Quatorzième rapport annuel au Premier ministre sur la fonction publique du Canada


Table des matières

I. Introduction

Objet du rapport
Structure du rapport

II. La fonction publique en 2007

Description
De l’importance d’une fonction publique de qualité supérieure
Les défis à relever

III. Le renouvellement de la fonction publique

Principes
Instruments
Partenaires en matière de renouvellement

IV. Les priorités à court et à moyen terme

1) La planification
2) Le recrutement
3) Le perfectionnement des employés
4) L’infrastructure de base

V. Coup d’œil prospectif

Le système des ressources humaines
Innovation et gestion des risques
Leadership

VI. Message aux fonctionnaires

Annexe 1 – Les activités du gouvernement

Annexe 2 – Aperçu démographique de la fonction publique fédérale

Annexe 3 – Le premier rapport du Comité consultatif sur la fonction publique nommé par le Premier ministre


I. Introduction

Voici le quatorzième rapport du greffier du Conseil privé sur la fonction publique du Canada, et mon deuxième depuis que j’assume la responsabilité de chef de la fonction publique, soit mars 2006.

Mon premier rapport était une déclaration très personnelle sur mes fonctions de greffier relativement à l’institution nationale essentielle qu’est la fonction publique du Canada. Je disais l’an dernier que « peu d’employeurs peuvent soutenir que le travail de leurs employés, à bien des égards, a un impact direct sur la vie des citoyens […] » et que « peu d’organisations offrent un aussi large éventail d’expériences ». Tirer le meilleur parti de l’occasion donnée de servir est certes le défi auquel doivent faire face les hommes et les femmes qui choisissent de faire carrière dans la fonction publique.

Objet du rapport

Mon deuxième rapport vise un objectif bien différent : énoncer ce que je considère comme l’orientation future de la fonction publique fédérale et, surtout, décrire la voie du renouvellement que nous empruntons. Le renouvellement de la fonction publique doit être opéré par un grand nombre de personnes dans des douzaines d’organisations fédérales, grandes et petites, d’un bout à l’autre du pays. Le rôle du greffier, en sa qualité de chef de la fonction publique fédérale, consiste à fixer les principaux objectifs, à établir les jalons permettant de mesurer les progrès réalisés et à promouvoir une culture de changement et de réforme qui nous mènera loin dans ce nouveau siècle.

Le présent rapport fixe essentiellement quatre objectifs qui serviront de points de repère à cet exercice.

a) Pourquoi cet exercice de renouvellement?

Le premier objectif est de démontrer la nécessité de procéder à un tel exercice. Pourquoi est-il si important en 2007 de se concentrer sur le renouvellement de la fonction publique du Canada? Beaucoup diraient que celle-ci semble avoir consacré une bonne partie des 20 dernières années à se renouveler. Cet exercice prendra-t-il jamais fin? Pourquoi imposer aux institutions et à leurs fonctionnaires d’autres changements et semer le chaos, comme diraient certains, quand l’État a déjà tant à faire pour bien servir les citoyens?

La réponse à ces questions est toute simple : si la fonction publique, en tant qu’institution nationale centrale, ne se renouvelle pas pour répondre aux besoins actuels et futurs de l’État et des citoyens, elle risque de devenir moins pertinente, moins utile et moins respectée au fil des années. Si nous nous abstenons de mener cet exercice de façon continue, la fonction publique ne pourra demeurer une institution nationale dynamique, essentielle à la gouvernance et à la prospérité du pays.

b) Qu’est-ce qui motive le changement?

Le deuxième objectif est de bien situer le contexte du renouvellement. Nous devons comprendre quelles réalités précises du pays et de la fonction publique commandent un investissement majeur en temps et en efforts pour opérer le changement et le renouvellement souhaités. Quels sont les facteurs déterminants dans notre société et ailleurs qui nous obligent à revoir en profondeur ce que les fonctionnaires font et comment ils le font? Pourquoi faut-il prêter une attention particulière aux questions de recrutement, de leadership et d’apprentissage? Que faut-il pour créer un milieu de travail qui favorise l’élaboration de politiques novatrices, la prise de décisions responsables et la reddition de comptes clairs?

c) Des objectifs et des mesures

Le troisième objectif est d’établir les priorités chaque année et de fixer des objectifs clairs, crédibles, sur lesquels se fonder pour mesurer les progrès réalisés au cours des cinq années suivantes et faire rapport sur ceux-ci. Cinq ans représentent ce qu’un optimiste pourrait appeler le moyen terme prévisible; le pragmatique, lui, pourrait être moins serein quant à notre capacité à prévoir la suite des événements, mais être lui aussi convaincu de la nécessité d’établir un plan pluriannuel. Que les choses se concrétisent ou non, il faut prévoir aujourd’hui un exercice permanent de changement et de renouvellement, en étant bien conscient que celui-ci nécessitera des mises au point de temps à autre.

