NOTES POUR UN DISCOURS DU
PREMIER MINISTRE JEAN CHRÉTIEN
à l’occasion du dîner de la Confédération
Le 26 novembre 2002
Toronto (Ontario)
Notre gouvernement a entamé sa dixième année, et il me reste 14 mois avant
mon départ.
Ce soir, j’aimerais vous parler de certains des principaux éléments du
programme d’action libéral. Des enjeux comme l’économie, l’innovation,
les enfants, les villes, la ratification du Protocole de Kyoto, la protection de
l’environnement et le renouvellement du régime de santé – pour nos enfants
et pour les générations à venir.
Quand je suis venu au dîner de la Confédération pour la première fois à
titre de Premier ministre, le Canada se trouvait dans une situation très
différente de ce qu’elle est aujourd’hui. Plus fragile. Moins uni. Moins
confiant.
Souvenez-vous de la situation il y a neuf ans. Une crise économique
nationale. Un déficit de 42 milliards de dollars. Un fort taux de chômage.
Une longue période de taux d’intérêt élevés. L’unité nationale dans la
tourmente après l’échec du lac Meech et de Charlottetown. Le Bloc
Québécois formant l’Opposition officielle à Ottawa.
Eh bien, comme les choses ont changé en neuf ans!
En 2002, l’économie canadienne crée des emplois plus vite qu’elle ne l’a
fait depuis des décennies. Près de 450 000 nouveaux emplois ont été créés
au Canada au cours des neuf premiers mois de cette année. Pendant ce temps, les
États-Unis perdaient 43 000 emplois. Les taux d’intérêt, les taux
hypothécaires sont très modérés. Le revenu disponible des particuliers
progresse d’année en année depuis cinq ans.
Le Canada est maintenant, selon l’expression de John Manley, un « tigre
nordique ».
Le mois dernier, Statistique Canada a fait état d’une baisse considérable
du nombre de familles à faible revenu au Canada.
Le nombre d’enfants dont la famille est sous le seuil de faible revenu a
diminué de 25 p. 100 entre 1996 et 2000, passant de 16,7 p. 100
à 12,5 p. 100. Non, ce n’est pas suffisant. Nous devons faire
encore mieux. Mais le progrès est réel.
L’unité nationale est plus forte que jamais. Le pays est aujourd’hui
particulièrement fort et confiant.
J’ai toujours dit que la santé de l’économie est essentielle à la
santé de la société.
Notre gouvernement a travaillé très fort depuis qu’il a été élu la
première fois. Qui aurait pensé, à l’époque, qu’aujourd’hui, nous
aurions un rendement meilleur que les États-Unis.
Ce n’est pas un hasard. C’est grâce aux efforts des Canadiens et aux
politiques économiques du gouvernement.
Pendant le récent ralentissement mondial, notre économie s’est
brièvement contractée, alors que l’économie américaine reculait lors des
trois premiers trimestres de 2001. Entre le deuxième trimestre de l’an 2000
et le deuxième trimestre de cette année, notre niveau de vie, mesuré d’après
le PIB par habitant, a augmenté de 3,3 p. 100, comparativement à une baisse de
0,5 p. 100 aux États-Unis. Nous avons maintenu l’équilibre budgétaire. Le
budget américain est déficitaire. Notre compte courant est excédentaire;
celui des États-Unis est déficitaire.
Ce sont des chiffres impressionnants. Ces résultats ont été obtenus au
prix d’efforts considérables rendus possibles par l’appui et les sacrifices
de nos citoyens et par notre engagement inébranlable envers la discipline
financière.
Certains membres de l’opposition et nombre de commentateurs de droite
prétendent, à tort, que nous ne pensons qu’à dépenser. Que je ne pense qu’à
dépenser.
Notre gouvernement a transformé 30 années de déficits continus en cinq
budgets équilibrés successifs. Et nous nous dirigeons vers un sixième cette
année – la plus longue série de budgets équilibrés de suite de notre
histoire.
