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Maladies chroniques au Canada


Volume 24
Numéro 1
2003

[Table des matières]

Office de la santé publique du Canada

Comparaisons régionales des profils des diagnostics de maladie cérébrovasculaire en milieu hospitalier et en consultation externe dans la province de l'Alberta


Nikolaos Yiannakoulias, Lawrence W Svenson, Michael D Hill, Donald P Schopflocher, Robert C James, Andreas T Wielgosz et Thomas W Noseworthy


Résumé

Au cours des dernières années, des épidémiologistes ont procédé à un examen critique des diagnostics de maladie cérébrovasculaire (MCEREV) à partir de données administratives. Il ressort le plus souvent de la littérature existante que les diagnostics établis en fonction de la CIM-9-MC qui figurent dans les registres de sortie des hôpitaux ne constituent pas une source d'information valable sur les diagnostics d'accident vasculaire cérébral (AVC), surtout lorsque des codes de quatre et cinq chiffres sont utilisés. Nous avons examiné comment les diagnostics de MCEREV posés en milieu hospitalier et en consultation externe varient entre les zones rurales et urbaines et parmi les 16 régions sanitaires administratives. Notre analyse a révélé des différences dans les profils des diagnostics provenant des deux sources de données, des différences entre les zones rurales et urbaines, et des variations dans la plupart des régions. La variation géographique observée dans l'utilisation des services de santé, les méthodes diagnostiques, la spécialité du médecin diagnostiqueur ainsi que le fardeau de la maladie peut expliquer nos constatations. Les résultats de notre examen donnent à penser que les diagnostics des patients des zones rurales sont soit codés différemment (et de façon moins précise) de ceux des patients des zones urbaines ou qu'ils sont codés de façon plus précise uniquement après que les patients en cause se sont présentés dans des établissements urbains. Les écarts régionaux dans les méthodes de codage montrent que tout système de surveillance de la MCEREV fondé sur des données administratives nécessite une approche de grande envergure (en l'occurrence, d'envergure provinciale) et axé sur les personnes.

Mots clés : accident vasculaire cérébral; données administratives; épidémiologie; maladie cérébrovasculaire


Introduction

La maladie cérébrovasculaire (MCEREV) est la troisième cause de décès au Canada, après la cardiopathie et le cancer1. Bien que son incidence ait diminué au cours des dernières années, le vieillissement de la population se traduira vraisemblablement par une hausse du nombre absolu de cas et du coût du traitement2.

La surveillance est un élément important de toute stratégie visant à contrer les effets sanitaires futurs de la MCEREV et, plus particulièrement, de l'accident vasculaire cérébral (AVC)3,4. Les caractéristiques fondamentales de la surveillance sont la collecte, l'analyse et la dissémination permanentes et systématiques de données et d'informations sur une population5,6. Plutôt que de se concentrer sur un groupe exposé à un risque particulier, la surveillance en santé publique s'intéresse à l'ensemble de la population. Pour être efficace, un système de surveillance doit assurer un équilibre entre l'exactitude et l'exhaustivité, tout en demeurant assez représentatif et global pour donner un aperçu général valable de la maladie7.

Au Canada, on trouve de plus en plus de données de surveillance dans les bases de données administratives sur les soins de santé, qui renferment de l'information sur les soins en milieu hospitalier, les soins en clinique externe et la facturation des médecins. Les données administratives peuvent constituer une source économique, opportune et généralisable de données de surveillance sur la MCEREV et d'autres états de santé8. Dans la plupart des systèmes de données administratives, les définitions de cas sont fondées sur les codes de la CIM-9-MC (Classification internationale des maladies, 9e révision, Modification clinique)9. Toutefois, les méthodes de diagnostic de l'AVC et l'exactitude des résultats varient grandement lorsqu'on utilise les codes de la CIM-9-MC10. Les données des registres de sortie des hôpitaux risquent de fournir une surestimation de l'incidence de l'AVC11,12. Les études de validation faisant appel aux enregistrements médicaux révèlent également que la maladie cérébrovasculaire ischémique n'est pas bien codée dans les données administratives13,14.