d) Aller de l’avant ensemble

Le quatrième et ultime objectif est de transmettre le sentiment de partager une vision du renouvellement à tous les niveaux de la fonction publique. À l’instar de milliers de collègues, j’ai fait carrière dans la fonction publique. Comme eux, je suis fier d’avoir pu contribuer à des politiques et à des programmes qui ont eu une incidence sur la vie des citoyens. J’espère – et je suis personnellement résolu à m’en assurer – que les générations futures de jeunes Canadiens et Canadiennes envisageront de faire carrière dans la fonction publique avec le même optimisme que moi quand j’y suis entré, et qu’ils pourront clore leur carrière de fonctionnaire avec un sentiment de satisfaction bien mérité.

Malgré quelques récentes affirmations du contraire, ce sentiment de fierté et de détermination se retrouve déjà dans la fonction publique du Canada. Le dernier Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux, par exemple, a récolté un impressionnant taux de réponse, soit 59 p. 100. Il révèle que 90 p. 100 des répondants sont fiers du travail accompli dans leur unité de travail et que 96 p. 100 d’entre eux sont déterminés à contribuer au succès de leur organisation. Plus de 80 p. 100 estiment que celle-ci leur offre un milieu de travail stimulant1. Après avoir vu ces chiffres, un président-directeur général du secteur privé a indiqué dernièrement que n’importe quelle organisation – privée ou publique – serait heureuse d’obtenir ce niveau de détermination et de satisfaction chez ses employés. À tout le moins, cette attitude positive au sein de la fonction publique assure le fondement d’une vision commune pour demain.

Structure du rapport

Le présent rapport compte six sections. À la suite de cette courte introduction, la section 2 décrit la fonction publique du Canada d’aujourd’hui, son évolution et, en termes généraux, sa structure2. Il y est question des multiples tâches accomplies par les fonctionnaires et de l’importance d’une fonction publique efficace pour assurer la sécurité et la prospérité du pays.

On traite aussi dans cette deuxième section des grands enjeux et défis auxquels la fonction publique doit faire face à moyen et à long terme, par exemple son renouvellement, le leadership, la gestion du risque, le juste équilibre entre la reddition de comptes et l’engagement de servir et d’innover, et la préservation en général des valeurs d’une fonction publique traditionnelle dans un milieu en constante évolution.

La section 3 établit les principes sur lesquels doit reposer un exercice de renouvellement fructueux et soutenu, de même que les moyens qui peuvent être utilisés pour y parvenir. Mentionnons les comités de sous-ministres ainsi que les programmes ciblés de recrutement et de perfectionnement qui toucheront des milliers de fonctionnaires, nouveaux et chevronnés, au cours des prochaines années. Il est aussi question dans cette section de nos nombreux partenaires, à l’interne et à l’externe, que le renouvellement intéresse.

La section 4 énonce les quatre priorités, à court et à moyens terme, qui découlent d’un dialogue entre les sous-ministres et d’autres discussions tenues dans la fonction publique. On traite des objectifs liés à chaque priorité, de la façon dont on entend mesurer les progrès accomplis et des résultats escomptés à court et à long terme (dans certains cas, à très long terme).

Dans la section 5, on examine ce à quoi s’intéressera la fonction publique au cours des prochaines années, notamment la simplification des façons de faire, l’innovation, la gestion du risque et le leadership. Il ne s’agit pas ici de couler un plan dans le béton, mais bien de donner aux fonctionnaires et à ceux qui ont à cœur l’évolution de la fonction publique une idée des éléments du plan d’action à long terme, bien que nous soyons conscients que les circonstances peuvent changer et que, comme toujours, nous devons être prêts à adapter notre démarche aux nouveaux défis.

La dernière section du rapport, la section 6, s’adresse aux fonctionnaires qui, comme moi, ont fait carrière dans la fonction publique. La plupart ont connu ces 15 dernières années un processus de changement quelque peu cahoteux. Ils ont appuyé des programmes et élaboré des politiques sous de nouveaux gouvernements en se demandant peut-être ce que les forces extérieures impliquaient pour eux et leur carrière, voire ce que le concept même de la fonction publique signifiait aujourd’hui. Je veux que tous les fonctionnaires sachent que nous sommes engagés ensemble dans cet exercice de renouvellement, et ce, à long terme. Ce sont les fonctionnaires qui, collectivement, sont les véritables intendants de cette institution vitale qu’est la fonction publique du Canada.

