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Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente (CCERI)
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LA RÉGLEMENTATION INTELLIGENTE
Une stratégie réglementaire pour le Canada

PARTIE II

SECTEURS/DOMAINES DE RÉGLEMENTATION

Introduction

Les deuxième et troisième éléments du mandat du Comité consistaient à définir les secteurs et domaines où il fallait en priorité procéder à une réforme réglementaire au Canada. Le Comité s'est en outre penché sur les secteurs qui pourraient être vulnérables si les cadres réglementaires n'étaient pas examinés, voire réformés. L'objectif était de trouver les secteurs industriels, les régimes d'intendance et les programmes réglementaires clés où une réforme réglementaire pourrait donner au Canada un avantage stratégique et contribuer à l'atteinte de ses objectifs sociaux, environnementaux et économiques. S'appuyant sur l'analyse et les recommandations présentées dans la partie I du rapport, relative à la stratégie réglementaire, la partie II démontre de quelle façon la réglementation intelligente peut être appliquée à des études de cas spécifiques.

Le Comité s'est fondé sur cinq critères pour déterminer les secteurs ou les domaines à analyser en priorité :

  1. Le secteur ou domaine présente des avantages économiques, sociaux et environnementaux pour les Canadiens.
  2. Des pressions en faveur du changement sont exercées par l'industrie, la population canadienne, le gouvernement ou des sources internationales.
  3. Le secteur ou le domaine possède les caractéristiques d'habilitation et de protection de la réglementation intelligente.
  4. Le cadre de réglementation constitue un atout stratégique pour l'industrie et le Canada.
  5. Le contexte est potentiellement favorable à l'essor d'une stratégie de réglementation intelligente

Outre ces critères, le Comité a procédé à un examen attentif de questions réglementaires et a pris en compte les inquiétudes et les préoccupations qui ont été soulevées par les organismes de réglementation et les parties intéressées partout au pays. Le Comité a aussi examiné des points qui se recoupaient du point de vue de leur vaste impact sur la société canadienne et sur l'économie. En se basant sur ces facteurs, le Comité a analysé les questions suivantes : la fabrication et l'approbation des produits; la biotechnologie et les sciences de la vie; le développement économique des Premières nations; le processus d'évaluation environnementale; l'exploration et la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières.

Le Comité reconnaît que ces questions ne sont pas les seules priorités auxquelles fait face le gouvernement du Canada en matière de réglementation, et il croit fermement que tous les secteurs et domaines de réglementation devraient faire l'objet d'une évaluation et d'une modernisation continues, tel que recommandé dans la partie I du rapport, en vue de refléter les principes de la réglementation intelligente. L'examen n'a pas porté sur le bien-fondé des objectifs des politiques dans ces domaines de réglementation. Le Comité a plutôt tenté de déterminer comment la réglementation intelligente pourrait s'appliquer à la réglementation canadienne actuelle afin de mieux promouvoir les objectifs des politiques environnementales, sociales et économiques. En élaborant ses recommandations, le Comité a tenu à s'assurer qu'elles tiennent compte de la vision et des principes dont il a été question au début de la partie I, soit : la coopération, l'efficacité, l'efficience, la rapidité d'action, la transparence, l'imputabilité et la performance.

Pour les besoins de cette analyse, le Comité a formulé les observations générales suivantes :

Coordonner les activités réglementaires - Le gouvernement fédéral devrait mieux coordonner les activités réglementaires entre les ministères et les agences fédérales, et avec les autres ordres de gouvernement. Dès le début du processus, le gouvernement fédéral devrait s'assurer qu'il y a harmonisation entre ses fonctions de réglementation et ses priorités. Il faudrait mettre en oeuvre des initiatives spécifiques, comme le « guichet unique » et nommer des coordonnateurs fédéraux ayant l'autorité nécessaire pour superviser les interventions réglementaires fédérales dans les projets les plus importants. Ces initiatives sont particulièrement indispensables dans les secteurs de l'évaluation environnementale, de la biotechnologie et des sciences de la vie, et de l'exploration et de la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières.

Élaborer des cadres de politique de réglementation - Le Comité a parfois trouvé des lacunes entre les objectifs d'un règlement et ses incidences réelles, en particulier lorsque plus d'un ministère était en cause. Par conséquent, il est nécessaire d'élaborer des cadres de politique de réglementation qui décriraient de façon claire et concise les objectifs du gouvernement dans un secteur ou un domaine de réglementation. Ces cadres donneraient une orientation générale aux divers organismes de réglementation, permettraient de déterminer les critères de réussite et feraient en sorte que les activités réglementaires soient cohérentes et intégrées. Le Comité s'est rendu compte que le besoin d'établir de tels cadres était particulièrement évident dans les secteurs de l'automobile, de la biotechnologie et des sciences de la vie, et dans le secteur pétrolier et gazier extracôtier.

Créer des règlements adaptés à la situation, dans des délais appropriés - Le Comité s'est rendu compte que l'environnement de réglementation actuel ne permettait pas de s'adapter rapidement aux changements externes qui interviennent notamment sur le plan des affaires, de la technologie ou des choix des consommateurs. Les règlements doivent être assez souples pour permettre de s'ajuster à l'évolution des méthodes de production et de prestation des services, et ce, dans des délais appropriés. Un des défis qu'il reste à relever tient du fait que plusieurs règlements fédéraux sont normatifs plutôt que fondés sur le rendement ou les résultats. Une plus grande utilisation de normes réglementaires axées sur le rendement offrirait aux parties intéressées une souplesse qui leur permettrait de s'y conformer de manière innovatrice tout en respectant les objectifs stratégiques de la réglementation.

Comprendre les incidences cumulatives et imprévues de la réglementation - Le gouvernement doit devenir plus conscient des incidences cumulatives des règlements existants et des projets de règlement. Cette conscientisation serait une première étape vers le développement d'une plus grande sensibilité aux contraintes qui découlent par inadvertance de la réglementation et à la manière selon laquelle une dimension « d'habilitation » peut être ajoutée à la réglementation. Cette observation s'applique à tous les secteurs.

Maximiser la transparence et la consultation - Le Comité s'est rendu compte que plusieurs règlements existants demeurent difficiles à comprendre et que plusieurs parties intéressées ne savent pas comment participer au processus de réglementation ni comment trouver l'information de base concernant les règlements existants ou les projets de règlement. L'élaboration continue d'information sur la réglementation accessible et facile à comprendre est essentielle. De plus, le recours accru et novateur aux consultations du grand public contribuerait à susciter une plus grande confiance envers le système réglementaire. Il serait souhaitable que le gouvernement fédéral exerce un leadership favorisant le rapprochement entre les représentants de l'industrie et les groupes de citoyens afin de leur permettre de discuter de façon constructive de leurs préoccupations respectives et d'explorer des solutions. Dans le rapport, on note que ces préoccupations sont particulièrement évidentes dans les domaines de la biotechnologie et des sciences de la vie, et de l'évaluation environnementale.

Faire un plus grand usage des principes de gestion du risque - Le cadre réglementaire fédéral continue de faire face à des demandes croissantes portant sur une transparence accrue et une meilleure capacité de réponse dans des délais raisonnables, tout en étant doté de moyens limités. Le Comité s'est rendu compte que les principes de gestion du risque n'étaient pas appliqués de manière cohérente et complète, et qu'ils devraient tenir un rôle plus prédominant au moment de la révision des cadres réglementaires de plusieurs secteurs (p. ex., l'évaluation environnementale et l'exploration et la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières). La mise en oeuvre des principes de la gestion du risque permettra au cadre réglementaire fédéral de se concentrer sur les risques les plus importants et d'atteindre plus efficacement les résultats escomptés par la réglementation.

Augmenter la coopération internationale en matière de réglementation - Le Comité a remarqué qu'il y avait un manque d'orientations politiques permettant de déterminer les situations où il serait approprié pour le Canada d'avoir des réglementations qui lui sont propres et celles où il serait préférable de recourir à la coopération internationale en ce domaine. Une plus grande coopération internationale permettrait d'augmenter l'efficience de l'économie canadienne, de continuer à offrir une protection de haut niveau de la santé humaine et de l'environnement et d'utiliser plus efficacement les ressources limitées dont disposent les organismes de réglementation. Ces conclusions sont particulièrement évidentes dans des secteurs comme l'automobile, la biotechnologie et les sciences de la vie, et en ce qui a trait au processus d'approbation des nouveaux médicaments.

1.1 Fabrication et approbation de produits

En raison des progrès technologiques et des efforts constants visant à libéraliser le commerce, les marchés sont de plus en plus ouverts et intégrés partout dans le monde. Cette situation a amené les entreprises à modifier radicalement leur approche et à innover constamment afin d'élaborer de nouveaux produits qui répondent aux besoins des clients, d'augmenter leur part de marché et de réduire leurs coûts de production. La principale concurrence des entreprises canadiennes ne s'exerce pas sur la scène nationale, mais bien sur la scène internationale, et provient d'entreprises étrangères soumises à des systèmes de réglementation différents. Les sociétés multinationales se sont restructurées et ont consolidé leurs activités, ce qui s'est traduit par la création d'un nombre limité de grandes usines spécialisées au service du marché international et en concurrence les unes avec les autres pour l'obtention du capital d'investissement intrasociétés. Plus des deux tiers du commerce transfrontalier avec les États-Unis s'effectue entre des entités différentes d'une même entreprise exploitant ses activités des deux côtés de la frontière.

Plusieurs intervenants croient que le système de réglementation a une incidence sur le climat d'investissement au Canada. Pour réussir dans un tel environnement, d'après ce que le Comité a entendu, les entreprises canadiennes doivent pouvoir compter, entre autres, sur des délais réglementaires stables pour planifier leurs activités commerciales et sur un accès fiable à des intrants nécessaires et nouveaux. Par exemple, dans les cas où les normes canadiennes visant les composantes d'un produit et le produit final diffèrent des normes du marché international, la production au Canada pourrait devenir moins efficiente, rendant ainsi le pays moins attrayant pour ceux qui voudraient y implanter une usine.

En même temps, les citoyens veulent l'assurance que les normes qui régissent les produits en matière de sécurité, santé humaine et environnement soient maintenues à un haut niveau. De surcroît, les Canadiens exigent des entreprises et des organismes de réglementation qu'ils soient plus responsables et transparents par rapport au respect de ces normes.

Dans un tel contexte, une réglementation plus efficiente pourra améliorer la capacité concurrentielle des entreprises et garantir le respect du mandat de protection de la santé et de la sécurité des citoyens et de l'environnement. De plus, une réforme de la réglementation pourra soutenir les organismes de réglementation pour faire en sorte que les consommateurs aient accès rapidement à une vaste gamme de produits et aux plus récentes nouveautés, à des prix concurrentiels.

1.1.1 Vue d'ensemble

Dans tout le pays, des parties concernées ont souligné au Comité qu'un enjeu clé de la fabrication et de l'approbation des produits, dans de nombreux secteurs, est lié au fait que les normes réglementaires canadiennes sont différentes de celles des autres pays, surtout des normes américaines. Les fabricants peuvent être confrontés à des exigences différentes pour un même produit, selon qu'il sera destiné à un marché provincial, national ou international. Ces différences réglementaires entre le Canada et ses principaux partenaires commerciaux peuvent nuire à la position concurrentielle du Canada compte tenu des occasions d'affaires perdues.

Les fabricants ont relevé plusieurs règlements canadiens qui nuisent à leur capacité d'obtenir des matières premières et de les utiliser ou qui établissent des normes industrielles applicables à leurs produits qui, selon eux, entravent leurs efforts d'innovation. Dans de nombreux cas, ces règlements diffèrent des exigences en vigueur dans les marchés étrangers, en particulier ceux des États-Unis, qui accueillent la grande majorité des exportations canadiennes. Pourquoi les normes diffèrentelles? Notamment en raison des facteurs suivants : sécurité et qualité accrues, perspectives divergentes à l'égard de la promotion de la santé, méthodes d'essai différentes, différents objectifs commerciaux et certaines traditions dans les approches réglementaires.

Exemples de différences dans les réglementations du Canada et des États-Unis
Produit Approche canadienne Approche américaine
Déodorants antisudorifiques Le numéro d'identification de médicament (DIN) est exigé à cause de la teneur en aluminium. DIN non exigé.
Étiquetage nutritionnel des acides gras trans La teneur des acides gras trans d'un produit doit être inférieure à 0,2 g (i) par quantité de référence et portion déterminée ou (ii) par portion déterminée si l'aliment est préemballé. La teneur des acides gras trans d'un produit doit être de 0,5 g par quantité de référence et portion déterminée pour qu'il soit considéré « sans gras trans ».
Vitaminisation des céréales pour petit déjeuner et autres produits alimentaires La réglementation canadienne précise quels sont les aliments auxquels peuvent être ajoutés les vitamines et minéraux et indique les teneurs de vitaminisation autorisées. Les États-Unis ne fixent aucune limite à la teneur des vitamines et minéraux ajoutés aux produits alimentaires.
Eau enrichie L'ajout de vitamines et de minéraux dans l'eau embouteillée est interdit. L'eau embouteillée peut être enrichie de vitamines et de minéraux.
Pizza surgelée Les additifs BHA, BHT et le caramel sont approuvés, mais ne peuvent être utilisés dans le pepperoni et les morceaux de saucisse. Les additifs BHA, BHT et le caramel peuvent être utilisés dans le pepperoni et les morceaux de saucisse.
Maïs éclaté à saveur de cheddar La teneur en fromage de l'assaisonnement doit être inférieure à 49 %. La teneur en fromage de l'assaisonnement est de 53 %.
Antidémarreurs automobiles Projet de réglementation des antidémarreurs conformes aux normes canadiennes et européennes. Facultatif pour les véhicules les plus fréquemment volés aux États-Unis.

Le Comité est d'avis que les exigences propres au Canada devraient se limiter aux situations suivantes : il n'existe aucune norme internationale ou nord-américaine généralement reconnue; d'importantes priorités nationales, des circonstances propres au Canada (p. ex. topographie ou valeurs constitutionnelles) exigent une approche différente; le gouvernement n'a pas encore assez confiance que les processus réglementaires, les pratiques, les résultats et les décisions de ses principaux partenaires commerciaux répondront aux objectifs politiques canadiens. En adoptant des exigences propres au Canada, le gouvernement fédéral devrait prendre en considération les autres outils dont il dispose, notamment la réglementation fondée sur le rendement et les codes volontaires, afin de réduire au minimum le poids de ces exigences sur les affaires (pour de plus amples renseignements, voir, dans la partie I, les sections 3.1, « Coopération internationale en matière de réglementation », et 3.5, « Instruments d'action gouvernementale »).

Recommandation 42 : Le gouvernement fédéral devrait collaborer avec les diverses parties intéressées et les citoyens pour dresser l'inventaire des différences en matière de réglementation - particulièrement entre le Canada et les États-Unis - qui nuisent à la capacité concurrentielle du Canada. Ces différences devraient être abordées sous l'angle des critères relatifs aux exigences particulières au Canada. Si les réglementations ne répondent pas à ces critères, le Canada devrait immédiatement prendre les mesures nécessaires pour harmoniser ses exigences réglementaires avec celles de ses partenaires.

Le Comité a examiné des cas précis de compatibilité et de divergence en matière de fabrication et d'approbation de produits dans les trois champs suivants : l'industrie automobile, le processus d'approbation des médicaments et la déclaration de substance nouvelle (DSN) (p. ex. les produits chimiques).

1.1.2 Construction et montage de véhicules automobiles

Le Comité a étudié l'industrie automobile du point de vue de sa structure nord-américaine et des implications d'une coopération en matière de réglementation. Le secteur de l'automobile est la plus grande industrie manufacturière au Canada : il représente 13 % du PIB manufacturier total et a investi plus de 23 milliards $ en installations et en technologie au cours des dix dernières années.12

Cette industrie est hautement concurrentielle, tournée vers l'exportation et pleinement intégrée à l'échelle nord-américaine. Le Canada est le huitième plus gros fabricant intégré de véhicules du monde, construisant près de 2,6 millions de véhicules par an, soit près de 16 % de la production de véhicules nord-américaine. Une grande partie des véhicules fabriqués au Canada sont destinés au marché américain. De même, ceux qui sont construits aux États-Unis sont librement exportés vers le Canada.

Le secteur de l'automobile au Canada fait cependant face à des tensions de plus en plus fortes sur plusieurs fronts : hausse de la concurrence des fabricants hors frontières, surcapacité dans les usines de montage, et exigences réglementaires qui, au dire des compagnies, augmentent les coûts de production. De plus, l'industrie canadienne de l'automobile a connu la fermeture de trois usines de montage - et la perte d'emplois bien rémunérés - au cours des dernières années, alors que plusieurs usines étaient ouvertes dans le Sud des États-Unis.

L'intervention du gouvernement du Canada dans le secteur automobile procède de divers mandats qui se recoupent, dont la sécurité des véhicules à moteur neufs et importés, l'intendance environnementale, l'amélioration de l'efficience énergétique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la promotion de la compétitivité internationale et de la croissance durable de ce secteur. Plusieurs ministères fédéraux (p. ex. Transports Canada, Environnement Canada, Ressources naturelles Canada) assument un rôle de réglementation ou de formulation de politiques intéressant les véhicules à moteur, l'industrie automobile et la protection des consommateurs.

Divergences entre le Canada et les États-Unis en matière de réglementation

Dans certains domaines, les normes automobiles canadiennes et américaines diffèrent ou pourraient différer en vertu de nouvelles initiatives de réglementation. 

  1. En ce qui concerne la protection des passagers avant, la norme de Transports Canada est propre au Canada (Norme de sécurité des véhicules automobiles du Canada n° 208). Le ministère propose de nouvelles exigences qui ne seraient toujours pas harmonisées avec celles des États- Unis. Les changements proposés exigeraient que les systèmes de ceinture de sécurité et de sac gonflable soient améliorés de manière à mieux protéger les passagers qui portent une ceinture. La nouvelle réglementation vise à assurer aux Canadiens le plus haut niveau de protection réalisable, et à réduire au minimum le risque de blessures causées par les sacs gonflables, particulièrement chez les enfants et les conducteurs de petite taille. La norme en question, propre au Canada, repose sur le taux plus élevé de port de la ceinture constaté au Canada (par rapport à celui des États-Unis) et vise à assurer une protection accrue aux passagers qui portent la ceinture de sécurité.
  2. Dans le Plan du Canada sur les changements climatiques 2000, le gouvernement fédéral proposait aux fabricants automobiles d'augmenter volontairement le rendement du carburant de 25 % d'ici 2010 afin d'atteindre les exigences de l'Accord de Kyoto. Un tel objectif créerait une divergence importante entre les exigences actuellement similaires du Canada et des États-Unis à cet égard.
  3. Il existe d'autres divergences actuelles (p. ex. phares de jour avant, pare-chocs pouvant résister à un impact de 5 mi/h tandis que la norme américaine est fixée à 2,5 mi/h - résultat d'un assouplissement de la norme américaine au cours des années 80) et des divergences proposées (p. ex. antidémarreurs sur les nouveaux véhicules et barres anti-encastrement sur les camions).  Même s'il y a des raisons valables justifiant chacune de ces normes spécifiques, la question de l'incidence cumulative des divergences continue de se poser.

Par exemple, la réglementation et la sécurité routière sont interreliées. Avec plus de 21 millions de personnes conduisant plus de 19 millions de véhicules sur plus de 900 000 kilomètres de routes, le transport routier est important pour pratiquement tous les citoyens du Canada. Le nombre de décès et d'hospitalisations résultant d'accidents de la circulation a considérablement diminué au Canada au cours des dernières décennies. Depuis 1982, le nombre de décès dus aux accidents de la route a baissé de près de 50 %, alors que le nombre de véhicules et de conducteurs sur nos routes connaissait une augmentation. 13 Néanmoins, les collisions routières coûtent toujours environ 25 milliards $ par année aux Canadiens14. Certaines interventions gouvernementales ont contribué à augmenter la sécurité sur les routes au Canada : parmi celles-ci, on compte les lois sur le port de la ceinture de sécurité et les harnais pour enfants, les sanctions plus sévères pour la conduite en état d'ébriété, les campagnes de sensibilisation et d'information auprès du public et les améliorations à la sécurité des véhicules et aux infrastructures routières.

Le gouvernement a aussi accordé de plus en plus d'attention au problème des émissions de gaz à effet de serre provenant de sources diverses, notamment du secteur des transports. Selon Environnement Canada, en 2001, les Canadiens étaient responsables de l'émission dans l'atmosphère d'environ 720 mégatonnes de gaz à effet de serre, par rapport à 608 mégatonnes en 1991. Le secteur du transport routier15 était responsable de l'émission de 133,4 mégatonnes de ces gaz (18,5 % du total), en hausse par rapport aux 107,5 mégatonnes de 1990 (17,6 % du total). Les émissions provenant des types de véhicules les plus nombreux, soit les automobiles à essence, ont diminué au cours de cette période, ce qui indique que la hausse des émissions dans le secteur est principalement attribuable à l'augmentation du nombre de véhicules utilitaires légers à essence (tels les VUS et les mini-fourgonnettes) et des véhicules utilitaires lourds au diesel.16

Fait à noter, tant au Canada qu'aux États-Unis, la conformité à des exigences de performance réglementées est basée sur un programme d'autocertification appliqué par les compagnies mêmes. Les deux pays exercent toutefois une surveillance des normes de sécurité par des essais, des vérifications et des recherches.

Principaux enjeux

Les règlements régissant l'industrie automobile relèvent de quatre types : normes de consommation de carburant; règlements sécuritaires; réglementation des émissions; et normes de qualité des carburants. Ils touchent principalement les véhicules vendus au Canada, quel que soit leur pays d'origine. Du fait que plus de 85 % des véhicules vendus au Canada sont construits à l'étranger, la réglementation canadienne dans ce secteur n'exerce pas ses effets que sur les constructeurs canadiens, mais aussi sur les fabricants d'autres pays.

Le gouvernement du Canada s'efforce d'harmoniser ses exigences et politiques réglementaires avec celles des États-Unis, sauf dans les cas où il est avantageux pour les Canadiens de poursuivre une approche non harmonisée. Les divers ministères ont indiqué n'épargner aucun effort pour élaborer des règlements et politiques aussi compatibles que possible avec ceux des États-Unis, de façon à ce que les véhicules construits puissent être vendus sur les deux marchés, tout en accordant une haute priorité à la sécurité et à la responsabilité environnementale.

