Historique des Hopitaux de la Péninsule Acadienne
Les Collections Numérisées du Canada
Accueil > Lamèque > Risques et Tragédies
 

Lamèque - Risques et Tragédies

Histoire de la tragédie des cinq noyés de Lamèque en 1928, racontée par Étienne Noël au directeur de la Revue de la Société historique Nicolas-Denys.

Traversée du goulet Shippagan-Lamèque

Le 26 décembre 1928, le district de Petite Lamèque était frappé par une tragédie épouvantable. Joseph S. Noël se noya lorsque son automobile s'enfonça dans la glace en traversant à Shippagan. Cinq personnes y perdirent la vie. C'était son épouse Diana, son beau-père André Duguay, Jean Jones et Joseph Chiasson, un jeune homme de Petite Lamèque, qui était le chauffeur. C'était une traversée hasardeuse. La veille, une première voiture avait traversé le hâvre pour se rendre à Shippagan mais la température n'étant pas très froide, il y avait encore danger. Ils prirent quand même le risque de s'y aventurer en suivant les traces de la voiture précédente.

Se rendre à Bathurst en automobile à ce temps de l'année était toute une performance. Partis de bonne heure le matin, le lendemain de Noël, ils se rendaient visiter Joseph Jones, le fils de Jean Jones et Louis Duguay, fils de André Duguay, étudiants au Juvénat, qui contrairement au Collège du Sacré-Coeur, n'accordait pas de vacances de Noël à ses étudiants.

Ce matin là, à six heures, il faisait encore noir. Une femme qui travaillait au presbytère s'était levée de bon matin pour chauffer les poêles, lorsqu'elle vit sur la glace les lumières d'une automobile au-dessus du chenal et à l'instant même les lumières disparurent soudainement. Immédiatement elle alla avertir le curé qui se préparait pour aller à l'église dire sa messe. Ensemble ils sortirent précipitamment, regardèrent vers le chenal et virent que la situation était tragique.

À cette époque les téléphones étaient rares, mais la nouvelle se répandit rapidement et l'on apprit que la seule voiture partie de Lamèque était celle de Joseph Noël et de ses passagers. Sam G. Robichaud, de la Pointe Brûlée, avait un téléphone. Il était aussi un constructeur de ponts, de quais et de brise-lames, ingénieux pour des cas difficiles comme celui-là.

Comme la glace était mince, il était essentiel de répartir le poids sur une grande surface afin d'éviter de s'enfoncer. En partant de chez lui Sam avait passé chez un voisin et avait emprunté les drisses et les palans de sa goélette. Ainsi équipés, ils entreprirent de retirer la voiture de l'eau. Avec des gros madriers ils fabriquèrent un mâtereau, trois poteaux verticaux placés en triangle, le pied au fond de l'eau, et assez hauts pour accrocher l'automobile et la monter hors de l'eau.

Repêchage de l'auto

On put alors sortir les corps des victimes et les ramener chez eux. Ce fut toute une désolation dans la paroisse...Joseph Noël et son épouse, Diane, étaient un couple très aimé et admiré dans la communauté. On disait que Diana était morte d'un arrêt cardiaque plutôt que de noyade. Ils laissaient de jeunes orphelins, Andréa, Jean-Louis et le bébé Alban, qui furent adoptés. Quant à André Duguay, 60 ans, père de Diana, il laissait son épouse Philomène Savoie et une grosse famille de grands et de petits enfants. Jean Jones, 63 ans, laissait aussi son épouse Victorine Duguay, tante de Joseph S. Noël, ainsi que plusieurs enfants et petits-enfants. Jean et André étaient deux grands amis de longue date, anciens pêcheurs et capitaines de goélettes qui avaient abandonné le métier pour raison d'épuisement et de prudence en mer. Même les moins âgés avaient une certaine crainte de la mer. On se demande comment ils ont pu s'aventurer ainsi sur une glace aussi mince et fragile.

Les funérailles des cinq noyés n'eurent lieu que quatre jours plus tard, le 29 décembre, afin de permettre aux juvénistes Joseph et Louis,de franchir le havre sur la glace pour rejoindre leurs familles.



Les difficultés et les risques encourus par les fondatrices de l'hôpital.

Une première difficulté se présente dès leur arrivée à Lamèque, le 2 février 1949. La plus grosse poudrerie de l'hiver sévissait au point que les gens du village se dirent :« Elles ne viendront pas.» Aussi, chacun resta chez lui. « Mais nous sommes venues, et nous sommes allées à l'ancien presbytère, notre futur hôpital, où le docteur et madame Cormier s'était déjà installés», raconte les chroniques de la communauté.

Un autre épisode est relaté dans la chronique du 2 avril 1955 : « Sœur Allard est convoquée à une assemblée à Bathurst. Les chemins sont impossibles, la traverse aussi, mais d'après les renseignements reçus, on peut encore sortir de l'île. La Supérieure risque l'aventure, et traverse au moyen d'un traîneau tiré par un cheval. Ce dernier a de l'eau et de la neige jusqu'aux genoux. Soeur Allard revient le même soir, elle traverse avec celui qui apporte le courrier. À plusieurs reprises le traîneau veut renverser, mais on arrive enfin sain et sauf de ce coté-ci.»

Hélicoptère de secours

Quelques jours plus tard soit le 7 avril, une urgence se présente: « Deux personnes nécessitant des opérations majeures arrivent à l'hôpital. Nous leur prodiguons les premiers soins, mais comment les transporter à Tracadie ? On demande un hélicoptère mais il ne peut venir car il neige à l'aéroport de Chatham. Un camion transporte donc la malade à la « traverse». Là, plusieurs hommes s'attellent sur un traîneau et avec mille précautions arrivent heureusement de l'autre côté. On fait la même chose avec la malade qui nous arrive le lendemain, excepté que cette fois on peut atteindre le bateau à une certaine distance du rivage avec le traîneau.»

En 1958, une autre difficulté se présente : « Comme notre médecin est absent et que le docteur Gauthier ne peut traverser à cause d'une grosse tempête de vent et de neige, Soeur Allard, assistée de deux compagnes infirmières, doit procéder à deux accouchements. Malgré la difficulté de la tâche, tout réussit très bien. Le docteur Gauthier qui vient nous visiter tôt le matin, félicite les hospitalières.»