ANNEXE 7 - EXEMPLE D’ÉTUDE DE CAS : SURPOPULATION DES OIES DES NEIGES - SERVICE CANADIEN DE LA FAUNE (SCF)

Question

  1. De quoi s’agit-il? Décrivez brièvement le contexte, l’ampleur et les répercussions de la proposition.

On se penche sur la récente augmentation rapide des populations d’oies des neiges, qui étaient déjà nombreuses, et sur les effets négatifs de cette surpopulation sur l’habitat de la faune. Les populations de grandes oies des neiges et de petites oies des neiges du milieu du continent ont énormément augmenté au cours des dernières décennies. La croissance rapide des populations est attribuée au fait que les exploitations agricoles permettent aux oies de trouver plus de nourriture en hiver et que le taux de mortalité a diminué. En conséquence, ces oiseaux ne sont plus limités par la capacité de charge de l’habitat hivernal, comme c’était le cas auparavant. L’analyse des effets du nombre accru d’oies des neiges dans les haltes migratoires et les aires de reproduction de l’Arctique indique qu’une utilisation excessive des ressources alimentaires provoque une ! dégradation des principaux habitats des oiseaux migrateurs et d’autres espèces sauvages. Si l’on n’intervient pas, les populations trop nombreuses d’oies des neiges pourraient devenir sérieusement préjudiciables à la survie à long terme de leur propre espèce et à celle d’autres oiseaux migrateurs et compromettre la diversité biologique de l’écosystème arctique.

En fin de compte, on a pris plusieurs mesures. Notre but était de protéger et de rétablir la diversité biologique des écosystèmes des milieux humides arctiques et des écosystèmes des grandes aires de migration et d’hivernage. Certaines mesures nécessiteraient des modifications réglementaires, mais l’opportunité, la manière et le moment d’appliquer ces règlements suscitent la controverse. Il a été déterminé que pour réduire la croissance rapide des populations et ramener ces dernières à un niveau compatible avec la capacité de charge des habitats de reproduction sur une période d’environ cinq ans, le taux de mortalité devrait être de deux ou trois fois supérieur à celui de la dernière décennie. À cette fin, depuis 1999, une modification apportée au Règlement! sur les oiseaux migrateurs permet de prendre des mesures spéciales de conservation qui autorisent les chasseurs à chasser les oies en surnombre en dehors de la saison de la chasse et, dans certains cas et sous réserve de contrôle précis, à utiliser des méthodes et de l’équipement spéciaux, tels que des appeaux électroniques et des appâts, pour augmenter le nombre de prises. Il n’a pas été nécessaire de prendre des mesures réglementaires pour appliquer d’autres options de gestion, telles qu’une gestion différente des refuges.

  1. Quelle est l’importance des considérations scientifiques et technologiques dans l’élaboration d’options stratégiques?

L’indicateur clé qui nous a révélé que la population croissante des oies des neiges était en train de devenir surabondante a été la détérioration des communautés végétales naturelles d’importantes haltes migratoires. La définition de la question et l’élaboration des choix stratégiques devaient reposer sur la recherche et des avis scientifiques. Dans le cas qui nous occupe, nous avons eu la chance de disposer de quantité de données, y compris des indices d’abondance, des taux de survie, des indices de productivité et d’autres paramètres, car les populations d’oies des neiges font l’objet d’une surveillance et d’une recherche depuis plus de trente ans. De surcroît, dans le cadre d’un vaste programme de recherche universitaire, des études intensives ont été réalisées pendant des années sur les com! munautés végétales et leur utilisation par les oies à l’importante halte migratoire et colonie de nidification de la baie La Perouse, au Manitoba. Les renseignements recueillis nous ont permis de cerner et de décrire le problème et nous ont fourni les données nécessaires à l’élaboration des choix stratégiques viables. Afin que la définition du problème soit plausible, il fallait à tout prix se baser sur des preuves scientifiques de l’abondance grandement accrue des oies des neiges et de ses effets néfastes sur l’habitat. Or, une bonne partie des données dont nous avions besoin avait été publiée dans des revues scientifiques examinées par des pairs.

