Discours du Premier ministre Jean Chrétien à l'occasion du Sommet Microsoft Can Win 2002 sur l'innovation et la
compétitivité au Canada
Le 20 août 2002
Toronto (Ontario)
Je tiens à remercier Microsoft Canada de m’avoir invité à Can Win 2002.
Parmi tous les privilèges qu’offre ma charge de Premier ministre, aucun ne
me procure autant de satisfaction que celui de proclamer le succès exemplaire
du Canada dans la nouvelle économie mondiale.
Je sais gré à Microsoft de me fournir ce forum véritablement exceptionnel
pour vous livrer quelques réflexions sur la stratégie audacieuse de notre
gouvernement en vue de faire de la feuille d’érable un emblème d’excellence
en matière d’innovation au 21e siècle. J’aimerais vous
parler aussi de certains des défis les plus fondamentaux qui se posent, selon
moi, au Canada et à d’autres pays avancés si nous voulons entretenir la
révolution de l’innovation en tant que moteur mondial de la croissance et de
la prospérité économiques.
Comme de raison, je suis conscient de prêcher en quelque sorte à la chorale
en vantant les mérites du Canada dans la nouvelle économie, car les
participants à cette conférence savent déjà que le succès est à la portée
du Canada. À vrai dire, le succès nous appartient déjà.
Il nous appartient parce que nous avons apprivoisé cet outil puissant qu’est
l’Internet. Nos chercheurs mettent au point des technologies et des procédés
de pointe. Nos entrepreneurs rivalisent de créativité dans la présentation de
nouveaux produits et services. Et nos exportateurs partent à la conquête,
comme jamais auparavant, de nouveaux marchés.
On trouve d’importantes filières de haute technologie dans toutes les
régions du pays. De nombreuses firmes de renommée internationale sont nées
chez nous. Des firmes comme Research in Motion dont le célèbre appareil
Blackberry est devenu la référence internationale en matière de courrier
électronique sans fil et dont le fondateur, Mike Lazaridis est devenu la
référence canadienne en matière de leadership en entreprise en finançant
personnellement le Perimeter Institute.
Le succès appartient au Canada en raison de la vigueur fondamentale de notre
économie. Les gouvernements fédéral et provinciaux ont assaini leurs
finances. Notre gouvernement a déposé cinq budgets excédentaires de suite. La
dette publique diminue. Les taux d’intérêt demeurent faibles et stables.
Nous avons aidé à instaurer un cadre propice à la croissance et à l’investissement
en réduisant les impôts sur le revenu des particuliers et l’impôt des
sociétés. Nous avons adopté le plus important plan d’allégements fiscaux
de toute l’histoire du Canada. Dans le cadre de ce plan, le taux d’imposition
des sociétés canadiennes s’établira environ cinq points sous les taux
américains moyens. En plus, nous offrons l’un des régimes fiscaux les plus
avantageux au monde pour la recherche et le développement.
Au risque de me vanter un peu, Mesdames et Messieurs, je crois pouvoir
affirmer aussi que le succès appartient au Canada parce que notre gouvernement
a adopté une stratégie proactive et ciblée pour stimuler l’innovation.
Quand nous avons formé le gouvernement au début, la nouvelle économie n’était
qu’une expression dans le vent. Il reste qu’au coeur de la grave récession
qui sévissait alors, la plupart des Canadiens se seraient contentés de n’importe
quelle sorte d’économie. À cette époque, le mot cybercommerce n'était pas
encore entré dans la langue. L'Internet n'existait que dans la pensée d'un
chercheur anonyme du Pentagone. Depuis, l'autoroute de l'information a
révolutionné les affaires, l'administration et la société.
Nous savions qu'il nous fallait préparer le Canada à prospérer dans le
nouveau siècle et dans la nouvelle économie. Nous savions qu’une vision
nationale à long terme serait essentielle. Mais nous savions aussi que le
gouvernement ne pouvait pas tout faire. Que notre rôle était de mettre en
place un cadre d’innovation sur lequel le secteur privé pourrait bâtir pour
l’avenir. Et que nous devions concentrer nos efforts sur les secteurs où nous
pouvions avoir un impact réel.
Je crois que nous avons fait d’immenses progrès dans la poursuite de cet
objectif.
Grâce à notre stratégie novatrice « Un Canada branché », nous
avons atteint le deuxième rang mondial dans l’utilisation de l’Internet. Le
Canada est le premier grand pays au monde à avoir connecté toutes ses écoles
et bibliothèques à l’Internet. Le réseau pancanadien à fibres optiques est
le plus perfectionné au monde. De plus, nous nous sommes fixé l’objectif
ambitieux de faire du Canada un centre d’excellence mondial en commerce
électronique.
Nous avons également compris une réalité encore plus fondamentale. C’est
que la recherche et le développement sont le nerf de la nouvelle économie.