II. La fonction publique en 2007

Description

La fonction publique fédérale constitue la plus grande entreprise au Canada, et son importance est indéniable. En effet, 250 000 Canadiens et Canadiennes sont employés dans le noyau de la fonction publique fédérale3, c’est-à-dire les 20 ministères et 180 organismes à vocation réglementaire et administrative du gouvernement du Canada. À ceux-là s’ajoutent les 220 000 membres des Forces canadiennes (64 000 membres réguliers et 25 000 réservistes) et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) (quelque 20 000 membres réguliers et civils) et employés des sociétés d’État (par ex., la Société Radio-Canada, VIA Rail et Postes Canada).

Les fonctionnaires appartiennent à des douzaines de groupes professionnels – des inspecteurs des aliments aux négociateurs des revendications autochtones, et des spécialistes de la santé publique aux diplomates. Ils comptent parmi les employés les plus qualifiés au pays, l’expertise et les réalisations de bon nombre d’entre eux étant reconnues dans le monde entier.

De même, les activités du gouvernement sont réparties dans des douzaines de secteurs d’activités et des milliers de programmes dont l’exécution est assurée par plus de 200 organismes fédéraux et, indirectement, au nom du gouvernement, par des centaines d’organismes sans but lucratif aux quatre coins du pays. Le gouvernement fédéral compte 1 600 points de service à l’échelle nationale, et les Canadiens peuvent s’adresser aux missions diplomatiques et aux bureaux consulaires de 180 pays.

L’une des fonctions fondamentales de l’administration fédérale consiste à percevoir les recettes nécessaires pour payer les programmes et les services dont les Canadiens ont besoin. En 2005-2006, les recettes fiscales se sont élevées à environ 222 milliards de dollars, et les dépenses à 209 milliards, d’où un excédent de 13 milliards.

La nature des dépenses fédérales a beaucoup changé depuis 10 ans, au rythme des besoins et des attentes de la population. Ce sont les dépenses en santé qui ont connu la plus forte croissance, en raison du vieillissement démographique, de l’innovation dans les soins de santé et d’autres facteurs. Parmi les autres secteurs où les dépenses fédérales augmentent le plus rapidement, surtout depuis les événements du 11 septembre 2001, figure celui de la sécurité nationale en général. Les dépenses au titre de la sécurité publique et de l’antiterrorisme ont en effet grimpé de 43,6 p. 100 au cours de la période de quatre ans s’échelonnant de 2002-2003 à 2006-20074. Parallèlement, les dépenses ont augmenté au pays dans les domaines de la justice et de la prévention du crime et, sur le plan international, aux chapitres de la défense et de l’aide au développement.

Pour la fonction publique fédérale, la tendance à long terme, s’il en est une, devrait correspondre à l’évolution du rôle du gouvernement fédéral au sein de la fédération, façonnée par une opinion publique changeante ainsi que par d’importants changements dans la technologie et dans le contexte mondial qui se répercutent sur notre société. La tendance laisse présager un rôle mieux ciblé pour le gouvernement fédéral dans certains secteurs clés, notamment la prestation de services; la redéfinition de la relation avec les Premières nations; une concertation plus étroite avec les provinces dans des domaines d’intérêt et de responsabilité partagés comme l’immigration et l’environnement; une prise de conscience accrue de l’importance d’investissements – et de réinvestissements – dans la recherche et les infrastructures essentielles pour assurer le succès d’une économie moderne. Il va sans dire qu’une gestion financière efficace est garante d’assises budgétaires solides pour toutes ces activités et pour la prospérité du pays en général.

De l’importance d’une fonction publique de qualité supérieure

Le travail des fonctionnaires a toujours été complexe et exigeant, que ce soit la réglementation du transport aérien, la promotion des exportations canadiennes ou l’inspection des aliments pour en garantir la salubrité. De nos jours, cependant, travailler dans l’administration est plus difficile que jamais en raison de la complexité des questions qui se posent aux gouvernements et du faible seuil de tolérance des erreurs dans le secteur public. Les changements entraînés par la révolution de l’information au cours des 25 dernières années ont eu de profondes répercussions sur lesactivités de l’État. En effet, ils ont amplifié les attentes du public à l’égard des gouvernements tout en permettant aux moindres facettes de l’administration d’être scrutées à la loupe par le public.