Les systèmes de surveillance servent à déterminer les taux généraux d'incidence et/ou de prévalence d'une maladie dans un territoire géographique donné, mais aussi les variations régionales (géographiques). Un certain nombre d'études15,16 ont relevé des différences géographiques dans l'incidence et la mortalité propres à l'AVC. Or, comme la qualité des diagnostics d'AVC consignés dans les données administratives demeure discutable et que des différences régionales ont été confirmées dans le codage des diagnostics17, il n'est pas établi clairement si ces variations sont confondues à cause d'erreurs de classification qui créent dans les profils de diagnostic des variations géographiques sans relation avec les véritables différences épidémiologiques.

Les variations régionales dans les méthodes de codage médical ajoutées au besoin d'utiliser des définitions de cas précises qui répartissent la MCEREV en sous-ensembles logiques de la maladie (p. ex., AVC aigu, accident ischémique transitoire, séquelles de l'AVC) posent un problème en apparence insoluble si l'on entend surveiller la MCEREV à partir de données administratives. D'une part, les définitions de cas doivent être suffisamment détaillées pour présenter une utilité en épidémiologie et en surveillance. D'autre part, il peut y avoir des variations régionales dans l'exactitude du codage en général et, plus les diagnostics deviennent précis, plus ces variations risquent d'entraîner une distorsion dans les résultats. Il faudrait approfondir l'étude des variations régionales dans le codage et des différences, entre les établissements, dans les méthodes de codage des maladies.

Le recours à des sources multiples de données administratives pourrait peut-être mener à des estimations plus exactes et solides des effets de la maladie. Même s'il existe une importante littérature sur la qualité des données canadiennes de sortie des hôpitaux18,19, peu de recherches ont été faites pour évaluer les diagnostics de MCEREV fournis dans les données provenant des unités de soins ambulatoires ou des factures des médecins. Les données recueillies en consultation externe peuvent améliorer les estimations de l'incidence et/ou de la prévalence, puisqu'elles se rapportent à une partie distincte du système de services de santé et pourraient découler de méthodes de collecte distinctes. Par exemple, les personnes qui meurent ou obtiennent leur congé dans un service d'urgence ne figurent pas dans les données sur les patients hospitalisés, mais plutôt dans les données des services de consultation externe.

Cette étude avait pour but de décrire et d'évaluer les différences régionales dans les sous-groupes de codage des diagnostics de MCEREV parmi les données sur les patients hospitalisés et reçus en consultation externe. En plus de décrire la répartition du codage de la MCEREV selon la CIM-9 dans les données administratives en milieu hospitalier et en consultation externe, nous procédons à des comparaisons géographiques des particularités du codage des données sur les patients hospitalisés et reçus en consultation externe. Cette recherche est importante, puisqu'elle aidera à établir un cadre préliminaire d'utilisation de données administratives de grande envergure dans la surveillance géographique de la maladie cérébrovasculaire. En exposant les limites des données administratives, nous faisons en sorte qu'elles puissent être utilisées plus efficacement. Nos conclusions aideront également à caractériser l'interaction entre l'emplacement d'un établissement, le type de MCEREV et la variabilité du codage des diagnostics, et elles donneront une idée de la mesure dans laquelle les données administratives permettent de découvrir les caractéristiques sous-jacentes de la maladie dans l'ensemble de la province de l'Alberta.

Méthodes

Tous les résidents de l'Alberta peuvent être couverts par un régime d'assurance-maladie public. Comme très peu choisissent de se soustraire à cette couverture, le registre contient de l'information sur la grande majorité de la population albertaine (environ trois millions d'habitants). Chacun des résidents couverts a un numéro personnel d'assurance-maladie, qui permet de faire le lien entre différentes sources de données. Aucune entrée n'est faite dans le registre pour les non-résidents qui reçoivent des services en Alberta, mais des données les concernant sont néanmoins consignées dans les systèmes de données sur la santé.

