Adresse
du Premier ministre Jean Chrétien en réponse au discours du Trône
Le 31 janvier 2001
Ottawa (Ontario)
Monsieur le Président, je tiens tout d’abord
à vous féliciter pour votre élection à titre de président de la Chambre des
communes.
J’aimerais également féliciter les
motionnaires de l’adresse en réponse au discours du Trône. L’un et l’autre,
le député de Northumberland et la députée de Laval-Est, siègent à la
Chambre pour la première fois. Si j’en juge par les discours qu’ils ont
prononcés hier, ils sont tous les deux promis à un bel avenir.
En même temps, Monsieur le Président,
ayant moi-même siégé dans cette enceinte depuis un certain nombre d’années,
je voudrais souhaiter la bienvenue à tous les nouveaux députés, quelle que
soit leur allégeance politique, et les féliciter.
C’est un honneur et un privilège de
siéger à la Chambre des communes. Qu’il s’agisse de notre première
élection ou de la douzième, c’est toujours avec humilité que l’on reçoit
le mandat de ses concitoyens et concitoyennes de les représenter au Parlement
du Canada.
Personne n’est attiré ici par l’argent.
Personne n’est attiré ici par l’horaire de travail. Tous autant que nous
sommes, quel que soit notre parti, nous sommes ici pour la même raison :
pour servir nos commettants de notre mieux et pour contribuer autant que nous le
pouvons à rendre notre pays meilleur. Et nous avons tous l’obligation, quel
que soit le parti que nous représentons, de veiller, par nos paroles et par nos
actes, à bâtir la confiance dans nos institutions et dans notre démocratie.
Rappelons-nous ce que Churchill disait
au sujet de la démocratie : « Le pire système de gouvernement au
monde, à l’exception de tous les autres. » Bien sûr, des
améliorations sont toujours possibles, mais il ne devrait faire aucun doute que
le Parlement du Canada sert très bien notre pays.
Comme toute institution humaine, la
Chambre des communes n’est pas parfaite. Il est possible de la renforcer. Au
fil des ans, de nombreux changements ont été apportés pour améliorer le
Parlement. Et d’autres changements seront apportés pour moderniser l’institution
parlementaire à l’aube du XXIe siècle. Le leader en Chambre
travaille avec ses collègues des différents partis sur des réformes qui vont
permettre à cette chambre de servir encore mieux les intérêts de tous les
Canadiens. Le vote électronique par exemple. Un meilleur soutien en recherche
pour les comités. Le renvoi d’un plus grand nombre de projets de loi en
comité après la première lecture.
Le 27 novembre dernier, la population
du Canada a confié un nouveau mandat au gouvernement. Je suis particulièrement
fier du fait que les libéraux de ce côté-ci et en face, dans le coin,
viennent de toutes les provinces et de chacun des territoires; que nous formons
un gouvernement véritablement national.
Je reconnais, comme c’est le cas dans
toute démocratie, que beaucoup de Canadiens ont voté pour d’autres partis.
Dans certaines provinces, nous ne comptons pas autant de membres que nous le
souhaiterions. Nous allons travailler très fort comme gouvernement pour nous
assurer que les députés libéraux de l’Ouest du Canada seront beaucoup plus
nombreux après les prochaines élections.
Je vous promets aujourd’hui que ce
gouvernement va écouter tous les Canadiens, où qu’ils habitent au Canada.
Nous allons gouverner dans l’intérêt de tous les Canadiens, sans égard au
parti pour lequel ils ont voté.
Nous avons reçu de la population
canadienne le mandat de laisser de côté les vieilles querelles, les vieux
problèmes et les vieilles solutions. Le mandat de fixer des buts et des
objectifs ambitieux pour un Canada fort et uni au cours des années à venir.
Le mandat de construire sur les
fondations solides que nous avons mises en place depuis que nous avons formé le
gouvernement. Le mandat de préparer le pays à suivre le rythme accéléré des
changements qu’exige la nouvelle économie. Le mandat de faire entrer ce que
le Canada offre de mieux dans le XXIe siècle en bâtissant une
économie innovatrice, en veillant à l’inclusion sociale et en faisant mieux
entendre notre voix collective sur la scène mondiale. Voilà les thèmes que j’aborderai
aujourd’hui. Mes ministres entreront dans les détails des autres éléments
du programme d’action du gouvernement au cours de ce débat.