Un examen est bienvenu, car il représente une caractéristique essentielle du processus démocratique. Le Parlement, la presse et le public ont le droit de demander où va l’argent que perçoit le gouvernement en impôts, et si l’efficacité de ce dernier est à la hauteur des attentes des Canadiens. Par contre, le climat actuel de scepticisme à l’égard du gouvernement, dont on exige de plus en plus qu’il rende des comptes, comporte lui-même des risques, en particulier celui que les fonctionnaires s’empêtrent dans les systèmes de surveillance et de rapports au point de ne plus pouvoir gérer le risque. Responsabiliser ne signifie pas étouffer la créativité dans la formulation de politiques ni compromettre la prestation des services.

L’Organisation de coopération et du développement économiques (OCDE), la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) ont tous réalisé des études qui montrent clairement ce que les Canadiens prennent depuis longtemps pour acquis, à savoir l’importance d’une fonction publique efficace pour la compétitivité nationale et pour la confiance du public dans l’intégrité des institutions et des gouvernements5. Si les Canadiens ont traditionnellement été perçus comme des innovateurs en matière de gestion du secteur public, il appert que depuis quelques années d’autres pays – l’Australie, le Royaume-Uni, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis – ont commencé à faire preuve de plus d’audace à cet égard. Les Australiens, par exemple, ont radicalement décentralisé leur régime de gestion des ressources humaines sans renoncer pour autant à une fonction publique unifiée. Quant aux Britanniques, ils sont désormais à l’avant-garde dans la mesure du rendement du secteur public et l’établissement de rapports en la matière.

Quelles qu’aient été nos réussites passées, nous ne pouvons pas présumer de l’avenir. L’institution nationale vitale que constitue la fonction publique vient de traverser plus d’une décennie de changements bouleversants. L’institution n’en est pas sortie brisée, mais elle est, selon l’expression d’un éminent érudit, à un « moment déterminant » de son histoire6. La fonction publique est confrontée à des défis d’origine externe et interne dont l’effet conjugué rend essentiel un investissement considérable et constant dans son renouvellement.

Les défis à relever

En quoi le travail de la fonction publique a-t-il changé et comment est-il plus exigeant qu’avant à divers égards? De nombreux auteurs ont tenté de fournir une réponse à cette question, mais les facteurs clés qui ressortent de toute étude sérieuse de la gestion des affaires publiques de nos jours comprennent immanquablement les suivants :

Les facteurs énumérés ci-dessus ne sont que les plus visibles parmi ceux qui ont une incidence sur le milieu de travail actuel des fonctionnaires. À ceux-là s’ajoutent les changements démographiques et autres qui touchent directement la fonction publique ainsi que d’autres institutions au Canada.

Parmi ces autres facteurs, notons :

Enfin, il ne faut pas oublier certains événements et initiatives de l’histoire récente de la fonction publique qui font du renouvellement de la fonction publique une priorité aujourd’hui. Une succession de réorganisations importantes au cours des 15 dernières années ont touché presque tous les secteurs et tous les employés du gouvernement. La fonction publique a également subi un important examen des programmes et plusieurs examens de moindre envergure qui se sont traduits par d’importantes compressions des budgets des ministères et par le départ de milliers d’employés chevronnés, à tous les niveaux. La croissance amorcée récemment n’a pas entièrement compensé l’effet de ces répercussions.

Au cours de la même période, de nouveaux organismes (Parcs Canada, l’Agence du revenu du Canada, l’Agence canadienne d’inspection des aliments et l’Agence des services frontaliers du Canada, entre autres) ont été créés pour accomplir autrement des tâches qui relevaient traditionnellement de la fonction publique, et plusieurs d’entre eux ont de nouveaux régimes d’emploi. Ces dernières années ont également été marquées par une série de grandes tentatives de réforme et de renouvellement des ressources humaines, telles Fonction publique 2000, au début des années 1990, et La Relève, à la fin de la même décennie. Celles-ci ont été suivies en 2003 par l’élaboration et l’adoption de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, qui est venue réformer en profondeur le régime de l’emploi et des relations de travail.

En résumé, la fonction publique se trouve aujourd’hui contrainte par les réalités démographiques, par la situation nationale et internationale et par sa propre histoire récente à repenser ses méthodes de recrutement, de perfectionnement, de gestion des effectifs et de maintien en poste. La tâche de relever ces défis l’occupera longtemps.

III. Le renouvellement de la fonction publique

Lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir en février 2006, le Premier ministre a clairement énoncé son engagement envers la fonction publique ainsi que les traditions et les valeurs traditionnelles de professionnalisme et d’impartialité qui définissent cette institution depuis l’adoption du principe du mérite en 1918. Cette déclaration d’appui politique envers le renouvellement de la fonction publique, une institution nationale essentielle, est d’une importance capitale.