Environ 85 % des normes sécuritaires canadiennes actuellement applicables aux véhicules à moteur neufs sont harmonisées avec celles des États-Unis. Cependant, les fabricants nord-américains se disent préoccupés par une tendance croissante à la divergence de la réglementation dans des domaines où ces écarts pourraient compliquer la conception des véhicules et les procédés d'ingénierie et de construction.

Un des défis que les changements réglementaires posent à l'industrie est que les exigences doivent être intégrées au processus de conception des véhicules. Les modèles de véhicules ont une durée de vie de cinq à quinze ans, et la conception est arrêtée jusqu'à quatre ans avant la production. Par conséquent, les fabricants affirment qu'ils ont besoin de délais importants (au moins six ans) pour se conformer à la réglementation et d'assez de souplesse pour apporter les modifications sur le plan des ressources humaines et des allocations de capitaux (il faut toutefois mentionner que les organismes de réglementation tiennent compte de ces délais dans leurs discussions avec les représentants du secteur sur des propositions de réglementation).

Outre les modification au titre de la conception des véhicules, d'autres instruments pourraient permettre d'atteindre des objectifs de politique publique. Par exemple, au lieu d'insister sur une politique générale d'amélioration de l'efficacité énergétique et de réduction des émissions, le gouvernement pourrait, par des mesures incitatives, encourager les consommateurs à acheter de petits véhicules éconergétiques déjà sur le marché, ou, par des mesures dissuasives, les décourager d'acheter des gros véhicules moins éconergétiques.

Les modifications proposées au titre de la conception des véhicules pourraient avoir des effets à long terme sur la santé du secteur. Les décisions qui sous-tendent les investissements reposent sur de nombreux facteurs, dont les différences sur le plan de la réglementation. Étant donné la forte concurrence sur les marchés mondiaux, ces différences peuvent laisser aux investisseurs potentiels l'impression que le système réglementaire canadien est trop complexe, et déformer la perception de la communauté internationale sur l'environnement commercial au Canada.

Le Comité reconnaît les défis pour l'industrie automobile d'attirer et de retenir des capitaux tout en respectant la nécessité de maintenir l'intégrité des normes de sécurité et environnementales au profit de l'ensemble des Canadiens. Par conséquent, étant donné les rôles des divers organismes fédéraux de réglementation et l'importance du secteur dans l'économie et l'environnement, le gouvernement du Canada doit élaborer un cadre stratégique afin de définir ses objectifs pour le secteur de l'automobile. Ce faisant, le gouvernement pourrait harmoniser sa réglementation pour s'assurer qu'elle contribue à l'atteinte de ces priorités politiques.

Le Comité est d'avis qu'un tel cadre stratégique pourrait créer un environnement réglementaire nouveau et moderne dans le secteur automobile, apte à desservir les intérêts économiques canadiens (p. ex. l'investissement et l'emploi au Canada), et à favoriser la capacité d'innovation et la compétitivité mondiale de l'industrie automobile tout en protégeant la santé et la sécurité des Canadiens et l'environnement.

Recommandation 43 : Le Canada doit élaborer un cadre stratégique global pour le secteur de l'automobile, en vue de coordonner les rôles réglementaires et de déterminer des objectifs clairs. Ce cadre devrait aussi comprendre une stratégie de coopération portant sur l'élaboration de normes et de règlements communs avec les États-Unis.

1.1.3 Processus d'examen des médicaments

Le Canada, à l'instar d'autres nations industrialisées, doit relever d'imposants défis en matière de réglementation sur les nouveaux médicaments. Pour Santé Canada, cela suppose de devoir demeurer à la fine pointe des découvertes scientifiques survenant à un rythme accéléré et menant au développement de nouveaux médicaments, et de satisfaire aux demandes des consommateurs à l'égard de médicaments novateurs et potentiellement nécessaires à la survie.

Le processus d'introduction de ces médicaments sur le marché canadien est complexe et est assujetti aux décisions de nombreuses parties. À l'instar de Santé Canada et de ses partenaires, le Comité est d'avis que la question de la sécurité est primordiale. Les interlocuteurs du Comité ont également estimé, toutefois, que les processus visant à approuver ces nouveaux médicaments et à en permettre l'accès aux Canadiens sont trop lents. Le délai peut engendrer des pertes de vente pour les entreprises pharmaceutiques et, par conséquent, des effets négatifs sur le développement de nouveaux médicaments au Canada et sur les occasions d'innovation.

Trois principaux facteurs sont à considérer dans le cadre du processus d'approbation et d'introduction de médicaments nouveaux au Canada, et il faut tenir compte de chacun d'eux dans une stratégie pharmaceutique globale.

Le premier facteur porte sur les stratégies de commercialisation des entreprises pharmaceutiques. En général, de nouveaux médicaments ne sont introduits sur le marché canadien, qui représente environ 2 % du marché mondial des produits pharmaceutiques, qu'après avoir été distribués dans d'autres marchés plus importants pendant plusieurs mois, voire des années. Soixante-dix pour cent des demandes d'homologation de médicaments sont d'abord présentées aux États-Unis, où les entreprises pharmaceutiques peuvent s'attendre à récupérer beaucoup plus rapidement leurs coûts de recherche-développement. Le deuxième facteur concerne l'inclusion des nouveaux médicaments dans les listes provinciales de médicaments remboursés en vertu d'un régime d'assurance maladie provincial. Le troisième facteur est le processus d'examen des médicaments sous la responsabilité de Santé Canada, qui est confronté aux pressions lui demandant de s'assurer de l'innocuité des nouveaux produits thérapeutiques, mais plus rapidement et plus efficacement.

Le Comité a décidé d'axer ses recommandations sur la façon dont une coopération internationale en matière de réglementation peut améliorer l'accessibilité aux nouveaux médicaments pour les Canadiens en accélérant le processus d'approbation des médicaments et, de ce fait, en permettant à Santé Canada d'utiliser de façon plus stratégique ses ressources restreintes. Si le processus réglementaire d'examen des médicaments du Canada était plus étroitement lié à celui des pays chefs de file dans ce domaine, les produits sûrs déjà approuvés dans ces pays pourraient être introduits plus rapidement sur le marché canadien. Le Canada pourrait mettre en oeuvre une telle approche en adoptant certaines normes internationales et en simplifiant le processus d'examen des médicaments déjà approuvés par d'autres pays dotés de normes réglementaires élevées.

Principaux enjeux

Lenteur du processus d'approbation des médicaments

En vertu de la Loi sur les aliments et drogues, Santé Canada est chargé de soumettre les médicaments à un examen avant d'en autoriser la vente au Canada, dans le but d'évaluer leur sécurité et leur qualité. Le processus d'examen des médicaments se divise en trois étapes distinctes, quoique interdépendantes. La première étape consiste à soumettre les nouveaux médicaments à un examen scientifique. La deuxième étape nécessite la réglementation de la qualité à la fois des installations et des processus de fabrication des médicaments. Finalement, Santé Canada est responsable de la surveillance continue de l'innocuité et de la qualité des médicaments déjà sur le marché.

Entre janvier 1999 et juin 2003, la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada a reçu et traité 314 demandes d'homologation de nouveaux médicaments. Il s'agit de médicaments qui contiennent une substance qui n'a pas été vendue au Canada pendant un temps suffisant ni en quantité suffisante pour établir son innocuité et son efficacité17. Plus de la moitié de ces demandes concernaient des changements apportés à des médicaments déjà approuvés, notamment en ce qui a trait à la combinaison ou à la proportion d'ingrédients ou à la formulation du produit fini (y compris la posologie, la présentation et l'étiquetage). Au cours de la même période, 139 demandes (moins de la moitié) portaient sur de nouvelles substances actives (c.-à-d. des substances dont la vente n'avait jamais été approuvée auparavant au Canada).

Bien que la durée cible du processus d'examen des nouveaux médicaments au Canada se compare à celle d'autres pays, elle n'est respectée que dans une faible proportion des cas. Le Centre for Medicines Research International indique que les délais moyens requis au Canada pour effectuer l'examen des nouveaux médicaments sont plus longs que les délais moyens requis aux États-Unis, en Suisse et dans l'Union européenne, qu'ils sont sensiblement les mêmes qu'en Australie et sont plus courts qu'au Japon.18

En ce qui a trait aux nouvelles substances actives, en 2001-2002 les délais pour la mise sur le marché de produits pharmaceutiques au Canada étaient en moyenne supérieurs de six mois à ceux des États-Unis. Dans le cas des produits biologiques, ces délais étaient de six mois à deux ans supérieurs.

On peut expliquer en partie ces délais par le fait qu'en 2001-2002, l'industrie a soumis ses demandes d'examen réglementaire de nouvelles substances actives aux États-Unis avant de les présenter au Canada. En moyenne, l'industrie a soumis ses demandes d'homologation de produits pharmaceutiques trois mois plus tard au Canada qu'aux États-Unis et ses présentations de produits biologiques douze mois plus tard. De plus, les délais en question ont également été allongés du fait que l'examen et l'approbation réglementaires des produits pharmaceutiques et biologiques (nouvelles substances actives) ont duré, en 2001-2002, en moyenne quatre mois de plus au Canada qu'aux États-Unis19.

En plus de ces facteurs, il a également été souligné que les sociétés pharmaceutiques décident souvent, une fois obtenues les approbations respectives du Canada et des États-Unis, de lancer leurs médicaments sur le marché américain plus rapidement que sur le marché canadien. Pour que les Canadiens aient rapidement accès aux nouveaux médicaments, le Canada doit tenir compte des réalités du marché et adapter son processus réglementaire en conséquence.

En ce qui a trait à l'atteinte de ses propres objectifs de rendement, Santé Canada rapporte qu'en 2002, le délai moyen pour rendre une première décision20 relative à des produits pharmaceutiques s'établissait à 547 jours dans le cas des propositions approuvées comme étant non prioritaires de nouvelles substances actives (192 jours de plus que l'objectif de rendement), et à 332 jours dans le cas des propositions approuvées comme étant prioritaires de nouvelles substances actives (97 jours de plus que l'objectif de rendement). En 2003, ces délais se sont établis respectivement à 678 et 348 jours.21

L'atteinte des objectifs de rendement touche également les fabricants de médicaments génériques. Selon Santé Canada, le délai moyen pour rendre une première décision dans le cas d'un médicament générique était de 368 jours en 2002, soit 133 jours de plus que l'objectif de 235 jours. En 2003, le délai moyen pour rendre une première décision était de 385 jours, soit 150 jours de plus que l'objectif.22

Les retards dans le processus d'examen des médicaments sont en grande partie attribuables à l'arriéré (présentations pour lesquelles on n'a pas atteint l'objectif de rendement) dont faisaient l'objet environ 60 % de tous les médicaments et produits biologiques soumis à l'examen de Santé Canada jusqu'à l'an dernier. Santé Canada souligne que l'augmentation des délais d'approbation en 2003 est attribuable aux efforts consacrés à la réduction de cet arriéré, qui lui ont permis de le réduire de 62 % dans le domaine des produits pharmaceutiques, en date de mars 2004 (par rapport à mars 2003). De plus, le ministère prévoit que cet arriéré sera totalement éliminé d'ici la fin de l'exercice 2005-2006. Dans le cadre de sa Stratégie d'accès aux produits thérapeutiques, Santé Canada a également réorganisé ses processus d'examen des médicaments en y incorporant les pratiques qui contribuent au niveau de rendement élevé de la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis. En éliminant progressivement l'arriéré, Santé Canada peut se concentrer sur la mise en oeuvre de pratiques qui reflètent les principes de réglementation intelligente : un processus d'approbation des médicaments plus simple, plus efficient et axé sur la qualité des résultats.

Un processus d'approbation plus lent n'est pas nécessairement gage d'une plus grande rigueur de l'examen scientifique des nouveaux médicaments, et peut plutôt traduire les effets de l'insuffisance des ressources et moyens d'action des organismes de réglementation. Les États-Unis, par exemple, retirent plus de produits du marché que le Canada,23 ce qui s'explique en partie par le fait que les nouveaux produits pharmaceutiques sont souvent approuvés aux États-Unis avant même d'être soumis à un examen au Canada. Ce décalage permet aux autorités canadiennes de tenir compte des données émises après la mise en marché d'un produit lorsqu'ils procèdent à son analyse scientifique, et de réduire ainsi le nombre de retraits.

Il convient de signaler que l'industrie a fait état de délais d'approbation plus longs que ceux rapportés par Santé Canada. Ces écarts soulignent les difficultés que présentent la mesure et la communication de données claires et cohérentes sur le processus d'examen des médicaments.

Utilisation plus avisée des ressources restreintes

Le Canada doit reconnaître que ses ressources et ses capacités sont limitées lorsque comparées à celles d'autres importantes autorités réglementaires, telle la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis. En 2002, le budget consacré par la FDA à l'évaluation des médicaments pour les humains atteignait environ 220 millions $US, comparativement à 40,9 millions $US pour santé Canada. La FDA déploie également dix fois plus de ressources humaines que Santé Canada à l'examen des médicaments, bien que le nombre de nouveaux médicaments approuvés soit sensiblement le même. Toutefois, le rendement de la FDA dépasse celui de toutes les autres instances sur le plan de la qualité de l'examen scientifique et de la rapidité du processus d'approbation.

Le Canada n'est pas en mesure d'appuyer un organisme de réglementation de l'envergure de la FDA, pas plus qu'il ne peut se permettre d'entreprendre des examens de médicaments aussi approfondis que ceux de son homologue américain. Il doit être stratégique dans l'utilisation de ses ressources limitées. Pour ce faire, il peut se concentrer sur des domaines où les produits s'adressent spécifiquement au marché canadien (tels les produits dérivés du sang, les vaccins, etc.) ou dans des secteurs où Santé Canada peut démontrer qu'un processus d'examen indépendant est essentiel pour assurer la santé et la sécurité des Canadiens. Une utilisation stratégique des ressources signifie également tirer parti des connaissances et capacités en matière de réglementation perfectionnées au sein d'autres instances, notamment par l'utilisation des données et des résultats d'autres examens entrepris ailleurs, par le partage de la charge de travail et des processus et éventuellement par la reconnaissance mutuelle ou l'acceptation de l'équivalence des processus. Bien qu'issue d'un contexte particulier, l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments (AEEM)24 est un exemple d'approche de guichet unique pour la réglementation des produits thérapeutiques. En fait, si 25 pays européens peuvent évoluer dans un cadre multilatéral coopératif d'évaluation des médicaments, pourquoi le Canada ne pourrait-il pas participer plus largement aux approches internationales?

Une coopération internationale accrue au chapitre de l'examen des nouveaux médicaments peut profiter directement aux citoyens par l'introduction accélérée de nouveaux produits thérapeutiques sûrs sur le marché canadien. En utilisant mieux et de façon plus stratégique la coopération internationale, Santé Canada pourrait également affecter plus efficacement ses ressources à des domaines qui requièrent une approche canadienne et le pays tout entier en tirerait parti. Par exemple, à l'instar de la FDA, le ministère pourrait consacrer des ressources supplémentaires à la recherche et au développement de traitements thérapeutiques innovateurs en collaboration étroite avec les parties concernées. Le développement d'essais cliniques au Canada et la surveillance après la mise en marché des effets indésirables des médicaments sont autant de domaines d'intérêt énoncés dans la Stratégie d'accès aux produits thérapeutiques de Santé Canada.

Utilisation plus stratégique de la coopération internationale

Santé Canada est actuellement engagé dans un certain nombre d'accords de coopération internationale avec les États-Unis et d'autres instances. Il doit cependant accélérer le renforcement et la mise en oeuvre de son cadre de coopération internationale. Une coopération internationale stratégique en matière de réglementation requiert la détermination des occasions et des partenaires de collaboration dans le but d'accroître l'efficience du processus d'examen des médicaments et d'en faire profiter les Canadiens. Il faut de ce fait déterminer dans quelles circonstances l'alignement de notre processus réglementaire sur celui de nos partenaires commerciaux est le plus approprié (c.-à-d. le Canada doit-il adopter des normes internationales ou accepter l'équivalence?) et une collaboration mutuelle est la plus opportune (p. ex. des processus d'examen partagés ou communs).

La coopération internationale en matière de réglementation peut revêtir plusieurs formes, comme en témoigne, dans la partie I, la section 3.1, « Coopération internationale en matière de réglementation ». Le Comité estime qu'il faudrait fixer à la fois des objectifs de coopération à long terme et des objectifs de coopération à court terme.

À court terme, Santé Canada devrait se concentrer sur la détermination des domaines du processus d'approbation des médicaments pour lesquels une approche indépendante n'ajoute pas à la qualité des décisions ni n'offre d'avantages aux Canadiens. Par exemple, l'harmonisation de nos processus avec ceux d'autres organismes de réglementation pourrait être réservée aux applications qui visent des modifications mineures à un produit thérapeutique ou qui ne nécessitent pas d'examen scientifique; ou encore, dans le cadre d'examens de données de fabrication, lorsque les installations pharmaceutiques sont conformes aux normes de qualité généralement reconnues par de nombreux organismes de réglementation à l'échelle internationale. Le Canada ne pourrait-il pas lui aussi adopter de telles normes internationales et ainsi éviter de devoir procéder à un examen indépendant? Les examens avant la mise en marché et la surveillance après la mise en marché sont d'autres domaines pour lesquels le Canada pourrait profiter d'une coopération internationale accrue, sans nuire au contrôle des résultats. La signature récente d'un protocole d'entente entre Santé Canada et la FDA sur les nouvelles percées thérapeutiques, telles les thérapies géniques et cellulaires et les technologies médicales, témoigne de cette orientation.

Un examen comparatif des résultats de la présentation des nouveaux médicaments au cours des cinq dernières années au Canada, aux États-Unis et dans l'Union européenne pourrait servir à cerner les différences substantielles dans les processus d'approbation respectifs et à déterminer si ces écarts sont le seul résultat de l'analyse des données de surveillance après la mise en marché. Il pourrait également servir à étudier les présentations des nouveaux médicaments à la FDA et à l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments au cours des cinq dernières années, mais non à Santé Canada, pour déterminer la perte potentielle d'avantages pour les Canadiens qu'entraîne l'indisponibilité de ces médicaments. Cette analyse présenterait à la fois les avantages éventuels d'un examen canadien indépendant des médicaments (p. ex. la sécurité accrue dans le cas de produits retirés du marché américain, mais jamais introduits au Canada) et les coûts inhérents à l'accès retardé à des produits thérapeutiques innovateurs. Grâce à cette analyse, Santé Canada pourrait déterminer dans quelles circonstances et selon quelles modalités il vaudrait mieux s'aligner sur d'autres instances qui ont des normes élevées en matière de réglementation.

Des objectifs à long terme devraient être fixés afin que les Canadiens fassent le meilleur usage possible des connaissances et de la capacité réglementaire acquises dans d'autres instances. Le Canada doit déterminer dans quelles circonstances une coopération internationale permettrait de mieux surmonter des défis communs en matière de réglementation. Pour qu'il y ait une coopération mutuelle, le Canada doit être en mesure de faire valoir ses capacités d'évaluation réglementaires auprès d'autres pays, et ceux-ci réciproquement, ce qui pourrait être fait par le biais de mesures d'instauration de la confiance (voir la partie I, section 3.1, « Coopération internationale en matière de réglementation »). En bout de ligne, Santé Canada devrait viser à établir des relations de confiance avec des organismes de réglementation comparables, qui lui permettraient d'adopter les décisions d'autres instances dans certaines circonstances.

Recommandation 44 : Le gouvernement fédéral devrait développer son cadre de coopération internationale en matière de réglementation des produits thérapeutiques en y intégrant des objectifs à court et à long termes et des échéanciers. Il devrait ensuite le mettre en oeuvre dans les plus brefs délais de manière à atteindre un degré de performance qui rende compte de pratiques exemplaires internationales.

Recommandation 45 : Le gouvernement fédéral devrait concentrer ses efforts à court terme sur la mise en place de mesures visant à utiliser des données et des examens provenant d'autres instances, lorsqu'un processus canadien indépendant n'améliore pas la qualité des résultats. Ses efforts à long terme devraient être axés sur la mise en place de mécanismes visant à permettre aux Canadiens de profiter le plus possible des connaissances et des capacités de réglementation d'autres instances, afin d'accélérer le processus d'accès à de nouveaux produits thérapeutiques.

Indemnité des fonctionnaires

Santé Canada, et l'ensemble du gouvernement, peuvent faire l'objet d'une poursuite concernant des actes posés ou des omissions commises par leurs employés. De telles poursuites ont un impact sérieux sur la culture organisationnelle et peuvent entraîner la crainte du risque et la résistance au changement, notamment à la lumière du nombre croissant de poursuites liées à des produits thérapeutiques mettant le gouvernement en cause. L'établissement de certaines mesures d'immunité pour les organismes de réglementation et leurs employés pourrait être opportun dans certaines circonstances, par exemple lorsque l'organisme de réglementation exerce ses responsabilités pour le bien de la population.

D'autres organismes de réglementation importants, tels que la Food and Drug Administration des États-Unis et la Therapeutic Goods Administration de l'Australie, prévoient des mesures d'immunité contre les poursuites, lorsqu'ils peuvent prouver que leur devoir envers la population a été rempli.

Recommandation 46 : Dans le cadre du renouvellement de la Loi sur les aliments et drogues et d'autres lois concernant la protection de la santé, Santé Canada et le ministère de la Justice devraient déterminer quelles sont les mesures d'immunité les plus pertinentes pour eux et leur personnel et en recommander l'adoption. L'approche recommandée devrait prendre en compte la protection offerte aux autres grands responsables de la réglementation des produits thérapeutiques, dont la Food and Drug Administration des États-Unis et la Therapeutic Goods Administration de l'Australie.

Contrôle du prix des médicaments sans ordonnance

En vertu de la Loi sur les brevets et du Règlement sur les médicaments brevetés, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés (CEPMB) protège les consommateurs contre les prix excessifs des médicaments brevetés. Bien que le terme « médicament » ne soit pas défini dans la Loi, une jurisprudence volumineuse s'y rapportant, couplée à la définition qu'en donne le CEPMB dans ses documents de politiques générales d'orientation, décrit généralement bien les produits pharmaceutiques qui sont soumis à l'approbation de mise en marché de Santé Canada. Parmi ces produits, la Loi n'établit pas de distinction entre les médicaments avec et sans ordonnance, le CEPMB non plus.