Nous avons recueilli l'information sur les cas dans deux systèmes de données administratives. L'information sur les patients hospitalisés provient d'une base sur la morbidité hospitalière de l'Institut canadien d'information sur la santé (ICIS), qui assure une collecte normalisée à l'échelle nationale. Notre autre source, le Système global de classification ambulatoire (SGCA), fournit des données provenant d'établissements de consultation externe hospitaliers. La plupart de ces données viennent des services d'urgence, et les autres viennent des services de chirurgie d'un jour, des programmes/cliniques de consultation externe et des autres établissements ou services qui ne nécessitent pas d'hospitalisation. L'Alberta recueille et tient à jour les données du SGCA depuis 1997-1998 et elle demeure l'un des rares endroits en Amérique du Nord où l'on tient un relevé numérique global des services de consultation externe. Dans la plupart des cas, les enregistrements sur les patients hospitalisés et les patients reçus en consultation externe sont codés par le même personnel de codeurs d'archives médicales.

Les données de l'année financière 1999- 2000 ont été obtenues et elles ont été évaluées par rapport à 16 régions sanitaires ainsi que par rapport aux zones rurales et urbaines de la province de l'Alberta (figure 1). Au cours de la période visée par l'étude, 69 établissements ruraux et 44 établissements urbains ont versé des enregistrements dans le SGCA et/ou dans les systèmes de données de l'ICIS. L'Alberta est en réalité divisée en 17 régions sanitaires, mais la Northwestern Health Authority ne disposait pas de données complètes sur les consultations externes et a donc été exclue de cette étude. Dans le cas des données de l'ICIS, il existe jusqu'à 16 champs pour les diagnostics; dans le cas des données du SGCA, il en existe jusqu'à six. Notre analyse a englobé tous les enregistrements sur lesquels un code de maladie cérébrovasculaire (de 430.x à 438.x) avait été inscrit dans n'importe lequel des champs de diagnostic par un établissement traitant des patients hospitalisés ou des patients en consultation externe. Nos données étaient donc fondées sur des transactions et non sur des personnes. Il fallait une analyse fondée sur les transactions pour pouvoir dégager le profil du codage des diagnostics dans les différentes régions sanitaires. Une analyse fondée sur les personnes fournirait une approximation de la fréquence de la maladie, ce qui obscurcirait la variation dans les méthodes de codage d'une région à l'autre. Comme notre but ne consiste pas à évaluer la fréquence de la maladie dans les différentes régions, mais plutôt à évaluer comment le codage varie d'une région à l'autre et entre les systèmes de données sur les patients hospitalisés et les patients reçus en consultation externe, nous avons dû opter pour une approche fondée sur les transactions.

Aux fins de l'analyse, les enregistrements ont été classés selon deux caractéristiques géographiques : la région sanitaire et le type de milieu (rural/urbain). La caractéristique du milieu rural/urbain a été définie en fonction du code postal à six chiffres de l'établissement ayant fourni le service : un établissement était classé comme «rural» lorsque le deuxième chiffre du code postal était «0» et il était classé comme étant «urbain» dans tous les autres cas. C'est la définition qu'utilise Statistique Canada20. Nous avons examiné la matrice des codes de diagnostic pour les sous-groupes de la MCEREV par région, en utilisant des méthodes d'ordination multidimensionnelles21,22. Plus précisément, la matrice a été représentée sous forme de diagramme de double projection dans l'espace des deux premières composantes principales. Les groupes ont été formés en fonction de la proximité des points représentant les régions.