Aucun autre pays ne peut envisager le
siècle qui débute avec plus de confiance que le Canada. Nous allons faire de
la première décennie du XXIe siècle, la décennie du Canada.
Une décennie placée sous le signe de la poursuite de l’excellence et de l’égalité
des chances.
Quand nous avons formé le
gouvernement, il y a plus de sept ans, nous avions une vision du pays à bâtir.
Des valeurs et des principes qui allaient guider notre action. En suivant une
voie bien canadienne. Selon un modèle bien canadien. Notre vision et notre
objectif n’ont pas changé.
Une société vouée à l’excellence
et déterminée à favoriser le succès. Où la prospérité ne se limite pas à
quelques-uns, mais est partagée – et créée en fait – par le plus grand
nombre. Une société où tous les enfants profitent d’un bon départ dans la
vie. Où les jeunes ont la possibilité de s’épanouir et de devenir les
meilleurs dans le domaine de leur choix. Où les citoyens ont accès aux
compétences et aux connaissances dont ils ont besoin pour exceller. Où les
citoyens, quel que soit leur revenu, reçoivent des soins de santé de qualité.
Où les familles jouissent de collectivités sûres et dynamiques et d’un
environnement sain. Où les Canadiens travaillent de concert avec d’autres
pays à promouvoir la paix, la diversité culturelle et la réalisation des
bienfaits pour l’humanité de la nouvelle économie mondiale.
Nous avons compris qu’il n’est pas
possible de tout accomplir d’un seul coup. Que pour gouverner avec succès, le
secret est de progresser de manière pragmatique, une étape à la fois et de
manière audacieuse au besoin. De fixer des objectifs d’ensemble. De faire des
choix en fonction des valeurs qui font la force du Canada. D’effectuer de
grands changements durables selon nos moyens.
C’est précisément ce que nous
faisons depuis sept ans. C’est la manière de gouverner que les électeurs du
Canada ont approuvé trois fois de suite. Et c’est l’approche que nous
allons continuer de suivre.
Nous avons entrepris de rétablir notre
souveraineté financière afin de nous redonner les moyens de faire des choix
pour l’avenir. Nous avons réussi au-delà des plus grandes espérances. Et
notre engagement reste inébranlable envers l’équilibre budgétaire, la
réduction de la dette et une fiscalité concurrentielle pour les investisseurs
et les entrepreneurs.
Monsieur le Président, il va sans dire
qu’il règne aujourd’hui une certaine incertitude quant aux perspectives à
court terme de l’économie américaine. Le gouvernement suivra de près l’évolution
de la situation aux États-Unis et dans l’économie mondiale et il examinera
son incidence possible sur le Canada. Cela dit, le succès de nos politiques
économiques nous place dans une meilleure position que jamais pour traverser
une période de ralentissement temporaire de l’économie américaine. Nous
avons toutes les raisons de croire que la performance de notre économie sera
meilleure que celle de nos principaux concurrents et partenaires commerciaux
cette année.
Monsieur le Président, un climat
financier sain n’est pas une fin en soi, mais plutôt la condition essentielle
sans laquelle un gouvernement ne pourrait effectuer tous les investissements
socio-économiques qu’il doit faire en collaboration avec ses partenaires.
Afin de bâtir un pays prospère où tous peuvent partager les fruits de la
croissance.
De ce côté-ci de la Chambre, nous
croyons qu’un gouvernement peut contribuer activement au mieux-être de la
société. Pour ce faire, il doit pouvoir compter sur une fonction publique de
haut niveau. Je suis fier de notre fonction publique. Le gouvernement prendra
toutes les mesures nécessaires pour que la fonction publique continue de
disposer des talents dont elle a besoin dans sa poursuite de l’excellence.
