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Les peintures à sujets mythologiques et historiques de
Restout: à propos de l'achat,
par la Galerie nationale du Canada,
de Vénus montrant ses armes à Enée
par Pierre Rosenberg et Antoine Schnapper
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Le second argument peut être tiré
de la deuxième partie du texte de 1771: l'influence de Jouvenet
est en effet plus sensible dans la toile Ségoura que dans celle d'Ottawa, au style beaucoup plus personnel. Dans la première, Restout
reprend exactement la pose de Vulcain accoudé à son établi,
sous la même grande planche fixée au mur, ainsi que la Vénus aux seins nus que l'on voit dans un tableau de même sujet, exposé par Jouvenet aux Salons de 1699 et de 1704, connu
notamment par une gravure de L. Desplaces. (15) Le casque posé sur
la table, l'idée du chien, le réalisme un peu appliqué
des détails du mobilier soulignés avec insistance par la
lumière, sont du pur Jouvenet. En voyant le tableau d'Ottawa, qui
aurait pu croire au contraire « que Jouvenet respirait encore »? La leçon de Jouvenet s'y fait discrète et n'apparaît
vraiment que dans les détails (têtes des putti, rendu des nuages, des mains, épaule relevée d'Énée,
etc,).
Curieusement, on ne retrouve pas non plus les formes grêles, si frappantes
dans le tableau Ségoura, et visibles encore dans l'Alphée et Aréthuse, peint comme morceau qe réception
à l'Académie en 1720 (fig. 4). Faut-il l'avouer? A défaut
de l'inscription du verso, nous aurions proposé une date plus
tardive pour la toile d'Ottawa, Il est vrai que le dessin préparatoire
pour le tableau Ségoura, réapparu en 1977 (16) (fig. 5), montre
beaucoup plus d'indépendance par rapport à Jouvenet, un style
plus personnel que l'oeuvre achevée.
Que conclure? Peut-être faut-il tenir compte d'une
coïncidence: les deux toiles ont les mêmes dimensions, l'une
en hauteur, l'autre en largeur, et elles semblent provenir toutes deux
de Suisse. On pourrait imaginer deux essais complémentaires sur
deux sujets liés, dans deux styles différents, peints par
Restout pour se préparer au grand prix, et dont l'un, sinon les deux, servit à son agrément. Le grand prix avait été
rendu plus solennel en 1717, grâce à la générosité
du Surintendant, le duc d'Antin, annoncée le 23 mai 1716. Les étudiants
furent avisés d'avoir à se préparer le 20 mars 1717,
mais le nom de Restout n'apparaît pas dans les quatre noms retenus
pour l'épreuve finale le 24 avril. (17)
On sait que la carrière de Restout, comme celle de Jouvenet,
fut principalement tournée vers la peinture d'église; mais,
comme le dit élégamment le texte de 1771, « il a cependant
tempéré quelquefois la noblesse de ses crayons, & enrichi
les cabinets particuliers. » Ce sont quelques-uns de ces tableaux
mythologiques et historiques réapparus depuis 1970, que nous voudrions
publier maintenant.
On reprendra, pour ce faire, notre catalogue de 1970. On s'en
souvient peut-être, celui-ci se composait d'une part, de classiques
notices de catalogue, et d'autre part, d'une liste raisonnée qui
tentait de dresser un catalogue complet des oeuvres de Restout connues
en 1970 ou mentionnées dans un texte du XVIIIe siècle.
Outre les 29 compositions à sujets mythologiques ou historiques que nous cataloguions en 1970 (notre liste comprenait un total de
143 numéros), une seule oeuvre nouvelle est apparue, le tableau
d'Ottawa.
Un certain nombre de modifications ou d'adjonctions nous autorisent
cependant à revenir sur quelques-unes de ces 29 compositions en
reprenant, pour ce faire, la numérotation de notre liste raisonnée
qui avait l'ambition, rappelons-le, d'être chronologique.
Tableaux conservés
No 5 Il s'agit du tableau Ségoura mentionné et
reproduit ici (fig. 2).
No 8 Diane et Endymion (Hôtel de ville de Versailles). Nous
n'avions pas pu nous procurer en 1970 la photographie (fig. 6) de ce tableau,
qui date de 1724.
No 9 Jupiter et Callisto 1725[7] et non 1752[7]. Une copie [7] (fig.
7) décore la préfecture de Châlons-sur-Mame (signalée
par Nathalie Volle).
Nos 38 et 39 Abdolonyme travaillant dans son jardin (1737); Abdolyne
paraissant devant Alexandre en costume royal. Pour des notices plus
complètes sur ces tableaux, voir l'excellent catalogue des Tableaux
français des XVIIe siècles du Musée d'Orléans
(1981) de Mary O'Neill.
No 74 Le tableau signé et daté de 1749 appartenait en 1970 à
la collection Mèwes. Il a été judicieusement acquis
en 1977 (Musée à Strasbourg, no 1, octobre-décembre
1977, reproduit en couverture) par le musée des Beaux-Arts de Strasbourg.
J. D.
Ludmann (La Revue du Louvre..., 1979, nos 5-6, pp. 451-452) a voulu
prouver que le tableau de Strasbourg ne représentait pas la Déification
d'Énée mais Vénus donnant des armes à
Énée. La comparaison avec le tableau d'Ottawa d'une part
(fig. 1), et avec la Déification d'Énée de
Le Brun à Montréal (catalogue d'exposition Le Brun, Versailles, 1963, no 5, illustré) d'autre part, prouve bien
que nous avions correctement identifié le sujet (en fait les deux
épisodes se suivent dans le récit d'Ovide) de la toile de
Strasbourg, pour laquelle le musée de Caen vient d'acheter un beau
dessin préparatoire (vente Hôtel Drouot, Paris, 6 novembre
1980, no 100); pierre noire et rehauts de blanc sur papier bleu, mis
au carreau, avec important « repentir » sous forme d'un rabattant
couvrant la figure de Vénus; 425 x 352 mm. Nous reproduisons ici
les deux « états » du dessin (fig. 8 et 9).
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