Nous avons compris que le Canada doit être le lieu où se font des découvertes
et des percées technologiques. Et que le talent humain, l’ingéniosité et la
créativité sont les clefs de voûte de l’innovation.
C’est la raison pour laquelle je crois que nous apportons notre
contribution la plus importante au succès du Canada dans la nouvelle économie
en effectuant des investissements sans précédent dans la promotion de l’enseignement
supérieur et dans la création d’une infrastructure de
recherche-développement ultraperfectionnée dans nos collèges et universités.
Afin d’aider les parents à économiser pour les études de leurs enfants,
nous avons créé la Subvention canadienne pour l'épargne-études. Afin d’élargir
l’accès aux études supérieures, nous avons créé les bourses d’études
du millénaire ainsi que les subventions canadiennes pour études pour les
étudiants ayant des personnes à charge, une déficience ou un très faible
revenu.
Mesdames et Messieurs, nos collèges et universités comptent parmi les
meilleurs au monde. Vous n’avez qu’à demander à Bill Gates. Il a connu un
grand succès en recrutant des chercheurs de talent de l’Université de
Waterloo. Même si les Canadiens se font une fierté d’être toujours des
hôtes modèles, je dois avouer aujourd’hui que l’un des objectifs
fondamentaux de notre stratégie d’innovation consiste à faire en sorte que
Bill Gates emploie ces talents canadiens chez nous. À cette fin, nous voulons
faire de nos collèges et universités des pôles d’attraction pour les
meilleurs cerveaux et les meilleures idées, qu’ils proviennent du Canada ou d’ailleurs
dans le monde.
C’est pourquoi nous avons créé la Fondation canadienne pour l’innovation,
dotée d’un budget de plusieurs milliards de dollars, les réseaux de centres
d’excellence, les Instituts de recherche en santé du Canada et Génome
Canada. C’est pourquoi nous avons sensiblement augmenté l’aide aux conseils
subventionnaires de la recherche avancée. Et c’est pourquoi nous nous sommes
engagés à créer 2000 chaires de recherche avancée dans nos universités.
Pour comprendre l’importance que peut avoir cette initiative au Canada,
imaginez l’impact qu’aurait la création de 20 000 nouvelles chaires de
recherche par le gouvernement américain.
Je suis fier de ce que notre gouvernement a accompli, mais nous savons aussi
que nous pouvons et que nous devons faire encore plus.
Nous savons que nous sommes engagés dans une course planétaire où la
victoire va au plus rapide. Que nos concurrents innovent sans cesse et que nous
devons continuer de nous fixer des objectifs toujours plus ambitieux.
C’est pourquoi nous nous sommes engagés à doubler l’investissement du
gouvernement dans la recherche-développement en vue de hisser le Canada parmi
les cinq premiers pays pour son rendement en R-D d’ici 2010. En plus, nous
avons entrepris de consulter tous les Canadiens sur les prochaines mesures que
nous devons prendre afin d’assurer le succès au Canada dans la nouvelle
économie. Et nous allons annoncer de nouvelles initiatives importantes dans ce
domaine.
Mes amis, nos projets sont audacieux. Ils sont axés sur l’avenir. Certains
sont uniques au monde. D’autres s’inspirent de l’expérience d’autres
pays qui, comme nous, relèvent avec enthousiasme les défis de la nouvelle
économie.
Mais aussi audacieux ou brillants soient-ils, nos projets n’aboutiront à
rien à moins que la nouvelle économie ne demeure fermement arrimée à une
notion très ancienne, mais une notion qui ne passe jamais de mode. La notion d’intégrité.
L’onde de choc des scandales retentissants d’Enron, de WorldCom et d’autres
a secoué les marchés mondiaux. Nous avons constaté que la confiance est vite
ébranlée. Si de telles révélations nous ont été largement épargnées au
Canada, nous ne sommes pas à l’abri de ce genre de choses. Nous nous
souvenons tous de l’affaire Bre-X.
À vrai dire, nous assistons en ce moment à une remise en question de la
confiance, que ce soit dans nos institutions publiques ou privées ou dans nos
Églises. J’en connais même qui ne font pas beaucoup confiance aux médias.
La tâche de rétablir la confiance incombe aux dirigeants des secteurs
public et privé. La transparence est plus importante que jamais ces temps-ci.
Pour notre part, notre gouvernement compte présenter un important ensemble de
mesures sur l’éthique dans le secteur public cet automne. Le mot d’ordre
sera la transparence, et le secteur privé pourra s’en inspirer.
Je mets d’ailleurs les chefs d’entreprise ici présents au défi de
suivre notre exemple et de prendre des mesures énergiques pour s’assurer que
la gestion des entreprises au Canada réussisse le test de la transparence et
contribue à la confiance dans nos institutions.
La confiance sur laquelle repose l’économie tout entière.
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