Le CEPMB a actuellement la responsabilité de passer en revue un certain nombre de produits médicamenteux sans ordonnance. Une association représentant certains fabricants de médicaments sans ordonnance soutient depuis un certain temps que les produits médicamenteux sans ordonnance (en vente libre) ne devraient pas être visés par des mesures de contrôle des prix ou par la réglementation dans un cadre fondé sur les plaintes afin de réduire le fardeau de la conformité. Elle soutient en outre que ces produits sont offerts dans un marché de consommation ouvert et concurrentiel où les consommateurs eux-mêmes peuvent choisir d'acheter ou non un produit.

La difficulté quant à savoir s'il faut donner suite ou non à cet argument consiste premièrement à préciser qui est responsable de la politique. Le ministre de l'Industrie surveille l'application de la Loi sur les brevets. Or, en vertu de l'article 79 de la Loi, le ministre de la Santé est chargé de l'application des articles 79 à 103 de la Loi (à savoir les articles relatifs au CEPMB). Le ministre de l'Industrie, par conséquent, ne peut apporter de modification au mandat du CEPMB que sur l'avis du ministre de la Santé ou de concert avec ce dernier. En outre, le CEPMB établit ses propres lignes directrices et procédures opérationnelles, et peut formuler des recommandations au titre de modifications à la réglementation, mais la modification du Règlement sur les médicaments brevetés est du ressort du ministre de la Santé. Si des changements devaient être apportés aux dispositions de la Loi sur les brevets visant le CEPMB, il faudrait que le ministre de la Santé, conjointement avec le ministre del'Industrie ou le CEPMB selon le cas, intervienne.

Pour accroître la transparence, il importe de préciser les rôles, les responsabilités et l'imputabilité. Il pourrait y avoir aussi lieu de désigner une seule instance à laquelle les parties concernées devraient s'adresser, si la faisabilité d'une telle mesure était démontrée.

1.1.4 Renseignements concernant les substances nouvelles

L'industrie manufacturière des produits chimiques est un secteur important de l'économie du pays puisque ces produits constituent les composantes de base pour un grand nombre d'entreprises canadiennes. L'industrie des produits chimiques est le quatrième secteur manufacturier d'importance au pays; il vient en sixième place pour sa contribution à la santé économique du Canada. Quelque 83 000 Canadiens travaillent dans cette industrie, qui offre des emplois très spécialisés et très bien rémunérés comparativement à d'autres secteurs de l'économie canadienne.25

La réglementation canadienne régissant ce secteur est comprise dans la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) (LCPE 1999). Cette loi a pour objectif de contribuer au développement durable par la prévention de la pollution et de protéger l'environnement et la santé humaine contre les risques liés aux substances toxiques. En application de la LCPE 1999, le Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles s'assure que toute nouvelle substance importée ou fabriquée au Canada est évaluée « du début à la fin » et ne pose pas de risques à la santé des citoyens ou à l'environnement.

Toujours en vertu de la LCPE 1999, une substance est « nouvelle » si elle n'apparaît pas sur la Liste intérieure des substances (LIS)26. Environnement Canada et Santé Canada se fient aux renseignements fournis par les demandeurs et à d'autres sources d'information et mènent une évaluation conjointe pour déterminer les risques que pourrait poser la substance à l'environnement ou à la santé humaine. Les mesures relatives à la gestion du risque sont utilisées lorsque cela est approprié. Les évaluations durent généralement de 5 à 90 jours

Principaux enjeux

Étant donné la taille et la dynamique du marché américain, la plupart des produits chimiques nouveaux en Amérique du Nord sont développés aux États-Unis. Il y a un partage considérable de l'information relative aux évaluations entre les organismes de réglementation du Canada et des États-Unis, mais les deux pays appliquent un régime distinct pour l'évaluation des substances chimiques nouvelles. Les produits chimiques approuvés pour utilisation aux États-Unis doivent donc subir des évaluations distinctes au Canada et vice versa. Dans un marché nord-américain intégré, cette situation pourrait avoir des incidences négatives sur la compétitivité des fabricants canadiens primaires de produits chimiques, mais également sur celle des transformateurs secondaires qui incorporent les produits chimiques dans les produits de consommation et les produits industriels. Les entreprises de produits chimiques desservent de plus en plus un marché nord-américain et mondial et considèrent comme des obstacles non tarifaires aux échanges les différences entre les systèmes réglementaires nationaux. Elles veulent avoir accès à un inventaire d'intrants chimiques qu'elles peuvent utiliser et expédier n'importe où.

Le régime canadien sur les substances nouvelles oblige le demandeur à fournir les données d'essais et d'autres renseignements pour l'évaluation du produit chimique. Le régime précise quels sont les données d'essais et autres renseignements requis, et il rattache la quantité et le genre des données au volume proposé, au risque afférent et au potentiel d'exposition. Si l'évaluateur croit que certaines données d'essais sont inutiles ou impossibles à obtenir, il peut déroger à la règle, ce qui arrive souvent. Les données d'essais, les analyses de modélisation et tous les autres renseignements d'évaluation qui sont publiés sont utilisés par Environnement Canada et Santé Canada pour évaluer la toxicité potentielle de la substance et ses effets probables selon divers scénarios d'exposition.

La Toxic Substances Control Act (TSCA) administrée par la Environmental Protection Agency (EPA) des États-Unis n'impose de données d'essais de l'industrie que si le demandeur possède déjà de telles données. Dans la majorité des déclarations, l'EPA recourt à la modélisation informatique pour obtenir des données complémentaires lorsqu'elle évalue les effets potentiels des produits chimiques nouveaux sur la santé et l'environnement. Une autre différence importante entre l'approche des États-Unis et celle du Canada, concerne la disposition de la TSCA qui stipule que l'EPA doit montrer qu'un produit chimique présente ou présentera un risque « excessif » avant de pouvoir le réglementer.

Bien que la politique actuelle reçoive l'appui de nombreuses parties concernées au Canada27, un segment du secteur chimique canadien soutient que le Canada devrait généralement accepter les résultats des évaluations effectuées aux États-Unis, à moins que les produits chimiques en question ne soient destinés à des usages ou à des degrés d'exposition différents dans les deux pays. En attendant d'avoir plus facilement accès à la documentation et aux renseignements relatifs aux évaluations effectuées aux États-Unis, le gouvernement fédéral a décidé de ne pas adopter une telle approche, car il est d'avis qu'elle ne lui permettrait pas de répondre aux appels en faveur d'une imputabilité accrue envers la population canadienne et qu'elle risquerait de se solder par un niveau inacceptable et inférieur de protection de l'environnement et de la santé humaine.

Des points de vue contradictoires ont été formulés au Comité à l'effet que les différences entre les deux régimes en matière de substances nouvelles aient empêché l'accès de l'industrie canadienne aux produits chimiques nouveaux, malgré les différences importantes au niveau des inventaires des deux pays (80 000 substances chimiques aux États-Unis comparativement à 23 000 au Canada). D'une part, le nombre plus élevé de substances chimiques aux États-Unis qu'au Canada semble être davantage fonction de plusieurs facteurs : la taille et la diversité de l'industrie chimique des deux pays; le nombre de substances non évaluées et bénéficiant de droits acquis aux États-Unis; le moment et le mode d'établissement des inventaires et la façon dont ils sont mis à jour (p. ex. les substances nouvelles qui sont aptes à l'emploi ne sont pas ajoutées à l'inventaire intérieur canadien tant qu'un volume donné n'est pas atteint). D'autre part, les représentants de l'industrie des produits chimiques estiment que le Règlement occasionne des délais à l'industrie canadienne en ce qui a trait à l'utilisation d'un nouveau produit chimique et ils affirment que cette situation nuit à la compétitivité du secteur.

Dans certains cas, notons par ailleurs que le Canada utilise les évaluations américaines lorsqu'il prend ses décisions. La Liste extérieure des substances (LES) comporte essentiellement des substances qui n'apparaissent pas sur la Liste intérieure des substances (LIS) du Canada, mais qui sont commercialisées aux États-Unis. Lorsqu'une substance est ajoutée à notre LES, les exigences de déclaration sont moindres que pour la LIS. En vertu de l'Entente Four Corners entre les États-Unis et le Canada (voir ci-après), une compagnie qui présente un produit chimique à l'EPA des États-Unis peut aussi demander que les données d'essais et les résultats soient communiqués au Canada. En outre, à la suite de la révision récente du Règlement, il est prévu de réduire la période d'attente pour ajouter une substance à la LES, actuellement de cinq ans, pour la fixer à un an. Environnement Canada devrait s'assurer de respecter son engagement relatif à l'entrée en vigueur de ces modifications réglementaires d'ici le début de 2005.

Coopération constante entre le Canada et les États-Unis

Le Comité juge très encourageant que le Canada et les États-Unis reconnaissent tous deux l'importance d'une coopération bilatérale dans la tâche consistant à lancer de manière plus efficiente les substances nouvelles sur le marché nord-américain. Les deux pays ont toujours collaboré en ce domaine, grâce à l'échange d'information. Comme il n'est pas dans l'intérêt public que des organismes nationaux mènent chacun de leur côté les mêmes activités, les organismes compétents s'emploient à devenir plus performants dans le lancement de produits chimiques nouveaux sur le marché, tout en veillant à la protection de la santé publique et de l'environnement.

Cette coopération trouve sa consécration dans l'Entente Four Corners entre les États-Unis et le Canada qui fait intervenir les organismes de réglementation fédéraux et les industries chimiques des deux pays. Ses objectifs comprennent le renforcement de la compréhension réciproque des politiques et pratiques des deux pays en matière d'évaluation et de gestion du risque, la définition de stratégies propres à supprimer les obstacles à une coopération accrue, et l'adoption de mesures permettant de progresser vers l'objectif à long terme d'une coopération accrue et d'une harmonisation des régimes canadien et américain de réglementation des substances nouvelles.

Les organismes de réglementation canadiens et américains se sont entendus sur une vision commune dont on pourrait dire qu'elle prend acte des approches de la réglementation intelligente, puisque :

  • chaque pays pourra voir, comprendre et accepter les décisions de l'autre qui visent à protéger la santé humaine et l'environnement;
  • les entreprises pourront soumettre un dossier d'évaluation (renseignements concernant les substances nouvelles), puis, après examen national, mettre le produit sur le marché n'importe où en Amérique du Nord;
  • les produits chimiques approuvés pour utilisation en Amérique du Nord seraient acceptés automatiquement sur le marché des autres pays de l'OCDE;
  • les pays et les entreprises pourront faire un meilleur usage de leurs ressources d'évaluation et améliorer constamment leurs décisions portant sur les produits chimiques nouveaux.

Le gouvernement du Canada élabore actuellement un plan d'action pour réaliser cette vision. Par contre, pour que la vision devienne réalité, chaque gouvernement devra documenter ses décisions relatives à l'évaluation de façon à les rendre plus facilement accessibles aux organismes de réglementation de l'autre pays. Les industries des deux pays devront appuyer les changements relatifs à la protection de la confidentialité et de la propriété des renseignements commerciaux de nature exclusive, ce qui a été par le passé une embûche de taille à une coopération accrue entre les États-Unis et le Canada. Le Comité appuie cette approche.

Le Comité appuie également les efforts déployés par le Canada pour promouvoir l'utilisation des acceptations réciproques des déclarations (Mutual Acceptance of Notifications ou MAN) avec les États-Unis et les autres pays. Comme première étape dans l'atteinte de ce but, les compagnies pourraient présenter une demande selon le processus MAN (sans y être tenues). Elles autoriseraient par le fait même l'échange d'information permettant ainsi aux gouvernements d'évaluer leur dossier et, si cela est pertinent, d'accroître l'information fournie. Le pays qui recevrait la demande en premier étudierait la substance en question, mènerait une évaluation des risques, documenterait et échangerait les résultats. Sur réception de ces renseignements, les autres pays s'engageraient à les utiliser dans leur processus d'évaluation des risques. Tous les pays devraient adopter des mesures pour échanger l'information de façon efficace, sécuritaire et assurer la protection des renseignements commerciaux confidentiels. Au lieu que chacun des pays fasse une évaluation du degré d'exposition et des risques et compare ensuite les résultats, on opterait pour un cadre de travail d'équivalence. Ce dernier comprendrait un arbre de décision justifiant la nécessité ou non d'une nouvelle évaluation du degré d'exposition et des risques.

La conclusion d'un MAN avec l'Europe, qui propose à l'heure actuelle des révisions majeures à sa réglementation de produits chimiques, fournirait une quantité appréciable d'information sur les évaluations pour les programmes relatifs aux produits chimiques existants et futurs. Par conséquent, le Comité reconnaît que l'établissement d'un MAN avec l'Union européenne ou avec d'autres pays nécessitera beaucoup de temps et d'effort.

Ces signes de progrès sont importants, car le Comité croit que le Canada devrait en fin de compte pouvoir se fier sur les évaluations des risques menées par d'autres organismes de réglementation. Tout compte fait, un produit chimique toxique a le même effet sur les humains, les plantes ou les animaux, peut importe l'endroit où il est diffusé. Ce qui diffère, d'un pays à un autre, c'est la quantité qui est diffusée et les éléments qui y sont exposés. Par ailleurs, le devoir de diligence et le fardeau de la preuve propres à chaque gouvernement et les différences dans les lois sont d'autres éléments dont il faut tenir compte.

1.2 Biotechnologie/Sciences de la vie

La révolution industrielle a entraîné de profonds changements. Les progrès réalisés dans le secteur des sciences de la vie pourraient avoir le même impact. Des découvertes scientifiques récentes ont considérablement accru notre capacité d'acquérir de nouvelles connaissances et d'élaborer des produits et des processus innovateurs, tels que des cultures qui résistent aux parasites et donnent un meilleur rendement, des outils de diagnostic médical plus efficaces et des traitements spécifiquement adaptés à la constitution génétique des personnes. Le secteur des sciences de la vie est fondé sur la recherche, il est à fort coefficient de capitaux et ses retombées sont très prometteuses dans des domaines comme les soins de santé, l'environnement, la sécurité, l'agriculture, l'aquaculture, le développement économique, la salubrité des aliments et le développement durable.

La présente section aborde des enjeux relatifs à la biotechnologie. Le Comité est d'avis que l'analyse est pertinente pour d'autres domaines multidisciplinaires en émergence comme la nanotechnologie. Étant donné la nature hautement complexe et la portée de la biotechnologie, le Comité a décidé de se limiter à certains enjeux : une stratégie réglementaire applicable à la biotechnologie, la législation, la coopération internationale, la communication de l'information et la participation des parties concernées. D'autres questions importantes, notamment celles qui touchent l'environnement et l'éthique, pourraient avoir des répercussions sur la nature du futur cadre réglementaire mais n'ont pas fait l'objet d'une recherche approfondie et ne figurent pas dans le plan de travail du Comité.

Le Canada fait bonne figure dans ce domaine à l'échelle internationale : ses recettes liées à la biotechnologie représentent près de 10 % des recettes mondiales et il est, après les États-Unis, le pays où l'on compte le plus grand nombre d'entreprises dans ce secteur. Le gouvernement fédéral a déployé des efforts et fait des investissements importants pour appuyer le développement de la biotechnologie. En 1998, il a mis en place la Stratégie canadienne en matière de biotechnologie qui constitue le fondement de l'action fédérale dans le domaine. Divers comités ont également été institués - notamment le Comité de coordination ministérielle en matière de biotechnologie (CCMB), qui regroupe les ministres de l'Industrie, de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, de la Santé, de l'Environnement, des Pêches et Océans, des Ressources naturelles et du Commerce international - pour superviser l'élaboration et la mise en oeuvre des questions de politique générale associées à la biotechnologie. Par ailleurs, le Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB) est un organisme externe créé dans le but de conseiller le gouvernement.

Le gouvernement fédéral a affecté des ressources considérables à la biotechnologie au cours des dernières années. En 2002-2003, il a consacré 695 millions $ aux dépenses en sciences et technologie de biotechnologie28 (une hausse de 25 % par rapport aux dépenses de 2001-2002). Ce montant tient compte des 9 millions $ réservés annuellement à la Stratégie canadienne en matière de biotechnologie depuis sa création, à savoir les 2,5 millions $ qui sont destinés au CCCB, les 500 000 $ affectés aux activités du Secrétariat canadien de la biotechnologie29, et les 6 millions $ destinés au Fonds de la Stratégie canadienne en matière de biotechnologie pour soutenir les initiatives ministérielles.

La réglementation et la politique en matière de biotechnologie relèvent du mandat de nombreux ministères, notamment Santé Canada, l'Agence canadienne d'inspection des aliments (ACIA) et Environnement Canada. Santé Canada réglemente les produits dérivés de la biotechnologie qui sont sous le régime de la Loi sur les aliments et drogues, à savoir les produits génétiquement modifiés et les autres produits alimentaires nouveaux, les produits biologiques, les technologies de procréation assistée et les produits thérapeutiques. Ce ministère réglemente également les produits de lutte antiparasitaire, en ce qui concerne leurs incidences sur la santé humaine et sur l'environnement, en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires. L'ACIA réglemente quant à elle certains produits dérivés de la biotechnologie, notamment les plantes, les aliments pour animaux et ingrédients d'aliments pour animaux, les engrais et les produits biologiques vétérinaires; elle assure en outre tous les services fédéraux d'inspection et d'application des règlements relatifs aux aliments, y compris les services liés à la Loi sur les aliments et drogues. Enfin, Environnement Canada et Santé Canada réglementent en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) (LCPE 1999) toutes les substances nouvelles à l'exception de celles dont l'usage est réglementé en vertu d'autres lois et règlements fédéraux qui comprennent des évaluations de risque pour l'environnement et la santé. Ces substances nouvelles sont énumérées à l'annexe 4 de la LCPE 1999.

D'autres ministères fédéraux assument d'importantes responsabilités en matière de politique, recherche et réglementation, qui ont une incidence sur la réglementation des produits dérivés de la biotechnologie. Ces ministères incluent Agriculture et Agroalimentaire Canada, Industrie Canada, Justice Canada et le Conseil national de recherches du Canada.

1.2.1 Principaux enjeux

Malgré tous les efforts déployés par le gouvernement fédéral jusqu'à présent, le Comité pense que de nombreux défis se posent toujours. Les 375 entreprises biotechnologiques du Canada30 sont confrontées à des obstacles considérables, par rapport notamment à l'accès au financement de démarrage et à la réalisation des activités de recherche-développement nécessaires pour commercialiser leurs idées et prendre de l'expansion.

Le développement du secteur de la biotechnologie au Canada est également entravé par des obstacles réglementaires de plus en plus complexes. La législation actuelle, qui a été élaborée en majeure partie avant la naissance de la biotechnologie, n'est généralement pas adaptée à ces nouvelles réalités. Les responsables de la réglementation doivent évaluer un grand nombre de produits dont la complexité s'accroît toujours davantage. De plus en plus, ces produits seront multifonctionnels (p. ex. nutriceutiques), découleront de la convergence de plusieurs domaines scientifiques (p. ex. l'utilisation de la nanotechnologie pour l'administration de médicaments) ou, dans le cas des médicaments et des vaccins, dériveront de plantes et d'animaux. En relevant ces défis, le gouvernement fédéral voudra examiner comment tirer le meilleur parti possible de l'investissement canadien en capacités de recherche-développement et établir des relations avec les communautés scientifiques, comme par exemple les universités, les centres d'excellence et les organismes subventionnaires. En outre, le gouvernement doit se pencher sur les questions d'ordre éthique qui sont fréquemment associées à la biotechnologie.

Pour que le Canada puisse jouer un rôle de chef de file dans le domaine de la biotechnologie, il est essentiel que son gouvernement accorde l'importance voulue aux opinions et aux préoccupations de la population canadienne lorsqu'il élabore politiques et règlements dans ce domaine. Cela signifie que le gouvernement doit se pencher non seulement sur des considérations d'ordre scientifique, mais aussi sur des questions d'ordre éthique, et ce d'une manière transparente et inclusive. Cet élément du processus est crucial, puisque la confiance du public est essentielle au succès d'un système réglementaire.

Des sondages récents31 concluent que, de manière générale, les Canadiens ont tendance à appuyer les domaines qui leur sont clairement bénéfiques, mais un très faible pourcentage de Canadiens considèrent qu'ils connaissent très bien la biotechnologie. Par conséquent, un autre important défi à relever pour les responsables de la réglementation consiste à informer les consommateurs au sujet des produits dérivés de la biotechnologie et à les faire participer à l'élaboration des règlements dans ce domaine.

Dans un environnement où un certain nombre de ministères partagent la responsabilité de réglementation, l'imputabilité est parfois imprécise et la collaboration n'est pas toujours efficace. En raison d'une telle situation, les cadres réglementaires, les décisions et l'application de la réglementation risquent de ne pas être toujours cohérents et intégrés.

On mentionne souvent que la biotechnologie est une priorité nationale. Or, le Comité a constaté que cela ne se traduit pas clairement dans les faits. Il a noté l'absence de leadership et d'imputabilité efficaces qui seraient nécessaires pour assurer une approche fédérale concertée à la réglementation du secteur de la biotechnologie et à l'atteinte rapide des objectifs fédéraux en matière de réglementation. Par ailleurs, de nombreuses lacunes subsistent sur le plan législatif et sur celui de l'information, et les cadres législatifs sont dépassés, ce qui a une incidence sur la commercialisation des produits de la biotechnologie et sur l'accès à ces produits. Davantage d'efforts pourraient être consentis afin que la population canadienne soit mieux informée et participe davantage aux discussions sur les questions concernant la biotechnologie.

Stratégie réglementaire fédérale en matière de biotechnologie

Les consultations qui ont abouti à la mise en place, en 1998, de la Stratégie canadienne en matière de biotechnologie (SCB) ont notamment fait ressortir la nécessité d'une meilleure coordination au sein du gouvernement de sorte que les questions touchant de nombreux ministères soient résolues de façon appropriée. Cette rétroaction s'est traduite en un plan d'action comportant dix thèmes clés. Un de ces thèmes avait trait à la nécessité de continuellement améliorer le système réglementaire pour tenir compte de la demande croissante pour de nouvelles applications de la biotechnologie; un autre visait la modernisation des lois canadiennes sur la propriété intellectuelle. Le Comité ministériel de coordination de la biotechnologie (CMCB) a été chargé de surveiller la mise en oeuvre de la stratégie et de se pencher sur les questions qui chevauchaient les mandats de divers ministères. La stratégie n'a malheureusement pas été transposée en un plan de travail établissant avec précision les délais et les responsabilités; elle n'énumérait que des « actions possibles ». C'est pourquoi il est difficile d'évaluer les progrès accomplis.