Nous pensons tellement à dépenser qu’il n’y a pas si longtemps, sur
chaque dollar, 35 cents servaient à amortir la dette. Aujourd’hui, il n’y
en a plus que 20 et ce n’est pas fini.
Nous pensons tellement à dépenser que nous avons remboursé
45 milliards de dollars de dette. Et nous continuerons à réduire la dette.
Notre endettement est passé de 72 p. 100 du PIB à moins de
50 p. 100. Et ce n’est pas fini. Nous sommes tellement le genre de
libéraux qui taxent à qui mieux mieux pour dépenser toujours plus que nous
avons réduit l’impôt sur les particuliers, l’impôt sur les sociétés et
les cotisations d’assurance-emploi de 20 milliards de dollars par an.
C’est un bilan dont nous sommes fiers. Un bilan dont je suis fier. Et c’est
un bilan que je n’ai pas l’intention de mettre en jeu.
Le programme d’action libéral reconnaît que pour maintenir un bilan
financier et économique sain nous devons continuer d’investir dans notre
société : dans l’apprentissage, dans la santé, dans nos enfants et dans l’environnement.
Le 11 septembre. Enron. WorldCom. Ces événements bouleversants sont venus
nous rappeler l’importance des gouvernements.
Pour ma part, j’ai toujours cru que le gouvernement contribue utilement au
bien-être de la société. J’ai toujours rejeté le dogme droitiste voulant
que le gouvernement soit toujours le problème.
Et regardons ce que nous avons accompli : la Prestation nationale pour
enfants, la préservation du Régime de pensions du Canada, le Programme d’aide
préscolaire aux Autochtones, le réseau scolaire Rescol, les bourses d’études
du millénaire, nos investissements dans les universités, l’argent que nous
avons consacré à la santé, nos investissements dans le développement de la
petite enfance, un nouveau Cadre stratégique pour l’agriculture, la loi sur
la clarté.
Mais pour conserver la confiance du public, il ne suffit pas d’avoir fait
avancer les choses. Il faut continuer d’avancer.
Car, mes amis, il nous reste encore beaucoup de travail à accomplir. Il
reste encore trop d’enfants qui ne profitent pas d’un bon départ dans la
vie. Nous avons la responsabilité de faire beaucoup mieux.
Dans la circonscription de Bill Graham, Rosedale, on trouve de belles grandes
maisons. Certains parmi vous habitez peut-être dans ces maisons. Mais sa
circonscription inclut aussi le quartier Regent Park, où personne d’entre
vous n’habite, mais où les familles et les enfants pauvres sont trop nombreux.
Ces enfants ont besoin d’un bon départ dans la vie. Ils ont besoin de l’aide
du gouvernement.
Investir dans les gens, c'est à la fois une bonne politique économique et
une bonne politique sociale. Nous devons offrir les meilleures perspectives
possibles à nos enfants — notre avenir en dépend. Comme société, nous
devons tâcher de donner à tous les enfants du Canada, où qu'ils se trouvent,
le meilleur départ possible dans la vie et la chance de réaliser pleinement
leur potentiel, afin qu’ils puissent contribuer pleinement à la société
canadienne.
C'est la raison pour laquelle nous nous sommes engagés dans le dernier
discours du Trône à bonifier de nouveau la Prestation nationale pour enfants
en faveur des familles à faible revenu, comme nous l'avons fait à plusieurs
reprises ces dernières années.
Après demain, Roy Romanow rendra public le rapport de la Commission royale
sur l’avenir des soins de santé – un jalon très important sur la voie de
la réforme et de la viabilité à long terme du régime public d’assurance-maladie
au Canada. Le rapport de monsieur Romanow de même que le rapport du Comité
sénatorial et divers rapports provinciaux aideront les gouvernements à
élaborer une approche nationale en vue de répondre aux besoins des Canadiens
en matière de soins de santé.