Nous procéderons aussi aux réformes qui s’imposent pour moderniser la
fonction publique en fonction des besoins du XXIe siècle.
Monsieur le Président, nous avons
entrepris il y a plus de sept ans de faire notre part en tant que gouvernement
pour bâtir une économie plus innovatrice. La Fondation canadienne pour l’innovation.
Les réseaux de centres d’excellence. Les Instituts de recherche en santé du
Canada. Les 2000 Chaires de recherche du Canada. L’augmentation des budgets
des conseils subventionnaires. La modification des taux d’imposition des
sociétés et des taux d’imposition des gains en capital. Le programme pour
faire du Canada l’un des pays les plus branchés au monde.
Nous avons posé des assises solides.
Mais nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers. Sinon, nous allons nous
laisser devancer.
Au XXIe siècle, nous
devons mener notre action à la fois sur les fronts social et économique. Nous
pourrons ainsi montrer au monde entier un Canada dont la société est vouée à
l’innovation comme à l’inclusion, à l’excellence comme à la justice.
Pour y arriver, nous avons un plan d’action
qui allie l’innovation, les compétences et l’apprentissage ainsi que l’engagement
de veiller à ce que tous nos enfants aient la chance de réaliser leur
potentiel.
Commençons par l’innovation. Dans la
nouvelle économie, le plus rapide remporte la course. Celui qui fait les
découvertes en premier et qui les met en marché. Le premier à mettre au point
de meilleurs procédés. C’est vrai dans le secteur de la haute technologie,
mais c’est aussi vrai dans presque tous les secteurs – de l’extraction des
ressources à l’agriculture, en passant par la commercialisation.
Le Canada doit posséder l’une des
économies les plus avant-gardistes au monde. Un des éléments clés pour y
parvenir, c’est de hisser notre effort par habitant en recherche et
développement au rang des cinq premiers pays au monde.
Pour atteindre cet objectif, le
gouvernement a établi un plan d’action à cinq volets.
Premièrement, doubler à tout le moins
les fonds que le gouvernement fédéral consacre déjà à la recherche et au
développement d’ici 2010. Au cours de son mandat, le gouvernement affectera
davantage de fonds aux conseils subventionnaires, à Génome Canada, aux
Instituts de recherche en santé du Canada de même qu’à la recherche
gouvernementale. Le Canada deviendra ainsi le lieu le plus propice au monde à
la recherche de premier plan. Cet effort renforcera notre économie et notre
société.
Deuxièmement, continuer de faire en
sorte que les universités canadiennes soient le lieu le plus propice à l’excellence
en recherche et un pôle d’attraction pour les meilleurs cerveaux. Le
gouvernement travaillera avec les milieux universitaires en vue d’aider nos
universités, afin qu’elles aient les ressources nécessaires pour profiter
pleinement des activités de recherche parrainées par le gouvernement
fédéral.
Troisièmement, accélérer notre
capacité de mettre en marché les découvertes canadiennes et d’offrir ainsi
de nouveaux produits et services.
Quatrièmement, poursuivre une
stratégie globale en matière de science et de technologie. Une stratégie qui
favorise une collaboration accrue à la recherche internationale aux frontières
du savoir.
Cinquièmement, travailler avec le
secteur privé pour identifier les meilleurs moyens de rendre accessibles les
services Internet à large bande dans toutes les collectivités du Canada d’ici
2004.
Toutefois, notre engagement envers la
recherche dans ce pays ne doit pas se limiter au gouvernement fédéral. Il faut
que ce soit une entreprise nationale. Par conséquent, aujourd’hui, je lance
le défi au secteur privé et aux provinces de consacrer davantage de ressources
au cours des prochaines années à faire du Canada l’un des chefs de file
mondiaux en recherche et développement.
Monsieur le Président, la transition
vers la nouvelle économie n’intéresse pas seulement un secteur économique
en particulier. Le succès économique dans tous les secteurs dépend plus que
jamais de l’esprit d’entreprise, de l’ingéniosité et de la créativité.
Il dépend, fondamentalement, de nos talents humains. Dans ce contexte, nos
investissements les plus importants sont ceux que nous effectuons dans nos gens.
