Notes pour un discours du Premier ministre Jean Chrétien à
l'occasion du 3e Congrès mondial des chambres de commerce
Le 16 septembre 2003
Québec (Québec)
C’est avec grand plaisir que je m’adresse aujourd’hui B
l’assemblée générale
annuelle de la Chambre de commerce du Canada et au CongrPs
mondial des chambres de commerce.
J’en profite pour souhaiter la bienvenue au Canada et B
Québec aux délégués
venus du monde entier. Le pays qui vous accueille aujourd’hui se porte trPs,
trPs bien. C’est un pays confiant
et plein d’avenir.
Je suis heureux que vous teniez ces assises internationales B
Québec maintenant, car la situation au
Canada est aujourd’hui trPs différente
de ce qu’elle était la premiPre
fois que j’ai pris la parole B l’assemblée
annuelle de la Chambre de commerce du Canada B
titre de Premier ministre.
C’était il y a neuf ans cette semaine
que je prononçais un discours ici mLme
B Québec
devant la Chambre de commerce du Canada réunie
B l’occasion de son assemblée
annuelle. Une atmosphPre trPs
sombre régnait dans la salle. On ne sentait
pas l’optimisme que je constate ici aujourd’hui.
A l’époque, le Canada
enregistrait des déficits budgétaires
depuis 28 ans. Pour chaque dollar de dépenses
gouvernementales, 37 cents étaient consacrés
au service de la dette. Le ratio de la dette au PIB était
de 71 % et ne cessait d’augmenter. Des taux d’intérLt
élevés
et des impôts relativement lourds décourageaient
l’investissement et nuisaient B
notre qualité de vie. Un fort taux de chômage
se conjuguait B une progression anémique
de l’emploi. En plus, le Québec venait d’élire
un gouvernement séparatiste. Le Wall
Street Journal qualifiait le Canada de candidat au tiers monde.
Ce jour-lB, j’ai énoncé
les mesures que le gouvernement comptait prendre pour tenter de redresser la
situation. C’était un programme d’action
ambitieux. Un programme d’action que les cyniques, et mLme
les réalistes, ne s’attendaient
probablement pas B nous voir mener B
bien. Or, nous l’avons mis en oeuvre, grâce
B l’appui, B
la discipline et au leadership des Canadiens. C’est pourquoi le pays se porte
si bien aujourd’hui. Et c’est pourquoi la presse internationale cite
maintenant le modPle canadien avec
admiration.
Nous n’avons pas gouverné pour le
court terme. Nous avons adopté une optique B
plus long terme. Et je crois que nous avons su transformer le Canada et le préparer
B entrer de plain-pied dans le XXIe
siPcle, de sorte que nous sommes
probablement en meilleure position aujourd’hui que tout autre pays
industrialisé.
Si vous le voulez bien, j’aimerais passer en revue briPvement
les questions que j’avais abordées il y a
B peu prPs
neuf ans.
Nous étions conscients que pour assurer
la croissance continue de l’emploi il fallait procéder
B une réforme
structurelle en vue d’accroître la
souplesse de notre marché du travail.
Ce jour-lB, B
Québec, j’ai promis une réforme
de l’assurance-chômage conçue
pour passer d’une assistance passive B
une forme active d’aide B la
recherche d’emploi. Nous avons réalisé
cette réforme structurelle et pris d’autres
mesures pour accroître la souplesse de
notre marché du travail. Les employeurs et
les employés ont vu fondre les taux de
cotisation. Les prestations parentales et de maternité
ont été
sensiblement enrichies. S’il reste encore beaucoup de travail B
faire, je crois pouvoir dire que nous avons rempli nos engagements.
Nous étions conscients de la nécessité
de préparer les Canadiens B
réussir dans la nouvelle économie.
Ce jour-lB, B
Québec, j’ai promis que le gouvernement
aiderait les Canadiens B poursuivre
leurs études et B
acquérir les connaissances nécessaires
pour se préparer en vue des emplois spécialisés
de demain.
Aujourd’hui, nous pouvons Ltre
fiers d’avoir encouragé les études
postsecondaires au moyen de bourses d’études
et d’incitations B l’épargne,
d’avoir stimulé la recherche et le
recrutement de professeurs, et d’avoir mis en place un énorme
programme d’infrastructures universitaires. LB
encore, mLme s’il reste encore des
efforts considérables B
faire, nous pouvons dire que nous avons rempli nos engagements.
Ce jour-lB, B
Québec, j’ai promis que notre
gouvernement aiderait B supprimer
les obstacles qui empLchent les
parents sans conjoint et les personnes handicapées
de trouver du travail. Nous avons fait d’immenses progrPs
B cet égard,
grâce en particulier B
la Prestation nationale pour enfants, qui constitue le plus important programme
social créé depuis l’assurance-maladie.