Les choix stratégiques potentiels ont été déterminés et évalués au moyen de modèles mathématiques des populations. Les questions clés auxquelles il fallait répondre étaient celles-ci : (1) une intervention est-elle requise et, dans l’affirmative, (2) quelle ampleur doit prendre la réduction de la population et (3) quelle serait l’ampleur de la réduction obtenue selon différents scénarios.

Les résultats des exercices de modélisation ont indiqué que si l’on n’intervenait pas, il s’ensuivrait une dégradation constante des habitats naturels qui se répercuterait sur la diversité biologique de l’écosystème. La population d’oies des neiges risquait ensuite de décroître naturellement à cause d’une mauvaise alimentation en été et d’une hausse de la prédation et des maladies. L’autorégulation naturelle de la population était considérée inacceptable parce que les effets s’en feraient sentir sur toutes les espèces qui dépendent des mêmes habitats que l’oie des neiges. On a donc effectué les premières estimations de la réduction jugée nécessaire, et les analyses de sensibilité ont révélé que l’approche la plus efficace était de réduire le taux de survie des adultes.

  1. Dans quelle mesure le public comprend-il le fondement scientifique de la proposition?

Au début, le public était peu sensibilisé à la question des dommages causés à l’habitat parce que les principales haltes migratoires et l’écosystème arctique demeurent hors du champ d’observation directe de la majorité des citoyens. Dans les environnements septentrionaux isolés, les interactions complexes entre les habitats de nidification et les haltes migratoires des espèces migratrices ont peu de chances de se produire devant témoins. Toutefois, certains citoyens ont été à même de constater personnellement les effets de l’accroissement de la population d’oies, leurs récoltes ayant subi des dommages accrus ou leurs occasions d’observer les oiseaux s’étant multipliées.

Tout le temps qu’a duré la définition de notre position, nous avons produit des documents décrivant le fondement scientifique de la question. Ce matériel a été posté à plus de 700 groupes et personnes intéressés et a paru sur des sites Web du gouvernement. Cette diffusion a contribué à susciter un vif intérêt des médias (les conclusions et les mesures du gouvernement y ont été à la fois appuyées et critiquées), qui ont consacré à l’affaire de nombreux articles dans les journaux et les magazines ainsi que du temps d’antenne à la radio et à la télévision. Si l’on en croit la correspondance reçue du public et les résultats de sondages locaux d’opinion, l’information qui a paru dans les médias et celle que nous avons diffusée ont permis au public, avec les années,! de beaucoup mieux comprendre le fondement scientifique de la question.

En soi, le fait de connaître le fondement scientifique d’une question ne signifie pas que l’on souscrira aux mesures proposées. Certains sondages régionaux réalisés dans le but de connaître l’opinion du public sur les options de gestion proposées ont révélé qu’une majorité était en faveur du genre de mesures qui ont fini par être prises. Par contre, une coalition de groupes de protection des animaux opposée à toute forme d’intervention a intenté des poursuites contre EC. Cette coalition a remis en question les preuves de l’étendue des dommages causés à l’habitat par une population surabondante d’oies et le fait que les oiseaux aient atteint un nombre sans précédent. Elle a soutenu que la réduction naturelle de la taille de la population par inanition, maladie et prédation serait préférable à une ! augmentation des prises des chasseurs. Le juge de la Cour fédérale a reconnu la nature controversée de l’affaire en déclarant qu’il était heureux d’être le juge plutôt que le ministre responsable et que si la décision n’avait pas été facile à prendre pour le tribunal, elle avait été encore plus difficile pour le gouvernement. Le juge a déclaré que le gouvernement du Canada a effectivement le pouvoir de prendre des règlements spéciaux, et la coalition a renoncé à interjeter appel. La cour a pris bonne note des preuves scientifiques présentées et du degré de consensus recueilli et a déclaré que les mesures proposées étaient justifiées dans le cas de l’oie des neiges, mais qu’elles étaient " ultra vires " dans le cas d’espèces d’apparence semblable parce que l! a preuve n’avait pas été faite.

