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Les cartographes : Essai en quatre partiesLa cartographieL'établissement de cartesL'établissement de cartes a passé par toute une série d'étapes, à commencer par les observations d'un explorateur sur le terrain, d'un géomètre sur terre ou d'un hydrographe ou navigateur sur l'eau. Pour que leurs observations servent à la cartographie, il fallait qu'elles contiennent le plus de mesures précises de distance, de direction et d'emplacement de la latitude et de la longitude possible. Ces observations sur le terrain sous forme de carnets, de journaux de bord et de cartes esquissées étaient habituellement confiées à un cartographe professionnel qui était aussi bien souvent géographe. Le processus par lequel l'information tirée des observations sur le terrain faites au Canada était transposée sur des cartes produites par des cartographes et des imprimeurs européens a été systématisé par les Français bien avant les Anglais. En 1670, l'intendant de la Nouvelle-France, Jean Talon, a donné l'ordre à tous les explorateurs de consigner des registres. Le gouverneur Buade de Frontenac a étayé cette directive en 1674, en nommant Jean-Baptiste-Louis Franquelin premier cartographe du Canada; Franquelin avait le mandat de recevoir ces registres, d'établir des cartes convenables et de transmettre ce matériel au ministère de la Marine à Paris. Entre 1674 et 1708, Franquelin a fait une cinquantaine de cartes. Aucune de ces cartes n'a jamais été publiée, mais elles constituaient une source d'information pour le Ministère et les cartographes nommés par la cour y avaient accès pour établir des cartes. En 1716, Gaspard Chaussegros de Léry a été nommé ingénieur en chef à Québec, assumant également le travail de cartographe en chef. Lorsque la section du Dépôt des cartes, plans et journaux a été mise sur pied au sein du Ministère en 1720, les cartes de Léry sont devenues accessibles à son ingénieur en chef, Jacques-Nicolas Bellin, et ses cartographes et ses imprimeurs ont été chargés de mettre à jour les cartes de l'Empire français. Les cartographes professionnels avaient accès aux anciennes cartes, à d'autres observations sur le terrain et aux différentes informations et ils avaient aussi la compétence technique nécessaire à la compilation de ces données sous forme de cartes qui ont placé les nouvelles découvertes dans un contexte plus large. Les cartographes qui établissaient des cartes du Canada étaient presque exclusivement des Français et des Anglais vivant en Europe, jusqu'à l'établissement de l'édition cartographique au Canada dans les années 1820. Le principal problème qui se posait à ces cartographes était de juger de l'exactitude des informations qu'ils recevaient, puisqu'il ne leur était pas possible de les vérifier. Avant l'utilisation de moyens mécaniques servant à reproduire les cartes, la carte du cartographe était une version finale : une carte manuscrite bien dessinée et attrayante. La plupart de ces cartes du XVIe siècle sont uniques; on en faisait rarement des duplicata, quoique certaines aient été copiées par d'autres cartographes. Nombre de ces cartes étaient commandées par de riches mécènes ou monarques ou encore données en guise d'objets commémoratifs, comme des œuvres d'art. Une fois la carte produite, on jetait les esquisses originales prises sur le terrain. Lorsque les cartes imprimées ont remplacé les cartes manuscrites, les cartographes ont fait affaire directement avec les imprimeurs. La reproduction des cartes comprenait deux étapes de base : le transfert de l'image du cartographe à une plaque d'imprimeur et le processus d'impression en soi. Ces deux étapes requéraient des spécialistes. Entre l'apparition de la première carte imprimée en 1472 et la fin du XIXe siècle, il y a eu trois procédés de préparation des plaques. Les premières cartes imprimées étaient produites à partir de blocs de bois lisse dans lesquels on gravait en relief l'image à imprimer à l'aide d'un graveur de forme. Les blocs de bois, fragiles, difficiles à modifier et s'usant