LB encore, il reste encore
beaucoup de travail B faire, mais
nous pouvons dire que nous avons tenu parole.
Quand nous avons formé le gouvernement,
nous avons hérité
d’un déficit de 42 milliards de
dollars, c’est-B-dire 6 % du
PIB. Nous avons promis de le ramener B
3 % avant la fin de la troisiPme
année de notre mandat. Et, ici B
Québec, j’ai expliqué
comment nous allions examiner l’ensemble des programmes ministériels
un B un. Nous avons réduit
la taille de la fonction publique. Nous avons supprimé
les programmes inutiles. Nous avons fait passer les dépenses
de programme de 16 % du PIB en 1994 B
un peu plus de 12 %.
Notre succPs a surpassé
toutes les attentes. LB encore, nous
pouvons dire que nous avons respecté
notre engagement.
En l’espace de quatre ans, le gouvernement fédéral
a éliminé
le déficit fédéral
au complet. Et nous avons maintenant présenté
six budgets équilibrés
de suite. Nous avons ramené le ratio de la
dette au PIB de 71 % B un peu
plus de 40 %, et nous avons remboursé
plus de 55 milliards de dollars sur la dette. Le service de la dette représente
maintenant environ 20 cents par dollar de recettes gouvernementales. De
plus, nous avons accordé la plus importante
baisse d’impôt dans toute l’histoire du
Canada. Les impôts continuent de baisser,
et il y a des décennies que les taux d’intérLt
n’avaient pas été
aussi faibles.
Le Canada est le seul pays du G-7 B
afficher un surplus cette année et B
projeter un surplus pour l’an prochain.
En plus, j’ai promis des mesures concrPtes
afin d’améliorer le climat d’affaires
pour les entrepreneurs, d’aider les entreprises B
tirer parti des nouvelles technologies et B
se tailler une place sur les marchés étrangers
et de promouvoir le tourisme au Canada. J’ai souscrit B
l’approche Équipe Canada en matiPre
de commerce. Dans chacun de ces domaines, nous pouvons dire que nous avons tenu
parole.
Ce jour-lB, B
Québec, au lendemain de l’élection
du Parti québécois,
j’ai affirmé que le premier devoir d’un
premier ministre du Canada était de préserver
l’unité nationale. Et je me suis engagé
trPs clairement B
m’acquitter de ce devoir. Nous avons traversé
une période difficile, mais aujourd’hui,
nous avons un gouvernement fédéraliste
au Québec. Les fédéralistes
détiennent la majorité
des siPges du Québec
B la Chambre des communes.
Et vous pouvez Ltre sfrs
que mon parti a beaucoup plus hâte aux
prochaines élections fédérales
que le Bloc Québécois.
A ce chapitre aussi, mLme
si le travail n’est jamais terminé, nous
pouvons dire que nous avons tenu nos engagements.
Je suis extrLmement fier de ces réalisations.
Je suis fier de savoir que nous avons viabilisé
notre régime public de pensions pour les
50 prochaines années. Aucun autre pays
n’y est parvenu.
Je suis fier de savoir que l’économie
a créé prPs
de trois millions d’emplois depuis notre arrivée
au pouvoir.
Je suis fier de savoir que notre niveau de vie a progressé
de 20 % depuis 1997.
Je crois que mon successeur héritera d’un
pays trPs nettement en position de
force. Nous avons effectué les réformes
structurelles que l’Europe souhaiterait pouvoir entreprendre. Notre situation
financiPre est viable, dans l’immédiat
et B long terme, contrairement B
celle de pays dont le déficit se creuse
rapidement.
Nous avons fait le nécessaire pour que
le Canada de demain puisse Ltre B
l’avant-garde du monde. Et nous l’avons fait d’une maniPre qui nous distingue désormais.
Au XXIe siPcle, nous
assistons B une redéfinition
des idéologies. La droite préconise
les baisses d’impôt B
tout prix – au détriment des services
publics et des infrastructures publiques. Et tout en prLchant
la responsabilité financiPre,
la droite fait des déficits. La gauche,
elle, veut dépenser sans tenir compte de la
situation financiPre. Et comme la
droite, elle se soucie peu des déficits et
de leurs conséquences pour les générations
B venir.
Au Canada, nous avons opté pour une
autre voie que j’appelle le centre radical en reconnaissant qu’il faut
maintenir la viabilité financiPre,
vivre selon nos moyens et équilibrer nos
budgets pour pouvoir atteindre nos objectifs B
moyen et B long terme.