Je veux que le Canada soit perçu dans
le monde entier comme le pays qui possède la main-d’oeuvre la plus
spécialisée et la plus douée qui puisse se trouver. Il faut en faire un
objectif national. Et y consacrer un effort national.
L’apprentissage ne se déroule pas
seulement à l’école. Avec les programmes préscolaires, le réseau d’écoles
publiques, les établissements d’enseignement postsecondaire et la formation
en cours d’emploi, le Canada a déjà en mains tous les éléments d’une
infrastructure nationale pour l’apprentissage continu. Tous les gouvernements,
le secteur privé et les établissements d’enseignement doivent travailler
ensemble à l’amélioration de cette infrastructure nationale pour le bien des
Canadiens.
Pour sa part, le gouvernement du Canada
a investi massivement au cours de nos deux premiers mandats pour aider à
préparer notre pays à être le bassin par excellence de talents et de
compétences. Que ce soient les Subventions canadiennes pour l’épargne-études,
qui aident les parents à économiser pour l’éducation de leurs enfants. L’augmentation
du crédit d’impôt pour études. Les Bourses d’études canadiennes du
millénaire pour les étudiants d’aujourd’hui. Les nouvelles règles
relatives aux RÉER qui permettent aux Canadiens de financer leur recyclage et
leur perfectionnement. Ou les Subventions canadiennes pour études à l’intention
des étudiants ayant des personnes à charge, des personnes handicapées ou des
plus démunis.
Il reste encore du travail à faire, et
ce gouvernement est prêt à faire toute sa part dans cet effort national.
Nous voulons qu’au moins un million d’adultes
canadiens d’âge actif de plus aient la possibilité de se perfectionner. À
cette fin, nous allons créer un Régime enregistré d’apprentissage personnel
pour permettre aux Canadiens de planifier et de financer plus facilement leurs
besoins d’apprentissage.
Nous veillerons à ce que nos
programmes d’emploi pour les jeunes permettent de venir en aide aux jeunes à
risque qui ont le plus de difficulté à réussir la transition entre l’école
et le monde du travail.
Nous allons faire en sorte que ceux qui
ont les plus grands besoins de formation soient admissibles à des allocations
de formation.
Un effort national en vue de nous doter
de la main-d’oeuvre la plus douée et la plus compétente exige l’appui et
la collaboration des provinces, du secteur privé et des organismes bénévoles.
Nous comptons les inviter à se joindre à nous pour lancer une initiative
nationale d’alphabétisation. Nous devons rehausser les compétences en
lecture et en écriture, car trop de Canadiens ne sont pas au niveau qu’exige
la nouvelle économie.
Le Canada a besoin d’un plus grand
nombre de travailleurs qualifiés. Notre pays doit mieux réussir à attirer les
immigrants hautement qualifiés, et le gouvernement fédéral prendra les moyens
nécessaires pour y arriver. Mais nous devons tous éviter de placer des
obstacles inutiles sur leur chemin. Dans une économie mondialisée, le Canada
doit s’efforcer de mieux reconnaître les titres de compétences valables
acquis à l’étranger.
J’exhorte les gouvernements
provinciaux à revoir leurs politiques de reconnaissance des titres de
compétences acquis par les néo-Canadiens à l’étranger. J’exhorte aussi
les provinces à mettre en oeuvre l’entente-cadre sur l’union sociale, et à
prendre rapidement les mesures nécessaires pour assurer la mobilité pleine et
entière des étudiants canadiens et des Canadiens munis de titres de
compétences acquis au pays, et ce d’un océan à l’autre.
Au Canada, l’enseignement primaire et
secondaire relève de la compétence exclusive des provinces. Tous les
gouvernements provinciaux prennent cette responsabilité très au sérieux. Et
chacun d’entre eux s’efforce d’offrir un enseignement public de qualité
supérieure.