Inclusion

  1. Est-ce que la portée et les répercussions du volet scientifique de cette proposition ont été explorées du point de vue des autres disciplines et ministères, y compris des sciences sociales et des sources de savoir traditionnel?

La principale autre discipline scientifique concernée était l’agriculture, et nous avons obtenu l’avis d’experts (provinciaux et fédéraux) en la matière dans le cadre du processus de consultation des intervenants décrit plus loin dans ce document. De plus, nous avons fait appel aux Autochtones des régions touchées, principalement au Nunavut, qui possèdent le savoir local.

  1. Quels processus a-t-on utilisé pour émettre des avis scientifiques : expertise interne, externe ou internationale, ou une combinaison des trois?

La question a été soulevée sérieusement pour la première fois en janvier 1995 à une conférence internationale sur les oies de l’Arctique, au cours de laquelle la communauté scientifique internationale (certains des membres appartenant au gouvernement, d’autres non) a fait savoir au SCF et au United States Fish & Wildlife Service (USFWS) d’une voix unanime la gravité de l’incidence de la surpopulation des oies des neiges sur les écosystèmes des milieux humides de l’Arctique.

Après cette prise de position, le SCF a convoqué un atelier international en octobre 1995 pour connaître les diverses opinions scientifiques. À l’issue de l’atelier, des équipes d’experts canadiens et américains ont été réunies pour préparer une évaluation qui permettrait de mesurer les incidences environnementales de la croissance rapide des populations d’oies des neiges. Connues sous le nom de Groupe de travail sur l’habitat des oies de l’Arctique (GTHOA), ces équipes comptaient des experts d’organisations gouvernementales et non gouvernementales, y compris des modélisateurs de population, des biologistes spécialisés dans la gestion des récoltes, des biologistes spécialisés dans l’habitat, des botanistes et des experts des populations d’oies. L’accord général entre les membres des équipes, tous étant reconnus dans la co! mmunauté scientifique et ayant une vaste expérience de travail quant aux habitats arctiques, a donné du poids à leurs conclusions. Ils ont également obtenu l’avis d’autres scientifiques lorsqu’ils l’ont jugé bon. Leurs analyses ont été publiées dans des rapports exhaustifs intitulés Arctic Ecosystems in Peril – Report of the Arctic Goose Habitat Working Group et The Greater Snow Goose – Report of the Arctic Goose Habitat Working Group. Les équipes faisaient rapport au Projet conjoint sur les oies de l’Arctique (PCOA) (créé antérieurement), lequel a formulé des recommandations concernant la prise de mesures aux deux gouvernements fédéraux19.

Ainsi, le processus utilisé pour élaborer les avis reposait sur une expertise interne considérable et de longue date sur la question, ainsi que sur de vastes programmes de recherche (certains à très long terme) dirigés par des chercheurs d’universités canadiennes. Des institutions américaines (niveau fédéral et des États, universités et musées d’histoire naturelle) participent aussi à d’importants projets de recherche. Les résultats (obtenus pour la plupart d’une collaboration) font l’objet d’une discussion au forum fourni par le PCOA international, qui formule des recommandations aux gouvernements fédéraux.

  1. Un organisme extérieur indépendant a-t-il été chargé de donner son avis sur cette question? Quelles raisons ont justifié cette décision et quelles ont été les conclusions et recommandations?

Comme on l’a décrit ci-dessus, le volet scientifique de la question a été élaboré grâce aux travaux du GTHOA, composé d’équipes de scientifiques internes et externes représentant les gouvernements fédéraux, provinciaux et des États, les universités et Canards Illimités. Les motifs qui ont présidé à la création du Groupe de travail étaient ceux-ci : (1) tenir compte, au début du processus, de la possibilité que la question soit controversée sur le plan politique; (2) faire participer tous les experts reconnus en la matière, dont certains sont de l’extérieur du gouvernement. Le Groupe avait pour mandat d’analyser les incidences environnementales des populations croissantes d’oies, de prévoir la croissance des populations, de recommander l’intervention ou la non-intervention et, dans le premier cas,! d’évaluer les mesures éventuelles à prendre. Dans ses recommandations, le Groupe a estimé l’intervention essentielle pour des raisons de conservation et a proposé un certain nombre de mesures possibles. Le GTHOA et le PCOA n’étaient pas complètement indépendants du gouvernement puisqu’un membre du SCF copréside le PCOA et participe au GTHOA. Toutefois, ces groupes se composaient principalement d’organismes gouvernementaux fédéraux étrangers et le SCF était un partenaire minoritaire.