FIGURE 1
Régions sanitaires de l'Alberta, délimitation de 1998

Régions sanitaires de l'Alberta, délimitation de 1998

Résultats

Diagnostics posés dans les services pour hospitalisés et les services de consultation externe

Après l'étape de la reclassification selon les sous-groupes à trois chiffres de la CIM-9-MC, les codes de diagnostic de la MCEREV dans les services pour hospitalisés diffèrent sensiblement des codes des services de consultation externe (tableau 1). Il n'y a rien d'étonnant dans cette constatation, puisque ces deux catégories de services traitent les patients différemment. La différence est plus perceptible dans les groupes diagnostiques 435.x à 438.x. La différence la plus notable s'observe dans le sous-groupe 436, qui réunit près de 25 % de tous les codes de MCEREV en consultation externe, mais environ 14 % des codes en milieu hospitalier. Nous avons été en mesure d'estimer, à l'aide d'un code de spécialité figurant dans les données sur la facturation des médecins, que seulement 9 % des diagnostics de MCEREV posés par les services d'urgence (qui fournissent la majorité des enregistrements en consultation externe) provenaient de neurologues. En raison d'un manque de données, nous n'avons pu tirer de conclusions semblables au sujet des services en milieu hospitalier, mais il est probable qu'une plus forte proportion des diagnostics sont posés par des neurologues dans le cas des patients hospitalisés.

Comparaison des zones rurales et urbaines

La répartition des codes de diagnostic varie entre les zones rurales et urbaines, dans le cas des services de consultation externe (figure 2) comme dans celui des services pour hospitalisés (figure 3). En consultation externe, la différence urbaine/rurale la plus marquée se trouve dans le groupe diagnostique 438.x, qui réunit une proportion beaucoup plus forte de tous les diagnostics d'AVC en milieu rural qu'en milieu urbain. Dans le cas de la plupart des autres groupes diagnostiques, les services urbains ont posé une plus forte proportion des diagnostics. Dans les groupes 435.x et 436, la fréquence du codage est semblable en milieu rural et en milieu urbain. Dans le cas des services pour hospitalisés, on observe un fort contraste urbain/rural pour les codes 435.x et 436, mais moindre pour les codes 438.x.

Lorsqu'elles sont ventilées en fonction des codes de diagnostic précis qui figurent dans les enregistrements administratifs, les données sur les patients hospitalisés continuent néanmoins de présenter un contraste urbain/rural considérable. Les zones rurales utilisent le code 436 (26,6 %) et le code 435.9 (24,2 %) (ischémie cérébrale transitoire, sans précision) beaucoup plus souvent que les zones urbaines (11,7 % et 9,9 % respectivement). La gamme des codes précis attribués est plus large dans les services urbains que dans les services ruraux : parmi les 58 types de diagnostics posés dans les services pour hospitalisés en Alberta, 39 étaient rapportés plus fréquemment dans les zones urbaines. Dans le cas des services de consultation externe, les deux codes les plus fréquents (436 et 435.9) sont utilisés avec une fréquence semblable en milieu rural (21,0 %, 16,9 %) et en milieu urbain (23,8 %, 16,7 %). La différence la plus marquée entre les zones urbaines et rurales dans la fréquence des diagnostics posés en consultation externe s'observe dans le groupe 438.9 (séquelles de la maladie cérébrovasculaire, sans précision) : 15,1 % ont utilisé ce code en milieu rural et 3,8 % l'ont utilisé en milieu urbain. Toutefois, comme dans le cas des services pour hospitalisés, la gamme des codes de diagnostic utilisés est plus large en milieu urbain : parmi les 57 types de diagnostics posés par des services de consultation externe de l'Alberta, 38 ont été rapportés plus fréquemment en milieu urbain.