Mais nous savons tous que dans l’économie du
savoir, ceux qui abandonnent le chemin de l’école perdent la possibilité d’emprunter
bien des voies de réussite. Le taux de décrochage demeure trop élevé au
Canada. Le découragement et le décrochage scolaire des jeunes entraînent des
coûts sociaux et économiques trop lourds. C’est pourquoi je veux lancer aux
gouvernements provinciaux le défi de redoubler d’efforts pour que les jeunes
qui fréquentent l’école y restent, et pour que ceux qui ont abandonné en
reprennent le chemin.
Monsieur le Président, une économie de classe
mondiale exige des travailleurs qualifiés de même qu’une population sachant
lire et écrire, instruite et en santé. Mais pour ce faire, nous devons avoir
une société qui ne laisse personne pour compte. Les priorités économiques
sont indissociables des priorités sociales. S’il est vrai qu’une économie
vigoureuse nous permet de concrétiser nos valeurs sociales, il est aussi vrai
que la solidarité sociale est à la base de la vigueur économique.
Grâce à notre impôt progressif, à nos
mesures actives et à notre filet de sécurité sociale, le Canada a su éviter
les pires coûts sociaux et économiques de l’exclusion.
Même si les revenus de la plupart des familles
sont maintenant à la hausse, un trop grand nombre de familles monoparentales,
de membres des minorités visibles, de nouveaux immigrants et d’Autochtones
continuent de vivre dans la pauvreté. Et trop d’obstacles entravent la
participation des Canadiens handicapés à la vie collective.
Nous sommes déterminés à aider les familles
à se libérer du piège de la pauvreté. À briser le cycle de dépendance. À
aider les parents à concrétiser les espoirs et les rêves qu’ils ont pour
leurs enfants. La pauvreté chez les enfants entraîne des coûts moraux,
humains et économiques trop lourds.
La croissance économique et la création d’emplois
sont les moyens les plus sûrs de réduire la pauvreté. Les réductions d’impôt
laissent plus d’argent dans les poches des familles. Mais elles ne sont pas la
solution à tous nos problèmes sociaux. Les gouvernements ont un rôle
important à jouer. Il nous faut adopter une approche équilibrée. Nous devons
trouver des façons nouvelles et plus efficaces de favoriser de meilleures
perspectives et de répondre aux besoins fondamentaux de tous.
À cet égard, la plus grande priorité doit
être accordée à nos enfants. C’est ainsi que nous pourrons agir le plus
efficacement pour bâtir un Canada fort qui ne laisse personne pour compte.
Mais le gouvernement fédéral ne peut y arriver
seul; nous devons tous y participer.
Nous avons fait des progrès considérables au
cours des sept dernières années en travaillant de concert avec les provinces.
La Prestation nationale pour enfants est le nouveau programme social le plus
important depuis la création de l’assurance-maladie. Avec l’Accord sur le
développement de la petite enfance conclu le 11 septembre dernier, nous avons
fait un autre pas significatif dans la bonne direction. Mais nous devons faire
davantage. Et nous ferons davantage.
Notre objectif doit être de faire en sorte qu’aucun
enfant ne soit privé de ses chances de réussir par les effets débilitants de
la pauvreté. Que tous les enfants puissent avoir un bon départ dans la vie.
L’urgence d’agir se fait particulièrement
sentir chez les enfants autochtones. Bien franchement, en ce qui concerne les
peuples autochtones, j’ai bien peur que nous consacrons trop de temps, trop d’énergie
et trop d’argent sur le passé, et pas assez sur les mesures nécessaires pour
assurer un bel avenir aux enfants d’aujourd’hui et de demain.
Trop souvent, nos investissements ne profitent
pas à ceux qui en ont le plus besoin. Cela doit changer. Nous devons tourner la
page. À partir de maintenant, nous devons orienter et cibler nos
investissements en fonction des plus grands bienfaits.
Il n’y a jamais assez de ressources pour tout
faire. Notre approche consistera à mettre l’accent sur l’avenir. Et,
surtout, sur les besoins des enfants. Pour commencer, nous augmenterons de
façon significative les ressources consacrées au Programme d’aide
préscolaire aux Autochtones, un programme créé par notre gouvernement et qui
produit d’excellents résultats.
