, de livres, de symposiums et de rapports publics. Cette question imprègne toute discussion sur la productivité,
l'environnement, la santé, la politique d'immigration, la qualité de vie et l'attrait du Canada pour les investisseurs et
les grandes entreprises.
La plupart de gens conviendraient que pour réaliser des progrès dans l'avenir, pour bâtir une société meilleure,
nous devons dès maintenant assurer la viabilité de nos collectivités :
-
d'une façon durable sur le plan de l'environnement;
-
au moyen d'une infrastructure économiquement durable;
-
de manière à accroître notre productivité.
Permettez-moi d'élaborer sur chacun de ces trois points, en commençant par l'environnement.
Nous sommes tous conscients du lien intrinsèque entre l'environnement et la santé de nos collectivités.
Comme le démontrent des décennies de recherche, les bassins hydrographiques et leur pouvoir regénératif,
les puits de carbone créés par les régions agricoles et sauvages, ainsi qu'une foule d'autres processus naturels à
l'extérieur des zones urbaines sont essentiels à la qualité de l'air, de l'eau et des habitats.
Le débat sur l'environnement fait ressortir une chose : Kyoto n'est ni le problème ni la solution. On
doit plutôt s'attarder aux pratiques de croissance qui entraînent des habitudes de consommation nuisibles à
l'environnement. Cela signifie que le problème – et donc la solution – est beaucoup plus près de nous.
À titre de citoyens, nous devrions encourager tous nos élus – municipaux, provinciaux et fédéraux – à faire
de l'environnement un élément clé dans leur planification et leurs plans de dépenses. Au nom du gouvernement du Canada,
je peux vous assurer que cette question nous tient à coeur.
Déjà, notre gouvernement a posé des gestes importants en proposant des mesures efficaces et rigoureuses pour
améliorer l'état de notre environnement :
- nous avons annoncé un nouveau crédit d'impôt pour encourager le recours au transport en
commun;
-
nous avons mis en place une exemption d'impôt pour les dons de terres
écosensibles;
-
nous avons entrepris la rédaction d'un projet de loi pour combattre la pollution qui empoisonne nos
villes;
-
d'ici 2010, nous exigerons une proportion moyenne de 5 pour 100 de combustible renouvelable dans l'essence et
le carburant diesel.
De plus, à l'automne, la ministre de l'Environnement présentera le nouveau plan du gouvernement en matière
d'environnement qui constituera, je crois, une agréable surprise.
N'oublions pas que nous avons aussi la responsabilité collective d'agir sur le plan individuel. Certes,
la majorité d'entre nous pratique le recyclage. Certains prennent peut-être d'autres mesures pour préserver
l'environnement. Mais il faut se mettre au défi de faire encore plus, dès maintenant. Nous devons commencer
par nettoyer notre propre cour, au sens propre comme au sens figuré.
Infrastructure
J’aimerais maintenant discuter de l’importance d’avoir une infrastructure financièrement viable pour progresser
en tant que nation.
Tous les ordres de gouvernement sont constamment poussés à préparer leurs budgets en ayant des projets
d’infrastructure comme priorités. Par exemple, les municipalités ont le défi de maintenir les dépenses d’infrastructure
tout en investissant dans la prestation d’autres services essentiels au maintien de notre qualité de vie.
Le coût d’entretien des routes, des égouts, des ponts, du transport en commun, des ports, des usines de
traitement d’eau et de toutes les infrastructures publiques dites « matérielles » fait concurrence à l’investissement
dans, par exemple, les terrains de soccer, l’enseignement, les musées et les initiatives de santé communautaire.
Pour répondre à tous ces besoins à mesure qu’ils s’accroissent, les municipalités peuvent augmenter l’impôt
foncier (mais tentent d’éviter de le faire) ou réclamer davantage de financement des autres ordres de gouvernement.
C’est alors aux provinces et aux territoires, ou au gouvernement du Canada de décider s’ils vont réduire leurs propres
programmes ou augmenter les impôts.