Différences régionales

Les matrices des codes de diagnostic des sous-groupes de MCEREV par région sont présentées sous forme de profils dans les figures 4a-e et 5a-d. Les graphiques, sauf la figure 4e (qui tient davantage du groupe résiduel), confirment le succès de cette stratégie : les régions présentant des profils diagnostiques similaires sont généralement regroupées. Les différences régionales dans les codes de diagnostic appartenant aux sous-groupes de la MCEREV s'observent surtout dans les données sur les patients en consultation externe (figures 4a-4e). Trois sous-groupes diagnostiques constituent une forte majorité des codes de MCEREV dans la plupart des régions, soit 435.x, 436 et 438.x. Dans les régions 6, 11 et 15, la majorité des enregistrements porte un code 438.x (figure 4a). Dans les régions 13 et 14, le code 436 domine (figure 4b). Dans les régions 1, 4, 7 et 9 (figure 4c), les proportions de codes 435.x et 436 par rapport à l'ensemble sont semblables, et dans les régions 2, 3, 5, 8 et 12, les proportions des enregistrements portant des codes s'échelonnant entre 435.x, 436 et 438.x sont assez semblables (figure 4d). Les profils diagnostiques des régions 10 et 16 diffèrent sensiblement de ceux des autres régions (figure 4e). Pour ce qui est de la région 10, le code 434.x est attribué dans plus de 30 % des enregistrements de maladie cérébrovasculaire, ce qui représente une proportion sensiblement plus élevée que dans les autres régions. Dams la région 16, le code 430.x est souvent attribué, quoique le nombre total de diagnostics posés dans cette région soit faible. Dans le reste des régions, les profils sont semblables : les codes 436 et 438.x sont les plus fréquents, et les codes 430.x à 434.x sont beaucoup plus rares.


TABLEAU 1
Sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire
(% de tous les diagnostics d'AVC)
CIM-MC Diagnostic Milieu
hospitalier
Consultation externe
430.x Hémorragie sous-arachnoïdienne 2,32 5,38
431.x Hémorragie cérébrale 4,68 6,21
432.x Hémorragies intracrâniennes, autres et sans précision 3,00 3,56
433.x Occlusion et sténose des artères précérébrales 10,46 2,70
434.x Occlusion des artères cérébrales 17,05 17,86
435.x Ischémie cérébrale transitoire 13,31 21,70
436 Maladies cérébrovasculaires aiguës mais mal définies 13,91 24,60
437.x Maladies cérébrovasculaires, autres et mal définies 11,18 3,47
438.x Séquelles des maladies cérébrovasculaires 24,10 14,50


FIGURE 2
Répartition par sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire posés par les services de consulation externe, selon le type de zone géographique (rurales ou urbaines), 1999-2000

Répartition par sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire posés par les services de consulation externe, selon le type de zone géographique (rurales ou urbaines), 1999-2000


Les variations régionales du codage observées parmi les données sur les patients hospitalisés se classent en deux grands groupes (figures 5a-5d). Premièrement, les régions 10 et 4 ont des profils de codage très semblables, caractérisés par une répartition plus uniforme et une proportion plus faible de codes 436 (figure 5a). Les codes de sous-groupes les plus souvent attribués dans ces deux régions sont 434.x et 438.x. Dans la plupart des autres régions, les codes les plus courants sont 435.x, 436 et 438.x, quoique les proportions relatives de ces trois diagnostics diffèrent. Les régions 1, 2, 5 et 16 ne s'alignent sur aucun de ces profils en particulier, quoiqu'elles attribuent couramment les codes 435.x, 436 et 438.x (figure 5d). Dans ce cas, les codes de diagnostic se répartissent de manière plus égale entre les sous-groupes en général.

Analyse

Il existe des différences quantifiables entre les régions ainsi qu'entre les zones rurales et urbaines en ce qui a trait à la fréquence du codage de la MCEREV en fonction des sous-groupes diagnostiques à trois chiffres. De plus, ces distinctions dans les profils de codage varient selon que les données concernent des patients hospitalisés ou des patients reçus en consultation externe. Elles peuvent s'expliquer par d'authentiques différences en ce qui a trait au fardeau et/ou à l'épidémiologie de la MCEREV, par des différences régionales dans les méthodes de codage médical ou par des différences dans les méthodes de diagnostic, ou encore elles peuvent refléter des divergences géographiques dans l'organisation des soins aux patients ayant subi un AVC. Les données peuvent également indiquer que les services en milieu hospitalier et en consultation externe sont utilisés différemment dans l'ensemble de la province. Ainsi, nos résultats se limitent à fournir une description des différences régionales dans le codage et ils ne peuvent servir à expliquer les causes de ces différences. Ils révèlent toutefois un certain nombre de problèmes dont les chercheurs devraient tenir compte lorsqu'ils utilisent des données administratives pour analyser des écarts régionaux dans la fréquence de la MCEREV.