Nous devons réduire de façon significative l’incidence
du syndrome d’alcoolisme foetal au sein de nos communautés autochtones. Et
nous nous engageons à participer à un effort national en vue d’atteindre cet
objectif.
Le nombre de jeunes Autochtones au sein de notre
système de justice pénale est trop élevé. C’est une réalité que notre
société doit reconnaître. Autrement, ce serait se mettre la tête dans le
sable. Il nous faut prendre les mesures nécessaires dans le cadre de nos
politiques économiques et sociales afin de réduire ce nombre. Notre objectif
doit être de réduire le nombre d’Autochtones qui sont incarcérés ou qui
ont des démêlés avec la justice. D’ici une génération, il ne devrait plus
y avoir de différence entre le taux d’incarcération des Autochtones et celui
du reste de la société canadienne.
Ces objectifs sont ambitieux. Ils seront
difficiles à atteindre. Il y aura des erreurs de parcours. Et ils ne pourront
être atteints dans l’espace d’un seul mandat. Mais nous devons participer
à cet effort national. Sa réussite – ou son échec – nous en dira long sur
le genre de pays que nous formons.
Monsieur le Président, le 11 septembre dernier,
nous avons tenu une rencontre des premiers ministres très fructueuse à Ottawa,
où il a été question de santé et de développement de la petite enfance. Par
la suite, nous avons conclu des ententes avec toutes les provinces pour un
programme d’infrastructures fédéral – provincial – municipal. Depuis que
nous formons le gouvernement, nous avons fait la preuve à maintes reprises qu’il
est possible de travailler ensemble lorsque nous mettons l’accent sur les
besoins de l’avenir. Et que notre système fédéral fonctionne bien.
Les Canadiens portent leur regard au-delà des
frontières de leur province ou de leur région. Ils font partie d’une
collectivité plus large, et ils veulent que leurs gouvernements travaillent
ensemble, dans un esprit de collaboration, pour concrétiser nos valeurs
communes et donner vie à l’expérience canadienne. C’est un objectif que
nous pouvons et que nous devons atteindre, en travaillant dans le respect de nos
compétences respectives. Et dans le respect les uns des autres.
Cet esprit de coopération et de collaboration
me dit que nous pouvons nous donner des objectifs ambitieux. Que nous pouvons
les atteindre ensemble. Qu’un effort national peut arriver à offrir à tous
les enfants un bon départ dans la vie et une véritable chance de tirer profit
des possibilités qu’offre la société canadienne. Nous sommes prêts à
faire notre part. Et je tends la main à mes collègues des provinces pour qu’ils
se joignent à ce grand effort national.
Il nous a fallu travailler ensemble pendant
toute une génération pour réduire l’incidence de la pauvreté chez nos
aînés. Nous y sommes arrivés en procédant étape par étape. Mais nous avons
franchi bien des étapes ensemble. Il ne s’agit pas d’être suffisants, mais
de réaliser que nous avons fait de grands progrès. Nous pouvons et nous devons
faire des progrès semblables en faveur des enfants. Ce ne sera pas l’affaire
d’une journée. Il y aura des obstacles en cours de route.
Les enfants doivent être une priorité
nationale. Certes, comme toujours, les ressources ne sont pas illimitées. Nous
devons toutefois orienter l’utilisation de nos ressources en fonction de ce
grand objectif national. Au cours de ce mandat, dans le cadre de nos budgets,
nous présenterons un calendrier d’investissements qui nous permettra de faire
des progrès réels en vue d’assurer un meilleur avenir à tous les enfants du
Canada.
Un système de santé moderne et de qualité est
essentiel pour l’avenir et le bien-être de tous les Canadiens, peu importe
leur âge. Il y a quelques instants, j’ai parlé de l’accord du 11 septembre
sur la santé. Cet accord prévoit de nouveaux investissements. Mais il comporte
aussi un plan d’action. Au cours des prochaines années, nous continuerons à
travailler ensemble à la mise en oeuvre de ce plan d’action. Notre
collaboration nous permettra d’atteindre nos objectifs, c’est-à-dire d’assurer
à tous les Canadiens un accès en temps opportun à des soins de santé de
grande qualité, sans égard à leur revenu ou leur lieu de domicile. Et nous
ferons rapport aux Canadiens sur notre rendement et sur les progrès accomplis.
