Allocution du Premier ministre Jean Chrétien prononcée devant la Chambre de commerce Argentine-Canada
Le 23 janvier 1995
Mesdames et messieurs:
Je suis très heureux d'être ici aujourd'hui, à Buenos Aires. Je me réjouis tout particulièrement - quoiqu'en tant que golfeur cela me désole un peu aussi - de constater, en cette période de vacances, la présence d'autant d'Argentins distingués.
Cette mission commerciale est la plus importante que le Canada ait jamais envoyée en Amérique du Sud. Dans le jargon du hockey, ou du soccer, me direz-vous, nous parlerions d'une équipe d'étoiles.
Comme en témoigne notre délégation, les Canadiens découvrent petit à petit les innombrables possibilités qui nous entourent. Fixés pendant la plus grande partie de notre histoire sur l'Europe et les États-Unis, nos regards sont maintenant attirés par l'expansion économique rapide que connaissent les pays d'Asie et d'Amérique du Sud. Les liens très forts qui nous attachent à l'Europe et aux États-Unis continueront d'exister, mais ils n'auront rien de limitatif. Nous sommes déterminés à établir des rapports solides et durables avec nos partenaires des Amériques.
Nous sommes très impressionnés par les mesures prises par des pays comme l'Argentine pour instaurer une plus grande stabilité économique et libéraliser les échanges commerciaux, mesures qui se sont traduites par une croissance remarquable et ont ouvert d'énormes perspectives de coopération commerciale.
La signature de l'Accord de libre-échange nord-américain atteste de notre volonté de libéraliser les échanges commerciaux dans cet hémisphère. Il s'agit de la première entente du genre à comprendre à la fois des pays développés et des pays en développement. Le Canada a insisté pour qu'on y inclue une clause d'accession, afin que d'autres pays puissent y adhérer à l'avenir. C'est naturellement à l'Amérique latine que nous pensions. Comme vous le savez, des négociations ont déjà été amorcées en vue de permettre au Chili de devenir membre de ce bloc commercial.
Le Sommet des Amériques qui a eu lieu récemment à Miami a constitué pour le Canada une étape importante sur la voie de relations plus étroites avec les pays d'Amérique latine. La déclaration de principes ainsi que le plan d'action rendus publics à cette occasion permettent d'espérer des progrès sensibles sur la voie du renforcement de la démocratie, de la libéralisation du commerce et de la promotion du développement durable.
Je suis fier que le Canada ait pris part à la conception d'un programme aussi ambitieux. Si je me trouve parmi vous aujourd'hui, c'est pour vous dire que le Canada est maintenant prêt à donner suite à ce sommet en tissant des liens directs avec les pays avec lesquels nous nous sentons une affinité particulière.
Les échanges commerciaux constituent l'un des principaux thèmes de ma visite. Les Canadiens savent bien, en effet, que le commerce avec l'étranger est un gage de création d'emplois et de croissance économique.
L'Argentine a un rôle spécial à jouer dans le cadre du MERCOSUR. Le Canada se réjouit de la décision que vous avez prise de joindre vos efforts à ceux d'autres pays en vue d'abattre les barrières commerciales. C'est là, pour cette région, une initiative audacieuse et imaginative.
Nous croyons que l'ALENA et le MERCOSUR sont les deux piliers sur lesquels s'érigera le libre échange à la largeur de l'hémisphère. Il est essentiel que ces deux regroupements amorcent immédiatement un dialogue aux plus hauts niveaux en vue de faciliter une meilleure compréhension des besoins de chacun.
Il y a deux jours, le ministre du Commerce canadien, Roy Maclaren, et moi-même étions à Montevideo pour lancer ce dialogue.
Aujourd'hui, je proposerai au Président Menem que des représentants des pays membres de l'ALENA et de MERCOSUR ainsi que du secrétariat de l'OÉA collaborent étroitement afin de déterminer comment intégrer les deux accords et de rendre compte de leurs conclusions aux ministres du Commerce. Ces derniers se rencontreraient au plus tard en juin afin d'examiner les progrès accomplis, tel que convenu à Miami.
Pourquoi tant insister sur le commerce? Parce qu'on se rend compte de plus en plus que, pour un pays, l'accroissement des échanges commerciaux et des mouvements d'investissements sont les moteurs de la croissance économique et de la prospérité, sans lesquels la démocratie demeurera toujours fragile.