Principes

Lorsque le Premier ministre a déclaré qu’«  un gouvernement efficace doit pouvoir compter sur des fonctionnaires efficaces »7, il a bien énoncé la prémisse globale du processus du renouvellement. Dans le respect de cette philosophie, pour contribuer à une administration publique efficace, fondée sur des principes, les fonctionnaires doivent s’équiper de nouveaux outils. Il en est de même des institutions.

Si nous voulons moderniser et renouveler la fonction publique et ses institutions, nous devrons donc :

Dans toute entreprise moderne florissante, le renouvellement n’est pas une activité ou une initiative ponctuelle; c’est plutôt un processus permanent, qui nécessite une attention constante de la part des gestionnaires et du personnel à tous les niveaux. Le renouvellement consiste non seulement à recruter et à perfectionner de nouveaux employés, mais aussi à valoriser les personnes en place et à les aider à se perfectionner. Même s’il nous est difficile d’anticiper, nous savons que bon nombre des compétences et des méthodes utilisées dans le passé ne suffiront plus. Le profil démographique du Canada change, tout comme celui de la fonction publique; nous devons tirer profit des possibilités de ce processus inévitable de régénération et les adapter à nos besoins.

Instruments

Le professionnalisme et l’engagement personnel de tous les fonctionnaires sont les facteurs clés en matière de renouvellement. Le Canada est choyé puisque sa fonction publique continue d’attirer dans ses rangs des personnes talentueuses, et ceux et celles qui y font carrière conservent ce sentiment d’engagement envers leur travail.

À titre de chef de la fonction publique, une de mes responsabilités consiste à fournir à la collectivité des sous-ministres et des cadres supérieurs les outils et les mécanismes nécessaires à la poursuite, collective et individuelle, de l’objectif commun : le renouvellement de la fonction publique. Mentionnons :

Partenaires en matière de renouvellement

Faire face aux défis liés au renouvellement n’est pas la responsabilité exclusive de la haute direction de la fonction publique. L’engagement continu des employés et d’un large éventail de partenaires et d’intervenants de tous les niveaux s’impose.

Certains partenaires sont au sein même du gouvernement, en commençant évidemment par le Premier ministre et les membres du Conseil des ministres. Ceux-ci établissent le programme d’action du gouvernement. Les ministres cernent les priorités et affectent les ressources aux politiques et aux programmes qui permettent aux fonctionnaires de contribuer au bien public.

L’engagement des élus, ceux qui composent le gouvernement et les parlementaires en général, est donc essentiel pour un processus de renouvellement efficace et durable. Les élus côtoient les fonctionnaires de près; ils sont témoins de leurs problèmes et de leurs réussites. Ils comprennent l’importance du bon fonctionnement de la fonction publique pour une gouvernance efficace au Canada. Leurs attentes sont, à juste titre, élevées.

Parmi les autres partenaires clés du processus de renouvellement figurent les organismes centraux et d’autres institutions du secteur public axées sur la gestion du personnel, notamment :

Ensemble, ces institutions centrales du gouvernement sont responsables des méthodes de recrutement, de perfectionnement, de rémunération et de gestion des employés. Les 200 ministères et organismes qui composent la fonction publique ne sont pas en reste. C’est par la prestation de programmes et de services, la réglementation et l’élaboration de politiques que la fonction publique touche la vie des Canadiens. Pour que le renouvellement soit réussi, les services de première ligne doivent être améliorés.

Parmi les autres partenaires gouvernementaux qui sont parties prenantes au renouvellement, mentionnons les syndicats de la fonction publique, l’Association professionnelle des cadres de la fonction publique du Canada ainsi qu’un nombre important de groupes informels de jeunes professionnels qui veulent apporter leur contribution au moment où la fonction publique s’engage dans le XXIe siècle.

Les partenaires et les intervenants externes jouent également un rôle clé dans le processus de renouvellement. Il peut s’agir de comités spéciaux dont le Comité consultatif sur le maintien en poste et la rémunération du personnel de direction (le Comité Stephenson) et d’intervenants représentant divers secteurs de la société et de l’économie : des entreprises, des membres du secteur bénévole et communautaire, des groupes des Premières nations et d’autres groupes autochtones, des universités et des collèges ainsi que des Canadiennes et des Canadiens qui s’intéressent à la politique publique.

Toutes ces parties sont concernées par la qualité et la pertinence de la fonction publique du Canada. Leurs voix doivent être entendues dans le dialogue continu qui inspire et nourrit le processus de renouvellement de la fonction publique.