Aujourd’hui, je réaffirme notre engagement de
travailler avec les provinces, ainsi qu’avec tous les Canadiens, pour faire
entrer notre système d’assurance-santé dans le XXIe siècle et
faire en sorte qu’il réponde aux besoins des Canadiens. Nous travaillerons
avec les provinces et nous leur donnerons notre appui pour que notre système de
santé soit mieux intégré, plus efficace, plus à l’écoute des besoins des
gens et plus transparent.
La santé des Autochtones sera l’objet d’efforts
supplémentaires, tout comme les nouvelles technologies et les autres
stratégies pour venir en aide aux personnes handicapées. Nous consacrerons
aussi plus d’efforts à la promotion d’habitudes de vie saine et au
renforcement de la recherche en santé. De plus, nous ferons le nécessaire pour
offrir un système d’assurance-santé moderne pour les années à venir.
Un environnement sain et sécuritaire est
essentiel à la santé des Canadiens et à l’avenir de nos enfants. Nous
déploierons encore plus d’efforts, au Canada comme sur la scène
internationale, pour favoriser un environnement sain. Nous mettrons l’accent
sur la qualité de l’air, la salubrité de l’eau et la protection de notre
patrimoine naturel.
Monsieur le Président, nous avons encore frais
à l’esprit les souvenirs de la dernière campagne électorale. Les
rassemblements partisans. Les visites dans les foyers et dans les usines. Parmi
tous ces événements, il y en a un que je retiens tout particulièrement. Il s’agit
d’une visite que j’ai effectuée un beau samedi matin au conservatoire de
musique à Victoria. À cette occasion, j’ai assisté à un récital offert
par des jeunes musiciens canadiens au talent extraordinaire. Et j’ai
réfléchi à la place des arts et de la culture. À leur importance vitale pour
la société canadienne.
Dans une société mondialisée, dans un univers
qui comprend des centaines de canaux télévisés et à l’ère de l’Internet,
l’appui à la culture canadienne est plus important que jamais.
Au cours de ce mandat, le gouvernement
accroîtra de façon significative son appui pour que nos institutions
culturelles, nos artistes et nos créateurs puissent jouer leur rôle. Un rôle
fondamental qui consiste à nous aider à mieux nous connaître. Et à agir
comme ambassadeurs du Canada à l’étranger pour partager ce que notre pays a
de meilleur à offrir.
Monsieur le Président, au cours de plus d’un
siècle d’histoire, nous avons développé une manière bien canadienne de
faire les choses. Nous avons adopté une approche flexible qui reconnaît l’importance
de l’action et des responsabilités tant individuelles que collectives. Nous
avons appris à apprécier la chance que nous avons de pouvoir travailler
ensemble à l’atteinte d’aspirations communes dans le cadre d’un système
fédéral qui s’accommode de la diversité et de l’expérimentation. Nous
avons pris conscience des avantages que nous apportent notre dualité
linguistique et notre société multiculturelle. Nous avons nourri un engagement
profond en faveur de la démocratie et les droits de la personne. Nous sommes
devenus un modèle dont le monde entier peut s’inspirer.
Durant la vie de cette législature, nous serons
actifs au sein de la communauté internationale. Que ce soit à la présidence
du G-20 ou à titre d’hôtes du G-8 en 2002 et du très important Sommet des
Amériques d’avril prochain à Québec, nous oeuvrerons au renforcement des
institutions multilatérales pour favoriser le dialogue et la coopération.
Nous allons accroître notre aide au
développement international, afin de permettre à un plus grand nombre de pays
de tirer profit des possibilités offertes par la mondialisation, et de
promouvoir la paix et la sécurité humaine dans le monde.
En Amérique du Nord, nous travaillerons de
près avec les nouvelles administrations des présidents Bush et Fox. Les
États-Unis constituent notre plus important partenaire commercial. Notre plus
proche allié. Je me rendrai à Washington la semaine prochaine pour rencontrer
le Président Bush et réaffirmer l’importance de notre relation.
