À l'occasion d'une cérémonie en l'honneur de la création du Nunavut
Le 1 avril 1999
Iqaluit (Nunavut)
Tout d'abord, j'aimerais vous transmettre les salutations de mon épouse, Aline.
Elle tenait vraiment à être ici. Malheureusement, l'un de nos petits-enfants a été impliqué dans un accident, et Aline a dû se rendre à son chevet. Mais elle m'a dit « Jean, assure-toi de transmettre mes salutations . » Et je fais toujours ce qu'elle me dit.
Cette journée est tout aussi importante pour elle qu'elle l'est pour moi.
Elle était à mes côtés à l'époque où j'étais ministre des Affaires indiennes. Cette expérience nous a ouvert les yeux sur de nombreux aspects de la vie dans le Grand Nord. La richesse de la culture inuit. La gentillesse des gens. Leur attachement profond à la beauté farouche du territoire et aux traditions de leurs ancêtres. Et au rêve de créer le Nunavut. Un rêve partagé par un grand nombre de personnes.
Je garde un souvenir inoubliable de mon expérience. Et les mots ne suffisent pas pour exprimer le bonheur que j'éprouve d'être Premier ministre au moment où ce rêve devient réalité.
Nous avons aujourd'hui l'énorme privilège de participer à un moment historique. Il s'agit d'une occasion aussi rare que précieuse. Dans cinquante ans, les livres d'école des enfants feront état de cette journée. Et nos familles pourront dire que nous y étions. Le jour où nous avons redessiné ensemble la carte du Canada. Et où nous avons contribué à concrétiser le destin tant attendu des gens de l'Arctique de l'Est.
D'un trait de plume, nous mettons aujourd'hui un terme à un très long processus. Un processus lancé il y a trente ans par des chefs de file tels que Tagak Curley et Jose Kugasak, et auquel ont contribué des gens comme John Amagoalik, Rosemary Kuptana et Jack Anawak. Et qui est mené à terme aujourd'hui en présence du chef de gouvernement le plus récemment élu du Canada, Paul Okalik.
J'ai fait au moins un bout de chemin avec vous. En jetant les bases de la première assemblée législative totalement élue des Territoires du Nord-Ouest. En donnant aux gens de l'Arctique de l'Est une voix au chapitre lorsqu'il est question de leurs affaires et de leur avenir.
En contribuant à la création de la réserve de parc national de Auyuittuq, la première à être créée sur le territoire de ce qui est, aujourd'hui, le Nunavut. Et en aidant à amorcer un partenariat qui a fait en sorte que les Inuit et le gouvernement du Canada travaillent maintenant ensemble afin de protéger pour toujours la beauté diversifiée du Grand Nord, dans le cadre de notre réseau mondialement reconnu de parc nationaux.
Et c'est avec beaucoup d'admiration et de respect que j'ai observé les gens du Nunavut à mesure qu'ils exerçaient de plus en plus leur autorité et qu'ils démontraient leur détermination de bâtir un nouveau territoire dynamique.
Tout au long de cette période et de ce processus, les Canadiens du Sud ont évolué vers la reconnaissance du droit des gens du Nord de contrôler leur propre destin. En tant que nation, nous avons compris que notre pays est composé de différentes communautés, chacune avec une identité et des valeurs qui lui sont uniques. Des valeurs qui enrichissent et renforcent ce projet commun que nous nommons le Canada. C'est pour moi une source de grande fierté que le Canada démontre une fois de plus au monde, à travers la création du Nunavut, combien nous apprécions les peuples et les cultures qui composent notre pays.
Le nouveau gouvernement du Nunavut sera le reflet de cette diversité, car il fusionnera les meilleures traditions inuit et un système moderne et public de gouvernement transparent et responsable.
Il ne fait aucun doute que des défis de taille attendent ce gouvernement. Mais nous ne serions pas ici aujourd'hui si les gens du Nord n'étaient pas imaginatifs et persévérants. Je suis convaincu que la jeune et dynamique population du Nunavut est prête à relever tous les défis.
Cette journée est une source de grande réjouissance pour moi, pour les Inuit et pour le Canada.
Certains des anciens parmi nous se rappelleront peut-être d'un voyage qu'Aline et moi avons fait dans le Grand Nord il y a de cela près de trente ans. Nous accompagnions alors Sa Majesté la Reine Elizabeth. On m'avait demandé d'entonner l'Ô Canada, ce que j'ai fait dans la seule version que je connaissais, c'est-à-dire en français. Je pense que personne, y compris Sa Majesté, n'oubliera cette performance solo.
Je suis heureux aujourd'hui. Mais je vous promets que je ne chanterai pas.
Mesdames et messieurs, le Nunavut vous appartient. Vous possédez maintenant les instruments pour bâtir votre avenir. Je vous invite à vous retrousser les manches, à vous mettre au travail, et à faire en sorte que le Nunavut réalise son plein potentiel. Pour vous et pour vos enfants.
Vive le Nunavut! Vive le Canada!
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