Les résultats ont été présentés au Comité trilatéral Canada-Mexique-États-Unis de conservation et de gestion de la faune et des écosystèmes, qui réunit les organismes fédéraux de la faune des trois pays et sert de principal groupe de coordination des activités continentales de conservation. Le Comité trilatéral a convenu que les populations d’oies des neiges étaient trop nombreuses et que chaque pays se devait de prendre des mesures pour régler le problème.

Au Canada, avant de prendre des décisions fondées sur les recommandations d’intervention, on a demandé l’avis de deux autres groupes d’intervenants distincts : celui concerné par la petite oie des neiges et celui concerné par l’autre sous-espèce, la grande oie des neiges. Dans le premier cas, les principales autorités compétentes sont les trois provinces des Prairies, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut. Dans le second cas, les principaux intervenants se trouvent au Québec. Bien que le SCF conserve l’entière responsabilité de la réglementation touchant le nombre de prises d’oiseaux migrateurs, les provinces, les territoires et les conseils de cogestion du Nord peuvent aussi avoir des rôles à jouer, par exemple, en ce qui concerne la gestion des terres.

Les principaux partenaires d’EC sont les provinces et les territoires, avec qui nous pratiquons la cogestion des oiseaux migrateurs. Un comité fédéral-provincial-territorial (le comité national de l’oie des neiges du Canada) a discuté des résultats de l’analyse scientifique, convenu de la nécessité d’une intervention et examiné les diverses recommandations quant aux mesures de gestion. Au Québec, des discussions ont eu lieu avec les organismes provinciaux de la faune et de l’agriculture par l’entremise du Comité technique pour la gestion intégrée de la grande oie des neiges. Ces organismes ont également recommandé l’intervention (il est question du Comité technique dans la prochaine section).

On a examiné un large éventail d’activités de gestion, de la collecte d’œufs à l’élimination sélective, en passant par une révision complète de la politique agricole en matière d’aires d’hivernage. Certaines des mesures recommandées n’étaient pas permises en vertu du Règlement sur les oiseaux migrateurs et nécessitaient donc des modifications réglementaires. En particulier, pour réduire le taux de survie des oies des neiges adultes au moyen d’une augmentation des prises des chasseurs, il fallait concevoir un règlement qui permettrait des niveaux de récolte beaucoup plus élevés qu’à l’habitude, y compris en dehors des dates où la chasse est autorisée par la Convention concernant les oiseaux migrateurs.

Un groupe indépendant a été mis sur pied pour examiner la question : le comité international d’intervenants, coordonné par le Wildlife Management Institute. Les deux gouvernements fédéraux ont été invités en qualité de conseillers. Le comité international d’intervenants a convenu que la situation justifiait le genre de mesures envisagées, bien qu’une organisation membre (la Humane Society des É.-U.) ait présenté un rapport dissident distinct à la dernière minute.

Conseils et principes scientifiques judicieux

  1. Quelles mesures ont été prises pour éviter (ou gérer) les conflits d’intérêts potentiels ou réels entre les conseillers scientifiques?

On a évité les conflits d’intérêts potentiels en demandant l’avis scientifique d’un large éventail d’experts reconnus de diverses organisations gouvernementales et non gouvernementales. Aucune source de conflit d’intérêts n’était apparente, même si certains ont accusé les experts de chercher à promouvoir leurs propres programmes de recherche en vue de s’assurer un financement permanent. Des groupes opposés à la chasse ont fait une allégation potentiellement plus grave en prétendant que la majorité des personnes et des organismes participants étaient en faveur de la chasse et que les choix de gestion représentaient des tentatives à peine voilées d’augmenter les occasions de chasse. Ces allégations ne semblaient toutefois pas représenter l’opinion publique ou recueillir un grand appui auprès de la population.