Je discuterai avec lui de l’importance de
garantir de façon efficace l’accès à nos marchés respectifs. Je
soulèverai la possibilité d’accélérer le travail que nous avons déjà
entrepris conjointement pour moderniser la frontière que nous partageons afin
de faciliter le commerce et les investissements tout en assurant la sécurité
de nos pays. Et j’exprimerai vigoureusement la position du Canada en matière
d’agriculture, à savoir que nos agriculteurs devraient pouvoir bénéficier
de règles de concurrence équitables, et que la surenchère de subventions ne
sert les intérêts de personne.
Nous voulons révéler aux investisseurs des
États-Unis et d’ailleurs dans le monde la réussite de l’économie
canadienne. Leur donner le goût d’investir au Canada. Stimuler leur
enthousiasme pour le Canada comme lieu débordant d’activité. Nous
consacrerons beaucoup d’efforts, avec l’aide et la coopération du secteur
privé et des provinces, à faire valoir le Canada en tant que pays doté d’une
main-d’oeuvre très qualifiée et d’une économie hautement novatrice,
capable d’attirer et de garder les gens les plus talentueux.
Monsieur le Président, notre gouvernement a un
programme positif pour cette législature. Un ordre du jour modéré et tourné
vers l’avenir. Équilibré, mais aussi ambitieux. Un programme qui prend appui
sur les réalisations qui ont fait du Canada le pays que nous connaissons
aujourd’hui.
Monsieur le Président, à la suite du décès
de Pierre Elliott Trudeau l’automne dernier, les Canadiens ont senti le besoin
de discuter non seulement de l’héritage de M. Trudeau, mais aussi de la
signification que revêt le Canada et notre attachement envers notre pays. Sa
vision était celle d’un Canada arrivé à maturité, confiant, capable de
bâtir lui-même sa destinée. Elle était celle d’un pays uni par une
citoyenneté commune fondée sur des droits et un sens des responsabilités
partagés par tous. D’un Canada bilingue où les citoyens peuvent jouir et
profiter de notre riche patrimoine français et anglais. D’un pays qui
respecte la place spéciale qu’occupent les peuples autochtones. D’un Canada
multiculturel ouvert sur le monde et pleinement conscient de ses
responsabilités à l’échelle mondiale. Une société juste où les chances
sont vraiment égales. Nous prendrons les moyens pour commémorer son héritage
d’une façon qui à la fois reflète et fait avancer ces valeurs.
Cette vision a façonné l’image que le monde
se fait du Canada. Elle a contribué à définir le modèle canadien. Mais le
monde découvre aussi, de plus en plus, un nouveau Canada. Un Canada bâti sur
cette riche fondation, mais aussi un Canada aux possibilités fantastiques,
tourné vers la recherche avancée, au premier rang des nouvelles technologies
et engagé en faveur de l’excellence en éducation. Un pays doté d’une
main-d’oeuvre qualifiée et novatrice. Un endroit de choix pour les
investissements et les affaires. C’est le Canada que nous devrons aussi bâtir
au cours des semaines, des mois et des années à venir. Un Canada doté d’une
nouvelle économie dynamique et de collectivités saines et fortes. Un Canada
qui évolue sous le signe de l’innovation et de l’inclusion.
Monsieur le Président, nous sommes davantage
que les citoyens d’une seule province ou d’une seule région. Nous sommes
davantage que des contribuables. Nous sommes les citoyens d’un grand pays.
Nous avons des responsabilités les uns envers les autres. Nous avons besoin d’un
gouvernement national qui travaille en partenariat avec tous les Canadiens pour
bien faire entendre notre voix dans le monde. Pour veiller à la vigueur
économique. Pour protéger et renforcer le tissu social et l’unité
nationale. Voilà le gouvernement que nous, de ce côté de la Chambre,
offrirons aux Canadiens.
Quant à moi, Monsieur le Président, j’ai
consacré ma vie à faire avancer le Canada... et ce n’est qu’un début.
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