Six ans plus tard, malgré la mise en place de plusieurs comités au sein de l'industrie et du gouvernement chargés d'assurer, dans la fonction publique fédérale, une approche uniforme et cohérente propre à encourager le développement et l'application de la biotechnologie, il semble qu'on déplore toujours l'absence de leadership efficace et responsable en ce qui concerne les questions de réglementation en la matière. Ainsi, le CMCB, qui est composé de sept ministres, ne s'est réuni qu'une seule fois depuis sa création. Cependant, les hauts fonctionnaires responsables de la réglementation en matière de biotechnologie ont récemment produit un projet fédéral visant à renforcer la position du Canada comme chef de file à l'échelle mondiale dans le domaine de la biotechnologie. Ce projet, actuellement à l'étude, aurait pour but de déterminer la façon optimale de concilier la détection et la gestion du risque avec le développement et la commercialisation de nouvelles découvertes, de manière à ce que les Canadiens profitent de leurs retombées bénéfiques sur les plans de la santé et de l'environnement.

Recommandation 47 : Le gouvernement fédéral devrait en priorité élaborer et mettre en oeuvre une stratégie réglementaire exhaustive à l'échelle gouvernementale en matière de biotechnologie qui :

  • permette de cerner et de combler les lacunes en matière de législation, de mettre en oeuvre une coopération internationale systématique et de fournir une information complète et facile d'accès au sujet des nouveautés en matière de réglementation;
  • détermine des façons d'accéder à l'expertise des communautés scientifiques nationales et internationales et d'en tirer parti;
  • tienne compte des considérations liées à l'éthique;
  • permette l'apport de toutes les parties intéressées et la participation du public;
  • se transpose en un plan de travail détaillé qui permette de mesurer le progrès accompli et d'en faire rapport;
  • soit régulièrement révisée et modifiée en fonction du progrès accompli dans sa mise en oeuvre et des changements rapides caractéristiques du domaine de la biotechnologie;
  • attribue de façon claire et ferme les responsabilités liées à la gestion et à la direction stratégiques.

À noter que nombre des points ci-dessus avaient déjà été soulevés par d'autres organes externes.32

Lacunes sur le plan législatif

La mise en place d'un cadre législatif précis en matière de biotechnologie est une condition essentielle pour que les Canadiens puissent profiter des avantages des produits biotechnologiques et que des entreprises décident d'investir dans la recherche, le développement et la commercialisation de nouveaux produits. Sans cela, le Canada aura beaucoup plus de difficulté à attirer des ressources financières et scientifiques. Le gouvernement fédéral doit également combler dans des délais raisonnables les lacunes courantes et à venir relatives à la réglementation du domaine de la biotechnologie. Il devrait s'assurer, au besoin, de consulter les experts en la matière et le public.

La recherche sur les cellules souches est un domaine où il existe un vide juridique depuis de nombreuses années. Des cellules souches peuvent être cultivées à partir de certains types de tissus, notamment des tissus embryonnaires ou foetaux. Cette recherche offre d'importantes perspectives de traitement de plusieurs maladies humaines, comme la maladie d'Alzheimer, la maladie de Parkinson, le diabète, la sclérose en plaques et les maladies du coeur. Après avoir fait l'objet d'études au Canada pendant plus de dix ans, un projet de loi donnant un cadre législatif à la recherche sur les cellules souches a reçu la Sanction royale le 29 mars 200433. La mise en application de la nouvelle loi aura lieu par étapes. Pendant ce temps, la plupart des autres pays développés ont instauré leurs propres cadres réglementaires. Certains d'entre eux, comme l'Allemagne et l'Irlande, ont interdit la recherche portant sur les embryons alors que d'autres, comme le Royaume-Uni, le Japon et Israël, ont décidé de permettre la création d'embryons pour la recherche. L'absence de réglementation engendre des risques de recherche contraire à l'éthique et est une source d'incertitude sur le marché.

Il existe à l'heure actuelle un certain nombre de lacunes en matière de législation, notamment :

  • Produits biotechnologiques réglementés sous le régime des lois concernant la santé : Les lois actuelles concernant la santé sont en place depuis des dizaines d'années et elles ne constituent pas toujours un cadre réglementaire adéquat en ce qui concerne des produits nouveaux ou d'avant-garde qui présentent à la fois les propriétés des aliments et des médicaments ou qui sont destinés à un sous-groupe très restreint de la population (les produits issus de la recherche pharmacogénomique, par exemple). Le Canada devrait disposer d'un cadre législatif suffisamment souple et prospectif pour régler les questions de réglementation liées aux nouvelles inventions dérivées de la biotechnologie.34 Le gouvernement fédéral a récemment lancé des consultations publiques sur le renouvellement de la législation sur la protection de la santé.

  • Protection de la propriété intellectuelle : La protection de la propriété intellectuelle est importante pour le développement et la commercialisation des produits dérivés de la biotechnologie. L'absence de protection adéquate de la propriété intellectuelle génère une incertitude sur le marché, qui risque d'entraîner un exode de ressources financières et d'experts. Un certain nombre de questions demeurent irrésolues, notamment celle des formes de vie supérieures. Le brevet est l'instrument le plus courant de protection de la propriété intellectuelle des inventions résultant de la recherche biotechnologique. Bien que des centaines de demandes aient été déposées jusqu'à présent, la Cour suprême du Canada a établi, en décembre 2002, que les formes de vie supérieures, c'est-à-dire les plantes, les semences et les espèces non humaines, ne sont pas incluses dans la définition des inventions de la Loi sur les brevets et, en conséquence, ne sont actuellement pas brevetables au Canada, à la différence de tous les autres pays membres du G7 et de la plupart des membres de l'OCDE où leur brevetage est permis. 35 Cependant, il faut signaler qu'en mai 2004, dans une décision rendue à 5 voix contre 4, la Cour suprême a statué que quiconque utilise sans permission des semences ou des plantes contenant des gènes ou des cellules brevetés commet une infraction à la Loi sur les brevets.

  • Législation sur les médicaments orphelins : Les entreprises sont moins portées à investir dans la recherche et la commercialisation de médicaments utilisés dans le traitement de maladies rares dont est atteint un faible pourcentage de la population. Les États-Unis, l'Union européenne, l'Australie et le Japon ont adopté des lois et mis en place des programmes pour combler cette lacune de manière à stimuler l'innovation et à accroître l'offre de médicaments orphelins sûrs à leurs citoyens. Le Canada permet l'accès à des médicaments qui ne sont pas offerts au pays en vertu de règlements et de politiques précises36, mais il n'existe pas de politique ou de loi concernant spécifiquement les médicaments orphelins au Canada. Les politiques sur les médicaments orphelins consentent habituellement aux fabricants l'exclusivité sur le marché et des crédits d'impôt. Un examen complet du médicament doit aussi être effectué avant la mise en marché du produit. Compte tenu des progrès récents en pharmacogénomique selon lesquels on peut maintenant axer un traitement sur des sous-groupes de la population, le temps serait peut-être venu d'envisager l'adoption d'un cadre législatif pour faciliter l'accès à ces médicaments.

Le Comité pense qu'en raison de l'évolution rapide de la biotechnologie, il sera aussi nécessaire d'examiner régulièrement toute réglementation en vigueur afin de s'assurer qu'elle reste appropriée. Il sera essentiel de le faire de façon proactive, systématique et opportune afin d'éviter de procéder à des examens en temps de crise.

Recommandation 48 : Le gouvernement fédéral devrait détecter les lacunes sur le plan législatif qui ont une incidence sur la biotechnologie, puis les combler après avoir établi un ordre de priorité. Comme première étape, il devrait accélérer le renouvellement de la législation concernant la protection de la santé. Pour s'assurer que la législation reste appropriée, il devrait effectuer les examens réguliers prévus dans la loi ou dans le mandat des ministères concernés. Il devrait, au besoin, consulter des scientifiques indépendants et le public dans le cadre de ces examens.

Coopération internationale

Le Comité est d'avis que la réglementation intelligente en matière de biotechnologie suppose qu'on ait recours de manière plus stratégique à la coopération internationale, tel que mentionné dans la section précédente du présent document. Les principes définis dans la section 3.1 de la partie I, « Coopération internationale en matière de réglementation », peuvent s'appliquer aux produits et processus dérivés de la biotechnologie. Le Canada pourrait collaborer avec d'autres pays en vue de l'adoption d'approches communes ou partagées en matière d'évaluation, d'approbation et d'examen après la commercialisation des produits biotechnologiques, et ce de manière systématique et cohérente d'un ministère à l'autre.

Le Comité croit aussi que le Canada devrait jouer un rôle de premier plan à l'échelle internationale dans certains domaines de la biotechnologie. Dans cet environnement en perpétuelle évolution, les découvertes canadiennes dérivées de la biotechnologie peuvent parfois précéder l'élaboration d'un cadre législatif international. Dans de tels cas, si ces percées peuvent lui donner un avantage comparatif dans le développement ou la commercialisation d'un produit dérivé de la biotechnologie, le Canada devrait prendre les devants, à l'échelle internationale, dans l'élaboration de la réglementation en matière de biotechnologie.

L'expérience récente dans le domaine de la biotechnologie alimentaire montre comment le gouvernement fédéral a joué un rôle de premier plan sur la scène internationale, tant en définissant des normes qu'en s'efforçant d'atteindre une harmonisation à l'échelle internationale (voir l'encadré).

Recommandation 49 : Le gouvernement fédéral devrait participer activement et s tratégiquement aux efforts internationaux de collaboration en matière de réglementation qui ont une incidence sur la biotechnologie. Il devrait en outre encourager des experts étrangers et canadiens à participer à des examens indépendants par les pairs, à des évaluations du risque et à des analyses de la réglementation. De plus, il devrait cerner les domaines où le Canada aurait intérêt à jouer un rôle de premier plan en matière de réglementation et s'attacher activement à atteindre cet objectif.

Le rôle de la réglementation canadienne sur la scène internationale - L'expérience en biotechnologie alimentaire

L'agroalimentaire est un secteur important et novateur de l'économie canadienne. Dans le domaine de la biotechnologie appliquée aux cultures vivrières, les percées réalisées par le gouvernement, le milieu universitaire et l'industrie se sont traduites par une capacité enviable en matière de développement de produits. Étant donné qu'on ne peut tirer le plein bénéfice de ces innovations que si on dispose d'un processus d'intendance sur le plan de la réglementation qui donne accès en temps opportun aux marchés, il est clair qu'il est dans l'intérêt du Canada de mettre en oeuvre un solide cadre réglementaire applicable à la biotechnologie alimentaire. Au-delà de la pertinence de l'intendance interne sur le plan de la réglementation, l'importance des exportations agroalimentaires du Canada plaide pour qu'il joue un rôle de premier plan à l'échelle mondiale afin d'augmenter l'influence du Canada dans l'harmonisation internationale des normes réglementaires qui protègent adéquatement les consommateurs tout en procurant un environnement de réglementation international cohérent, prévisible et fondé sur des faits.

C'est pourquoi Santé Canada a décidé de jouer un rôle de chef de file relativement au Codex Alimentarius (l'agence internationale qui définit les normes applicables à l'alimentation) en définissant une orientation pratique et des normes internationales pour l'évaluation de la salubrité des aliments dérivés de la biotechnologie. Dès le départ, Santé Canada a projeté sur la scène internationale son expertise interne en participant systématiquement aux consultations d'experts internationaux. Les lignes directrices canadiennes figurent parmi les premières méthodes complètes d'évaluation scientifique à avoir été publiées. L'expérience et l'expertise du Canada dans l'évaluation des plantes génétiquement modifiées ont fourni une preuve tangible de l'efficacité des nouveaux principes scientifiques. La méthode canadienne était donc dans une position avantageuse pour servir de modèle à l'élaboration d'une norme internationale, adoptée par le Codex en 2003; elle guide maintenant l'harmonisation, à l'échelle mondiale, des exigences en matière de sécurité alimentaire.

Information sur la biotechnologie et participation des citoyens

La mise en oeuvre d'une législation appropriée est de toute évidence nécessaire. Il faut aussi fournir au public, à l'industrie et aux autres responsables de la réglementation des explications et des renseignements compréhensibles. Des sondages récents37 confirment que seulement 16 % des Canadiens considèrent être très au courant des questions concernant la biotechnologie. Ce manque de connaissances pourrait avoir une incidence négative sur l'acceptation des produits par la population, même si ces produits ont fait l'objet d'une évaluation sérieuse du risque. Cette situation limite aussi la compréhension des initiatives prises par le Canada à l'échelle internationale sur des questions précises liées à la biotechnologie, y compris les organismes génétiquement modifiés (OGM). Il est en outre essentiel que les entreprises - surtout les petites entreprises et les entreprises en démarrage - aient accès à de l'information claire sur la réglementation. Enfin, une source d'information à jour et accessible sur ce vaste domaine aiderait les responsables fédéraux de la réglementation en matière de biotechnologie.

Alors qu'on dispose de certains renseignements en provenance de diverses sources fédérales, on déplore actuellement l'absence d'une source d'information globale, conviviale et à jour sur les progrès en matière de réglementation applicable à la biotechnologie. Le Comité pense qu'il est essentiel que le gouvernement informe mieux toutes les parties concernées. Ce faisant, il fournirait aux citoyens les connaissances nécessaires à leur participation éclairée au processus législatif et en améliorerait la transparence. Il viendrait aussi en aide aux entreprises biotechnologiques canadiennes qui veulent mettre sur le marché de nouveaux produits et de nouveaux procédés.

Le Comité consultatif canadien de la biotechnologie avait d'ailleurs recommandé, dans son rapport publié en août 2002 intitulé Améliorer la réglementation des aliments génétiquement modifiés et des autres aliments nouveaux au Canada, la mise sur pied d'un service centralisé d'information pour les consommateurs. En août 2004, le gouvernement fédéral n'avait toujours pas répondu officiellement au rapport.

Le Royaume-Uni a adopté une nouvelle approche pour informer les biotechnologistes et « les esprits curieux de tous horizons professionnels » : le Biotechnology Regulatory Atlas38. Il s'agit d'un système efficace d'extraction de données qui permet de localiser les lois et contient des instructions officielles, des explications et des commentaires sur les questions entourant la biotechnologie. Il décrit les règlements généraux et les règlements sectoriels, y compris les exigences auxquelles les entreprises doivent se conformer (p. ex. préparer des évaluations du risque, tenir des dossiers, aviser les autorités, obtenir des permis). Il contient pour l'ensemble des parties concernées de l'information utile sur les tendances législatives, les débats actuels et les perspectives internationales. Le Biotechnology Regulatory Atlas contient également de l'information sur des sujets tels que stratégie et société, propriété intellectuelle, sécurité et bien-être, usages confinés des OGM, génétique humaine et thérapie, et alimentation et agriculture.

Le gouvernement fédéral devrait non seulement fournir de l'information pertinente, accessible et à jour, mais aussi faire en sorte de créer des occasions de communiquer avec les citoyens, l'industrie, et les gouvernements provinciaux et territoriaux de manière à favoriser une meilleure compréhension des perspectives de tous et chacun. Compte tenu des importantes incidences d'ordre éthique, social, environnemental et économique de la biotechnologie, le gouvernement devrait travailler activement à susciter la participation des citoyens et des autres parties concernées, et à favoriser le débat public dans ce domaine.

Recommandation 50 : Le gouvernement fédéral devrait mettre en oeuvre une stratégie de communication améliorée qui comporterait un service d'information par Internet accessible destiné aux consommateurs et à l'industrie, semblable au Biotechnology Regulatory Atlas du Royaume-Uni, et informer efficacement le public-cible de l'existence et des avantages d'un tel service.

Recommandation 51 : Le gouvernement fédéral devrait concevoir et mettre en oeuvre une méthode complète et perfectionnée visant à susciter la participation des citoyens et d'autres parties intéressées sur des questions d'intérêt public concernant la biotechnologie. Cette méthode devrait notamment comprendre l'échange de l'information sur les observations scientifiques les plus récentes et l'analyse de la gestion du risque.

1.3 Développement économique des Premières nations

Un nombre croissant de collectivités des Premières Nations font la promotion d'initiatives de développement économique et cherchent à gérer elles-mêmes leurs terres et leurs ressources. Des projets dans différents secteurs - exploitation des ressources minières, forestières, pétrolières et gazières, aquaculture, etc. - sont en cours sur les terres de réserve d'un bout à l'autre du Canada. Ces activités ont pour objet de renforcer les économies autochtones et d'accroître l'autonomie économique des Premières nations.

Toutefois, le régime réglementaire en vigueur dans les réserves, complexe et mal défini, fait obstacle. La majorité des règlements sont établis en vertu d'une loi qui est entrée en vigueur en 1876 et dont la dernière mise à jour d'importance a eu lieu en 1951, la Loi sur les Indiens. Les efforts déployés pour remédier à la situation progressent beaucoup trop lentement de l'avis du Comité, qui souligne d'ailleurs que bon nombre des mêmes problèmes avaient déjà été soulevés en 1996 dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Le gouvernement doit mettre en place sans tarder un régime réglementaire moderne et efficient qui favorise le développement et instaure un environnement plus sain pour les entreprises et les investissements dans les réserves. Conformément à l'énoncé de vision du Comité, une coopération accrue entre les Premières nations, les gouvernements et le secteur privé serait un élément clé de ce nouveau régime.

Entrepreneurs autochtones au Canada

L'entrepreneuriat autochtone représente un segment de plus en plus dynamique de l'économie canadienne. Le nombre d'emplois autonomes est en constante augmentation dans les milieux autochtones. D'après le Recensement de 2001, l'augmentation du nombre d'emplois autonomes a été dix fois plus élevée chez les Autochtones entre 1996 et 2001 que chez les non-Autochtones.

Les économies autochtones contribuent de plus en plus aux économies provinciales, régionales et nationales. Durant la dernière décennie, on a pu observer une nette augmentation du nombre de projets de création ou d'expansion d'entreprises et de projets exécutés conjointement avec de grandes entreprises canadiennes ou internationales. C'est ainsi, par exemple, que les Premières nations participent à des initiatives industrielles de premier plan, surtout dans le secteur très dynamique des ressources naturelles (pétrole et gaz, hydroélectricité, forêts, mines). Afin de profiter au maximum de ces projets d'exploitation et pour en assurer le succès, les Premières nations doivent pouvoir compter sur des arrangements préétablis en matière de réglementation, qui prévoient des mesures visant à renforcer leurs capacités. (Ces questions sont traitées de façon détaillée plus loin dans la partie II).

Le développement économique des Premières nations présente des avantages importants pour le Canada : création d'emplois, diversification des compétences à l'intérieur des réserves, création de richesses et réduction possible des recours au filet de sécurité sociale. C'est la clé d'une meilleure qualité de vie pour les citoyens autochtones et de leur participation plus active à l'économie canadienne.

1.3.1 Dispositions réglementaires et principaux enjeux

Des contraintes de temps et de ressources ont empêché le Comité d'approfondir tous les aspects de la réglementation qui sont propres aux Autochtones. Le présente section est principalement consacrée au régime qui s'applique aux collectivités des Premières nations situées au sud du 60e parallèle, en particulier à ce qui a trait à la gestion des terres et des ressources.

Les dispositions réglementaires relatives aux terres et aux ressources des Premières nations sont différentes selon la situation géographique de la Première nation concernée et l'administration en cause. Dans le Nord, la gestion des ressources relève d'un cadre législatif qui s'applique à tous les habitants, membres des Premières nations et autres. Il existe d'autres variantes, selon que l'on a réglé des revendications territoriales globales ou passé des ententes concernant l'autonomie gouvernementale (qui confèrent aux Premières nations un pouvoir de réglementation dans certains domaines). Certains aspects de la réglementation dans le Nord sont approfondis plus loin dans la partie II, section 1.5, « Exploration et mise en valeur des ressources pétrolières et gazières ».

La gestion des terres et des ressources au sud du 60e parallèle est régie principalement par la Loi sur les Indiens et par la Loi sur le pétrole et le gaz des terres indiennes, toutes deux administrées par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC). Cinq groupes ont accédé à une autonomie gouvernementale totale ou partielle, mais la majorité d'entre eux sont toujours assujettis aux règlements administrés par le MAINC et d'autres ministères fédéraux.

Le Comité s'est intéressé principalement à trois enjeux clés liés au développement économique des Premières nations au sud du 60e parallèle :

  • la mise à jour des dispositions législatives et réglementaires;
  • la simplification de la réglementation et l'allégement du fardeau qu'elle représente;
  • l'accroissement de la capacité de gestion en matière de réglementation.

Mise à jour des dispositions législatives et réglementaires

On s'accorde généralement à reconnaître que la Loi sur les Indiens est dépassée et que ses dispositions au chapitre du développement économique sont limitées. Le processus d'approbation des projets de développement, établi en vertu des règlements d'application de la Loi, est lourd et très long. Il faut parfois des années pour qu'un projet soit approuvé, ce qui se traduit par la perte d'occasions, d'emplois ou de possibilités de croissance économique.

La Loi sur la gestion des terres des Premières nations (LGTPN) a été adoptée en 1999 afin de combler les lacunes de la Loi sur les Indiens au chapitre de la gestion des terres et des ressources. Elle donne aux Premières nations signataires la liberté et la responsabilité de gérer leurs terres de réserve, les ressources naturelles qui s'y trouvent et les recettes qu'elles peuvent tirer de leur exploitation. Elle leur permet, par exemple, d'adopter leur propre code foncier ainsi que d'adopter leurs propres lois et règlements sur leur territoire et de veiller à leur application.

La création de la LGTPN a marqué un pas important sur la voie du développement économique des Premières nations. Cela dit, les progrès demeurent lents. Lors de l'adoption de cette législation, le Parlement a recommandé d'en limiter l'application initiale à un petit nombre de bandes afin que la mise en oeuvre se déroule de manière ordonnée et efficace. Actuellement, 12 des 629 Premières nations sont sous le régime de la LGTPN, 24 sont en voie d'y être et 52 sont en attente. La vaste majorité des bandes sont toujours assujetties aux règlements d'exécution de la Loi sur les Indiens, et à la cadence actuelle, il s'écoulera de nombreuses années avant qu'elles puissent accéder au régime de la LGTPN. Le Comité est d'avis que des mesures vigoureuses s'imposent pour remédier à cette situation. Le gouvernement fédéral devrait revoir son approche de sorte que toutes les bandes puissent sans tarder bénéficier d'un processus réglementaire plus rapide et plus efficace, conformément aux principes de la réglementation intelligente.

