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Le VIH/ sida et la santé de la population : Leçons pour la coordination de l'action et des politiques

Document de discussion pour le Conseil ministériel sur le VIH/ sida

Les opinions énoncées dans le présent rapport ne représentent pas forcément les opinions de Santé Canada, du Comité consultatif fédéral/ provincial/ territorial ou de tout autre représentant gouvernemental siégeant à ces groupes.

Also available in English under the title: HIV/ AIDS and Health Determinants: Lessons for Coordinating Policy and Action

No de cat. H39-632/ 2002F
ISBN 0-662-87526-52

Préparé par
Martin Spiegelman Research Associates
mspigelman@ telus. net

janvier 2002
La contribution du Comité consultatif fédéral/ provincial/ territorial sur le sida est grandement appréciée.


Table des matières

  1. Introduction
    1.1 But et objectifs
    1.2 Méthodologie
    1.3 Organisation du rapport
  2. Des soins de santé aux soins sociaux
    2. 1 Promotion de la santé
    2.2 Santé de la population
    2.3 Déterminants sociaux
  3. Les déterminants sociaux et le VIH/ sida
    3.1 Réflexions sur la documentation
    3.2 Richesse et santé
    3. 3 Expérience à la petite enfance
    3.4 Soutien social, cohésion sociale et discrimination
    3.5 Race et rapports sociaux entre les sexes
    3.6 Habitation et itinérance
    3. 7 Services de santé
  4. Conclusions : Comprendre le sens et faire des progrès
    4.1 Comprendre le sens
    4.2 Faire avancer la santé de la population

Références
Annexe - Sources d'information


Sommaire

Au Canada, le VIH/ sida s est abattu sur les communautés les plus vulnérables. La propagation de la maladie a démontré à quel point il est chimérique de croire que les sociétés industrialisées sont à l abri des maladies infectieuses et que la science et la médecine peuvent répondre à toutes les menaces biologiques.

Par conséquent, le Canada doit envisager d'autres stratégies pour prévenir le VIH/ sida et pour limiter ses répercussions. Le concept de la santé de la population s articule autour d'une approche holistique qui tient compte des multiples facteurs environnementaux, les déterminants sociaux qui contribuent à la santé. Parmi ceux-ci figurent la pauvreté, les inégalités en matière de revenu, le racisme, la discrimination ainsi que les expériences à la petite enfance.

La présente analyse documentaire est une initiative de Santé Canada. Son but est de situer le VIH/ sida dans le contexte de la santé de la population, de définir les déterminants sociaux qui sont le plus souvent associés au VIH/ sida et d'établir des politiques qui favoriseront la lutte contre l épidémie au Canada.

Réflexions sur la documentation

Il existe de nombreux documents qui abordent le concept de la santé de la population. En revanche, il y a peu de documentation sur le VIH/ sida dans le contexte de la santé de la population. C est peut-être parce que les chercheurs sont plus intéressés par la modification comportementale à court terme que par le changement social qui demande beaucoup plus de temps et d'efforts.

Ceci est peut-être aussi parce que les chercheurs sont souvent confrontés à de nombreuses difficultés d'ordre méthodologique, comme la diversité de l'épidémie, le besoin d'établir des groupes témoins adéquats et le besoin de mener des études longitudinales qui nécessitent plus de temps et de ressources que ne le permet le caractère urgent de l'épidémie. Les chercheurs doivent à tout prix éviter de confondre « l'absence de preuves » et « l'évidence de l'absence » .

Résultats

La documentation établit un lien de manière convaincante entre les déterminants sociaux et la prévalence du VIH/ sida. Ceux-ci ont une incidence sur la vulnérabilité d'une personne au VIH, la rapidité de la progression de la maladie et sur la capacité d'une personne à gérer et vivre avec le VIH/ sida.

Ces facteurs peuvent comprendre les abus émotifs, physiques et sexuels subis pendant l'enfance ainsi que les inégalités fondées sur le revenu, la race et le sexe. De façon importante, le racisme et la discrimination et non la race, la culture ou le sexe eux-mêmes rendent certains groupes de personnes particulièrement vulnérables à l'infection à VIH en les excluant de la vie sociale et économique normale et en les privant des soutiens sociaux nécessaires pour améliorer et prolonger la vie.

En matière de santé, ces déterminants ont une incidence sur l'individu, par exemple, lorsque la violence faite aux enfants et l'itinérance des adultes augmentent les probabilités qu une personne manifeste des comportements à risque élevé. Ils ont aussi une incidence au niveau social, par exemple, lorsque les inégalités économiques engendrent des besoins à court terme le besoin de nourriture et de logement, et même le besoin de drogue de sorte que les préoccupations de santé à long terme ont une allure plutôt chimérique.

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Faire avancer la santé de la population

La documentation offre fréquemment des recommandations en vue d'influencer les comportements individuels et collectifs. Distribuer des préservatifs et des seringues propres, encourager des comportements sexuels à moindre risque sont parmi les mesures de lutte les plus souvent recommandées.