Peu importe qui perçoit combien auprès de qui : il n’y a qu’une assiette fiscale, et c’est nous tous qui devons
payer pour l’infrastructure.
Le gouvernement du Canada a la conviction qu’il a un rôle important à jouer pour que le pays dispose d’un
système d’infrastructures solide capable de soutenir les échanges et le commerce. À preuve, nous avons annoncé un
investissement de 16,5 milliards de dollars dans l’infrastructure pour les quatre prochaines années.
De surcroît, notre gouvernement s’est engagé à rendre le financement fédéral plus prévisible et à l’offrir
davantage à long terme, et il a fait de cette question une partie intégrante des discussions sur l’équilibre fiscal
avec les provinces et les territoires.
Cela dit, en tant que citoyens, il est important de se rappeler que les sommes qui peuvent être
consacrées à ce domaine ne sont pas infinies. C’est pourquoi il est si important de se doter d’une infrastructure
viable sur le plan économique.
Le week-end dernier, le Globe and Mail a publié une lettre ouverte de l’architecte Jack Diamond .
Peut-être l’avez-vous lue.
Dans le cadre d’une discussion sur les dimensions économiques des nouveaux quartiers à faible densité,
il a fait référence à une étude réalisée dans le sud-ouest de l’Ontario. Celle-ci révèle que pour chaque dollar
provenant d’un bien immobilier, 1,40 dollar est nécessaire pour y fournir des services. Vous conviendrez que lorsque
nous disons vouloir laisser un héritage à nos enfants, nous ne parlons pas de déficits institutionnalisés.
Si nous négligeons de bâtir une infrastructure économiquement viable, il en résultera de nouveaux besoins,
une augmentation des impôts ou un déclin de la qualité de vie. Aucun de ces scénarios n’est bon pour améliorer la
productivité, stimuler l’ingéniosité et attirer les entreprises de façon à gonfler les revenus et assumer le coût
du progrès.
La productivité
J’ai montré l’importance d’avoir une croissance viable sur le plan environnemental et économique.
J’aimerais maintenant aborder un dernier point, soit la nécessité de veiller à ce qu’à mesure qu’elles se développent,
nos collectivités favorisent une meilleure productivité. Nous pourrons ainsi financer les progrès futurs et faire en
sorte que les familles canadiennes puissent continuer de vivre dans la prospérité.
Dans le futur, pour continuer de bénéficier des services, des installations et de la sécurité dont nous
jouissons aujourd’hui, il nous faudra augmenter notre production par habitant. Pour être concurrentiels à l’échelle
mondiale, il nous faut convaincre les investisseurs et les acheteurs que le Canada est un marché qui fera fructifier
leur argent.
Je conviens que la productivité est une question aux nombreuses facettes qui exige des initiatives à
plusieurs niveaux. Il s’agit également d’un domaine de spécialité de mes collègues, alors je ne prétends pas
avoir personnellement la solution ultime. Ce que je peux dire, par contre, c’est qu’il y a certaines choses
critiques que le gouvernement du Canada fait déjà pour renforcer notre économie.
Au cours des dernières années, la communauté d’affaires a exprimé des préoccupations à l’effet que les
taxes et les dépenses du gouvernement limitent notre développement économique. C’est pourquoi le gouvernement
actuel a pour priorité de freiner l’augmentation de ses dépenses et d’offrir des programmes de manière responsable.
Nous avons aussi apporté des allégements fiscaux tant pour les Canadiens que pour les entreprises. Notre premier
budget proposait plus de réductions d’impôt des particuliers que les quatre budgets précédents combinés.
Nous continuons d’essayer d’éliminer les obstacles à la mobilité et au commerce au Canada, les barrières à
l’emploi pour les immigrants et les entraves aux marchés financiers efficients.
Le ministre des Finances explore divers moyens d’harmoniser les régimes fiscaux au Canada afin de réduire
les coûts d’observation pour les contribuables et les frais d’administration pour les entreprises et les gouvernements.