On relève également dans les réserves des lacunes réglementaires graves qui contribuent à l'incertitude sur le plan réglementaire et peuvent faire obstacle à l'investissement. Les Premières nations qui veulent élaborer des projets commerciaux et industriels sur les terres de réserve ne peuvent aller de l'avant avec des projets de plus grande envergure en raison de l'absence des règlements nécessaires (p. ex. en matière de santé et de sécurité, de protection de l'environnement et de mise en exécution). La législation fédérale actuelle ne contient pas ou ne prévoit pas de dispositions réglementaires pour les projets de ce type. Et la réglementation provinciale, qui régit la majeure partie des autres projets de développement industriels et commerciaux au Canada, ne s'applique pas sur les réserves à cause du partage constitutionnel des responsabilités en ce qui concerne les Premières nations. Le MAINC étudie diverses possibilités en vue de régler cette situation, y compris celle d'intégrer les règlements provinciaux par renvoi.

Recommandation 52 : Le gouvernement fédéral doit rapidement mettre en place un environnement réglementaire efficient et mieux adapté aux réalités dans les collectivités des Premières nations, ce qui leur permettrait de réaliser leur plein potentiel de croissance économique. La nouvelle approche devrait prévoir des partenariats renouvelés avec les Premières nations, les autres ordres de gouvernement et l'industrie.

Recommandation 53 : De concert avec les Premières nations, le gouvernement fédéral devrait accélérer les efforts en cours pour modifier les dispositions législatives actuelles ou pour en adopter de nouvelles, au besoin, de manière à permettre aux bandes de bénéficier dès que possible d'un régime de réglementation moderne. En outre, le gouvernement fédéral devrait combler sans tarder les lacunes de la réglementation qui entravent l'élaboration de projets commerciaux et industriels dans les réserves.

Simplification de la réglementation et allégement du fardeau qu'elle représente

Outre le MAINC, plusieurs ministères et organismes fédéraux ont des responsabilités en matière de réglementation qui touchent les Premières nations, notamment Pêches et Océans Canada, Environnement Canada, Ressources naturelles Canada, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, Santé Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada. Cette situation donne lieu à un réseau complexe de règlements et de régimes d'administration. Elle impose par conséquent un lourd fardeau aux collectivités des Premières nations dont environ la moitié comptent moins de 500 membres. Par ailleurs, certains règlements provinciaux et territoriaux, notamment les règlements d'application générale, visent aussi les Premières nations.

La nature et la portée entières de l'activité de réglementation locale restent inconnues pour l'heure, faute d'un processus ou de quelque autre mécanisme fédéral permettant d'obtenir ce genre d'information et de coordonner cette activité. C'est là un aspect essentiel à la mise en place d'un régime de réglementation intelligente. Le gouvernement fédéral devrait veiller à ce que les règlements appliqués sur le territoire des réserves soient adéquats et bien coordonnés, et qu'ils ne constituent pas pour les collectivités un fardeau trop lourd à porter. Dans cette optique, il conviendrait d'envisager sérieusement de faire participer les Premières nations à l'élaboration ou à la modification des principaux textes législatifs fédéraux (dont la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) et la Loi sur les espèces en péril). De plus, le gouvernement devrait maximiser la contribution des organismes de consultation comme le Conseil national de développement économique des Autochtones. Le Comité croit qu'il deviendra de plus en plus important au fil des ans de conclure avec les collectivités des ententes bien coordonnées en matière de réglementation ainsi que d'éliminer les chevauchements, au fur et à mesure que s'allongera la liste des Premières nations ayant accédé à l'autonomie gouvernementale.

Recommandation 54 : Le gouvernement fédéral devrait passer en revue l'ensemble des règlements touchant les Premières nations, dans le but d'alléger le fardeau réglementaire et administratif qui peut en découler pour elles. Tous les règlements désuets ou faisant double emploi devraient être éliminés et toutes les lacunes réglementaires devraient être corrigées. À l'appui de cette initiative, le gouvernement devrait mettre en place un processus ou un mécanisme centralisé visant à permettre une meilleure coordination et un meilleur suivi des activités réglementaires dans les collectivités.

Accroissement de la capacité de gestion en matière de réglementation

La façon dont les bandes font respecter et administrent les règlements est un autre volet important de la question. Des initiatives sont en cours au MAINC dans le but de renforcer les compétences et les qualifications professionnelles des collectivités et des gouvernements des Premières nations en matière de gestion des terres et des ressources. Le Comité y voit une condition essentielle à l'application des principes de la réglementation intelligente dans ces collectivités.

On a déjà mis en place diverses organisations ou institutions qui reconnaissent aux Premières nations un pouvoir de réglementation dans certains secteurs ou qui leur confèrent à tout le moins un rôle prépondérant à jouer de concert avec le MAINC. De plus, de nouvelles mesures législatives sont en voie d'élaboration au MAINC. Elles accorderaient aux Premières nations des responsabilités supplémentaires et permettraient en outre d'accroître la capacité dans les réserves. Le Conseil des ressources indiennes, le Conseil consultatif des Premières nations sur les terres, la National Aboriginal Land Management Association et l'Aboriginal Environmental Network pourraient constituer la base d'ententes plus formalisées qui donneraient aux Premières nations et à leurs institutions un contrôle accru et une orientation plus précise.

Recommandation 55 : Le gouvernement fédéral devrait accélérer la mise en oeuvre d'initiatives propres à accroître les compétences et la capacité des Premières nations en matière d'élaboration de règles et de gestion de règlements. Une étape déterminante consisterait à ce que le gouvernement donne priorité à l'élaboration de mesures législatives appropriées qui aideraient à renforcer les compétences professionnelles dans les collectivités des Premières nations.

1.4 Processus d'évaluation environnementale

En vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCEE), l'évaluation environnementale est un outil de planification de projet utilisé pour aider à éliminer ou à réduire les dommages potentiels à l'environnement découlant de la délivrance d'un permis du gouvernement fédéral, lorsque ce dernier est un promoteur du projet ou qu'il le subventionne ou que ce projet prend place sur un terrain domanial. De façon plus générale, l'évaluation soutient les efforts de développement durable.

La LCEE, administrée par l'Agence canadienne d'évaluation environnementale39, prévoit quatre types d'évaluation : l'examen préalable, l'étude approfondie, la médiation et l'évaluation par une commission d'examen. La grande majorité des projets (plus de 99 % des projets évalués) subissent un examen préalable. Le Règlement sur la liste d'étude approfondie en vertu de la LCEE vise les projets qui pourraient avoir une incidence considérable sur l'environnement et qui, par conséquent, doivent être examinés en profondeur. Les principales différences entre les examens préalables et les études approfondies sont la complexité et la longueur du processus, ainsi que l'étendue des consultations publiques, qui sont plus importantes dans le cas des études approfondies que dans le cas des études préalables. Généralement, les examens préalables durent quelques mois, les études approfondies environ un an, et les examens par une commission parfois plus d'un an.

Les préoccupations de la population et la possibilité d'impacts négatifs sur l'environnement sont généralement les deux principaux facteurs pris en compte pour déterminer le type d'évaluation qui sera utilisé. Les responsables de la réglementation et les autres décideurs gouvernementaux doivent étudier dans quelle mesure ces deux facteurs justifient la tenue d'une évaluation plus approfondie par un médiateur ou une commission d'examen. Les responsables de la réglementation ont le pouvoir de s'assurer que les projets qui touchent la population sont soumis à une commission d'examen, ou font l'objet de consultations publiques.

Les évaluations environnementales fédérales sont généralement conçues de façon à se conclure par l'énoncé des mesures à adopter pour réduire les conséquences potentiellement néfastes pour l'environnement, plutôt que par l'annulation d'un projet. Toutefois, le Comité s'est rendu compte que les citoyens percevaient les évaluations environnementales comme des outils d'approbation de projets de facto du gouvernement fédéral, plutôt que strictement comme des outils de planification.

Le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ont des responsabilités en matière d'évaluation environnementale. Ces responsabilités se chevauchent et varient considérablement. Par exemple, les provinces se chargent des projets qui concernent les ressources naturelles de leur territoire, tandis que le gouvernement fédéral est responsable de projets dans divers secteurs dont ceux qui ont des répercussions sur l'habitat des poissons et sur les eaux navigables, ou encore, qui ont d'importantes incidences néfastes dans plus d'une province ou d'un pays. L'utilisation des évaluations environnementales peut varier selon le gouvernement en cause. En Saskatchewan, par exemple, le processus d'évaluation environnementale n'est pas seulement utilisé comme outil de planification, mais il fait partie intégrante du processus de planification de l'élaboration de projets et de leur approbation.

1.4.1 Principaux enjeux

Le Comité reconnaît que la législation fédérale en matière d'évaluation environnementale a été révisée en 2003, après un vaste processus de consultation. On ne dispose donc pas encore de données suffisantes pour savoir à quel point les révisions permettent de résoudre les problèmes (voir l'encadré sur la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale). Par conséquent, l'Agence devrait accélérer la mise en application de la nouvelle législation. Il faut cependant signaler que les amendements récents à la LCEE ont laissé certains points en suspens, principalement lorsqu'il n'y avait pas de consensus sur la façon de procéder (p. ex., les mécanismes de mise en application, le principe d'autoévaluation, etc.).

Révisions à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (2003)

Le projet de loi C-9 a apporté diverses modifications à la LCEE  :

  • la création du rôle de coordonnateur fédéral de l'évaluation environnementale;
  • le mandat d'établir un programme d'assurance de la qualité pour examiner les évaluations fédérales;
  • l'obligation de créer une base de données Internet sur toutes les évaluations environnementales fédérales;
  • des programmes de suivi obligatoire pour des projets déterminés;
  • des outils pour traiter avec efficience les projets ayant des effets négligeables;
  • un processus d'étude approfondie plus certain;
  • un plus grand nombre de possibilités de participation publique au processus d'étude approfondie, appuyées par l'octroi d'une aide financière aux participants;
  • le recours aux études environnementales régionales.

D'autres modifications aux règlements et aux politiques sont en cours pour compléter celles apportées par la loi, notamment :

  • un engagement pangouvernemental à s'attaquer au problème de la mise en train des processus ministériels d'évaluation environnementale à un stade avancé de la planification d'un projet (déclenchement tardif), par l'instauration d'un système selon lequel le ministère concerné serait automatiquement mis à contribution dès le début du projet;
  • des ajouts au Règlement sur la liste d'exclusion pour exempter des projets dont on sait qu'ils auront des effets négligeables;
  • des révisions du Règlement sur la coordination fédérale pour refléter le nouveau rôle de coordonnateur fédéral de l'évaluation environnementale dans la Loi.

Les modifications à la LCEE ont été adoptées par suite de consultations de multiples parties concernées. Les exemples suivants illustrent comment les changements répondent à certaines des préoccupations soulevées par diverses parties  :

  • Pour répondre aux préoccupations des organisations non gouvernementales actives dans le domaine de l'environnement et des collectivités, on a fait preuve d'une plus grande transparence (p. ex. création d'une base de données sur Internet) et mis en place des exigences de consultation accrues.
  • Pour répondre aux préoccupations émanant du gouvernement concernant l'évaluation d'un trop grand nombre de petits projets, des ajouts ont été faits pour augmenter la portée du Règlement sur la liste d'exclusion et créer une nouvelle catégorie d'examen.
  • Pour répondre aux nombreuses préoccupations de l'industrie et des provinces relativement à l'efficience et à la prévisibilité, des dispositions relatives au coordonnateur fédéral de l'évaluation environnementale ont été adoptées et un processus d'étude approfondie plus certain mis en place.

En outre, le processus d'évaluation environnementale est une des questions ayant fait l'objet du plus grand nombre de plaintes auprès du Comité. Compte tenu de son impact sur la gestion de l'environnement et sur de nombreux secteurs économiques partout au Canada, plusieurs organisations industrielles et organisations non gouvernementales à vocation environnementale considéraient ce processus comme une priorité dans la réforme de la réglementation. De plus, le Comité s'est rendu compte que de nombreuses personnes se demandaient si les changements à la LCEE rendraient le processus beaucoup plus efficace, ou dans certains cas, encore plus difficile d'application.

Les commentaires des représentants de l'industrie devant le Comité ont révélé un degré de frustration élevé : en effet, s'ils considèrent que l'évaluation environnementale est importante, ces représentants trouvent que le processus est lent, qu'il manque de clarté, qu'il est coûteux et, qu'à l'occasion, ses retombées bénéfiques pour l'environnement sont incertaines. Les gouvernements provinciaux mettent également en question la lenteur des processus d'évaluation environnementale fédéraux et les chevauchements avec les règlements provinciaux/territoriaux; de nombreuses provinces considèrent aussi le rôle fédéral comme un empiétement dans leur champ de compétence. Presque tous conviennent que, dans l'ensemble, les processus d'évaluation environnementale sont trop complexes.

Les organisations non gouvernementales à vocation environnementale soutiennent parfois que les évaluations environnementales ne sont que de la poudre aux yeux servant à camoufler les décisions déjà prises. En même temps, certains représentants du gouvernement mettent en question l'affectation de ressources très limitées à l'évaluation de projets de petite envergure ou de projets courants dont les effets et la contribution à l'atteinte des priorités environnementales sont bien compris.

Enfin, le processus d'évaluation environnementale peut constituer, pour les citoyens, le seul moyen de se faire entendre sur un projet de développement, ou à tout le moins un moyen facile d'accès. Les citoyens intéressés ont souvent l'impression que le processus manque d'équité, puisque les ressources financières et juridiques dont ils disposent pour y participer sont limitées. Les collectivités locales touchées par un projet peuvent notamment sentir qu'elles n'ont pas l'occasion de donner leur avis et croire que leurs intérêts ne sont pas toujours pris en compte dans la décision réglementaire finale.

Préoccupations exprimées à l'endroit du processus d'évaluation environnementale

Préoccupations exprimées à l'endroit du processus d'évaluation environnementale

En outre, l'objet des évaluations environnementales n'est pas toujours bien compris, particulièrement par les citoyens. Ceux-ci peuvent s'attendre à ce que les résultats d'une évaluation environnementale mettent fin à un projet, ou y entraînent de grandes modifications. Lorsque ce n'est pas le cas, cela cause de la frustration et un sentiment d'impuissance. Par ailleurs, les citoyens voient parfois le gouvernement comme un promoteur ou un fervent défenseur du projet.

Bien que chacune de ces parties ait son propre point de vue, on peut relever certaines préoccupations communes, comme en témoigne le diagramme à la page 113.

1.4.2 Une approche intégrée de l'évaluation environnementale

L'une des préoccupations les plus souvent formulées au Comité concernant le processus d'évaluation environnementale est le manque de coordination efficace - à la fois à l'intérieur du gouvernement fédéral et parmi les autres ordres de gouvernement.

Coordination entre les ministères fédéraux

Lorsque le gouvernement fédéral a instauré sa législation sur l'évaluation environnementale, la responsabilité des évaluations a été ajoutée aux activités courantes des ministères. En conséquence, il arrive que les promoteurs des projets et les autres parties concernées doivent interagir avec plusieurs ministères en même temps, ce qui contribue à la complexité du processus d'évaluation environnementale et au manque d'uniformité des exigences à ce titre. Toutefois, selon cette approche, qu'on appelle l'autoévaluation, le ministère concerné est en général bien placé pour comprendre les particularités d'un projet donné et les manières d'en réduire l'impact néfaste sur l'environnement. Dans les provinces, au contraire, les évaluations environnementales relèvent généralement d'une seule agence.

Plusieurs parties concernées ont en outre souligné le manque d'uniformité dans l'application des procédures d'évaluation environnementale à l'intérieur des ministères, au niveau régional. Plus précisément, le même règlement peut être interprété et appliqué sans cohérence; il en résulte que des projets de même nature reçoivent un traitement fort différent d'un bureau régional à un autre, et ce, à l'intérieur d'un même ministère fédéral.

Coordination entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux

Les projets peuvent relever à la fois du gouvernement fédéral et d'un gouvernement provincial/territorial, ce qui nécessite une évaluation environnementale par les deux ordres de gouvernement. Certains ont fait valoir au Comité que le cadre actuel dans lequel les processus d'évaluation environnementale chevauchent les divers ordres de gouvernement, entraînant une certaine redondance, devait être amélioré. La participation de divers ordres de gouvernement à un même projet ne conduit pas nécessairement à un environnement durable. De plus, ce chevauchement intergouvernemental semble dénoter un manque de confiance au sein des gouvernements fédéral-provinciaux-territoriaux ainsi qu'un souci injustifié de défendre son champ de compétence qui ne sert pas l'intérêt public. Tel qu'indiqué dans la partie I, section 3.2, « Coopération fédérale-provinciale-territoriale en matière de réglementation », les Canadiens s'attendent à ce que leurs gouvernements travaillent de concert à mettre en place des normes rigoureuses de protection et des services de qualité.

L'entente auxiliaire sur l'évaluation environnementale découlant de l'Accord pancanadien sur l'harmonisation environnementale offre un moyen d'améliorer la coordination des évaluations environnementales plurigouvernementales. Cette entente favorise l'application efficace de l'évaluation environnementale lorsque deux administrations ou plus doivent, en vertu de leurs lois respectives, évaluer la même proposition de projet. Elle comprend des dispositions énonçant des principes et des éléments d'information communs, une série d'étapes d'évaluation préétablies et une clause prévoyant un processus unique d'évaluation et d'audiences publiques.40

Malgré des signes de progrès encourageants dans la coordination fédérale-provinciale des évaluations environnementales (p. ex., l'examen conjoint de deux projets récents d'exploitation de sables bitumineux par le gouvernement fédéral et l'Alberta Energy and Utilities Board), le Comité a appris auprès de représentants de l'industrie - plus particulièrement ceux des secteurs pétrolier et gazier et de la production d'électricité - que des problèmes subsistent touchant la coordination des échéanciers, les exigences en matière de documentation et la participation du public. Ainsi, une province a exprimé ses préoccupations quant au fait qu'il est parfois difficile, voire impossible, pour le gouvernement fédéral de reconnaître des données qui ont été recueillies lors d'évaluations provinciales passées et d'utiliser ces données pour les évaluations fédérales.

Une nouvelle approche

On pourrait améliorer la coordination et les autres questions concernant les évaluations environnementales en accélérant la mise en oeuvre des amendements à la LCEE et en prenant des mesures concrètes pour améliorer la coordination à l'intérieur du gouvernement fédéral et avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Cependant, le Comité craint que tout cela ne soit trop coûteux en temps et en efforts, compte tenu du peu de bénéfices qu'on pourrait en retirer.

Si le processus d'évaluation environnementale n'est pas amélioré de façon importante, le Comité craint que la crédibilité du processus lui-même ne continue de s'effriter et que son utilisation efficace ne soit mise en péril. Par conséquent, le Comité croit que l'évaluation environnementale est un domaine où il faut aller au-delà de l'harmonisation et se concentrer sur une seule approche nationale intégrée, qui engloberait les processus fédéraux, provinciaux et territoriaux. De façon générale, cette idée a reçu l'appui des représentants de l'industrie et des organisations non gouvernementales lors de nos consultations. Le Comité préconise un système national d'évaluation environnementale qui serait :

  • coordonné, à la fois au sein du gouvernement fédéral et entre les différentes instances;
  • axé sur les résultats;
  • réalisé en temps opportun et prévisible;
  • efficient;
  • accessible.

Plus précisément :

  • Un seul ensemble de documents devrait être préparé par projet; il serait utilisé par toutes les organisations gouvernementales concernées, fédérales et provinciales.
  • Pour chaque projet, une seule audience devrait être tenue au besoin.
  • Il faudrait surveiller les résultats des évaluations environnementales, afin de démontrer qu'elles donnent lieu à une protection appropriée de l'environnement.
  • Des échéances pour chacune des étapes de l'évaluation environnementale devraient être fixées dès le début d'un projet, et respectées.
  • Tous les déclencheurs d'une évaluation devraient être cernés dès le départ pour permettre la tenue de processus simultanés - le cas échéant.
  • Toutes les parties concernées (p. ex. les citoyens, les organisations non gouvernementales et les peuples autochtones) devraient avoir la juste possibilité de présenter leurs points de vue.
  • Les évaluations multiples effectuées pour un seul projet devraient être conduites simultanément.

Ce concept est souhaitable puisqu'il donnerait lieu à la clarification et à la rationalisation du processus, à la conduite d'une évaluation plus globale d'un projet et au développement de connaissances spécialisées dans ce domaine, et il assurerait la protection de l'environnement et la promotion du développement économique. Cette approche pourrait par ailleurs améliorer l'examen des incidences cumulatives de plusieurs projets sur un seul écosystème et assurer que le processus d'évaluation environnementale est adapté aux progrès scientifiques et au caractère évolutif des circonstances. La création d'une agence d'évaluation nationale unique - dans laquelle les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux seraient partenaires à parts égales - serait un moyen de réaliser cette vision.

Le Comité reconnaît qu'une telle entreprise soulèverait d'importantes questions juridiques et politiques qu'il faudrait régler, mais croit qu'il est temps que le gouvernement fédéral prenne l'initiative d'entamer des discussions avec les provinces et les territoires sur la façon d'élaborer et de mettre en oeuvre cette approche nationale.

Recommandation 56 : Le gouvernement fédéral devrait entamer des pourparlers avec les gouvernements provinciaux et territoriaux en vue de créer un processus d'évaluation environnementale intégré au Canada auquel les différentes instances collaboreraient comme partenaires.

1.4.3 Autres questions

Outre l'analyse précédente, le Comité a émis d'autres suggestions sur la façon d'améliorer le processus d'évaluation environnementale au Canada. Les recommandations suivantes pourraient être mises en oeuvre dans le cadre de l'approche environnementale intégrée à l'échelle nationale qui est proposée, ou dans le cadre d'initiatives indépendantes.