Cependant, restreindre la prévention aux changements de comportement aux préservatifs renforce la notion que la transmission du VIH est strictement le résultat de la négligence personnelle et de la dynamique des groupes. De tels efforts, bien qu essentiels à court terme, ne sont pas la solution à long terme. Afin d'établir un cadre de santé de la population pour le VIH/ sida, il faut du leadership fort, engagé et non-partisan aux plus hauts niveaux de la société et des gouvernements de tout le pays. Les dirigeants doivent intégrer le concept de santé de la population dans un programme de justice sociale, comprenant les é léments suivants :

  • réduire, entre autres, les inégalités en matière de revenu au Canada;
  • favoriser le bien-être des enfants et des jeunes;
  • s'assurer qu une personne n'est pas poussée en marge de la société à cause d'un trouble mental ou autre maladie, d'un handicap, de son orientation sexuelle, de son groupe ethnique, de sa culture ou de son sexe.

Pour faire avancer un programme de justice sociale, il faut de la recherche et de l'éducation, de la coopération et de la coordination entre les organismes et les autorités décisionnelles, et il faut la volonté de mettre en pratique les leçons tirées de la santé de la population dans le contexte du VIH/ sida.

La Stratégie canadienne sur le VIH/ sida, les divers conseils ministériels et les comités fédéraux/ provinciaux/ territoriaux serviront de fondement à l'élaboration d'un programme de justice sociale au Canada. Il faut établir des partenariats entre les ministères qui ont compris l'importance de la santé de la population et chercher à rejoindre les autres instances et organisations gouvernementales qui ne l'ont pas comprise. Étant donné l'importance du leadership en matière de la santé de la population, tous les efforts doivent ê tre dirigés au préalable aux ministres, sous-ministres et cadres dirigeants dont l'engagement par rapport au concept servira d'exemple au sein de leurs organisations.

Afin d'établir un leadership, un engagement et un consensus populaire, il faut que l'épidémiologie s intègre plus clairement au contexte de la justice sociale. Des recherches doivent être menées pour établir un lien entre les déterminants sociaux et les résultats pour la santé à long terme et pour faire ressortir les économies potentielles ainsi que l'impact positif de la justice sociale sur l'hygiène publique. Il serait également utile de s adresser aux instances gouvernementales et aux commissions qui sont chargées d'évaluer et d'entreprendre la réforme de leurs systèmes de santé.

De plus, Santé Canada et la Stratégie canadienne sur le VIH/ sida pourraient aider les chercheurs dans le domaine de la santé à mieux partager leurs connaissances avec le grand public. Ces chercheurs doivent partager et faire connaître leurs résultats de recherche de manière efficace et convaincante, par des sources moins techniques que les revues médicales.

On ne peut pas se détourner des efforts entrepris pour freiner la propagation de l'épidémie sous prétexte de promouvoir le programme de justice sociale. Il faut donc diriger certaines initiatives de lutte contre le VIH/ sida en fonction de notre compréhension de la santé de la population. Dans le cadre de ces efforts dirigés, on pourrait développer des mesures telles que les suivantes :

  • Faire participer les dirigeants des autres secteurs décisionnels aux comités responsables de la lutte contre le VIH/ sida;
  • À l'occasion des tests de dépistage, examiner les facteurs qui exposent une personne au risque de contamination. Les personnes travaillant au sein des services de soutien ou dans les refuges pour personnes sans abri pourraient aussi examiner ces facteurs;
  • Intégrer les services de counselling en matière d'abus sexuel aux efforts de prévention et favoriser une collaboration entre la Stratégie canadienne sur le VIH/ sida, l'union sociale, la Stratégie nationale pour les enfants et les autres organismes participant au développement de la petite enfance;
  • Encourager le développement des programmes voués à la réduction des préjudices, surtout ceux qui s adressent aux utilisateurs de drogues injectables. Examiner les problèmes de dépendance en tant que problème de santé et de société et non en tant qu acte criminel;
  • Établir des réseaux de soutien pour les enfants des parents vivant avec le VIH/ sida pour favoriser leurs chances d'épanouissement;
  • Développer des protocoles pour aider les hôpitaux et les professionnels de la santé à répondre aux besoins spécifiques des groupes de personnes marginalisées;
  • Axer le discours sur le racisme et la discrimination plutôt que sur les groupes ethniques et les groupes de personnes à risque d'infection à VIH.

Étant donné la nature, la menace et les répercussions du VIH/ sida, il n' y a pas d'alternative pratique au modèle de la santé de la population et au programme de justice sociale. La société et les autorités gouvernementales auraient tort de considérer l'épidémie uniquement comme un problème de santé et encore moins comme un problème moral mais devraient plutôt la considérer comme une question d'ordre juridique, de respect des droits de la personne et d'égalité. La santé d'une nation doit être envisagée comme étant le baromètre de son engagement à la justice sociale et au respect des droits de la personne. Le bon sens, l'expérience vécue et une abondance de recherches effectuées dans tout le monde démontrent que les sociétés font preuve de sagesse lorsqu elles s engagent à favoriser la promotion de la santé de la population et la justice sociale.

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