Les scientifiques et les gestionnaires d’EC, selon une de leurs conditions d’emploi, sont tenus de divulguer tout conflit d’intérêts possible et de mener leur vie personnelle et professionnelle de manière à éviter les conflits d’intérêts apparents ou réels.

  1. Quelles mesures ont été prises pour s’assurer de la qualité, de l’intégrité et de l’objectivité des avis scientifiques?

Nous avons commencé à prendre conscience de la gravité du problème en lisant des articles de pairs publiés dans des revues scientifiques. Depuis, nous gérons le contrôle de la qualité en tenant compte de l’avis scientifique d’un large éventail d’experts reconnus. De plus, nous avons profité de la tenue de forums internationaux pour solliciter l’avis de nombreuses organisations (Comité trilatéral Canada-Mexique-É.-U., PCOA, conseils des voies migratoires des É.-U.). La participation de chefs de file reconnus dans la recherche sur la biologie de l’oie des neiges et l’écologie de la végétation arctique de même que la publication de nombreux articles approuvés par des pairs dans la documentation scientifique ont contribué à assurer la qualité, l’intégrité et l’objectivité des avis. Des articles scientifiqu! es ont également paru après que la décision d’intervenir a été prise, et les principales conclusions de leurs auteurs étaient que le gouvernement devait effectivement agir, mais que les chasseurs à eux seuls seraient sans doute incapables de récolter assez d’oiseaux.

  1. Dans quelle mesure les conseillers ont-ils participé à la définition et à l’évaluation des choix stratégiques? Leurs conseils ont-ils contribué aux choix présentés aux décideurs?

Les conseillers scientifiques ont pris une part active aux évaluations scientifiques du GTHOA puis à la formulation des recommandations. Les avis scientifiques ont été discutés à fond par l’entremise du comité technique et du conseil de gestion du Projet conjoint sur les oies de l’Arctique. Les conseillers scientifiques ont produit les documents d’information qui ont aussi été examinés par les scientifiques. Leurs avis ont été déterminants dans l’élaboration des options présentées aux décideurs.

Incertitude et risque

  1. Quelle est la nature et l’ampleur de l’incertitude et des risques inhérents à cette proposition?

Incertitude scientifique : Essentiellement, on n’est pas sûr que la réduction des populations conduira au rétablissement des communautés végétales et, par la suite, à des tailles de population optimales. Bien que de l’avis général le nombre d’oies des neiges soit actuellement plus élevé qu’il ne l’a jamais été, nous ne pouvons l’affirmer avec une certitude absolue, car nous ne disposons pas de données scientifiques sûres pour établir des comparaisons. Les causes secondaires de l’augmentation des populations, qu’on pense être avant tout la récente disponibilité et utilisation des ressources alimentaires agricoles, ne sont pas tout à fait certaines; d’autres facteurs, tels que le réchauffement climatique, pourraient jouer un rôle. Enfin, on ne connaît pas avec certitude l’étendue géographique de! s dommages subis par l’habitat dans l’Arctique.

Risque scientifique : L’évaluation des risques visait surtout à déterminer la nécessité d’une intervention. D’un côté, ce qu’on risquait en ne prenant pas de mesure était clair : certains des principaux habitats des oiseaux migrateurs et d’autres espèces sauvages continueraient de se détériorer à cause d’une surutilisation, ce qui compromettrait la diversité biologique des écosystèmes des milieux humides de l’Arctique et d’importantes haltes migratoires. D’un autre côté, la modélisation montrait que le risque d’aller trop loin dans notre intervention (c.-à-d. de mettre en péril la population d’oies des neiges) était minime. Il était beaucoup plus probable que nous serions incapables d’atteindre la réduction de population souhaitée en utilisant l’approche privilégiée, soit augmen! ter les prises des chasseurs.

Incertitude technologique : La principale incertitude technologique concerne la possibilité de réduire suffisamment la population d’oies des neiges en augmentant les prises des chasseurs.

