Lac La Biche - Histoire

Agriculture | Pêche | Jardinage | Quête alimentaire

AGRICULTURE

À la Mission Notre-Dame des Victoires

L'agriculture était nécessaire afin de pourvoir aux besoins de la mission en nourriture. Il était également important pour les missionnaires d'amener les notions de civilisation dans la vie quotidienne des autochtones. Les missionnaires désiraient remplacer le commerce de fourrure et le style de vie nomade par une vie agraire avec des valeurs chrétiennes.

La mission a été fondée en 1855 sur le site actuel et, pendant la première année, des pommes de terre, de l'orge et des chouraves ont été plantés. À cette époque, le travail était fait manuellement avec peu d'outils ou d'animaux à trait. Cela veut dire que le travail était éreintant puisqu'il fallait abattre les arbres, déraciner les souches et casser le sol avec une hache et une houe.

En 1864, la ferme de la Mission était non seulement autosuffisante mais produisait un surplus de nourriture. Un inventaire de ses ressources, après la récolte exceptionnelle de 1864, énumérait 32 bétails, 18 chevaux, 16 porcs et de nombreux équipements agricoles. Vingt acres étaient cultivées avec une prédominance accordée au blé, aux pommes de terre et à l'orge. Aussi, la Mission offrait aux membres des communautés environnantes des porcs (qu'elle avait en trop) pour les convaincre de s'installer sur la terre. Même si les religieuses devaient éduquer et soigner les membres de la communauté, souvent elles travaillaient à côté des frères dans les champs, car il y avait peu d'agriculteurs. Imaginez être une madame de Montréal qui croyait que le travail de missionnaire serait agréable et qu'en arrivant ici, vous deviez travailler dans des conditions de privation et d'épreuves difficiles et que vous deviez porter des vêtements lourds, énormes et chauds!

Après 1869, lorsque l'évêque Faraud a repris la Mission, la productivité a augmenté; cela explique pourquoi elle est devenue importante dans l'approvisionnement des missions du nord des Oblats. La Mission du Lac La Biche a ainsi acquis la réputation d'être riche et productive.

L'agriculture pendant les années 1850, 1860 et 1870 était pratiquée manuellement avec des outils comme les faux et faucilles ainsi que des charrues tirées par des chevaux ou des bœufs. En 1863, une minoterie a été construite pour moudre le blé en farine. En 1887, les pères de la Mission ont utilisé des moissonneuses mécaniques pour la première fois; ce qui a facilité l'exploitation agricole.

À cause du déclin de la Mission, les officiels gouvernementaux ont conseillé au clergé et aux religieuses de s'installer à la réserve indienne du lac Saddle. Cependant, certaines activités agricoles ont perduré ici puisqu'il existe des registres montrant l'abattage de bœufs annuel jusqu'en 1898. Lorsque l'école résidentielle a été délocalisée, il n'y a plus eu autant de besoin pour la machinerie agricole et pour le moulin à farine si bien que ses parties opérationnelles ont été transférées à Saint-Paul-des-Métis.

La réouverture de l'école en 1905 est corollaire d'une nouvelle motivation pour les activités agricoles. Les champs ont été à nouveau cultivés et les animaux élevés. L'agriculture est restée une activité importante pour la Mission; particulièrement puisqu'en plus de lui fournir la nourriture, elle offrait aussi la base financière nécessaire pour faire marcher l'école jusqu'à ce que cette dernière ferme au début des années 1960.

En considérant la technologie agricole des années 1850 et 1860, l'agriculture des champs consistait en l'ensemencement sur des terres grossièrement labourées et hersées, avec une récolte grâce à des faucilles, faux et fléau. Celle-ci débutant à la fin du mois d'août jusqu'au début septembre, était effectuée par les frères de la Mission, les prêtres, les étudiantes Métis aînées et parfois les religieuses. Le grain était moissonné avec une faucille, les gerbes étaient ensuite liées en bottes. Le grain fauché était par la suite tiré en charrette des champs jusqu'au terrain de la ferme et mis en meule. En hiver, la battue était faite avec le fléau battant le grain sur le sol de la grange. Après, il était vanné dans le courant d'air frais de la grange puis tamisé dans les tamis faits maison. Une moissonneuse mécanique coupait le grain pour la première fois en 1887 et, selon Faraud, c'était une invention importante. Le besoin de clôturer tous les champs cultivés pour les protéger des bœufs errants faisait en sorte que ces champs étaient petits. Dans l'inventaire de 1864, la Mission avait à la fin de la récolte (mais probablement avant que le battage ne soit terminé) 200 boisseaux de pommes de terres, 120 boisseaux de blé, 20 boisseaux d'orge et 4 boisseaux de pois.

Aussi inscrit sur l'inventaire : 1 000 livres de pemmican, 400 livres de viande séchée, et 300 livres de viande. La plupart du pemmican et de la viande séchée était achetés de la communauté environnante des Métis alors que la grande majorité de la viande fraîche provenait du propre bétail de cette dernière abattu chaque novembre. Les troupeaux pouvaient fourrager librement l'été et étaient nourris de foin sauvage pendant l'hiver. Les récoltes des champs ne nourrissaient pas le personnel de la Mission pendant les mois d'hiver des années 1860.

