Témoignages
Les dix ans de l'AMFA…
Dulari Prithipaul

La célébration de dix ans est certainement un moment opportun pour tout organisme de faire un bilan de ses activités. C'est un moment propice pour se pencher sur ses objectifs et sur les responsabilités qu'il a définis lors de sa création. En ce faisant, on peut se réjouir des succès remportés et se féliciter d'avoir surmonté bien des difficultés. II nous incombe également d'éviter certains moments malencontreux qui nous ont bouleversés et nous préparer à mieux confronter les nouvelles situations qui ne manqueront pas de surgir dans l'avenir.

Au premier abord, ces questions peuvent nous paraître assez simples. Elles font partie d'un exercice d'autocritique et de réflexion que tout individu ou organisme doit faire en cours de route. Dans une association oeuvrant au sein d'une communauté hétérogène cette tâche peut être accomplie lors d'une rencontre entre les responsables de l'organisme et quelques représentants de la communauté dans un esprit d'entente et d'appui mutuel. Les liens communs, l'expérience historique et culturelle partagée apportent une entente et un sens de solidarité.

Quand il s'agit d'un organisme tel que l'AMFA, où sont réunies, souvent pour une première fois, des personnes de différentes origines ethniques, culturelles et historiques, pour défendre une cause commune, cette tâche se complique, selon moi, pour deux raisons d'ordre sociologique.

En premier lieu, lorsque les membres de différentes origines ethniques et culturelles décident de s'engager dans une activité commune, un certain apprentissage intellectuel et interculturel devient nécessaire. On se voit contraint à chaque pas de dépasser des intérêts personnels et particuliers, à caractère familial et culturel, fondés sur des critères ethniques ou nationaux afin de s'entendre sur des objectifs d'ordre universel, multiethnique et multiculturel, comme c'est le cas de l'AMFA. Une méthode et une pédagogie interculturelles s'imposent, dotées d'une réflexion morale, de dimension humaniste, et désintéressée.

En deuxième lieu, l'effort de défendre la francophonie que font les nouveaux immigrants au Canada peut bien s'inscrire comme une activité visant à renforcer l'idéal bilingue de la politique linguistique officielle de la société d'accueil. Cependant, dans toute démarche orientée vers ce but, en Alberta aussi bien que dans les autres provinces, on aura intérêt à s'identifier avec la communauté francophone qui s'y est déjà établie. Toute action communautaire que voudrait entreprendre l'AMFA pour le maintien de la francophonie devra être en harmonie avec les mesures prises au sein des organismes provinciaux et régionaux de la communauté environnante. Or l'harmonisation des activités dans ce sens sera assurée dans la mesure où des rapprochements sont déjà en place, où une communication constante est maintenue, et où un esprit d'entente et de partage des biens et des services est soutenu. Un tel climat d'entente et de réciprocité est le fruit d'un labeur intense de reconnaissance mutuelle et d'acceptation de chacun à titre d'égalité.

J'établis ces grandes lignes au début même de ma présentation pour nous rappeler que toute brève que soit l'existence de l'AMFA (ses dix ans marquent une courte vie comparée à celle d'autres organismes francophones qui existent dans la province depuis au moins le début du vingtième siècle), toute petite qu'elle soit par rapport au nombre de ses membres et toute récente que soit l'expérience historique canadienne de ceux ci, les buts, les objectifs qu'elle poursuit sont conformes aux préoccupations identifiées par les chercheurs spécialisés dans l'étude des questions d'intégration des nouveaux arrivants par le biais de l'immigration dans la société canadienne. Cette question fait partie de l'acheminement dans ce pays vers un idéal d'harmonie nationale et d'équité.

L'essor de l'AMFA, sa survie et ses oeuvres auront un impact sur la vie et l'épanouissement de bien plus de personnes que celles qui y sont directement impliquées jusqu'à ce jour.

Pour nous éclairer davantage sur le rôle et la mission de I'AMFA durant ces dix premières années de son existence, je me propose de répondre à ces trois questions cruciales qui nous permettent d'examiner en profondeur la raison d'être de tout organisme cherchant à promouvoir une cause sociale. Ces questions se résument comme suit :

1) Pourquoi l'AMFA?
2) Comment dessert-elle sa clientèle?
3) Comment doit-elle remplir son devoir dans l'avenir?