IV. Les priorités à court et à moyen terme

1) La planification

Pour réaliser des progrès, il faut se donner un plan. La première priorité consiste donc à mieux comprendre, dans chacun des ministères et organismes et dans la fonction publique dans son ensemble, les compétences et les besoins du gouvernement et des Canadiens, pour pouvoir ensuite déterminer quelles sont les compétences et les capacités dont nous avons besoin pour bien servir la population canadienne dans les années à venir.

Nos objectifs

En intégrant la planification des ressources humaines à la planification des activités, nous aurons une meilleure idée des points forts ainsi que des lacunes à combler, soit par le recrutement de débutants ou de spécialistes à mi-carrière, soit par la formation. Le processus de planification permettra, dans tous les ministères et organismes, d’amener les employés à contribuer à l’évolution de leur organisation.

Notre stratégie

À court terme, nous allons :

À moyen terme, nous allons :

2) Le recrutement

Le recrutement et le perfectionnement des employés sont des aspects importants du renouvellement. Quinze ans de prospérité ainsi que des changements démographiques dans la population canadienne ont provoqué un resserrement du marché du travail. Nous devons être prêts à faire concurrence aux autres employeurs pour recruter des personnes talentueuses, et nous devons le faire en respectant le principe des nominations au mérite et l’objectif que nous nous sommes donnés de doter la fonction publique d’un effectif représentatif de la population active – deux caractéristiques fondamentales de la fonction publique. Nous devons également être en mesure d’offrir aux employés en place et à ceux qui arrivent la possibilité de développer leurs compétences et de mener des carrières intéressantes au sein du gouvernement.

Nos objectifs

Du côté du recrutement, nos objectifs sont donc de veiller à ce que a) la fonction publique dispose des employés et des compétences dont elle a besoin pour l’avenir; b) chaque ministère ou organisme puisse répondre à ses besoins en nouveau personnel, besoins qu’il aura lui-même définis; c) les processus de recrutement soient accessibles, crédibles et efficaces.

Pour recruter les employés dont nous avons besoin, il faut promouvoir efficacement « l’image de marque » de la fonction publique, c’est-à-dire à convaincre les jeunes Canadiennes et les jeunes Canadiens que la fonction publique peut leur offrir des carrières de choix. On peut leur montrer la très grande diversité de carrières qu’on y trouve, la satisfaction qu’on retire à servir la population et les nombreux autres avantages que recèle le fait de faire carrière au gouvernement.

Plusieurs études ont révélé que les six facteurs suivants étaient les plus importants pour attirer des employés au sein d’une organisation et les maintenir en poste :

La fonction publique offre tous ces avantages à ses employés, et les faits, du moins en ce qui concerne l’attrait d’une carrière dans la fonction publique, en témoignent. Chaque année, des dizaines de milliers de Canadiens, la plupart jeunes et qualifiés, postulent pour obtenir un emploi dans la fonction publique. Nos programmes de recrutement spécialisés révèlent en outre que nous pouvons faire concurrence aux meilleures entreprises du secteur privé et aux autres échelons de gouvernement. Nos défis sont donc les suivants : répondre aux attentes des nouvelles recrues; procéder à un recrutement efficace et en temps opportun; et mieux aider les employés à perfectionner leurs compétences et à faire avancer leur carrière.

Notre stratégie

À court terme, nous allons :

À moyen terme, nous allons :

3) Le perfectionnement des employés

Le talent et l’engagement des employés sont l’atout le plus précieux de la fonction publique du Canada. Non seulement il est dans l’intérêt de l’employeur de faire en sorte que les employés aient la possibilité de se perfectionner et d’utiliser la pleine mesure de leurs compétences, mais aussi que cet intérêt pour le perfectionnement se manifeste chez les employés mêmes.

Nos objectifs

Nos objectifs en matière de perfectionnement des employés sont simples :

Cet objectif s’applique de façon systémique, par le truchement d’institutions telles que l’École de la fonction publique du Canada et de programmes tels que le Réseau du leadership. Cette responsabilité incombe également à chacun des sous‑ministres et des administrateurs généraux. Dans le milieu de travail, ce projet nécessitera un engagement soutenu à l’égard des plans d’apprentissage, des ressources consacrées à la formation ainsi qu’une mobilité accrue afin de faciliter le perfectionnement des employés – non seulement au sein des organisations, mais aussi entre elles.

Nous pouvons ici prendre exemple sur nos collègues des Forces canadiennes qui, depuis bien des années, reconnaissent l’importance du développement des compétences de leurs membres en matière de leadership, depuis le caporal jusqu’à l’officier général. Cette pratique peut aussi être adoptée du côté civil du gouvernement.