Risque technologique : S.O.

  1. Comment a-t-on géré l’incertitude dans le processus de formulation des choix stratégiques?

Rappelons les principales incertitudes : que l’augmentation du nombre de prises des chasseurs va permettre de réduire suffisamment la population d’oies des neiges et que la réduction de la population va entraîner un rétablissement des communautés végétales et, par la suite, des tailles de population optimales.

On a tenté de diminuer les incertitudes en sollicitant l’avis d’experts et en concevant des plans de surveillance et d’évaluation scientifiques. Afin de tout mettre en œuvre pour obtenir une évaluation adéquate, on a élaboré un programme régularisé de surveillance graduelle de l’habitat et de la population. Ce programme a été exécuté, mais pas dans toute la mesure recommandée à cause d’un manque de ressources. De plus, on a pris des mesures qu’on voulait temporaires pour limiter la population d’oies des neiges; il a donc fallu procéder à une évaluation et à une surveillance ultérieures pour savoir quand mettre un terme à ces activités.

La gravité de la situation nous a incités à commencer à appliquer sans tarder les méthodes de réduction des populations. La modélisation avait montré qu’il serait impossible de dépasser le taux de mortalité visé et qu’on courait plus de risques en n’agissant pas qu’en agissant. Pendant qu’on tentait de réduire la population d’oies, les scientifiques devaient poursuivre leurs travaux afin de fournir les données qui permettraient d’évaluer les méthodes employées. Afin de diminuer l’incertitude quant à notre capacité d’atteindre une réduction suffisante de la population et de nous donner la possibilité de changer de direction, nous avons chargé de nouveaux groupes de travail internationaux d’examiner: (1) les choix qui s’offraient à nous pour limiter la population sans abattre d’oiseaux, (2) la limitation de la populat! ion par la modification du paysage; (3) les méthodes qui permettraient de procéder à l’élimination sélective.

  1. De quelle façon le cadre gouvernemental de gestion intégrée du risque a-t-il été appliqué?

Le cadre n’avait pas encore vu le jour lorsque les premières options scientifiques et stratégiques ont été formulées de 1995 à 1999. Toutefois, après une comparaison de l’approche du SCF et de celle préconisée dans le Cadre de gestion intégrée du risque de 2001, il appert que les éléments clés de la pratique de la gestion intégrée du risque ont été respectés. En effet, on a procédé à une évaluation claire des risques relatifs des différentes approches (c.-à-d. intervenir ou ne pas intervenir); on a comparé les risques et choisi l’approche la plus acceptable; on a pris des mesures, et un plan d’évaluation est en cours pour en préciser les effets; on a établi un échéancier précis pour réévaluer les décisions antérieures. Le SC! F n’a pas pris de décisions seul, mais a sollicité la participation d’un vaste éventail d’intervenants ainsi que du public.

Transparence et ouverture

  1. Un groupe d’intervenants représentatif a-t-il été constitué pour commenter l’élaboration des options stratégiques? Comment ce groupe a-t-il été choisi?

Au Québec, le public a pu observer plus facilement qu’ailleurs les incidences environnementales de l’accroissement du nombre d’oies des neiges. En effet, la population entière de grandes oies des neiges fait halte dans la vallée du Saint-Laurent durant les migrations du printemps et de l’automne. La région accueille une foule d’ornithologues amateurs et le tourisme y est en plein essor. En même temps, les agriculteurs de la région ont subi des pertes économiques parce que leurs récoltes ont été endommagées par les oies migratrices. En décembre 1996, le Comité technique pour la gestion intégrée de la grande oie des neiges a été constitué et il sert depuis de forum où l’on évalue les options stratégiques. Le SCF a invité un groupe d’intervenants représentatifs ayant des intérêts divergents, y comp! ris des agriculteurs et des organisations agricoles, des chasseurs, des ornithologues amateurs et d’autres groupes de conservation, ainsi que des représentants du ministère de l’agriculture et de la faune des deux échelons de gouvernement, à faire partie du Comité. Après avoir travaillé ensemble pendant plus de cinq ans, les membres ont élaboré un plan d’action pour la gestion de la grande oie des neiges en tenant compte des recommandations du Groupe de travail sur l’habitat des oies de l’Arctique. Des mesures spéciales de conservation pour contrôler la croissance de la population, y compris une augmentation du nombre de prises et l’utilisation d’appeaux électroniques et d’appâts en vertu de permis, ont été unanimement acceptées sous réserve d’une clause indiquant que certaines collectivités rurales où le touriste ornithologue est très im! portant ne serait pas soumises à ces mesures. L’approche propos ée a également été examinée par le Comité de coordination de la chasse, de la pêche et du piégage, qui coordonne les activités de conservation de la faune des Autochtones du Nord du Québec. Le règlement a été mis en œuvre pour la première fois au printemps de 1999.