Une agence fédérale unique

En l'absence d'une entente qui permettrait d'élaborer une approche nationale à l'évaluation environnementale, on doit donner la priorité aux efforts de coordination à l'intérieur du gouvernement fédéral et entre les ordres de gouvernement. Comme première étape, le gouvernement fédéral devrait accélérer la mise en oeuvre des amendements à la LCEE. De plus, le gouvernement devrait établir une seule agence fédérale qui serait responsable des évaluations environnementales qui relèvent du gouvernement fédéral. En tant que guichet unique du gouvernement fédéral pour les évaluations environnementales, cette agence offrirait un processus plus simple et plus efficace pour les promoteurs de projets et les autres parties intéressées. En outre, elle soutiendrait davantage le développement d'une expertise en ce domaine au sein du gouvernement fédéral. Une agence fédérale unique serait par ailleurs en meilleure posture pour collaborer avec de multiples administrations (p. ex. gouvernements provinciaux et territoriaux) et parties concernées (p. ex. peuples autochtones, groupes de citoyens et groupes voués à la conservation) de manière à offrir en temps utile des évaluations de grande qualité qui répondent aux préoccupations du public.

Recommandation 57 : Le gouvernement fédéral devrait créer une seule agence d'évaluation environnementale qui serait responsable d'effectuer les évaluations de compétence fédérale et de collaborer avec d'autres ordres de gouvernement.

Parallèlement, le gouvernement fédéral devrait travailler étroitement avec les provinces et les territoires afin d'améliorer le fonctionnement des ententes existantes concernant les évaluations environnementales conjointes, s'assurant ainsi que les évaluations sont continues et qu'elles comportent tous les aspects, comme la présentation unique d'un projet fondée sur l'harmonisation des exigences de collecte d'information et de rapport, l'utilisation de données communes, des audiences uniques et des échéanciers communs. Dans le contexte de ces améliorations aux processus de coopération existants, le gouvernement fédéral devrait envisager de concentrer ses efforts sur les projets de grande envergure (p. ex. des projets qui prennent place dans plusieurs territoires de compétence) et sur ceux qui présentent de plus grands risques potentiels pour l'environnement.

Processus simultanés

De nombreux ministères sont en cause dans le processus d'évaluation environnementale, et il arrive que les déclencheurs de certains ministères n'interviennent pas au début du processus, ce qui donne lieu à des évaluations séquentielles pour un seul projet. Cette situation ajoute à l'incertitude de l'environnement d'affaires et retarde certaines décisions des responsables de la réglementation, sans nécessairement entraîner une meilleure protection de l'environnement.

Ainsi, il s'agit d'un problème important, soulevé comme tel principalement par l'industrie pétrolière et gazière extracôtière, dans le contexte de l'administration de la Loi sur les pêches. Afin de régler ce problème, Pêches et Océans Canada prend des mesures pour mettre en oeuvre une approche de « participation automatique » selon laquelle l'examen prévu au titre de la Loi sur les pêches aurait lieu en même temps que d'autres évaluations environnementales requises. Cette approche serait adoptée dans le cas de projets de grande envergure qui seraient très probablement les déclencheurs d'une évaluation dans le cadre de la Loi sur les pêches.

Lorsqu'une évaluation environnementale est requise par plusieurs ministères fédéraux, le gouvernement devrait prendre des mesures pour s'assurer que ces évaluations sont effectuées simultanément, et non séquentiellement, tout en maintenant la qualité supérieure et la rigueur analytique du processus. Le Comité croit qu'une coordination et une intégration accrues dans ce domaine pourraient donner lieu à une hausse importante de l'efficience. De plus, une approche simultanée pourrait aussi s'appliquer à tout le processus réglementaire, permettant aux mécanismes d'approbation des règlements d'être déclenchés avant même que les évaluations environnementales ne soient terminées.

Recommandation 58 : Des évaluations environnementales multiples pour un même projet devraient être effectuées par différentes autorités simultanément, et non séquentiellement.

Substitution

La LCEE a toujours comporté une disposition en vertu de laquelle le ministre de l'Environnement peut autoriser le recours au processus d'audience publique d'une autre autorité fédérale en remplacement d'une commission d'examen. Cette mesure pourrait contribuer à réduire la complexité administrative des évaluations environnementales dans les cas où la participation du public est exigée. La Loi autorise une telle substitution dans les cas où le ministre est convaincu que le processus qui est substitué répond aux exigences de la LCEE, dont celles ayant trait à la participation du public.

La substitution accorderait à la nouvelle autorité responsable un plus grand contrôle quant à la conception du projet et au processus d'approbation réglementaire général. L'Office national de l'énergie, par exemple, procéderait à un examen, outre l'évaluation environnementale, en vue d'approuver la construction d'un pipeline. L'on rendrait plus efficients et plus opportuns les processus d'examen sans pour autant réduire la qualité de l'évaluation environnementale ni compromettre les possibilités de participation du public. Le demandeur et les autres parties intéressées recevraient des communications plus claires et seraient mieux assurés quant au processus complet d'examen réglementaire, incluant l'élément d'évaluation environnementale.

Plusieurs parties concernées ont invoqué l'utilisation de la substitution des autorités pour aider à rationaliser ce processus. Cependant, la substitution n'a à ce jour pas encore été accordée du fait de questions d'ordre technique ayant trait notamment aux coûts engendrés pour les participants aux consultations. Dans la plupart des cas, ces questions pourraient être réglées par voie d'arrangements administratifs.

Recommandation 59 : L'Agence canadienne d'évaluation environnementale et les autorités de remplacement potentielles, comme l'Office national de l'énergie, devraient négocier une entente permettant la substitution lorsque sont exigés à la fois une évaluation environnementale par une commission d'examen et d'autres processus d'approbation de projet.

Surveillance et évaluation des résultats

Selon des commentaires qui ont été soumis au Comité, on présume généralement des avantages de l'évaluation environnementale pour l'intégrité de l'écosystème, mais on les mesure rarement. Les représentants de l'industrie sont frustrés qu'il existe peu d'outils efficaces pour déterminer si les mesures d'atténuation qu'un responsable de réglementation leur a demandé de mettre en place ont vraiment contribué à préserver l'environnement. Les groupes environnementaux sont également préoccupés par l'incapacité des agences gouvernementales à évaluer l'impact environnemental d'un projet et à veiller au respect des résultats de l'évaluation. Cette situation, combinée à une procédure perçue comme étant inutilement complexe, a commencé à susciter une mise en question de la légitimité du processus d'évaluation environnementale.

L'évaluation environnementale doit aider à protéger les écosystèmes naturels ainsi qu'à améliorer la durabilité des projets, et ce, de manière davantage mesurable et transparente pour les promoteurs de projets, les collectivités concernées et les autres parties prenantes. Le Comité reconnaît la difficulté d'imputer des changements environnementaux subséquents à un projet donné, dans le cas surtout d'espèces dont les niveaux de population varient selon des cycles naturels. Toutefois, des moyens de déterminer l'efficacité des mesures d'atténuation prises par les promoteurs pour répondre au processus d'évaluation environnementale doivent être élaborés.

Les modifications récentes à la LCEE exigeant des programmes de suivi, programmes qui permettent de confirmer l'exactitude des prédictions en matière d'effets sur l'environnement et de déterminer l'efficacité des mesures d'atténuation à partir d'indicateurs bien précis, permettront de garantir qu'on a atteint les objectifs fixés en matière de protection de l'environnement. Le programme d'assurance de la qualité que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale est en train d'élaborer et de mettre en oeuvre servira quant à lui à confirmer les résultats. Enfin, s'appuyant sur les recommandations de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, le gouvernement fédéral entend intégrer à son processus décisionnel des indicateurs clés en matière de pureté de l'eau et de l'air et de réduction d'émissions.

Les ministères doivent vérifier si un programme de suivi est justifié dans le cas des examens préalables et, le cas échéant, ils doivent concevoir un tel programme et le mettre en oeuvre. Les programmes de suivi sont aussi obligatoires dans le cas des projets assujettis à une étude approfondie, à une médiation ou à une évaluation par une commission d'examen. L'Agence créera un dépôt électronique où seront consignés les résultats des programmes de suivi pour qu'on puisse mettre en commun cette information; il servira de base de données centrale sur les pratiques exemplaires. Mentionnons qu'au moins un ministère a exprimé des réserves quant à sa participation à ce dépôt, en raison de la charge de travail.

Recommandation 60 : Des objectifs, des mesures de rendement et des indicateurs précis permettant de surveiller les incidences environnementales d'un projet et l'efficacité des mesures d'atténuation devraient être considérés comme des éléments essentiels de l'évaluation environnementale. Cette approche tiendrait compte des leçons tirées de l'évaluation et tirerait parti des vérifications et des rapports de surveillance subséquents à l'approbation. Ces éléments doivent être élaborés conjointement avec les provinces, les territoires et les autres organismes de réglementation, surtout si un processus d'évaluation environnementale national est éventuellement mis en place.

Accroître le recours aux évaluations environnementales stratégiques

Tel qu'il a été discuté précédemment, plusieurs parties concernées voient le processus d'évaluation environnementale comme le moyen le plus efficace d'avoir accès aux décideurs pour un projet donné. Cependant, le Comité a souvent reçu des commentaires sur le fait que le processus de consultation de plusieurs évaluations s'était enlisé dans des discussions portant sur des questions de politique publique plus générales (p. ex., à savoir si l'on devait ou non forer sur la côte atlantique canadienne pour trouver du gaz et du pétrole) plutôt que de se concentrer sur la question de la durabilité environnementale d'un projet donné (p. ex., étudier l'impact du choix d'un site de forage en particulier ou la pertinence de la prospection séismique dans une région spécifique de la côte atlantique, etc.). Non seulement les débats sur des questions de politique publique générales détournent-ils l'attention d'un projet en cours, mais ils ajoutent des délais supplémentaires à ceux qui sont déjà inhérents à plusieurs évaluations environnementales.

Un moyen de répondre à ces préoccupations est le recours aux évaluations environnementales stratégiques. Les politiques, les programmes et les plans proposés par le gouvernement qui exigent une décision du Cabinet, ainsi que les projets qui risquent d'avoir des effets importants sur l'environnement, bénéfiques ou néfastes, doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale stratégique. Ce processus permet de prendre davantage en compte les facteurs environnementaux durant l'élaboration des politiques publiques. La Commissaire à l'environnement et au développement durable est actuellement chargée de la vérification au titre de la mise en oeuvre de ce processus.

Les évaluations environnementales stratégiques permettent d'examiner les projets de politiques et de programmes fédéraux d'une façon qui soit transparente et qui incite à procéder à des évaluations environnementales efficaces et ciblées de projets spécifiques. Le Comité estime que le gouvernement pourrait faire meilleur usage de ce processus en effectuant ces évaluations avant d'envisager l'élaboration de projets et avant que des sommes importantes ne soient investies. La réalisation d'évaluations environnementales stratégiques permettrait aux parties intéressées, comme des représentants autochtones et des collectivités locales, d'intervenir au début du processus et d'influer sur les décisions de politiques publiques, et favoriserait l'instauration d'un climat de certitude en matière de réglementation pour l'industrie au moment du dépôt ultérieur de projets particuliers.

À la suite de l'évaluation environnementale stratégique, l'industrie pourrait aller de l'avant avec le projet, sans avoir à revisiter les décisions de politiques publiques, sous réserve de se conformer aux exigences ultérieures de la LCEE et à la réglementation applicable aux aspects techniques.

En ce qui concerne les activités au large des côtes, le recours à des évaluations environnementales stratégiques pourrait contribuer directement à l'élaboration de plans visant à orienter l'emplacement et l'intensité des activités maritimes de manière à accroître la sécurité opérationnelle et la protection de l'environnement. Dans le cas précis de l'étude des ressources pétrolières et gazières extracôtières, les activités d'exploration et de mise en valeur ultérieures à une évaluation environnementale stratégique n'auraient à faire l'objet que d'une évaluation sur la forme sans qu'il faille réévaluer si l'industrie doit exercer ses activités dans la région en question ou non. Si l'évaluation était effectuée avant que le gouvernement ne cède de parcelles pour la mise en valeur des ressources, les conditions et les mesures d'atténuation que les promoteurs de projets seraient tenus de prendre y seraient précisées. Subséquemment, des examens préalables plutôt que des examens approfondis, qui requièrent plus de ressources et de temps, pourraient suffire.

Étant donné que les gouvernements provinciaux et territoriaux sont responsables au premier chef de la planification générale de l'utilisation des terres et de la gestion des ressources, ils devraient participer à ces évaluations environnementales stratégiques.

Recommandation 61 : Le gouvernement devrait mener des évaluations environnementales stratégiques publiques pour fournir à la population l'occasion de discuter de questions d'ordre général ayant trait au développement des zones extracôtières ou des territoires domaniaux, ou de questions liées à un projet de politique fédérale ou à une modification d'une politique existante.

La Loi sur les pêches

La Loi sur les pêches représente un déclencheur important de l'exécution d'une évaluation environnementale lorsqu'un projet risque d'endommager l'habitat du poisson. Nombre des plus gros irritants soulevés par les parties intéressées avaient trait à l'administration et à la mise en application, par Pêches et Océans Canada, de la Loi sur les pêches. Dans certaines régions, le recours à des agents des pêches armés pour surveiller la pêche en eau douce contribue à provoquer le mécontentement. Les principales préoccupations que soulèvent les évaluations environnementales telles qu'exigées dans la Loi sur les pêches sont les suivantes :

  • le manque de clarté et de transparence dans la définition de certains termes de la législation (p. ex. « détérioration, destruction ou perturbation de l'habitat » dans la Loi sur les pêches et « conséquences néfastes importantes pour l'environnement » dans la LCEE);
  • l'imprécision quant aux activités et pratiques considérées comme néfastes et quant aux mesures d'atténuation des effets acceptables en vertu de la Loi sur les pêches;
  • le déclenchement tardif des évaluations en vertu de la Loi sur les pêches qui donne lieu à des évaluations séquentielles;
  • le manque fréquent de cohérence dans l'interprétation et l'application des règlements d'une région à l'autre, parfois à l'intérieur d'une région même, ainsi qu'un manque de prévisibilité et de transparence qui peuvent amener les intéressés à percevoir les décisions des agents de la réglementation comme inconséquentes ou abusives.

Compte tenu de ces préoccupations, il est donc plus difficile pour les promoteurs de planifier leur projet tout en étant certains de se conformer aux exigences réglementaires.

Pêches et Océans Canada : Introduire la réglementation intelligente au sein du Programme de gestion de l'habitat

Pêches et Océans Canada est responsable des pêches côtières et intérieures en vertu de la Loi sur les pêches. Dans ce contexte, sa Politique de gestion de l'habitat du poisson fournit un cadre pour la protection, le rétablissement et le développement de l'habitat selon le principe de « l'absence de perte nette ». Cette politique comporte une combinaison de stratégies réglementaires (protection et conformité) et non réglementaires (mesures prévisionnelles, comme l'intendance et les partenariats). Le ministère reçoit entre 10 000 et 12 000 projets annuellement aux fins de l'évaluation de leur incidence sur l'habitat du poisson. Aucun règlement n'oblige les promoteurs à faire approuver ces projets, mais, s'ils ne se conforment pas à la Loi sur les pêches, le ministère peut engager des poursuites judiciaires. Certaines décisions prises en vertu de la Loi sur les pêches sont des déclencheurs à l'égard de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. En conséquence, un projet nécessitant une autorisation en raison de ses incidences sur l'habitat du poisson en vertu de la Loi sur les pêches déclenche le besoin d'une évaluation environnementale. En 2002- 2003, quelque 950 évaluations environnementales ont été « déclenchées » en vertu de la Loi sur les pêches et de la Loi sur la protection des eaux navigables (LPEN) et ont fait l'objet d'un examen de la part du personnel de Pêches et Océans Canada (depuis, il faut noter que la responsabilité de la LPEN a été transférée à Transport Canada).

L'industrie, les gouvernements provinciaux et territoriaux, d'autres ministères fédéraux et parties intéressées ont exprimé leurs vives inquiétudes quant au manque de clarté de la Loi sur les pêches, aux retards dans les interventions des agents d'exécution et à leur manque d'homogénéité, et quant à l'examen des projets qui n'ont aucune incidence apparente sur les pêches.

Le ministère a entrepris, dans le cadre de l'examen de ses programmes et de ses dépenses en 2003, un examen du Programme de gestion de l'habitat (PGH). Cet examen avait pour objectif l'atteinte d'un meilleur équilibre entre les considérations environnementales et socioéconomiques et l'accroissement de la prévisibilité et de la rapidité des décisions. Un plan de modernisation des processus environnementaux du PGH est actuellement en cours afin que le programme puisse concentrer ses ressources sur les activités réglementaires qui sont les plus susceptibles de réduire les risques pour l'habitat du poisson, alléger le fardeau de l'industrie, et réinvestir les ressources dans des façons novatrices de s'acquitter de son mandat.

L'examen du PGH a permis de constater que de nombreux projets soumis au ministère présentent un risque faible ou moyen : sur les milliers de projets dont le ministère est saisi chaque année, seulement 500 à 600 pourraient entraîner la détérioration, destruction ou perturbation (DDP) de l'habitat du poisson. Le premier et principal élément du plan est l'élaboration d'un cadre de gestion du risque afin d'assurer que l'on consacre des efforts et des ressources aux priorités en matière d'habitat. Ce cadre fait partie intégrante du plan de modernisation du ministère et est composé de deux éléments qui permettent de déterminer le niveau de risque approprié. Le premier est un modèle utilisé pour déterminer les effets sur l'habitat du poisson d'une activité donnée. Le deuxième est une matrice du risque qui permet de classer les risques en fonction de leurs impacts négatifs et de la sensibilité de l'habitat du poisson (voir le tableau ci-dessous).

De plus, des outils de gestion seront créés pour orienter la prise de décision en fonction du niveau de risque et rationaliser le processus de renvoi. Le ministère procède actuellement au classement des projets à risque moyen et faible soumis pour examen et à l'élaboration d'outils et de façons de procéder destinés à aider les promoteurs à déterminer quelle démarche est nécessaire. Par exemple, dans le cas des projets à risque moyen à faible (comme ceux prévoyant l'aménagement de drains agricoles), le ministère a recours à un système d'autorisation par classe pour réduire le fardeau des parties concernées et le nombre d'évaluations à effectuer. Dans le cas des projets à faible risque, quelque 20 feuillets d'information destinés à aider les parties concernées à se conformer par anticipation à la Loi sur les pêches seront publiés en 2004. Des outils supplémentaires seront élaborés en collaboration avec l'industrie et les provinces, et des mesures appropriées de consultation des Premières nations et d'autres parties concernées sont à l'étude.

Les objectifs du ministère, compatibles avec une approche de réglementation intelligente, consistent à accroître la prévisibilité et l'uniformité de la prestation des programmes dans l'ensemble des provinces et des territoires en travaillant plus étroitement avec les autres autorités réglementaires (fédérales, provinciales et territoriales), et de renforcer ses partenariats avec les principales parties concernées. De plus, grâce à une nouvelle approche de gestion, le ministère sera mieux en mesure d'identifier et d'examiner les grands projets dans le but d'améliorer la rapidité et l'uniformité des décisions et de mieux harmoniser les examens avec les autres organisations. Il y aura une séparation plus claire entre les processus relevant de la LCEE et de la Loi sur les pêches et le déclenchement rapide des évaluations environnementales en vertu de la LCEE pour les projets de grande envergure.

Vulnérabilité du poisson et de son habitat

Ces problèmes entravent en particulier les projets de production et de transport d'énergie hydroélectrique qui sont souvent affectés par le besoin de coordination entre les autorités fédérales et provinciales. Toutefois, l'Association canadienne de l'électricité et Pêches et Océans Canada ont conclu un protocole d'entente qui semble être un moyen prometteur d'accroître la compréhension mutuelle et d'assurer la clarté, l'uniformité et la cohérence de l'application des lois et règlements fédéraux relatifs à l'environnement. Pêches et Océans Canada a en outre élaboré un plan pour résoudre cette question (voir l'encadré).

Recommandation 62 : Pêches et Océans Canada devrait accélérer la mise en oeuvre des améliorations prévues à son système d'habitat du poisson et aux formes connexes de participation aux évaluations environnementales.

Gestion du risque

L'envergure et la complexité des évaluations environnementales devraient être fonction de la nature du projet et des risques inhérents à celui-ci. Le gouvernement fédéral devrait par conséquent appliquer les principes de gestion du risque de manière à concentrer ses efforts sur les projets qui représentent un plus grand risque pour l'environnement et concevoir des façons de gérer des projets de moindre envergure qui pourraient générer des risques plus élevés. Le Règlement sur la liste d'exclusion en vertu de la LCEE a été examiné et sera élargi de manière à soustraire à l'exigence d'évaluation environnementale un grand nombre de petits projets dont on sait qu'ils n'ont que des effets négligeables sur l'environnement. Grâce à cette mesure et au nouveau recours aux rapports d'examen préalable par catégorie, on s'attend à pouvoir réduire du tiers le nombre des évaluations environnementales.

De plus, le Règlement sur la liste d'étude approfondie en vertu de la LCEE devrait aussi être révisé de la même façon afin de s'assurer de son efficacité. Le Comité note que la LCEE confère au ministre de l'Environnement le pouvoir d'approuver des changements au Règlement sur la liste d'étude approfondie et croit qu'une action rapide du gouvernement au regard de la révision de ce règlement pourrait avoir des répercussions importantes sur l'efficience et l'efficacité de la réglementation.

Recommandation 63 : Le Règlement sur la liste d'étude approfondie devrait être évalué afin de s'assurer que la complexité accrue du processus (comparativement à celui applicable aux examens préalables) résulte en une meilleure protection environnementale. Il conviendrait par ailleurs d'envisager de modifier la liste des projets ou les seuils lorsqu'il a été démontré qu'une étude approfondie serait justifiée du fait de possibles conséquences néfastes importantes pour l'environnement.

Consultation

La participation du public est un élément important du processus d'évaluation environnementale. Il est essentiel que les collectivités susceptibles d'être affectées par un projet aient la possibilité de poser des questions lorsque des enjeux importants sont soulevés ou que de nouveaux aménagements de grande envergure sont envisagés. Étant donné que les groupes de citoyens ont souvent des ressources limitées, l'aide financière qui peut leur être accordée pour leur permettre de participer aux études approfondies et aux commissions d'examen joue un rôle important dans la mesure où elle permet aux collectivités concernées de contribuer utilement au processus.