C’est la souveraineté financiPre
qui nous permet de partager la prospérité,
d’accroître l’autonomie des citoyens, d’investir
dans nos enfants, de contribuer B
stimuler la créativité
et l’innovation dans l’économie du
savoir, de renforcer notre régime universel
de soins de santé financés
par les deniers publics, d’étendre la
couverture de l’assurance-maladie aux soins B
domicile et aux médicaments trPs
onéreux B
l'échelle nationale ainsi que d’investir
dans les infrastructures publiques.
J’ai toujours maintenu que le gouvernement peut exercer une force positive
dans la société.
Les événements
de l’été
qui s’achPve le démontrent
particuliPrement bien.
Le SRAS, la vache folle et la panne d’électricité
ont fait ressortir plus que jamais le besoin d’un gouvernement qui joue un rôle
actif dans les secteurs de la santé
publique et des infrastructures collectives. Tout cela comporte un coft.
Il y a deux semaines, j’ai reçu une
lettre signée par plus de 200 tLtes
dirigeantes du monde des affaires, du mouvement syndical, du secteur bénévole
et communautaire, du milieu de l’éducation
et des administrations locales de la région
de Toronto. Les signataires appellent le gouvernement B
développer le parc de logements abordables
et B investir dans les transports
publics et les équipements communautaires.
Ils réclament des investissements accrus
dans l’éducation publique, le soutien au
développement de la petite enfance et l’accPs
B un enseignement postsecondaire de
qualité. Ils préconisent
des mesures pour relancer le tourisme et une hausse des investissements
gouvernementaux dans la recherche-développement
et dans les arts.
Je les félicite. Bien que la lettre en
question parle de Toronto, elle énonce un
programme d’action pour l’ensemble du Canada. Et c’est en grande partie le
programme d’action que nous suivons depuis que nous avons réalisé
l’équilibre budgétaire.
En fait, ils appellent les gouvernements B
poursuivre sur la lancée de tous nos
budgets depuis 1997 – et plus particuliPrement
de notre dernier budget, qui prévoit des
investissements B long terme dans
chacun de ces domaines.
C’est un programme d’action auquel je souscris. Un programme d’action
qui implique une action gouvernementale ciblée.
Le gouvernement ne pourra pas tout faire pour tous. Ce programme d’action nécessitera
des investissements publics considérables.
La facture sera élevée.
Mais c’est la seule façon d’assurer la
compétitivité
B long terme du Canada. Je me réjouis
qu’un si grand nombre de dirigeants d’entreprise, y compris tous les présidents
de banque, le reconnaissent et appellent le gouvernement B
effectuer ces investissements.
Cependant, ils doivent également reconnaître
les implications d’un tel programme d’action. En effet, si nous voulons
maintenir l’équilibre budgétaire
– et il le faut – ces nouveaux investissements publics excluent forcément
toute nouvelle baisse d’impôt importante
dans un proche avenir.
Les réductions d’impôt
des derniPres années
ont rendu notre régime fiscal concurrentiel.
Nous avons éliminé
nos déficits budgétaires.
Le défi pour l’avenir consiste maintenant
B mettre fin aux déficits
sur le plan social et en matiPre d’environnement
et d’infrastructure.
Toutefois, le gouvernement ne peut pas se préoccuper
uniquement de politique intérieure. Le
civisme international fait partie intégrante
de la gouvernance au XXIe siPcle.
Le Canada doit continuer de prôner des
solutions multilatérales aux problPmes
internationaux. Les grands défis de notre
temps comprennent la pauvreté, la dégradation
de l’environnement, les maladies infectieuses, les conflits régionaux,
le crime organisé et le terrorisme.
Aucune nation, aussi puissante soit-elle, ne saurait en venir B
bout seule. La tâche de mettre la
mondialisation au service du mieux-Ltre
de l'humanité en favorisant le commerce et
un développement judicieux exige également
une certaine coordination de la part des organisations multilatérales.
L’échec de la réunion
de l’Organisation mondiale du commerce B
Cancun en fin de semaine est trPs préoccupant.
J’affirme depuis longtemps que les pays industrialisés
doivent réduire sensiblement leurs
subventions B l’agriculture pour
donner la chance aux pays en voie de développement,
en Afrique en particulier, d’améliorer le
niveau de vie de leurs populations. Le monde industrialisé
a l’obligation d’agir. Et d’agir sans tarder. Au nom de la population du
Canada, j’appelle l’Union européenne et
les États-Unis, ainsi que tous les membres
de l’OMC, B réfléchir
encore sur ce qui s’est produit en fin de semaine, et B
reconsidérer leur position. Il n’est pas
trop tard.
J'ai toujours été
convaincu de la nécessité
de faire preuve de civisme international pour servir les intérLts
de ses propres citoyens. Cependant, un tel civisme représente
en mLme temps une expression de
notre idéalisme et de notre esprit
humanitaire.
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