Les établissements urbains attribuent un éventail plus vaste de codes de diagnostic que les établissements ruraux, tant en milieu hospitalier qu'en consultation externe. Globalement, les distinctions urbaines/rurales dans les profils du codage diagnostique sont plus marquées pour les patients hospitalisés. En milieu hospitalier, les établissements ruraux inscrivent le code 436 sur plus de 25 % de leurs enregistrements de MCEREV, alors que ce code n'apparaît que sur environ 12 % des enregistrements des établissements urbains. Dans le cas des données des établissements de consultation externe, la proportion des diagnostics recevant le code 436 est très semblable en zone rurale et en zone urbaine (~30 %). Un autre code de diagnostic fréquent, le 435.9, révèle un contraste marqué similaire entre les zones urbaines et rurales dans les services pour hospitalisés, alors que la différence est minime dans les services de consultation externe. En effet, le profil des diagnostics portant les codes 436 et 435.9 révèle dans l'ensemble une similitude entre les enregistrements des services pour hospitalisés et ceux des services de consultation externe, en zone rurale.


FIGURE 3
Répartition par sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire
posés par les services hospitaliers, selon le type de zone géographique (rurales ou urbaines), 1999-2000

Répartition par sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire


On peut observer deux tendances régionales distinctes dans les données sur les patients hospitalisés, ce qui illustre une nouvelle fois les contrastes urbains/ruraux déjà signalés. Les services pour hospitalisés des régions 10 et 4 (qui comprennent respectivement Edmonton et Calgary) utilisent les codes des sous-groupes de MCEREV à une fréquence quasi identique, les proportions les plus importantes étant associées aux codes 433.x, 434.x et 438.x. La grande majorité des neurologues et autres spécialistes travaillent dans ces deux centres urbains. Si, comme on l'a laissé entendre plus haut, les neurologues posent une plus forte proportion de diagnostics dans le cas des patients hospitalisés, il se pourrait que cet état de chose reflète une plus grande uniformité et une plus grande assurance dans l'établissement des diagnostics parmi les neurologues. Les similitudes entre Calgary et Edmonton sont peut-être attribuables au fait que la fréquence de la maladie, les normes de codage ou une combinaison de ces deux facteurs, sont semblables aux deux endroits.

Dans le cas des données des services de consultation externe, les variations régionales sont dignes de mention. L'importance de ces variations dans les profils laisse supposer que les trois codes de diagnostic les plus fréquents dans la majorité des régions (435.x, 436 et 438.x) représentent peut-être un phénomène de classification semblable pour les médecins et/ou les codeurs médicaux. Deux constatations mènent à cette conclusion. Premièrement, il est peu probable que l'importance de la variation coïncide avec de réelles différences dans la maladie parmi la population. Par exemple, dans les régions 6, 11 et 15, le code 438.x a été attribué à plus de 50 % des diagnostics de MCEREV. Dans les régions 1, 4, 7, 9, 10, 13 et 14, moins de 10 % des enregistrements portent ce code. Il semble peu plausible qu'une variation aussi importante puisse être attribuable à de réelles différences régionales dans l'épidémiologie de la maladie. Deuxièmement, des régions présentant des caractéristiques démographiques semblables et comptant des nombres semblables de neurologues présentent néanmoins des différences marquées dans les profils de diagnostic. Les régions 4 et 10 sont des zones urbaines dont les populations sont semblables sur le plan des caractéristiques démographiques et de la santé. Mais elles présentent néanmoins de grandes différences dans la fréquence d'utilisation du code 434.x . Plus de 30 % des enregistrements des services de consultation externe se rapportant à la MCEREV portent le code 434.x dans la région 10; dans la région 4, par ailleurs, moins de 12 % des enregistrements sont pareillement codés.