Le savoir traditionnel autochtone a été explicitement reconnu dans la LCEE et pourrait être pris en compte dans l'exécution d'une évaluation environnementale. À l'heure actuelle, il n'existe pas de lignes directrices sur la manière dont ce savoir pourrait être pris en compte par les autorités concernées dans une évaluation environnementale.

Recommandation 64 : On doit reconnaître le fait que l'aide financière aux participants est un élément essentiel du processus d'évaluation environnementale qui permet aux citoyens de participer au processus. Il faudrait rédiger des lignes directrices qui définissent clairement les critères permettant de décider qui doit recevoir de l'aide financière pour participer aux processus d'évaluation environnementale, et à quelles fins.

Recommandation 65 : Le gouvernement fédéral, après consultation des communautés autochtones, devrait donner des directives générales sur la manière dont le savoir traditionnel autochtone peut être pris en compte dans une évaluation environnementale, de façon pondérée, en préservant la viabilité de l'échéancier du projet.

1.5 Exploration et mise en valeur des ressources pétrolières et gazières

Les activités en amont (exploration et production) du secteur pétrolier et gazier en font le secteur privé qui a investi le plus au Canada en 2003, soit 28 milliards $. Les entreprises de ce secteur affichaient des recettes évaluées à plus de 75 milliards $ pour 2003, et elles sont aujourd'hui la source de 500 000 emplois au pays.41 Le Canada occupe actuellement le troisième rang des pays producteurs de gaz naturel et le neuvième rang en production de pétrole. Toutefois, les coûts d'exploration et de production des ressources pétrolières et gazières au Canada sont parmi les plus élevés au monde.42

Les sociétés pétrolières et gazières du Canada oeuvrent dans de nouvelles conditions. Les réserves de l'Ouest du Canada sont déjà bien exploitées et les prochaines explorations se feront davantage dans des zones relativement nouvelles - sables bitumineux, régions du Nord, zones extracôtières - avec des techniques d'extraction innovatrices dont la production de gaz naturel à partir de méthane de gisements houillers. Les industries elles-mêmes sont aussi en voie de changement : on remarque une intégration croissante au plan international, ce qui place le Canada en situation de concurrence avec d'autres pays pour l'obtention du capital d'investissement nécessaire au soutien de son industrie. En outre, les obligations internationales du Canada en matière de changement climatique auront dans le futur des incidences majeures sur cette industrie et certaines autres, tout comme sur leurs clients.

Simultanément, les collectivités autochtones et les organisations non gouvernementales faisaient connaître leurs préoccupations en rapport avec ces nouvelles activités, par exemple sur l'impact possible de la prospection sismique, du forage et de la construction de pipelines dans des régions écologiquement fragiles, dont le Nord canadien.

Le Comité est d'avis qu'une réglementation dans le secteur amont des industries pétrolières et gazières du Canada permettrait la mise en valeur de ces ressources, tout en respectant l'environnement et en assurant son renouvellement pour les générations à venir. De plus, la réglementation doit favoriser la concurrence et l'innovation sur le plan économique afin de contribuer à la qualité de vie des Canadiens et des Canadiennes, et leur garantir un approvisionnement sûr, fiable et sécuritaire.

La présente section du rapport traitera des secteurs « frontières » de mise en valeur que sont le Nord et les régions extracôtières. Il est à noter cependant que nous n'aborderons que certaines questions en rapport avec la réglementation de l'exploration et de la mise en valeur des ressources pétrolières et gazières. Le lecteur trouvera des recommandations relatives au secteur pétrolier et gazier dans la section 1.4, « Processus d'évaluation environnementale ».

1.5.1 Mise en valeur des ressources pétrolières et gazières du Nord

Principaux enjeux

Le développement économique lié aux ressources naturelles dans le Nord, particulièrement dans le secteur gazier et pétrolier, est au seuil d'une période de croissance exceptionnelle. Cet important secteur, en plus du secteur florissant des mines pourrait exercer une influence considérable sur le paysage économique du Nord et du reste du Canada. Il représente aussi un défi pour la promotion de la durabilité et pour la réalisation d'un équilibre entre croissance économique et protection sociale et environnementale.

Cependant, le Comité a entendu dire que le potentiel de développement du Nord est en péril à cause d'un entrelacs complexe et imprévisible de règlements faisant appel à une multitude de ministères fédéraux et d'autorités territoriales et autochtones.

À l'échelon fédéral, par exemple, la gestion de la mise en valeur des ressources du Nord relève en grande partie du Programme des affaires du Nord (PAN) du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. Les responsabilités définies par le PAN comprennent : les mines, le pétrole et le gaz naturel, le développement économique et toute une gamme de questions intéressant les Premières nations et les Inuits. Le ministre a par ailleurs de vastes responsabilités relativement aux terres, aux eaux et aux évaluations environnementales. Il appert, cependant, que le rôle du MAINC dans le Nord, et ses limites, n'est souvent pas bien compris au-delà du gouvernement fédéral. Ce dernier a d'ailleurs transféré l'administration du PAN au gouvernement du Yukon en avril 2003. Les pourparlers en vue de la dévolution des pouvoirs se poursuivent avec les Territoires du Nord-Ouest, mais il semble peu probable qu'on puisse procéder à court terme comme pour le Yukon, vu qu'il n'existe pas d'approche commune sur le plan de la réglementation entre les collectivités en cause.

D'autres organismes fédéraux ont eux aussi des mandats de réglementation reliés à certaines activités dans le Nord, notamment l'Office national de l'énergie, l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, Pêches et Océans Canada, Ressources naturelles Canada, Environnement Canada et même Affaires étrangères Canada pour les projets qui ont une dimension internationale.

Les droits ancestraux enchâssés dans l'article 35 de la Loi constitutionnelle ont des incidences importantes sur le développement des ressources du Nord. La participation des Premières nations et des Inuits dans l'élaboration et la gestion des projets n'est pas assurée assez tôt par les promoteurs ou par le gouvernement, ce qui cause des retards dans les prises de décision réglementaires.

Cette situation complexe a instauré un climat d'incertitude au sein des organismes de réglementation du Nord, des industries réglementées et du grand public, incertitude susceptible de mettre en péril la mise en valeur des riches et prometteuses ressources naturelles de la région et la protection environnementale. Il y a des projets qui pourraient être envisagés dans le cadre d'un intérêt national plus large compte tenu de leur importance et de leur incidence sur le pays, mais dont on ne peut pas traiter de façon efficiente et prévisible puisqu'ils vont au-delà des moyens d'action de l'actuel cadre de réglementation. Étant donné que le gouvernement fédéral est dans de nombreux cas l'organisme de réglementation et, dans d'autres, l'auteur du système réglementaire, le Comité estime qu'il lui faut faire preuve de leadership et s'engager à résoudre ces questions.

Cette section traitera principalement de questions relatives au projet de gazoduc de la vallée du Mackenzie (GVM); ce projet peut servir d'exemple en raison de son ampleur et des impacts possibles pour la région. Cela dit, plusieurs recommandations incluses dans ce rapport peuvent également s'appliquer à la réglementation des autres secteurs du Nord canadien.

Les projets de gazoduc de la vallée du Mackenzie et de l'Alaska

Maintes raisons font que le GVM est représentatif. Premièrement, il stimulera la poursuite de l'exploration et la mise en valeur de nouveaux gisements de gaz dans le delta du Mackenzie et la mer de Beaufort ainsi que leur raccordement aux marchés du Sud. Deuxièmement, les sources de gaz naturel du Canada proviennent principalement des réserves de l'Ouest, qui sont déjà pleinement exploitées et ne présentent qu'un potentiel limité d'accroissement de la production.

Troisièmement, on s'attend à la mise en production des réserves de gaz de la baie Prudhoe, en Alaska, d'ici quatre ans. Le pipeline projeté pour acheminer ce gaz pourrait traverser le territoire canadien. Étant donné l'envergure des deux projets, il est tout à fait improbable que les deux chantiers soient entrepris en parallèle. Et puisque le projet de l'Alaska est le plus ambitieux, le GVM ne dispose que d'une petite fenêtre d'opportunité pour être mis en chantier et achevé avant le début de la construction du gazoduc de l'Alaska (en présumant que le projet obtienne l'approbation réglementaire). Si le GVM se voit reporté jusqu'après l'achèvement du gazoduc de l'Alaska, les facteurs économiques peuvent évoluer d'ici là, à tel point que le projet pourrait ne plus être viable. Un cadre réglementaire efficient régissant le GVM rassurerait les investisseurs et accroîtrait la probabilité qu'ils optent pour une route canadienne pour l'acheminement du gaz de l'Alaska, au lieu de l'option d'un pipeline transalaskien de gaz naturel liquéfié, solution de remplacement pour le transport du gaz vers les États du Sud.

Le cadre réglementaire du GVM

Le Nord présente des défis particuliers du fait que certains de ses régimes réglementaires sont fondés sur des ententes de règlement de revendications qui tiennent compte des droits des peuples autochtones protégés par la Constitution.

Les négociations portant sur les revendications territoriales dans les Territoires du Nord-Ouest où le GVM aura des répercussions directes mettaient en jeu quatre grands groupes : les Inuvialuit, les Gwich'in, les Sahtu et les Deh Cho. Trois d'entre eux, les Inuvialuit, les Gwich'in et les Sahtu, ont signé des accords de revendications territoriales et participent activement aux discussions en vue de la mise en valeur future des ressources du Nord. Les Premières nations Deh Cho, qui représentent 13 gouvernements dénés et métis, n'ont pas encore conclu d'entente avec le gouvernement fédéral sur leurs revendications territoriales et ont exprimé leur mécontentement face au rôle qui leur est imparti dans l'évaluation du trajet du gazoduc éventuel. Or, 40 % des 1 300 km de longueur du GVM proposé se situeraient sur les terres traditionnelles des Premières nations Deh Cho.

Au cours des négociations sur ces revendications territoriales dans les Territoires du Nord-Ouest, les groupes autochtones ont exprimé un fort désir de jouer un rôle accru dans la réglementation de l'utilisation du territoire et des eaux et dans l'évaluation environnementale. De ce fait, le gouvernement fédéral a édicté la Loi sur la gestion des ressources de la vallée du Mackenzie(LGRVM), qui établit un système de gestion des ressources basé sur des offices publics conjoints.43 La moitié des membres de chaque office sont nommés par les Premières nations et l'autre moitié par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien ou le ministre territorial désigné.

Afin de pallier la complexité réglementaire résultant de l'intervention de multiples offices créés par la LGRVM, le Plan de coopération pour l'évaluation des répercussions environnementales et l'examen réglementaire d'un projet de gazoduc du Nord passant par les Territoires du Nord-Ouest a été dressé. Ce Plan de coopération met en jeu 13 organisations :

  • Agence canadienne d'évaluation environnementale
  • Office national de l'énergie
  • Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie
  • Office d'examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie
  • Office des eaux des Territoires du Nord-Ouest
  • Office des terres et des eaux des Gwich'in
  • Office des terres et des eaux des Sahtu
  • Bureau d'examen des répercussions environnementales pour la région désignée des Inuvialuit
  • Ressources, Faune et Développement économique des Territoires du Nord-Ouest
  • Affaires indiennes et du Nord Canada
  • Environnement Canada
  • Pêches et Océans Canada
  • Transports Canada

Le Plan de coopération prévoit un processus d'évaluation environnementale mixte pareil à nul autre, ainsi que des approches coordonnées de la part des organismes de réglementation concernant l'administration d'autres contraintes réglementaires applicables au projet de GVM. Il encourage également les organismes de réglementation à harmoniser l'information exigée et promeut le partage du soutien technique et la participation du public.

Les principaux objectifs qui sous-tendent cet accord consistent à coordonner les examens, éliminer les chevauchements et assurer la certitude du processus pour le GVM. La bonne exécution du Plan de coopération dans les délais prévus démontrerait l'efficience d'une démarche de coopération et contribuerait à la prise de décision en temps opportun par les organismes de réglementation, dans la coordination des examens du GVM.

Renforcement du Plan de coopération

Le Plan de coopération du GVM représente un effort de collaboration de la part de divers organismes de réglementation en vue de surmonter la complexité de l'environnement réglementaire du Nord. Il constitue une mesure immédiate vitale en attendant qu'une stratégie plus robuste pour adapter le cadre actuel soit décidée et mise en oeuvre.

Cependant, le Plan de coopération n'est pas obligatoire et dépend de la bonne volonté d'autorités multiples. La signature en avril 2004 de l'Entente des organismes de réglementation est un pas important dans la mise en place du Plan de coopération en limitant le double emploi et en encourageant la collaboration entre les organismes. 44 Toutefois, certaines dispositions de l'entente ne sont probablement pas assez contraignantes. Par exemple, les parties ne font face à aucune conséquence notable en cas de désistement. Malgré qu'il soit trop tôt pour évaluer le Plan et son Entente, le Comité remarque que les promoteurs de projets sont grandement préoccupés par le fait que le processus décrit au Plan de coopération ne sera pas terminé dans les délais prévus.

Recommandation 66 : Le gouvernement devrait continuer de jouer un rôle de premier plan dans la promotion de la vision commune incarnée dans le Plan de coopération, de façon à créer un cadre de coopération réglementaire plus vaste et à long terme entre les organismes de réglementation du Nord, soit un cadre assurant le respect des délais, la transparence, la prévisibilité, la clarté et la certitude.

Cohérence et synchronisation des régimes de réglementation fédéraux

Sans compromettre les objectifs de protection de l'environnement du cadre de réglementation du Nord, l'industrie des pipelines et les industries de prospection de pétrole et de gaz et d'extraction minière ont besoin d'une réglementation prévisible et claire et de la coopération des principaux partenaires. Les organismes de réglementation doivent également être en mesure de s'acquitter de la charge de travail résultant des nouvelles activités de développement.

Ces industries se sont engagées à respecter les contraintes réglementaires (notamment sur le plan des évaluations environnementales), mais elles demandent que les décisions établissant si elles s'y conforment soient cohérentes et leur soient communiquées en temps opportun. Le fait que la réglementation relève de nombreuses autorités dans le Nord retarde la délivrance de permis et d'agréments et peut conduire à des désaccords ou à des contradictions entre différentes autorités. Dans le cas des projets pangouvernementaux, tels que les gazoducs, les délais tendent à s'allonger proportionnellement au nombre d'organismes de réglementation en cause.

Tel que décrit dans la Partie I, section 3.3, « Coordination fédérale en matière de réglementation », la création d'un guichet unique serait avantageuse à la fois pour le secteur et pour les citoyens dans leurs rapports avec les organismes de réglementation fédéraux. D'abord au service d'un secteur spécifique, (industrie du pipeline, exploration et exploitation des ressources pétrolières et gazières, etc.), le guichet unique serait le seul point de liaison avec l'ensemble du gouvernement fédéral pour tous les secteurs industriels du Nord afin d'offrir un service efficient en temps opportun.

Recommandation 67 : Le gouvernement fédéral devrait mettre en oeuvre une approche de guichet unique pour coordonner la participation des organismes de réglementation fédéraux à la réglementation des secteurs industriels du Nord (p. ex. industrie pétrolière et gazière et industrie minière), avec des échéanciersde réponse obligatoires de façon à garantir des décisions rapides et prévisibles concernant les projets présentés.

Alors que l'approche de guichet unique faciliterait les interactions entre les divers secteurs de l'industrie, la présence d'un coordonnateur fédéral pourrait permettre au gouvernement fédéral de s'exprimer d'une seule voix sur des questions relatives à des projets spécifiques dans le Nord, de l'envergure du GVM. Dans le cas du GVM par exemple, un coordonnateur pourrait oeuvrer avec les autorités en dehors de la sphère fédérale de façon à cultiver avec soin et constance le Plan de coopération, anticiper les obstacles et promouvoir des solutions consensuelles propres à assurer la prise de décision en temps voulu.

Le Comité se réjouit des récentes annonces du gouvernement fédéral en rapport avec la mise en place d'un bureau de l'énergie pour le Nord devant servir de « vitrine » du gouvernement, et aussi de la nomination d'un représentant du gouvernement pour conseiller les ministres des Affaires indiennes et du Nord Canada et de Ressources naturelles Canada sur les questions relatives au GVM. Même si le représentant du gouvernement aura un rôle de la plus grande importance dans l'amélioration des communications entre les parties prenantes du projet, le Comité est d'avis qu'un coordonnateur est aussi nécessaire. Le coordonnateur fédéral disposerait de l'autorité claire de prendre des décisions et de la responsabilité d'établir un cadre réglementaire cohérent pour le GVM, tout en garantissant la transparence.

Recommandation 68 : Afin de veiller à la réglementation efficiente du gazoduc de la vallée du Mackenzie, il est proposé de nommer dans les meilleurs délais possibles un coordonnateur fédéral investi d'une autorité clairement définie de prise de décisions vis-à-vis les divers ministères et chargé d'établir un cadre réglementaire cohérent pour le GVM.

Renforcement de la capacité réglementaire

Étant donné la situation démographique du Nord, il est nécessaire de développer la capacité réglementaire des collectivités autochtones conformément à la politique d'autonomie gouvernementale des Autochtones du gouvernement fédéral. Les offices de réglementation autochtones sont confrontés à des enjeux complexes où le temps est un facteur primordial et comportant des conséquences importantes pour l'avenir de leurs collectivités et le Canada. Ces offices, par exemple, ont à mener à bien des évaluations environnementales complexes et de grande envergure. Ils n'ont généralement été formés qu'il y a quelques années, à la suite de la dévolution des pouvoirs du gouvernement fédéral. Bon nombre de parties intéressées craignent que le gouvernement fédéral ne se rende pas pleinement compte des incidences de ces développements sur l'environnement réglementaire du Nord. Il est nécessaire d'adopter des mesures importantes pour aider à bâtir les compétences et la capacité des Autochtones afin que les communautés autochtones puissent participer pleinement et de manière productive aux processus réglementaires. (Voir aussi la section 1.3, « Développement économique des Premières nations »).

Recommandation 69 : Le gouvernement fédéral devrait offrir une formation à tous les membres des nouveaux offices de réglementation du Nord, comme condition de leur nomination et comme soutien continu. Il devrait également collaborer avec les offices et tribunaux similaires de tout le Nord du Canada de manière à créer un réseau permettant de partager les pratiques exemplaires et les solutions aux défis qui les confrontent.

1.5.2 Ressources pétrolières et gazières extracôtières

Sur quelques décennies, plus de 40 milliards $ ont été dépensés pour les activités de prospection et de mise en valeur dans les zones extracôtières du Canada. La production pétrolière a permis à la province de Terre-Neuve-et-Labrador d'afficher la croissance économique la plus rapide du Canada en 2002,45 tandis que les dépenses de l'industrie au large de la Nouvelle-Écosse ont atteint près de 1 milliard $ en 2002. Néanmoins, l'activité d'exploration sur la côte Est est restée sporadique et trop faible pour engendrer une industrie florissante. C'est une activité à coût élevé et aux résultats incertains.

Les ressources pétrolières et gazières ont été jusqu'à présent exploitées et mises en valeur exclusivement dans les eaux de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve-et-Labrador, mais d'autres régions présentent un potentiel à ce titre. Le Comité a porté son attention sur les ressources extracôtières de l'Atlantique; ses conclusions pourraient toutefois s'appliquer ailleurs.

De nouvelles zones de la côte Est commencent à susciter un intérêt pour l'exploration, notamment le golfe du Saint-Laurent et la baie de Fundy. Bien que des structures de réglementation précises seraient bénéfiques à la mise en valeur de ces zones, les cadres réglementaires ne devraient pas s'éloigner des approches en vigueur à Terre-Neuve et en Nouvelle-Écosse et faire en sorte que la situation sur la côte Est soit plus complexe.

En Colombie-Britannique, l'exploitation des ressources extracôtières fait actuellement l'objet d'un moratoire fédéral en cours de révision. On s'attache principalement à déterminer, au moyen de données scientifiques, les zones où le moratoire pourrait être levé sans risque, si tel était le choix politique pour cette région. On doit aussi tenir compte des revendications autochtones concernant ces ressources. Le Comité a jugé encourageant que la province ait mis sur pied une équipe chargée d'examiner l'expérience du Canada atlantique et de certaines régions du monde où sont exploitées les ressources extracôtières afin de cerner les pratiques exemplaires qui pourraient être adoptées en Colombie-Britannique, advenant le cas que l'exploitation pétrolière et gazière y soit permise.

Enfin, les eaux peu profondes du delta du Mackenzie dans la mer de Beaufort recèlent un potentiel important qui pourrait être mis en valeur une fois le projet de gazoduc de la vallée du Mackenzie confirmé. L'exploitation des ressources dans cette région est assujettie à un environnement réglementaire tout aussi complexe que celui décrit dans la section 1.5.1, « Mise en valeur des ressources pétrolières et gazières du Nord », de même qu'aux régimes réglementaires régissant l'exploitation des ressources terrestres et celle des ressources extracôtières (compte tenu notamment du lien entre les ressources extracôtières et les pipelines terrestres). L'industrie est peu susceptible d'entreprendre des travaux de forage importants tant que la construction du gazoduc de la vallée du Mackenzie n'aura pas été clairement décidée, par crainte d'engloutir de précieux dollars d'investissement dans des puits inutilisables. Comme il a déjà été mentionné, le gouvernement fédéral doit poursuivre ses efforts pour clarifier l'environnement réglementaire du Nord et assumer le leadership nécessaire à cette fin, surtout dans les champs de compétence qui lui sont propres.

Le cadre réglementaire devrait favoriser les activités d'exploration et de production dans toutes ces régions. Concurremment, il doit aussi tenir compte des autres secteurs axés sur l'océan, comme celui des pêches, ainsi que des objectifs environnementaux globaux en matière de durabilité de l'environnement.

Principaux enjeux

Comme il est mentionné au début de cette section, des régions d'exploitation marine tant anciennes que nouvelles, telles que le golfe du Mexique, le Chili et la mer du Nord, se livrent une concurrence croissante et intense pour les capitaux et l'engagement d'explorer ou d'extraire. Étant donné les investissements requis pour conduire de telles opérations dans des conditions extrêmes (l'Atlantique Nord par exemple), la réglementation pour les zones extracôtières représente un élément important du coût et des délais de réalisation des projets et peut donc influer sur leur viabilité économique. Un gouvernement prêt à concevoir des cadres réglementaires adaptés qui encouragent la mise en valeur responsable et durable des ressources tout en réduisant les coûts, l'incertitude et les retards bénéficiera d'un avantage stratégique.