Notre gouvernement apportera sa contribution. Nous allons consacrer nos
énergies à travailler avec les provinces au cours des prochaines semaines à
élaborer une approche fédérale-provinciale. Tous les premiers ministres –
que nous soyons en désaccord ou non sur d’autres sujets – m’ont assuré
de leur entière collaboration dans l’établissement d’un plan de réforme
du système de santé. Et ils peuvent compter en retour sur ma pleine
collaboration.
Chacun sait que l’argent ne permettra pas de régler tous les problèmes
dans le secteur de la santé. Mais si nous avons un plan et si nous nous
entendons sur des changements importants à long terme, j’assure les Canadiens
que les dollars fédéraux nécessaires seront disponibles.
Les Canadiens s’attendent à ce que les premiers ministres parviennent à
une entente sur un plan global quand ils se réuniront à la fin de janvier ou
au début de février. C’est ce qui va se produire. Les Canadiens ne se
contenteront pas de moins que cela de la part de leurs dirigeants.
De plus, la part fédérale du financement de ce plan sera prévue dans le
budget de M. Manley à la fin de février.
Le discours du Trône, il y a deux mois, mettait l’accent sur la santé,
les enfants, l’infrastructure, et l’innovation.
Les villes comme Toronto jouent un rôle important dans le développement
économique du pays. C’est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral
procède aussi à la mise en oeuvre d’une stratégie urbaine.
Allan Rock et Jane Stewart ont coprésidé le Sommet national sur l’innovation
et l’apprentissage à Toronto la semaine dernière. Ce fut un succès. Nous
allons y donner suite pour bâtir une société axée sur l’apprentissage, une
société du savoir.
Nous sommes en bonne voie de préparer un budget qui donnera suite à ces
priorités d’une manière qui assurera l’imputabilité, la viabilité et l’équilibre
budgétaire à long terme.
Cependant, le discours du Trône énonçait aussi d’autres priorités. Nous
avons présenté devant le Parlement un ensemble de mesures sur l’éthique.
D’autre part, la semaine prochaine, nous allons déposer un projet de loi
prévoyant une réforme en profondeur du financement des partis politiques.
J’aimerais passer maintenant à une question d’une importance capitale
pour l’avenir. Hier, la Chambre des communes a commencé à débattre de la
ratification du Protocole de Kyoto.
Dans l’intérêt des générations qui suivront, il incombe à la
génération actuelle de Canadiens de s’atteler à la tâche. Et c’est un
défi que les Canadiens sont prêts à relever.
Je suis conscient que la façon dont nous choisirons de respecter nos
obligations en vertu du Protocole de Kyoto devra tenir compte des répercussions
sur l’économie.
Mon gouvernement a travaillé trop fort à améliorer notre situation
économique pour la compromettre. Il n’en est pas question.
Nous avons dix ans pour respecter nos obligations aux termes du Protocole.
Nous pouvons progresser ensemble. Nous allons ratifier Kyoto et respecter nos
obligations à l’aide d’un plan conçu au Canada.
Nous travaillons très fort à mettre en place un plan qui réduira l’incertitude
pour les entreprises et pour les investisseurs. Un plan qui nous permettra de
remplir nos responsabilités environnementales tout en tenant compte des
secteurs les plus touchés.
Les nombreuses bonnes idées de l’industrie et des gouvernements des
provinces nous permettront de faire un bon bout du chemin. La technologie nous
amènera encore plus loin.
Le plan ne répondra peut-être pas à toutes les questions possibles. Aucun
plan ne pourrait le faire. Les rajustements nécessaires seront effectués à
mesure que nous apprendrons et que nous travaillerons ensemble.
Si nous travaillons ensemble, si nous saisissons les opportunités et si nous
laissons de côté la rhétorique, je suis persuadé que le Canada sera à la
hauteur du défi.
Nous allons atteindre nos objectifs d’une manière responsable, dans l’intérêt
de l’économie, de l’environnement et des générations qui suivront.
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