Une approche différente a été adoptée dans l’Ouest du Canada, territoire de migration de la petite oie des neiges du milieu du continent. Dans cette partie du pays, les effets de la surpopulation des oies des neiges sont limités à des régions éloignées et ne sautent pas aux yeux des habitants. Un groupe d’intervenants n’a pas été formé, mais des consultations bilatérales ont eu lieu avec des groupes particuliers à l’hiver de 1998. Par exemple, on a demandé l’opinion de chacune des trois fédérations de la faune des Prairies (organisations non gouvernementales) à l’occasion de leurs congrès annuels et par l’entremise du conseil du Projet conjoint Habitats des Prairies, du conseil de la Société protectrice du patrimoine écologique du Manitoba et du conseil du Plan nord-américain de gestion de la sauvagine de l! ’Alberta. Des discussions circonstanciées avec le comité consultatif sur la faune du Environment and Resource Management Department de la Saskatchewan ont eu lieu tout au long de 2000. Le SCF a également consulté le conseil d’administration de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities (SARM). À la suite de l’appui démontré par ces intervenants, le Manitoba a appuyé la proposition de la mise en application de mesures spéciales de conservation à partir du printemps de 1999 et la Saskatchewan a suivi en 2001. De même, le SCF a consulté les organisations Inuit régionales (la Kitikmeot Hunters’ and Trappers’ Association, la Keewatin Wildlife Federation et le Qikiqtalluuk Wildlife Board) pendant plusieurs années. Se fondant sur l’appui démontré par ces organisations, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut a approuvé la proposition du S! CF relativement à la mise en application de mesures spéc iales de conservation à partir du printemps de 2001.

On a aussi encouragé des organismes non gouvernementaux canadiens à participer à un comité international d’intervenants mis sur pied par le Wildlife Management Institute pour l’Association internationale des agences du poisson et de la faune sauvage. Le Conseil de gestion des ressources fauniques d’Inuvialuit et la Fédération canadienne de la faune ont siégé au comité. À une exception près (la Humane Society des É.-U.), le comité a été unanime à reconnaître la nécessité de l’intervention.

2a. Comment a-t-on informé le public et les intervenants du degré et de la nature de l’incertitude et des risques et des approches de gestion du risque utilisées?

On a informé les intervenants et le public en appliquant les processus de consultation décrits dans le présent document. Notre message principal a été que le risque de commettre une erreur en n’agissant pas était élevé, mais que le risque de faire des erreurs en agissant était beaucoup plus faible. Ainsi, les données sur l’incertitude n’ont pas été mises en évidence, car elles étaient jugées secondaires par rapport aux questions de gestion, considérées comme primordiales. Celles-ci faisaient l’unanimité et comportaient peu d’incertitudes et peu de risques. Une trop grande mise en évidence de l’incertitude scientifique peut saper l’appui du public, car la certitude scientifique est d’un caractère tellement relatif. Nous avons plutôt reconnu qu’agir sur la foi des meilleures connaissances disponibles et intégrer dans nos pr! atiques des mécanismes d’apprentissage et d’adaptation constituaient des pratiques exemplaires.

2b. Comment a-t-on informé le public et les intervenants de la façon dont la science a été prise en considération dans le processus décisionnel et de formulation des politiques?

