Monsieur le Premier ministre,
Il m’a semblé utile de vous communiquer, à vous et à vos collègues
participant à la Conférence annuelle des premiers ministres provinciaux la
semaine prochaine à Winnipeg, mon point de vue sur quelques-unes des grandes
priorités pour les Canadiens. Je suis ravi que vous ayez décidé de mettre l’accent
sur la consolidation de notre système de soins de santé. Je sais que vous
envisagerez également les modalités d’une collaboration sur d’autres
aspects, afin de répondre aux besoins des Canadiens, de les aider à se
préparer à la nouvelle économie du savoir qui caractérisera le XXIe siècle,
et de renforcer et renouveler les politiques et les programmes de façon à en
assurer la pertinence, l’efficacité et la viabilité.
Vous vous réunissez au moment où s’ouvrent de vastes perspectives grâce
aux efforts déployés ces dernières années pour assainir notre situation
financière et jeter les bases d’un progrès économique et social soutenu.
Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont eu à faire des
choix difficiles pour bien gérer leurs finances. Les décisions qui ont été
prises ont certes créé des difficultés ou imposé des sacrifices aux
Canadiens. Faute de ressources, il nous a fallu reporter d’importants
investissements.
À l’heure où nous offrons des réductions d’impôt et procédons à de
nouveaux investissements dans l’intérêt des Canadiens, nous ne devons pas
compromettre les progrès accomplis sur le plan financier ni les réformes
structurelles que nous avons réalisées. Nous savons maintenant qu’il nous
faut choisir nos priorités avec soin et que l’argent n’est pas
nécessairement une solution à tous les problèmes. À cette fin, tous les
gouvernements conviennent de l’importance de faire avancer les priorités
communes que sont la santé, les enfants et l’infrastructure, et je crois que
nous pouvons faire des progrès tangibles dans chacun de ces domaines si nous
continuons de travailler ensemble et de bien cibler nos efforts.
Cette année, le système de santé du Canada est le principal sujet à l’ordre
du jour de la Conférence des premiers ministres, et à juste titre. Notre
système de soins de santé nous a bien servis et il a donné au Canada un
avantage concurrentiel. Face à l’évolution sociale, économique et
technologique, il nous faut collaborer à renforcer et à renouveler notre
système de santé pour répondre aux besoins des générations actuelles et à
venir. Nos enjeux sont très élevés car nous devons veiller à ce que le
système respecte les cinq principes de l’assurance-maladie et assure à tous
les Canadiens un accès opportun à des services de qualité qui soient en même
temps viables.
Les ministres de la santé du pays ont travaillé d’arrache-pied pour
planifier le renouveau de notre système de santé national. Il y a deux
semaines, ils se sont réunis à Ottawa. J’ai reçu le rapport de cette
réunion, où l’on indiquait que des réformes considérables étaient déjà
entamées dans diverses administrations et que les ministres de la santé
étaient déterminés à travailler de concert pour généraliser et accélérer
ce renouveau.
Les ministres ont trouvé plusieurs terrains d’entente : réforme des
soins primaires; bassin et répartition des infirmiers, infirmières, médecins
et autres fournisseurs de soins; produits pharmaceutiques; infrastructures et
équipements médicaux; technologies de l’information et des communications;
promotion de la santé et mieux-être; indicateurs de rendement.
Les ministres de la santé ont décidé de rédiger, le plus rapidement
possible, un texte contenant les éléments d’une entente en santé qui
pourrait être ratifiée par les premiers ministres lorsque nous nous réunirons
le mois prochain — sous réserve d’une entente sur le financement.
Mon collègue Allan Rock, le ministre de la santé, a maintenant fait
circuler un document où il a tenté de refléter le consensus de ses homologues
et d’esquisser les grandes lignes d’un système de santé repensé :
vision, principes, priorités, plan d’action, mécanismes de financement et d’imputabilité.
Je crois que si les premiers ministres acceptent de collaborer à un tel projet
de renouvellement, les Canadiens ne peuvent qu’être gagnants.
Nous admettons tous que notre système de santé a besoin d’un
investissement considérable. Cependant, un tel investissement ne répondra aux
besoins des Canadiens — aujourd’hui et demain — que s’il s’appuie sur
une vision et un plan communs et que si nous nous engageons collectivement à
rendre compte aux Canadiens des résultats ainsi obtenus. Si les premiers
ministres s’entendent sur ce plan, l’investissement fédéral au titre de la
santé pourra être sensiblement accru, en grande partie grâce à la
bonification du Transfert canadien en matière de santé et de programmes
sociaux (TCSPS).
Il ne fait aucun doute que tous les Canadiens tiennent énormément à leur
système de santé, mais ce n’est pas la seule priorité. En tant que premiers
ministres, nous savons qu’il est impossible de canaliser tous nos nouveaux
investissements vers un seul secteur. Le TCSPS couvre l’éducation
postsecondaire, les services sociaux ainsi que les soins de santé. Si le
financement du TCSPS est accru de façon significative, nous, premiers
ministres, avons également l’obligation de mieux faire dans chacun de ces
secteurs. De fait, dans la nouvelle économie du savoir, il importe que les
Canadiens aient accès non seulement à un système de santé public de
qualité, mais aussi qu’ils puissent faire des études postsecondaires de
qualité sans devoir s’endetter indûment; il faut aussi que tous les enfants
puissent partir du bon pied dans la vie. C’est tout cela qui fait l’avantage
concurrentiel du Canada.
Pour sa part, le gouvernement du Canada a ajouté des milliards de dollars à
ses investissements dans l’infrastructure de recherche, le soutien aux études
postsecondaires et la Prestation nationale pour enfants.
En plus de vouloir renouveler le régime de santé, les gouvernements ont
convenu de travailler ensemble au bien-être de nos enfants, ce qui les amènera
à investir et à planifier pour aider toutes les familles canadiennes à
élever des enfants en bonne santé, aptes à apprendre et à s’épanouir plus
tard dans la vie. C’est pourquoi, ensemble, nous avons créé la Prestation
nationale pour enfants, première étape du Programme d’action national pour
les enfants. Pour assurer l’épanouissement de ces derniers, il nous faut
instaurer un système intégré de développement de la petite enfance qui
fournira à toutes les familles du Canada l’information, le soutien et les
services dont elles ont besoin pour offrir un maximum de chances à leurs
enfants. À cette fin, j’espère que nous pourrons adopter à notre réunion
de septembre un cadre commun pour le développement de la petite enfance, y
compris des indicateurs adéquats qui nous permettront de suivre nos progrès
afin de mieux cibler nos investissements communs.
Ces dernières années, tous les gouvernements ont dû reporter des
investissements à l’égard d’infrastructures qui étaient pourtant
essentielles à la santé, au mieux-être et à la prospérité économique des
Canadiens. L’économie du XXIe siècle exige en effet une
infrastructure moderne. Nos fonctionnaires discutent depuis un bon moment déjà
des modalités d’un nouveau programme à coûts partagés (fédéral-provincial-territorial-municipal)
pour les travaux d’infrastructure, et je m’attends à ce que nous puissions
signer de nouvelles ententes dès septembre.
Je fais parvenir copie de la présente lettre à tous les premiers ministres
et chefs de gouvernement, à titre d’information.
En vous souhaitant une conférence annuelle qui soit couronnée de succès,
je vous prie d’agréer, Monsieur le Premier ministre, l’expression de mes
sentiments distingués.