Il faut apprécier les fonctionnaires à leur juste valeur. Cette ressource, au service du pays, se doit d’être développée. L’engagement à long terme à l’égard des employés demeurera un élément marquant de la fonction publique, même si la société tend maintenant vers des emplois de courte durée et des carrières diversifiées. Les cadres supérieurs de toutes les organisations du secteur public doivent s’efforcer de répondre aux besoins et aux aspirations des jeunes employés en leur faisant voir l’éventail des possibilités qui s’offrent dans l’ensemble de la fonction publique.

Notre stratégie

À court terme, nous allons :

À moyen terme, nous allons :

4) L’infrastructure de base

Pour atteindre nos objectifs de renouvellement, il nous faut mettre en place les systèmes et les processus capables de soutenir la planification, le recrutement et le perfectionnement, de manière efficace et adaptée aux besoins.

Nos objectifs

Il nous faut établir des points de repère et mettre en commun nos pratiques exemplaires. Il s’agit de mieux nous servir de la technologie dans tous les aspects de la planification et de la gestion, notamment des normes intégrées de politiques et de programmes en matière de ressources humaines. Nous devons également faire en sorte que les assouplissements actuels et les nouveaux outils, par exemple en ce qui concerne la planification intégrée, soient mieux compris et appliqués par les gestionnaires et les employés.

Notre stratégie

À court terme, nous allons :

À moyen terme, nous allons :

Le Comité consultatif sur la fonction publique nommé par le Premier ministre

Durant la mise en œuvre de nos stratégies, à court et à moyen terme, nous serons guidés par les idées et les recommandations du Comité consultatif sur la fonction publique nommé par le Premier ministre. J’entrevois une complémentarité bénéfique entre les travaux du Comité et le processus de renouvellement mené au sein du gouvernement. Nous  pouvons en apprendre beaucoup des autres secteurs de la société en ce qui concerne la manière de gérer les personnes. Je suis très heureux d’avoir pu profiter des conseils de première heure du Comité concernant le sujet précis du recrutement (voir le rapport du Comité à l’annexe 3).

V. Coup d’œil prospectif

S’il nous faut des résultats concrets à court terme, nous reconnaissons que les modifications de la culture organisationnelle et des grands systèmes exigeront plus de temps. Ici encore, si nous voulons que nos efforts soient productifs, nous devons commencer à travailler dès maintenant et soutenir nos efforts au fil du temps.

Le système des ressources humaines

On peut faire beaucoup pour réduire la complexité du présent système des ressources humaines, investir dans les ressources humaines actuelles et cibler une nouvelle génération de fonctionnaires professionnels. Et l’on peut faire plus pour ouvrir les portes de la fonction publique à des personnes talentueuses des niveaux moyen et supérieur qui voient la possibilité d’y apporter une contribution.

En simplifiant les choses et en les rendant plus transparentes, nous aiderons à atteindre un autre objectif, celui de renforcer la responsabilisation tout en améliorant l’efficacité des activités gouvernementales. Non seulement cela est possible, mais c’est ce qu’il faut faire.

Innovation et gestion des risques

Un processus de changement culturel plus général devrait faire partie intégrante du renouvellement de la fonction publique. En particulier, il faut modifier la culture d’aversion au risque qui, pour un certain nombre de raisons, est apparue ces dernières années. J’ai parlé ailleurs du besoin d’établir un meilleur équilibre entre la surveillance et la souplesse et de supprimer les restrictions improductives qui poussent les fonctionnaires à gérer simplement en fonction des règles plutôt qu’en fonction des résultats. Ce thème est réitéré dans le récent rapport du Groupe d’experts indépendant sur les programmes de subventions et de contributions, où il est dit que « la responsabilisation est renforcée lorsque les règles de conformité sont judicieuses et établies à un niveau correspondant au risque et au besoin »8.

D’autres questions liées à la culture de la fonction publique méritent notre attention dans le travail de renouvellement. Ainsi, nous devons examiner d’un œil critique notre capacité de résoudre les problèmes de rendement et notre volonté de fixer des objectifs réalistes et de gérer en vue de les atteindre.

Leadership

Le leadership est un autre point qui nécessitera de l’attention et un investissement à long terme. C’est là une de mes priorités pour la fonction publique; les autres sont la responsabilisation, le travail d’équipe, l’excellence et, bien sûr, le renouveau. Le Comité consultatif sur la fonction publique nommé par le Premier ministre a manifesté son intérêt à explorer toutes ces questions dans le cadre de son travail au cours des prochains mois.