D'après les observations reçues par le Comité, le cadre réglementaire actuel est défaillant à ces égards. Selon des informations recueillies auprès de représentants du secteur, les projets sur la côte Atlantique ne reçoivent en moyenne les autorisations réglementaires qu'après 600 jours, alors que l'attente est de 200 jours au Royaume-Uni ou en Norvège et de tout juste sous 400 jours dans le golfe du Mexique.46

L'environnement réglementaire des ressources extracôtières reflète les réalités du partage des pouvoirs au Canada en vertu de la Constitution, en ce qui a trait aux multiples approbations, autorités, cadres législatifs et réglementaires en cause (certains étant en bonne partie, mais non pas totalement parallèles). Compte tenu de cette situation, il peut y avoir confusion quant à la primauté des réglementations et des chevauchements, dans le cas par exemple où une installation de forage passant de Terre-Neuve à la Nouvelle-Écosse devrait être certifiée par les deux gouvernements.

Voici certains attributs distinctifs du cadre réglementaire propre à l'industrie pétrolière et gazière de la côte Est :

  • la législation et la réglementation fédérale-provinciale parallèles (la Loi de mise en oeuvre de l'Accord atlantique Canada-Terre-Neuve et la Loi de mise en oeuvre de l'Accord Canada-Nouvelle-Écosse sur les hydrocarbures extracôtiers);
  • les régimes de gestion conjointe avec des offices indépendants visant à gérer le développement pour le compte des deux paliers de gouvernement;
  • les provinces fixent les niveaux de redevances et perçoivent tous les revenus comme s'il s'agissait de ressources foncières.

L'environnement réglementaire est constitué de l'Office Canada-Nouvelle-Écosse des hydrocarbures extracôtiers et de l'Office Canada-Terre-Neuve des hydrocarbures extracôtiers, qui administrent la prospection, la mise en valeur, l'extraction, les opérations de production, la construction, la certification, la santé et la sécurité, de même que les aménagements de pipelines de leurs régions respectives. L'Office national de l'énergie est chargé des enjeux réglementaires internationaux et interprovinciaux et de certains certificats d'exploitation d'aménagement de pipelines, en plus de la réglementation de toutes les régions non visées par des accords. L'Agence canadienne d'évaluation environnementale est responsable de l'administration du processus d'évaluation environnementale en collaboration avec les ministères pertinents.

La protection des habitats et environnements marins relève d'Environnement Canada, de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale et de Pêches et Océans Canada, et s'effectue en vertu d'un processus d'évaluation environnementale, des principes énoncés dans la Loi sur les océans et de lignes directrices pour la conservation et la protection de l'habitat. De plus, il arrive que des zones de protection marine (Pêches et Océans Canada) et d'aires marines de conservation (Parcs Canada) soient créées en vue de protéger certains habitats et environnements marins particuliers. Étant donné la grande part de responsabilité partagée, il y a risque de confusion et d'inefficience de la surveillance entre les sphères de compétence.

Cette structure complexe est responsable du manque de rigueur dans le respect des échéances pour chacune des étapes du processus de réglementation et influe, par le fait, sur la prévisibilité et la prise de décision opportune. La structure devient un élément de dissuasion, surtout pour les petites entreprises, d'investir dans la région. Le Comité a aussi appris que la présence d'un grand nombre d'organismes de réglementation rendait difficile la participation de citoyens intéressés au système de réglementation.

La Loi sur les océans

L'industrie pétrolière et gazière est l'un des nombreux utilisateurs des ressources océaniques parmi lesquels on compte aussi les secteurs des pêches, de l'aquaculture, du tourisme et des transports. Le gouvernement fédéral a créé un mécanisme, dans le cadre de la Loi sur les océans, qui permet de planifier les activités se déroulant dans les océans du Canada et d'établir des critères pour garantir le développement économique durable des écosystèmes des océans de manière à tenir compte des intérêts de tous les utilisateurs de l'environnement marin tout en en assurant la protection. Cette approche s'appuie sur le principe que les principaux acteurs sont prêts à collaborer à la gestion intégrée de cet environnement.

Cette initiative constitue une nouvelle approche aux termes de laquelle le gouvernement fédéral, de concert avec toutes les parties concernées, fera la promotion du développement durable des écosystèmes des océans et de leurs ressources au Canada. Cette approche permettra aussi d'accroître l'efficacité opérationnelle et la sécurité commerciale par une harmonisation accrue des processus d'approbation et de réglementation des utilisations marines et côtières. Elle devrait par exemple aider à la compréhension plus rapide des intérêts en matière d'exploration et de mise en valeur par les responsables de la réglementation et les autres utilisateurs et à leur sensibilisation à cet égard, et à la détermination active des zones où les activités comme l'exploitation du pétrole et du gaz sont susceptibles de ne pas être approuvées ou exigeront des recherches ou des mesures de protection supplémentaires.

La majeure partie de l'approche écosystémique énoncée dans la Loi sur les océans est conforme à nombre des principes proposés par le Comité, qui sous-tendent la réglementation intelligente. Au fur et à mesure que Pêches et Océans Canada la mettra en oeuvre, il devra vraisemblablement se pencher sur certaines des préoccupations que suscite la réglementation des activités d'exploitation des ressources pétrolières et gazières extracôtières. Par exemple, le recours à des évaluations environnementales stratégiques (tel que décrites dans la section 1.4, « Processus d'évaluation environnementale ») favoriserait la planification et la rationalisation de la gestion des activités d'exploitation des ressources marines comme le pétrole et le gaz extracôtiers.

Le Comité remarque aussi que les avantages prévus par l'application de la Loi sur les océans, entrée en vigueur en 1997, ne se sont pas encore pleinement fait ressentir. Bien que le Comité reconnaisse que la Loi est appliquée de façon planifiée et systématique, l'industrie a mentionné que les délais dans sa mise en oeuvre avaient créé un sentiment d'incertitude réglementaire dans ce secteur.

Avec la publication en 2002 de la Stratégie de gestion des océans (SGO), le gouvernement a satisfait aux exigences de la Loi concernant l'élaboration d'une stratégie nationale pour la gestion des océans du Canada. La SGO confirme l'importance et la contribution de l'industrie du pétrole et du gaz exploités en mer pour les possibilités économiques durables. Pêches et Océans Canada a adopté des initiatives de gestion et de planification intégrées dans les champs d'intérêt pour le domaine du pétrole et du gaz exploités dans l'Atlantique, l'Arctique et le Pacifique. Les priorités retenues pour la planification sont justifiées (en partie) par l'existence ou le potentiel de développement pétrolier et gazier. En outre, des progrès ont été réalisés dans la détermination et la protection de régions écologiquement sensibles. Par exemple, parmi les efforts déployés par Pêches et Océans Canada pour protéger l'environnement des ressources marines vivantes, le ministère concentre ses efforts sur l'impact du bruit sur l'environnement marin, y compris la prospection sismique. La réglementation existante ne touche que les volets de santé et de sécurité relatifs aux levés sismiques.

En précisant dans la loi quand, où et comment mener des activités sismiques, le gouvernement offrira aux parties concernées un régime de réglementation plus prévisible que maintenant. Les normes viendront compléter les processus inclus dans Loi canadienne sur l'évaluation environnementale ainsi que les futures Évaluations environnementales stratégiques régionales.

Cela étant dit, les organismes de réglementation régionaux et les représentants de l'industrie ont manifesté des inquiétudes quant à l'élaboration d'une éventuelle nouvelle réglementation sismique par Pêches et Océans Canada, selon la Loi sur les océans et les conflits possibles avec les cadres réglementaires existants concernant les zones extracôtières. La Loi sur les océans offre une occasion d'améliorer la cohérence de la réglementation des zones extracôtières et de toute autre nouvelle loi et de s'assurer qu'elle respecte les principes de la réglementation intelligente.

Recommandation 70 : Puisque Pêches et Océans Canada élabore une réglementation en application de la Loi sur les océans, il devrait s'assurer que ces mesures sont établies en consultation et en collaboration avec d'autres organismes de réglementation fédéraux et provinciaux, des représentants de l'industrie, les Premières nations et d'autres parties intéressées. Cette approche devrait compléter les réglementations existantes concernant les activités sismiques pour le pétrole et le gaz en zones extracôtières.

Amélioration de la structure réglementaire

Bien qu'une telle structure plurigouvernementale vise l'atteinte de buts et de priorités stratégiques importants, comme la croissance économique et la durabilité de l'environnement, sa complexité a donné lieu toutefois à des démarches fragmentées offrant peu d'accessibilité et de souplesse aux demandeurs, aux citoyens, aux groupes d'intérêt et même aux autres ordres de gouvernement, ce qui se traduit par une insuffisance de transparence et de prévisibilité et engendre des coûts élevés. Pour relever ces défis, il est désirable d'adopter un cadre obligatoire de la politique de réglementation afin de guider les activités des ministères fédéraux. Cette approche viendrait coordonner la réglementation existante et future et prônerait des approches claires et intégrées dans les domaines de la sécurité, de la conformité environnementale, de la protection, et de la conservation de la ressource. En plus d'établir des objectifs de politiques concrets pour le secteur, le cadre réglementaire définirait des normes pour mesurer l'efficacité de la structure de réglementation.

Signe encourageant, un processus a récemment été esquissé à la Table ronde sur l'énergie de l'Atlantique en vue de la conclusion d'un accord qui établirait des échéanciers déterminés, uniformiserait les exigences d'information, créerait des procédures génériques et assurerait la consultation du public selon une approche fédérale-provinciale coordonnée de l'examen des projets. Le travail effectué par la Table ronde a produit des résultats concrets comme l'élaboration d'un protocole d'entente (qui a fait l'objet récemment de consultations publiques) qui vise l'adoption d'évaluations environnementales et d'autres processus de réglementation dans les zones extracôtières incluses dans l'entente (par ex. la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve) de façon parallèle et coordonnée.

Plusieurs personnes concernées ont exprimé une inquiétude importante au sujet du suivi que donnerait le gouvernement aux initiatives d'envergure qui seraient annoncées. Cette question est discutée plus longuement dans la partie I, section 3.6, « Processus réglementaire ». Dans le cas de la Table ronde de l'Atlantique, et bien que l'entente conclue récemment soit un bon début pour coordonner les activités de réglementation dans les zones extracôtières de cette région, le gouvernement fédéral devra jouer un rôle de chef de file et déployer des efforts pour réaliser les objectifs de l'entente.

Recommandation 71: L'interaction du gouvernement fédéral avec l'industrie pétrolière et gazière extracôtière et d'autres acteurs devrait être guidée par un cadre obligatoire de la politique de réglementation liant toutes les responsabilités pertinentes des ministères fédéraux.

Approches de la réglementation axée sur les résultats

L'approche réglementaire dans cette industrie reste largement de nature normative. Elle est axée sur des contraintes spécifiques imposées par le gouvernement pour répondre à de multiples attentes. Une telle réglementation normative est typiquement fondée sur la technologie connue au moment de la formulation des règlements. Or, dans un secteur comme la prospection pétrolière et gazière, où la technologie progresse rapidement, la méthode normative peut freiner l'application de technologies nouvelles susceptibles d'améliorer la performance environnementale et le rendement économique des projets. Le grand nombre de demandes de dérogation à des règlements spécifiques émanant de l'industrie du pétrole et du gaz extracôtiers au profit d'approches différentes témoigne de ce problème. Par conséquent, des technologies nouvelles sont introduites de manière ponctuelle.

L'approche axée sur les résultats constitue une solution de rechange, mais ne sera pas appropriée dans toutes les circonstances. Des mécanismes hybrides combinant une démarche normative et une autre fondée sur les résultats peuvent être requis pour fournir des solutions normatives aux entreprises (telles les petites et moyennes entreprises) qui ne possèdent pas la capacité d'élaborer des solutions axées sur les résultats ou qui recherchent une certitude réglementaire. Alors que la réglementation axée sur les résultats donne plus de souplesse, elle accroît également le fardeau tant des autorités que des promoteurs de projets qui doivent tous deux démontrer que les objectifs de la réglementation sont atteints. C'est une entreprise complexe qu'il faudra du temps pour mener à bien, mais les domaines de réglementation ayant enregistré le plus grand nombre de demandes de dérogation pourraient servir de point de départ.

Recommandation 72 : Une réglementation axée sur les résultats devrait être adoptée lorsque cela permettrait de tailler sur mesure des programmes sécuritaires et environnementaux en fonction des risques spécifiques rencontrés, et d'autoriser le déploiement rapide de nouvelles technologies,  tout en réalisant les résultats exigés par la réglementation sur le plan tant économique que social ou environnemental.

Amélioration des procédures d'évaluation environnementale

En juillet 2003, le gouvernement fédéral a étendu l'application de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale (LCEE) aux forages pétroliers et gaziers au large de la côte Est, de façon que les activités d'exploration et de production soient assujetties au même processus d'évaluation environnementale dans toutes les régions du Canada où l'activité extracôtière est autorisée par le gouvernement fédéral. En vertu de la LCEE, le premier puits exploratoire dans un nouveau secteur extracôtier doit faire l'objet d'une étude approfondie, tandis que l'approche qui relevait à l'origine des offices extracôtiers équivalait en fait à un examen préalable.

Tel que brièvement discuté dans la section sur le processus d'évaluation environnementale, les principales différences entre un projet faisant l'objet d'un examen préalable et un projet assujetti à une étude approfondie sont la complexité et la longueur du processus ainsi que l'étendue des consultations publiques dont fait l'objet l'étude approfondie. Par exemple, dans le cadre d'une étude approfondie, il faut examiner tous les modes possibles de réalisation du projet et la capacité des ressources renouvelables de répondre aux besoins courants et futurs, ce qui n'est pas le cas au titre de l'examen préalable. En outre, les exigences de surveillance dans le cas d'une étude approfondie peuvent être fort strictes. Toutefois, les représentants du secteur ne sont toujours pas convaincus des raisons pour lesquelles les activités de forage nécessitent des études approfondies plutôt que des examens préalables.

Le Comité a également noté que l'Agence canadienne d'évaluation environnementale travaille actuellement avec un sous-comité du Comité consultatif multilatéral de réglementation du ministre de l'Environnement à analyser si les puits d'exploration en mer devaient toujours figurer sur la liste d'étude approfondie. Le sous-comité est composé de représentants de l'industrie, de ministères fédéraux, d'organisations non-gouvernementales, d'organismes provinciaux et d'organisations autochtones.

Recommandation 73 : Le gouvernement devrait s'assurer que l'étude du Comité consultatif multilatéral de réglementation portant sur la politique exigeant des études environnementales approfondies pour les puits d'exploration est terminée et que des mesures sont adoptées dans des délais raisonnables.


12 Référence : L'Association canadienne des constructeurs de véhicules.

13 Référence : Transports Canada, Sécurité routière : Tour d'horizon, mars 2004.

14 Référence : Transports Canada, Vision sécurité routière 2010 - Rapport annuel 2002, mars 2004. Ce nombre varie selon la méthode de calcul et ne tient pas compte du coût social.

15 Le secteur comprend les automobiles à essence, les véhicules utilitaires légers à essence, les véhicules utilitaires lourds à essence, les motocyclettes, les automobiles au diesel, les véhicules utilitaires légers au diesel, les véhicules utilitaires lourds au diesel, ainsi que les véhicules propulsés au propane et au gaz naturel.

16 Environnement Canada, Inventaire canadien des gaz à effet de serre - Tour d'horizon 1990-2001, octobre 2003, pp. 4-5.

17 Données fournies par la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada selon le Rapport annuel de 2002 de la performance sur les présentations de drogue.

18 Centre for Medicines Research International, R&D Briefing #35, The Impact of the Changing Environment on Review Times.

19 Données fournies par la Direction des produits thérapeutiques de Santé Canada.

20 On entend par « délai moyen pour rendre une première décision » la période comprise entre la réception d'une proposition par la Direction des produits thérapeutiques et la première réponse qui pourrait être un avis d'insuffisance, un avis de conformité ou un avis de non-conformité.

21 Données provenant de Santé Canada, Direction générale des produits de santé et des aliments, Direction des produits thérapeutiques (DPT) - 2003 Rapport annuel de la performance sur les présentations de drogues - Partie 1, 2003.

22 Santé Canada, Direction générale des produits de santé et des aliments, Direction des produits thérapeutiques (DPT) - 2003 Rapport annuel de la performance sur les présentations de drogues - Partie 1., 2003.Dans ce rapport, les médicaments génériques sont traités avec les présentations abrégées de drogue nouvelle (PADN).

23 Les proportions réelles sont relativement faibles dans les deux cas : 3,1 % des produits pour les États-Unis, comparativement à 1,8 % des produits pour le Canada.

24 L'AEEM procède à l'approbation réglementaire des médicaments issus de la biotechnologie au nom de toute l'Union européenne. La plupart des médicaments conventionnels sont approuvés à l'échelon national et ces approbations sont mutuellement reconnues par les autres membres de l'UE. Si un des États membres refuse de reconnaître l'approbation d'un autre État membre, les sujets des différends sont soumis à l'arbitrage de l'AEEM.

25 Association canadienne des fabricants de produits chimiques, Canada's Chemical Industry: A Keystone to the Canadian Economy, p. 9.

26 La LIS est une compilation complète de toutes les substances connues régies par le Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles et en vente au Canada entre le 1er janvier 1984 et le 31 décembre 1986, ou qui ont été soumises et évaluées selon la LCPE 1999 et le règlement connexe. Par conséquent, les substances qui ne figurent pas sur la LIS ne font pas l'objet de rapport selon le Règlement.

27 Par exemple, les révisions continues au Règlement sont orientées principalement par les recommandations consensuelles d'un groupe composé de représentants du gouvernement fédéral, de l'industrie et des groupes de défense d'intérêts publics. Voir Environnement Canada et Santé Canada, Consultations au sujet du Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles de la LCPE et du programme des substances nouvelles, décembre 2001.

28 Source : Statistique Canada. Quatre-vingt-seize pour cent de ces fonds ont été consacrés à des activités de R.-D. Ces statistiques ne tiennent pas compte des activités réglementaires du gouvernement fédéral.

29 Le Secrétariat relève du CCMB. Ses deux principales fonctions sont de coordonner les décisions horizontales à l'échelle interministérielle et de fournir des services de secrétariat au CCCB.

30 Les dernières données de Statistique Canada datent de 2001.

31 Sondage d'opinion publique concernant la biotechnologie, Earnscliffe/Pollara, décembre 2003.

32 La Société royale du Canada, Groupe d'experts sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire, Éléments de précaution, février 2001; Comité consultatif canadien de la biotechnologie, Améliorer la réglementation des aliments génétiquement modifiés et des autres aliments nouveaux au Canada, août 2002.

33 Loi concernant la procréation assistée et la recherche connexe, L.C. 2004, chapitre 2 (projet de loi C-6).

34 Dans son discours du Trône de 2002, le gouvernement du Canada s'est engagé à réviser la législation fédérale en matière de protection de la santé pour mieux faire face aux nouveaux risques, s'adapter à la technologie moderne et se concentrer sur la prévention.

35 En juin 2002, le CCCB a recommandé que les formes de vie supérieures répondant aux critères requis soient brevetables sous réserve que certaines balises soient établies simultanément. En décembre 2002, la Cour suprême du Canada a statué que la Loi sur les brevets n'indiquait pas clairement que les formes de vie supérieures sont brevetables et que c'est une question qui devrait en conséquence être réglée par le Parlement. Quoi qu'il en soit, la Loi sur les brevets ne fournit pas actuellement les outils nécessaires pour régler les questions liées aux formes de vie supérieures complexes. Industrie Canada et d'autres ministères continuent d'analyser la question.

36 La politique Avis de conformité avec conditions autorise le fabricant à mettre son produit sur le marché avant la fin des essais cliniques à certaines conditions. Le Programme d'accès spécial (PAS) - Médicaments soustrait également certains médicaments à l'application de la réglementation en permettant aux médecins de demander l'accès à des médicaments qui ne sont pas vendus au Canada pour des raisons humanitaires ou urgentes. Une autorisation conférée au titre du PAS ne garantit pas que le médicament en cause est sûr, efficace ou de grande qualité.

37 Sondage d'opinion publique sur les questions liées à la biotechnologie, Earnscliffe/Pollara, décembre 2003.

38 Voir http://plus.i-bio.gov.uk/ibioatlas.

39 Bien que l'une des fonctions de l'Agence soit d'administrer la LCEE, elle n'effectue pas d'évaluations environnementales.

40 L'entente auxiliaire est mise en oeuvre au moyen d'accords bilatéraux entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires. À ce jour, des accords bilatéraux ont été conclus avec la Colombie-Britannique, l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, le Québec et le Territoire du Yukon. Des négociations sont par ailleurs en cours avec la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador. Une ébauche d'accord avec l'Ontario était en cours d'élaboration lors de la rédaction du présent rapport. Dans les cas où des accords bilatéraux ne sont pas en place, on a recours à des arrangements particuliers aux projets pour prévenir les redondances.

41 Référence : Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP), Directives pour l'Industrie Pétrolière et Gazière Canadienne (document présenté au Conseil des ministres de l'énergie, septembre 2003), p. 1.

42 Selon l'ACPP, les coûts d'exploration, de production et d'opération sont plus élevés au Canada que dans les autres régions pétrolières et gazières telles que les États-Unis, l'Amérique latine et le Moyen-Orient. Référence : ACPP, p. 4.

43 Par exemple, l'Office des terres et des eaux des Gwich'in détient la responsabilité de réglementer l'utilisation du sol et de l'eau dans toute la région désignée des Gwich'in, incluant les terres de la Couronne et les terres Gwich'in privées. L'Office peut émettre, renouveler ou modifier des permis d'utilisation du sol et des concessions d'eau, et établir les modalités d'utilisation du sol et de l'eau dans la région désignée des Gwich'in.

44 Les signataires du projet d'entente pour le processus d'examen réglementaire coordonné du projet gazier Mackenzie sont : l'Administration des terres inuvialuit et la Commission inuvialuit d'administration des terres, l'Office national de l'énergie, l'Office des eaux des Territoires du Nord-Ouest, l'Office des terres et des eaux de la vallée du Mackenzie, l'Office des terres et des eaux des Gwich'in, l'Office des terres et des eaux des Sahtu, Pêches et Océans Canada, le ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, Environnement Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et Transports Canada.

45 Référence : Association canadienne des producteurs pétroliers.

46 ACPP, p.6.


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Mise à jour:  9/22/2004

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