Cette analyse est fondée sur les transactions, ce qui signifie que la composante géographique était associée à l'établissement fréquenté par le patient et non à son lieu de résidence. Ce détail avait son importance dans notre analyse, puisqu'il nous a permis d'observer les tendances dans le codage (séparément des tendances dans la fréquence de la maladie) et d'y cerner les différences régionales. Cependant, toute tendance de la population rurale à obtenir des services dans les établissements hospitaliers et/ou de consultation externe des zones urbaines (c.-à-d. à se faire traiter à l'extérieur de leur lieu de résidence) a une influence sur nos constatations. Les enregistrements ruraux peuvent fréquemment correspondre à des contacts initiaux dont le suivi se fait dans des établissements urbains, où les codes attribués sont plus précis. C'est une question importante qui pourrait faire l'objet d'études ultérieures : à quelle fréquence la population rurale reçoit-elle des diagnostics plus définitifs et/ou plus précis dans des établissements non locaux?

Le facteur des visites multiples à différents établissements peut également compliquer l'estimation de la fréquence de la maladie. Un résident d'une zone rurale peut recevoir un diagnostic imprécis dans un établissement rural avant d'être transféré dans un établissement urbain, où un diagnostic plus précis est posé. Au moment de déterminer la maladie d'une personne donnée, il faudrait décider lequel des deux codes retenir. Nos constatations laissent tout de même supposer qu'il ne suffirait peut-être pas de recueillir l'information nécessaire à des fins de surveillance ou de recherche exclusivement dans les enregistrements médicaux, dans le cas des établissements ruraux. Les différences régionales existant dans la disponibilité du matériel diagnostique spécialisé et de l'expertise nécessaires peuvent cacher de réelles différences dans l'épidémiologie de la maladie. Ce pourrait être révélateur du fait que les populations rurales ont tendance à se présenter dans les établissements urbains, ou du fait que les établissements ruraux ont des méthodes de codage nettement différentes. Quoi qu'il en soit, les établissements des régions sanitaires rurales présentent des profils de codage de la MCEREV bien différents, et souvent dans les hôpitaux comme dans les cliniques de consultation externe. Ceci pourrait influer sur les estimations géographiques de la fréquence de la MCEREV en général, même quand les définitions de cas sont fondées sur les personnes.

Nos constatations illustrent également l'importance des données axées sur les personnes dans les initiatives de surveillance et de recherche en matière de santé, en particulier lorsque des comparaisons régionales sont envisagées. Les données transversales peuvent constituer une représentation biaisée de la MCEREV, sur les plans géographique ou autres, qui indiquerait que la population rurale reçoit un nombre disproportionnément élevé de diagnostics imprécis. Nos constatations révèlent peut-être que les patients des zones rurales reçoivent des diagnostics imprécis en milieu rural et ne reçoivent de diagnostic précis qu'après avoir été transférés dans un établissement urbain. Cela étant, même si le premier contact s'est fait dans un établissement rural, le code du diagnostic posé dans un établissement urbain pourrait mieux décrire les caractéristiques de la maladie du patient. Le suivi des antécédents complets de diagnostic et de service peut aider à atténuer une partie de ce biais. Dans les cas où les patients reçoivent des diagnostics différents dans des établissements différents à des moments différents, il est possible de réunir et d'analyser l'ensemble de l'information, afin d'avoir une idée plus précise de la maladie. Ceci pourrait également dissiper l'incertitude associée aux codes de la CIM-9 utilisés dans les données administratives. Même si le lieu de résidence continue d'influer sur les habitudes de consultation de la population et, en définitive, sur les profils de la MCEREV, une surveillance des données administratives axée sur les personnes constitue la meilleure façon de surmonter les problèmes liés aux données administratives.

