Allocution du Premier ministre Jean Chrétien à l'occasion de la cérémonie commémorative du 50e anniversaire de la victoire sur le Japon
Le 13 août 1995
Ottawa (Ontario)
Il y a cinquante ans, au Canada comme à l'étranger, les Canadiens et Canadiennes célébraient le retour de la paix après six longues années de guerre. Ils comprenaient le sens de cette journée.
Le général McNaughton, qui était ministre de la Défense à l'époque, l'a résumé ainsi : « Pour les Canadiens et Canadiennes comme pour nos combattants, c'est le jour de la victoire. Finale. Décisive. »
Vous, les Canadiens qui avez combattu dans le Pacifique et êtes avec nous aujourd'hui, vous en compreniez tout le sens.
Tout comme vos compagnons d'armes de 1945 qui, pour une quatrième année, étaient prisonniers dans les camps.
Tout comme les aviateurs des escadrilles des Forces aériennes du Canada qui opéraient en Birmanie en août 1945.
Tout comme ces Canadiens, anciens combattants d'Europe toujours en uniforme qui auraient combattu aussi dans le Pacifique si la guerre s'était poursuivie.
Tout comme leurs familles.
En ce jour, il y a 50 ans, des centaines de milliers de Canadiens et Canadiennes ont envahi les rues pour y accueillir la paix.
Pour beaucoup d'autres, la journée du 15 août a été bien différente. C'était une journée du souvenir. Une journée pour pleurer ceux et celles qui ne reviendraient pas. Les maris, les pères, les fils et les filles, les frères, les soeurs, les amis.
Cela est pareil en 1995. Oui, nous sommes réunis ici pour célébrer notre victoire et notre libération.
Mais nous sommes également ici pour nous souvenir.
Aujourd'hui, nous reconnaissons que la paix et la liberté qui sont nôtres aujourd'hui ont été acquises au prix des sacrifices consentis par les Canadiens, il y a un demi-siècle, par ces jeunes hommes et femmes représentant toute la jeunesse des années 40.
L'an dernier, j'étais au cimetière Saiwan, à Hong Kong, lors du Jour du Souvenir, là-même où reposent 283 Canadiens de cette génération. Ils faisaient partie d'un contingent de deux mille soldats provenant du Winnipeg Grenadiers et du Royal Rifles of Canada, de Québec.
Ils étaient encore des recrues lorsqu'ils sont arrivés dans la région du Pacifique, ils croyaient avoir le temps d'y compléter leur entraînement. Ils ont débarqué à Hong Kong en novembre 1941. La guerre a éclaté trois semaines plus tard.
Ils ont affronté les troupes aguerries de l'armée impériale du Japon. S'ils étaient déclassés sur le plan des armes, de l'expérience et du nombre, ils ont compensé avec une large dose de ce courage typiquement canadien.
Ils ont combattu avec beaucoup d'adresse et d'audace. Ils ont gagné du temps au prix de leurs vies.
Aujourd'hui, nous rendons hommage à leur bravoure et à la bravoure de ces autres Canadiens, 10 000 au total, qui ont servi dans le Pacifique, de l'océan Indien aux Aléoutiennes. Nous rendons hommage à leurs compagnons d'armes qui ont combattu et qui ont laissé leur vie sur d'autres champs de bataille.
Le monument élevé à leur mémoire est tout autour de nous. Leur monument c'est le Canada.
Car un pays, c'est un ouvrage qu'on doit bâtir avec acharnement au cours des siècles alors que chaque génération relève les défis de son époque.
Vous, vos amis et vos camarades les jeunes Canadiens et Canadiennes de 1939 à 1945 avez relevé le défi de votre époque.
En ce jour, nous vous disons que, par delà un demi-siècle, nous n'avons pas oublié. Notre pays est devenu ce qu'ils est aujourd'hui, et nous sommes qui nous sommes grâce à ce que vous avez accompli.
Nous vous rendons hommage.
Nous vous offrons notre gratitude.
Nous n'oublierons pas.
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