Voir les discussions des divers forums ci-dessus.

Nos choix stratégiques clés étaient les suivants : (1) intervenir ou ne pas intervenir; (2) si l’on intervenait, déterminer la meilleure façon de réduire la taille de la population. Afin de joindre les personnes qui ne participaient pas directement aux comités d’intervenants, nous avons appliqué le processus officiel élaboré pour les consultations annuelles consacrées aux règlements sur la chasse. Une première description de la situation et de la nécessité possible d’une intervention a été présentée dans le Compte rendu de la situation des oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada de 1995. La question a été étoffée dans les rapports annuels ultérieurs (de 1996 à 2001), qui sont publiés en novembre. Des solutions précises ont été d&eacut! e;crites en détail dans les rapports annuels de décembre (de 1997 à 2001) intitulés Les oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada : Propositions relatives au Règlement de chasse. De l'information a aussi été présentée dans les rapports de juillet 1998, 1999 et 2000 intitulés Règlement de chasse des oiseaux migrateurs considérés comme gibier au Canada. Ces documents ont été distribués à quelque 700 gouvernements fédéraux, provinciaux et d’État, organisations autochtones et non gouvernementales et groupes de chasse et de conservation tels que le Fonds mondial pour la nature, la Fédération canadienne de la nature et la Société canadienne pour la conservation de la nature. Les documents ont également été affichés sur le site Web du SCF aprè! s la publication d’un avis d’intention dans la Gazette du Canada.

Le juge de la cour fédérale responsable de la révision a conclu que le gouvernement du Canada avait mis au point le règlement spécial à l’issue d’un long processus d’élaboration, de consultations et d’écoute d’opinions.

  1. A-t-on entrepris des consultations publiques? Comment a-t-on tenu compte des préoccupations des principaux intervenants et du public?

Même réponse que ci-dessus.

Examen

  1. Quels outils et mécanismes ont été mis en place pour surveiller et mesurer les répercussions scientifiques de la politique, et pour en faire rapport?

Maintenant qu’un programme de réduction de la population d’oies des neiges est en voie de réalisation, il faut s’acquitter des importantes et coûteuses obligations permanentes qu’entraînent l’évaluation de la situation et la réévaluation des objectifs. Dans la foulée de la révision des exigences scientifiques effectuée par le GTHOA, on réalise actuellement les études jugées les plus prioritaires. Parmi les exigences déterminées, citons des enquêtes sur la taille et la distribution des populations, des programmes de marquage pour évaluer les paramètres de mortalité (taux de prises dans des colonies particulières), des estimations améliorées du nombre de prises, des enquêtes approfondies et intensives sur l’habitat et les communautés végétales, et des enquêtes sur les effets du programme sur l! es autres oiseaux et espèces sauvages. Toutefois, on ne dispose pas des fonds suffisants pour financer tous les travaux nécessaires à la surveillance des répercussions scientifiques de l’application de la politique. Un compromis a donc été trouvé : on se concentre davantage sur l’indicateur (le nombre d’oies) que sur l’effet (les communautés végétales). Les résultats des études sont présentés au Projet conjoint sur les oies de l’Arctique en vue d’une réévaluation continue des objectifs en matière de population et des progrès accomplis pour atteindre ces objectifs. Les résultats sont aussi présentés au public durant le processus de consultation annuel et par l’entremise des groupes d’intervenants existants.

  1. Quelles dispositions sont prévues pour revoir le fondement scientifique et les décisions (échéance fixe ou advenant d’importants changements touchant la politique ou les connaissances scientifiques)?

Chaque année, on examine les nouvelles données scientifiques et les progrès accomplis par rapport à l’objectif, et on réévalue ce dernier. Cet échéancier a été établi en partie à cause de l’obligation annuelle de promulguer le règlement (Règlement sur les oiseaux migrateurs en vertu de la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs), qui permet la prise de mesures spéciales de conservation autorisant les chasseurs à abattre des oies en dehors de la période de chasse. La question de la procédure et du processus d’évaluation nécessaires en raison du caractère temporaire des mesures a été abordée plus haut.


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