En s'ouvrant aux technologies étrangères, le Canada s'est donné la possibilité de se développer rapidement. En les adaptant à ses conditions propres, il est parvenu à l'un des plus hauts niveaux de vie de la planète et il dispose maintenant de ses propres technologies de pointe.
Le Canada continue d'être ouvert aux technologies nouvelles et novatrices. Vos investissements et votre coopération dans ce secteur seront toujours bien accueillis chez nous.
Parallèlement, grâce à la libéralisation de son économie et à la privatisation massive qu'elle a entreprise, l'Argentine attire maintenant les meilleures technologies de la planète.
Je tiens à féliciter le Président Menem et son équipe pour la remarquable modernisation économique qu'ils sont parvenus à réaliser. Cela ne s'est pas fait sans peine, j'en conviens. Le Canada s'est vu forcé lui aussi de procéder à de difficiles ajustements. Mais pour nos deux pays, la récolte ne peut qu'être bonne si nous continuons dans cette veine.
Lorsque le Président Menem est venu au Canada en juin dernier, il était accompagné par quelques-uns des principaux entrepreneurs de l'Argentine. Cette visite nous a permis, à moi et aux milieux d'affaires canadiens, de nous rendre compte des progrès économiques impressionnants accomplis par l'Argentine et des énormes possibilités de coopération qui s'offraient à nous.
Bien que les échanges commerciaux entre nos deux pays soient encore modestes, les exportations canadiennes vers l'Argentine ont triplé au cours des trois dernières années. Après ce déjeuner, nous signerons de contrats et des ententes totalisant *** dollars. Indice sûr des liens qui nous unissent, ces contrats attestent du succès de cette mission et représenteront des milliers de nouveaux emplois tant en Argentine qu'au Canada.
Mais il ne s'agit là que d'un début. Une occasion extraordinaire se présente à nous de profiter de nos avantages et de nos moyens respectifs. Les Canadiens sont sans rival au monde dans les domaines de l'exploitation des ressources naturelles et des communications. Leurs technologies répondent parfaitement aux besoins de l'Argentine.
Les exportations ne constituent toutefois qu'un volet de nos rapports mutuels. Les investissements en sont un deuxième. Il y a cinq ans, les investissements directs canadiens en Argentine étaient insignifiants. Aujourd'hui, ils représentent au-delà d'un milliard de dollars canadiens, et ils continuent de se multiplier, sans cesse plus rapidement.
L'initiative appartient au secteur privé, mais les gouvernements peuvent joindre leurs efforts aux siens. La Société d'expansion des exportations a déjà accordé trois lignes de crédit pour du financement à moyen et à long termes, et elle en annoncera trois autres aujourd'hui.
Au cours de la visite du Président Menem au Canada, nous avons signé une entente destinée à aider les exportateurs argentins à faire affaire sur le marché canadien.
Nous pouvons nous appuyer sur un accord de protection contre l'investissement étranger depuis 1993. Il y a quelques semaines, nous avons également conclu une entente sur la double imposition.
Je tiens à encourager les entreprises argentines à considérer le Canada comme une porte d'accès à l'ALENA, c'est-à-dire au plus gros marché du monde. Je vous invite à vous joindre à des entreprises canadiennes pour vous lancer à l'assaut de l'ensemble du marché nord-américain avec vos produits et vos technologies.
J'encouragerai les entreprises canadiennes à faire de même en ce qui concerne l'Argentine et le MERCOSUR. D'ailleurs, deux d'entre elles, McCain's et Canada Malting l'ont déjà fait, avec un grand succès.
Mes amis, nous vivons à une époque riche en possibilités de toutes sortes. Tout comme l'Argentine s'est vu offrir un avenir rempli d'espoir et de promesses, je crois qu'une aube nouvelle est en train de se lever sur la communauté des pays américains. J'y vois des liens étroits. Une prospérité sans précédent. Des emplois convenables pour tous et toutes, un avenir assuré pour nos enfants. Un rapprochement de nos pays, de nos populations.
Nous avons vu les premières lueurs de cette aube nouvelle en décembre dernier, lors du Sommet de Miami. Notre visite aujourd'hui marque un nouveau pas dans cette direction.
Je vous invite tous à faire davantage pour stimuler la coopération entre nos deux pays. J'ai pris aujourd'hui beaucoup de plaisir à célébrer l'amitié qui unit l'Argentine et le Canada une amitié déjà solide et qui ne cesse de grandir.
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