Sur la question du leadership, j’ai déclaré ce qui suit lors du Forum des sous‑ministres adjoints, il y a près d’un an : « Le leadership ne consiste pas à prolonger les heures de travail ou à travailler plus dur, ni à prendre des responsabilités supplémentaires. Il consiste à mobiliser les employés et les clients, à fixer le programme d’action et à donner l’exemple. » Ces remarques s’adressaient à un groupe de cadres supérieurs, mais elles auraient pu s’appliquer à n’importe quel groupe de fonctionnaires du pays. À mon sens, le leadership est une qualité à développer sous une forme ou une autre chez tout employé. Nous devons faire beaucoup plus, dans nos programmes de formation et de perfectionnement, pour inculquer et développer les qualités de leadership qui sont si essentielles à une fonction publique moderne et efficace.

Tout comme la réaction d’une culture d’innovation et de responsabilisation, le développement du leadership doit être considéré comme une initiative à long terme. Dans mes rapports futurs, j’élaborerai sur ces sujets importants et, en particulier, sur la nécessité d’établir un équilibre entre la demande de responsabilisation accrue et les impératifs d’une gestion moderne et novatrice.

Dans ce grand processus de renouvellement, nous visons en définitive le même objectif que tous les chefs de la fonction publique se sont toujours donnés pour leur organisation : l’excellence dans le soutien du gouvernement du Canada, dans la prestation des programmes et des services, et dans la réglementation et l’élaboration des politiques. Au sens propre, la mission fondamentale des fonctionnaires n’a pas changé. Ce qui a changé, c’est ce qu’il faut faire en pratique pour satisfaire aux normes de l’institution et aux attentes des concitoyens.

VI. Message aux fonctionnaires

Mes dernières remarques s’adressent à vous, mes collègues de la fonction publique. C’est vous qui, par-dessus tout, aurez la responsabilité de mener le processus de renouvellement de la fonction publique au cours des prochaines décennies et au delà. C’est vous qui serez le mieux en mesure de juger si les modifications apportées aux règles et aux systèmes auront vraiment changé quelque chose, ou si elles n’auront représenté qu’une simple réorganisation de la bureaucratie traditionnelle.

C’est vous, les fonctionnaires de près de 200 ministères et organismes fédéraux, qui serez touchés par les changements proposés dans le présent rapport, et qui devrez les diriger et les modeler. Les sondages révèlent clairement que les fonctionnaires attachent du prix à leur travail et qu’ils sont fiers du rôle qu’ils jouent pour servir tant le gouvernement que les Canadiens. Quels que soient leur poste et leur niveau, cependant, il faut développer leurs compétences et adapter leur milieu de travail pour répondre aux exigences d’un contexte en évolution constante.

C’est vous, les membres de la fonction publique, qui êtes les véritables partenaires du processus de renouvellement de la fonction publique, et c’est à vous que je dédie ce rapport.

Kevin G. Lynch


  1. Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux 2005
  2. Pour plus de détails sur les activités du gouvernement fédéral et la composition de la fonction publique, voir les annexes 1 et 2.
  3. Le noyau de la fonction publique fédérale compte 250 000 employés et comprend des organismes comme l’Agence canadienne d’inspection des aliments, l’Agence du revenu du Canada, Parcs Canada et le Service canadien du renseignement de sécurité, à l’égard desquels le Conseil du Trésor n’est pas l’employeur et la Commission de la fonction publique n’est pas habilitée à faire des nominations.
  4. Les dépenses au titre de la sécurité publique et de l’antiterrorisme sont engagées dans le cadre de 150 programmes, par 33 ministères et organismes. Les dépenses en 2006-2007 ont totalisé 6,26 milliards de dollars, en hausse de 43,6 p. 100 par rapport à 2002-2003.
  5. Voir Moderniser l’État : la route à suivre (OCDE, 2005); Intégrité du secteur public : un cadre d’évaluation (OCDE, 2005); Governance and Corruption: Global Issues Seminar Series (Banque mondiale, 2006); Good Governance and Development: A Time For Action (Banque mondiale, 2006); The Cost of Government and the Misuse of Public Assets (FMI, 2000).
  6. Voir Evert Lindquist, Un moment déterminant : connaître et faire connaître l’évolution de la fonction publique canadienne, École de la fonction publique du Canada, 2006.
  7. Discours du Premier ministre Harper, «  L’imputabilité et la fonction publique  » le 23 mars 2006.
  8. « Des lourdeurs administratives à des résultats clairs », rapport du Groupe d’experts indépendant sur les programmes de subventions et de contributions, 2006, p. 44.


Retour à la page Web:
http://www.pco-bcp.gc.ca/default.asp?Language=F&Page=InformationResources&Sub=Publications&doc=14report2007/14th_annual_report_f.html