Allocution de bienvenue prononcée à la Chambre des communes par le Premier ministre Jean Chrétien pour accueillir le Président des États-Unis d'Amérique Bill Clinton
Le 23 février 1995
Ottawa (Ontario)
Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de vous souhaiter la bienvenue au Parlement au nom de tous les Canadiens et Canadiennes.
Je dois d'abord dire qu'avant même d'avoir prononcé un seul mot en cette chambre, vous avez déjà fourni une preuve éloquente de l'amitié qui lie nos deux pays en acceptant de venir visiter Ottawa en février!
Monsieur le Président, le temps froid qui sévit à l'extérieur est peut-être typiquement canadien, mais il en est de même de l'accueil chaleureux que nous vous réservons à l'intérieur. Cette chaleur nous la réservons à nos amis les plus chers.
Il s'est dit et écrit beaucoup de choses au sujet de l'amitié qui lie nos deux pays. Cette amitié n'a pas toujours été facile à vivre, ce qui est normal étant donné que l'un est un pays relativement petit et que l'autre est la plus puissante nation au monde. Comme l'a déjà dit un député de cette Chambre, il y a une trentaine d'années, les Américains sont nos meilleurs amis, qu'on le veuille ou non.
Mais notre relation s'est épanouie et a évolué au fil des ans. Aujourd'hui, comme dans toute amitié saine et solide, notre relation se déroule d'égal à égal.
En tant qu'amis et voisins, nous sommes capables de faire la distinction entre les affaires et l'amitié lorsque cela s'impose. Et dans la grande majorité des cas, nous somme en mesure de collaborer, comme depuis toujours, à la réalisation des objectifs communs.
Le fait est, Monsieur le Président, que nos deux gouvernements ont été élus en fonction de leurs programmes d'emploi et de croissance. Et tous deux ont mis l'accent sur ces programmes depuis leur arrivée au pouvoir, avec succès dans les deux cas : le Canada et les États-Unis connaissent une relance économique forte, solide et durable.
Nos économies sont étroitement liées. Il se fait plus de commerce entre nos deux pays qu'entre n'importe quel autre pays dans le monde, soit près d'un milliard de dollars par jour, tous les jours. Lorsqu'un des deux pays va bien, l'autre en profite. Et lorsque nos deux économies sont fortes, rien ne peut nous arrêter. Des emplois en Colombie-Britannique signifient des emplois dans l'État de Washington. Des emplois au Michigan se traduisent par des emplois en Ontario. Des emplois au Québec entraînent des emplois dans l'État de New York.
Mais nos objectifs communs vont au-delà de notre relation immédiate. Nos deux administrations comprennent que l'accroissement et la libéralisation du commerce sont garants de la création d'emplois et de la croissance dans nos pays respectifs. Nous étions ensemble à Jakarta, en novembre dernier, lorsque les pays de l'Asie du Pacifique se sont engagés à créer une zone de libre-échange d'ici l'an 2010. Et aussi à la conférence que vous avez présidée à Miami, en décembre, au cours de laquelle tous les pays de l'hémisphère se sont entendus sur une zone de libre-échange des Amériques pour l'an 2005.
Je tiens à souligner, Monsieur le Président, le rôle que vous avez joué à l'égard de la concrétisation de cette vision nouvelle. D'ailleurs, vous n'avez pas limité cette vision aux questions économiques. Vous avez agi de façon décisive à l'égard du rétablissement de la démocratie en Haïti. Et vous avez joué un rôle de premier plan en ce qui a trait aux progrès remarquables qui ont été réalisés dans le processus de paix aux Moyen-Orient.
Monsieur le Président, vous avez compris les forces qui régissent l'économie de la planète. Vous vous êtes employé à établir une nouvelle unité et un nouvel optimisme dans l'hémisphère. Vous vous êtes efforcé d'unir les populations et les pays. Ce sont là des objectifs que cette Chambre et la population du Canada ont en commun avec vous. Et nous sommes déterminés à travailler avec les États-Unis et les autres pays en vue de les réaliser.
Mes récentes visites en Asie et en Amérique latine m'ont rappelé qu'il est plus important que jamais de pouvoir compter sur une présence forte des États-Unis dans le monde. Les bouleversements survenus depuis la fin de la guerre froide indiquent que les États-Unis peuvent et doivent jouer un plus grand rôle sur la scène internationale.
Notre propre gouvernement a tracé les nouvelles orientations de notre politique étrangère. Nous voulons maintenir la tradition canadienne qui consiste
à promouvoir la paix et la sécurité. Nous savons tous depuis longtemps que l'isolationnisme est assorti d'un prix et d'un danger beaucoup plus lourd que la collaboration internationale.
Monsieur le président, vous ne le savez peut-être pas, mais parmi vos prédécesseurs qui ont pris la parole au Parlement du Canada au cours de votre vie, il y a les Harry Truman, Dwight Eisenhower, Richard Nixon et Ronald Reagan qui ont tous une chose en commun : ils ont été élus pour un deuxième mandat.
Cette coïncidence ne semble peut-être pas si remarquable. Mais si l'on considère les présidents récents qui n'ont pas pris la parole devant le Parlement canadien, on trouve les Gerald Ford, Jimmy Carter et George Bush.
Et je me garde bien de tirer quelque conclusion que ce soit, M. le Président, car comme vous le savez, le Canada applique une politique stricte de non ingérence, mais de non-indifférence.
De toutes façon, Monsieur le Président, nous sommes enchantés que vous ayez accepté notre invitation.
Monsieur le président de la Chambre, Mesdames et Messieurs les députés et sénateurs et chers invités, je vous laisse notre ami et voisin, le Président des États-Unis, Bill Clinton.
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