Conclusions

Certains faits permettent de croire que les données sur les patients hospitalisés recueillies dans les zones urbaines représentent le codage le plus cohérent des diagnostics de MCEREV dans le système albertain de données administratives sur la santé. Cet état de fait est peut-être attribuable à la disponibilité de matériel diagnostique et de spécialistes, ou à la formation et à l'expertise des codeurs médicaux, ou encore à une combinaison de ces facteurs et d'autres facteurs. Ceci n'exclut pas la possibilité de confusion ou d'inexactitude dans le codage diagnostique, mais on peut supposer que l'erreur est semblable parmi les grandes zones urbaines et que, par conséquent, les comparaisons fondées sur les données concernant les patients hospitalisés sont probablement valables. Le manque d'uniformité dans les diagnostics posés en milieu rural donne à penser a) que certains profils géographiques découlant des données administratives sur la MCEREV risquent toujours de subir l'effet confusionnel de variations dans le codage (malgré les similitudes observées à Edmonton et Calgary), et b) que les estimations de l'incidence de la maladie seront de plus en plus obscurcies par l'utilisation de codes diagnostiques toujours plus détaillés provenant de la CIM-9.


FIGURE 4a-e
Sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire posés en consultation externe, par région, 1999-2000


FIGURE 5a-d
Sous-groupes des diagnostics de maladie cérébrovasculaire posés en milieu hospitalier, par région, 1999-2000


Nos résultats tendent également à démontrer soit que les populations rurales reçoivent des diagnostics nettement différents (et, en général, moins précis) que les populations urbaines, ou que les populations rurales se présentent souvent dans des établissements urbains pour obtenir un diagnostic. Si la première hypothèse est la bonne, il faudrait alors approfondir les recherches afin d'évaluer si les codes différents reflètent des traitements différents. Si la deuxième hypothèse est la bonne, il faudrait alors entreprendre des recherches afin d'évaluer l'effet que peut avoir sur la santé des populations rurales le fait d'avoir à se déplacer vers les zones urbaines pour obtenir des diagnostics et traitements. De plus, il faudrait effectuer un travail de validation afin de confirmer l'existence d'un biais diagnostique d'une région à l'autre, ainsi que de caractériser le type et l'orientation de ce biais. Les différences géographiques dans la répartition des diagnostics peut s'expliquer par des méthodes de codage propres aux régions, par des différences régionales dans le fardeau de la maladie ou par la tendance de la population de certaines régions à se montrer sélective dans l'utilisation des services locaux. Enfin, il faudrait effectuer d'autres recherches afin d'assurer un suivi de l'utilisation dans l'ensemble du système et de cerner les habitudes d'utilisation des patients, peu importe la zone géographique, le moment ou le type de service.

Remerciements

Santé Canada, Alberta Health and Wellness et la Fondation des maladies du cœur du Canada ont financé ce projet.

Références

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Coordonnées des auteurs

Nikolaos Yiannakoulias, Health Surveillance, Alberta Health and Wellness, Edmonton (Alberta), Canada

Lawrence W Svenson, Health Surveillance, Alberta Health and Wellness, et Département des sciences de la santé publique, Université de l'Alberta, Edmonton (Alberta), Canada

Michael D Hill, Département des neurosciences cliniques, Université de Calgary, et Département des sciences de santé communautaire, Université de Calgary, et la Faculté de médecine, Université de Calgary, Calgary (Alberta), Canada

Donald P Schopflocher, Health Surveillance, Alberta Health and Wellness, et Département des sciences de la santé publique, Université de l'Alberta, Edmonton (Alberta), Canada

Robert C James, Département des sciences de la santé communautaire, Université de Calgary, Calgary (Alberta), Canada

Andreas T Wielgosz, Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques, Santé Canada, et Division de la cardiologie, Hôpital d'Ottawa, Ottawa (Ontario), Canada

Thomas W Noseworthy, Département des sciences de la santé communautaire, Université de Calgary, Calgary (Alberta), Canada

Correspondence: Lawrence W Svenson, Health Surveillance, Alberta Health and Wellness, P O Box 1360 STN MAIN, Edmonton, Alberta, Canada T5J 2N3; télécopieur : (780) 427-1470; courriel : larry.svenson@health.gov.ab.ca

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Dernière mise à jour : 2003-04-20 début