En ce qui concerne le capital humain et la compétitivité, nous reconnaissons, comme le reste du monde, qu’une
main-d’oeuvre qualifiée est cruciale pour que l’économie canadienne soit forte.
Nous devons faire tout en notre pouvoir pour avoir un système d’éducation qui forme des travailleurs compétents,
instruits et polyvalents. Pour les jeunes Canadiens, avoir une bonne éducation est la clé du succès, et nous voulons
nous assurer d’avoir une population active qui est prête à travailler avec ardeur et à prendre les devants.
Notre gouvernement reconnaît l’importance que les Canadiens fassent des études postsecondaires et a prévu
370 millions de dollars de nouveaux investissements dans le Budget 2006 pour faciliter l’accès aux collèges et
universités et y encourager l’excellence.
La question est maintenant de savoir si, vu l’évolution de nos collectivités, il est possible d’améliorer
notre productivité.
Se pourrait-il qu’il y ait un fond de vérité à notre croyance selon laquelle la productivité est tributaire
de la densité de population?
Dans une région particulièrement peuplée, les gens habiteraient-ils plus près de leur lieu de travail,
ce qui réduirait le temps de transport et augmenterait le temps consacré aux loisirs?
Est-ce qu’en ayant davantage de temps libre la population serait plus heureuse et en meilleure santé?
Des gens plus heureux et en meilleure santé seraient-ils plus productifs et créatifs?
En un mot, pourrions-nous rapidement, et d’un seul coup, protéger l’environnement, économiser sur le plan de
l’infrastructure et améliorer la productivité en augmentant la densité des nouveaux développements domiciliaires?
Ce sont là les questions qui me viennent à l’esprit pendant mes propres déplacements, et je constate par mes
lectures que d’autres ont la même réflexion. Peut-être s’agit-il d’un bon sujet de discussion pour une autre occasion.
Maintenant, question de synthétiser toutes ces idées...
Je crois qu’il est clair que le gouvernement fédéral actuel a aligné ses priorités de façon à ce que les
familles et les entreprises canadiennes puissent améliorer leur situation. Nous déployons des efforts pour que les
nouveaux immigrants et les jeunes puissent contribuer au renforcement de la main-d’oeuvre. Nous veillons à ce que
le système d’infrastructures soit financé de façon à maximiser les échanges et le commerce. Nous avons réduit les
taxes pour tout le monde. Et nous sommes en train de concevoir un plan environnemental ingénieux pour le Canada.
Il ne faut toutefois pas oublier que les gouvernements ne sont pas les seuls protagonistes. En effet, chacun
d’entre nous, en tant que personne, est responsable de l’avenir de nos collectivités.
Il faut absolument se rappeler que nos décisions personnelles influent sur l’avenir, que leur portée est
bien plus vaste, par exemple, que la durée de notre emploi actuel.
Je me rends bien compte que si on m’a invité à vous parler aujourd’hui, c’est parce que je suis membre du
Cabinet. Toutefois, ce qui m’a incité à venir est l’occasion de m’exprimer en tant qu’habitant du pays et en tant
que père et citoyen au sujet d’une dure réalité qui a le potentiel de nous faire découvrir de nouveaux sommets de
qualité de vie ou de faire lentement basculer notre société telle que nous la connaissons.
Essentiellement – en ce qui concerne nos villes, notre environnement, le coût de notre infrastructure et
la croissance de la productivité – je tenais à vous dire que nos actions individuelles sont toutes des composantes
du progrès. Que nous conduisions une voiture écologique, que nous écrivions une lettre ouverte ou que nous dépensions
des milliards de dollars, nos gestes sont indissociables de la société. Dès que nous embrasserons cette réalité, nous
embrasserons le progrès.
Merci
- Ibbitson, John. The Polite Revolution: Perfecting the Canadian Dream. Toronto: McClelland and Stewart, 2005, 270 pages
- Diamond, Jack, Our Sickly Suburbs: We have the cure. Where's the courage?
Globe and Mail, August 5, 2006, A15
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