rapidement, ont été presque entièrement remplacés vers la moitié du XVIe siècle par une nouvelle technique, la gravure sur cuivre. La gravure sur cuivre nécessitait la préparation d'une plaque en coupant (incisant) l'image cartographique sur une feuille de cuivre plate. Contrairement aux blocs de bois où l'encre adhérait à la surface en relief, dans le cas de la plaque de cuivre, l'encre remplissait les incisions. Ces deux techniques demandaient de couper ou d'inciser l'image cartographique à l'inverse dans la plaque ou la surface de bois, afin de produire une image positive. Ce travail exigeait la main de spécialistes chevronnés, de vrais artistes. Plusieurs signaient leurs plaques, dont David Pelletier sur la carte de Champlain de 1612 et le grand graveur de portraits italien Giovanni Frederico Pesca sur la carte de Bressani de 1657. La gravure sur cuivre a été graduellement remplacée par la lithographie au cours du XIXe siècle. La lithographie est un procédé chimique par lequel une image en relief est produite sur une surface de pierre lisse en dissolvant les zones superflues à l'acide nitrique. Ce procédé permettait de produire des cartes plus rapidement et à moindre coût avec l'élimination des graveurs sur bois et des graveurs. Les presses utilisées pour transférer l'image sur le papier ont également évolué avec le temps. En général, les cartes faites à partir de blocs de bois étaient imprimées sur une presse à plat ressemblant à un pressoir à vin, une pression verticale étant appliquée sur une feuille de papier placée sur la surface encrée. Les plaques de cuivre exigeaient l'emploi de la presse à rouleaux. Cette presse déplaçait la plaque et le papier légèrement mouillé entre deux rouleaux, comprimant les deux ensemble et forçant le papier à entrer en contact avec l'image incisée qui contenait l'encre. Les deux presses nécessitaient un nettoyage et un nouvel encrage à chaque impression d'image. Les presses lithographiques ressemblaient à l'origine aux presses à plat et à rouleaux, mais on a mis au point rapidement une technologie spécialisée qui leur était propre.
Contrairement à la France où le procédé de collecte, de compilation, d'entreposage et de diffusion de l'information cartographique était passablement systématique après 1670, la cartographie s'est développée lentement en Angleterre jusque dans les années 1790. À la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle, Richard Hakluyt et Samuel Purchas ont collecté et publié des informations sur ce sujet, mais le plus souvent, les auteurs potentiels prenaient leurs propres arrangements avec des éditeurs privés. En 1791, la Compagnie de la Baie d'Hudson a nommé Aaron Arrowsmith pour préparer des cartes et lui a donné accès à ses archives volumineuses. Lorsque sa première carte a sorti en 1795, de grandes parties du Canada figuraient sur une carte pour la première fois. Les cartes d'Arrowsmith ont été mises à jour régulièrement. Après sa mort, survenue en 1823, ses fils Aaron Jr. et Samuel ont pris la firme à leur charge. À la mort de Samuel en 1839, un neveu, John Arrowsmith, a poursuivi la tradition jusqu'en 1873. Les cartes des Arrowsmith sont un outil remarquable pour étudier le développement des connaissances géographiques sur le Canada.
En 1795, l'Amirauté britannique a établi finalement un service hydrographique similaire au Dépôt des cartes français. Son premier directeur, Alexander Dalrymple, a publié la première carte de l'Amirauté anglaise en 1800. Avec la fondation de ce service, la Marine royale a cessé de dépendre des cartes des éditeurs privés, bien que plusieurs explorateurs, dont le personnel de la marine, aient continué de prendre leurs propres arrangements de publication. L'impression des cartes s'est développé au Canada dans les années 1820 avec l'emploi du procédé lithographique. Ce procédé a pris rapidement de l'expansion à Toronto, à Québec et à Montréal et, dans les années 1850, il était bien établi, offrant une production de grandes cartes complexes de qualité équivalente aux cartes produites en Angleterre. |