Le transfert de juridiction de la Mission de l'évêque Faraud après 1869 a accru le montant de terre cultivée au Lac La Biche, surtout la farine moulue à partir du blé qui était expédiée aux missions du nord. En 1878, la ferme de la Mission, gérée par le frère Milsenc, a récolté 300 tonneaux de blé, 200 tonneaux de d'avoine et 600 tonneaux de pommes de terre. La superficie cultivée a augmenté annuellement et en 1879 le père Grouard demandait qu'une grande charrue (pour quatre à six bœufs) soit envoyée à la Mission. En 1884, Faraud observait qu'une nouvelle bande de terre était cultivable à côté de la maison à poudre loin derrière les autres immeubles et, en 1888, Collignon enregistrait un autre champ de quatre acres de terre cultivable.

La ferme de la Mission était une des principales sources d'appui financier pour l'école. Dès lors, l'étendue de la culture a augmenté au fur et à mesure que les coûts scolaires croissaient. En 1930, la Mission possédait une partie ou l'entièreté des lots 36, 38, 39, 42, 46, 52 et 54. En 1933, le père Pilon notait que plus de 24 acres avaient été pris du « Grand Parc » pour être ensemencés durant les deux premières années avec du blé puis être transformés en pâturage pour les vaches de la Mission. En 1944, la Mission a racheté de la terre de Sylvester et Mary Bourque qui avait été vendue en 1922. En 1955, la Mission possédait 755 acres desquels environ 250 étaient cultivés ou utilisés comme foin.

Dès les années 1860, la Mission était, pour l'Alberta, le lieu où le premier blé était produit en quantité commerciale. En juin 1863, la construction du premier moulin à blé était terminée à la Mission. Avant que le moulin ne soit introduit, un moulin à café manuel était utilisé pour moudre le blé en farine. Par ailleurs, il fallait toute une journée pour que les missionnaires produisent assez de farine pour pouvoir faire 18 biscuits.

L'alimentation

des poissons, surtout du poisson blanc pêché dans le Lac La Biche
du gros gibier, pemmican et viande séchée étaient achetés des Métis (bison, caribou, élan, biche)
du petit gibier, chassé par les frères (lapins, poules de prairie, perdrix, oies)
des baies sauvages cueillis par les religieuses et les enfants (« saskatoons », framboises, canneberges, fraises, myrtilles)
des œufs de canards sauvages étaient trouvés et utilisés
des cultures de céréales : blé, orge et avoine
élevage de bétail : porcs et poulets (pour le lait, la viande et les œufs)
production de pains à partir de la farine moulue de leur propre blé

Quelques activités typiques pour les religieuses étaient la cueillette de baies avec les enfants. Les fruits sauvages servaient à faire des sirops et à être mis dans des boîtes de conserve pour agrémenter les régimes hivernaux. En Juillet 1894, quatre religieuses partaient pour faire du camping sur le lac Montagnais. Ce marécage peu profond, à l'ouest du lac des Pères, qui nourrissait le moulin, ne ressemblait guère à un lac où l'on pouvait se baigner. En fait, ils allaient y cueillir des baies. Il y a eu beaucoup de pluie le lendemain, mais le temps s'est éclairci par la suite et les campeurs ont pu revenir cinq jours plus tard, ravis de leurs vacances. Nous ne savons pas quels fruits étaient cueillis, mais les fraises étaient abondantes à cette époque et dans ce lieu.

Les enfants suivaient un régime ordinaire composé de légumes avec poissons, viande et pommes de terre; très typique de ce que les canadiens français mangeaient à cette époque. Il y avait aussi des choux, du rutabaga, des carottes ou de la choucroute. Une trappe menait à la cave en dessous de la chambre du garçon où les patates et les carottes étaient pendues sur des crochets sortant du plafond. En hiver, il faisait tellement froid dans la cave qu'il fallait recouvrir les patates pour les empêcher de geler. Il y avait un garde-manger dans lequel le porc salé était conservé et il y avait aussi des étagères pour les conserves. Un fumoir était construite sur le terrain. À chaque fois, qu'ils abattaient des porcs, une cuisinière faisait toujours de la tête-fromagé avec les petits restes de la tête. Au début, elle faisait aussi du boudin, comme de coutume, dans des boyaux, mais lorsqu'elle réalisa à quelle vitesse elles étaient consommées, elle se mit à les faire cuire tout simplement dans des casseroles plates. Elle cuisinait aussi du ragoût avec les pieds de porcs dans une sauce de farine brune (roux) : la méthode habituelle chez les canadiens français. Il y avait diverses denrées alimentaires, on y trouvait du café, du sucre, des viandes en conserves ainsi que du beurre, du pain, du sel et du poivre, des légumes et des galettes. – Citations de Champagne page 293 et 294

Les gens mangeaient rarement des fruits frais, mais tout le monde avait droit à une tranche de pain et du beurre avec de la mélasse après les classes. Ils savaient qu'ils vivaient selon un régime minimal et que les sœurs actives risquaient la malnutrition.

En hiver, trois bœufs et deux ou trois porcs étaient abattus et conservés pour l'été. Ils avaient souvent du poisson frais et gardaient environ cent poules. Le poulailler était chauffé et ils pouvaient manger des œufs toute l'année, car la cuisinière se levait à 4 h 30 du matin pour y allumer une lumière. – Citations de Champagne page 293 et 294

Sources d'information :

Mission Notre-Dame-des-Victoires, Matrice Interprétative et histoire narrative, Juliette Champagne.

Chroniques du Lac La Biche, Gregory A. Johnson et collège Portage, 1955.

Rendez-vous – Notre Dame des Victoires, Mike Maccagno, 1988.

Gestion, Initiative, Développement (GID), mai 2002.

Notre Dame des Victoires : Une histoire structurelle par les consultants de recherche des Great Plains, juin 1990.