Discours du Premier ministre Jean Chrétien à l`occasion du Forum
d`action des entreprises pour le développement durable
Le 1er septembre 2002
Johannesburg, (Afrique du Sud)
L’établissement de partenariats innovateurs pour promouvoir le
développement durable est au centre de l’ordre du jour des nations du monde
réunies ici à Johannesburg. Il est donc tout à fait approprié que ma
première activité officielle à ce sommet consiste à m’adresser au Groupe d’action
des entreprises pour le développement durable (BASD). En effet, la raison d’être
de votre organisation est le partenariat. La création du BASD résulte de la
reconnaissance des intérêts communs entre la Chambre de commerce
internationale et le World Business Council for Sustainable Development.
L’existence du BASD et l’excellent travail qu’il a accompli en
prévision du Sommet démontrent que nous devons mettre au rancart le cliché
désuet voulant que les entreprises ne se soucient pas de l’environnement. En
réalité, les compagnies du Canada et d’ailleurs relèvent avec
détermination le défi de la durabilité.
Dix ans après Rio, personne ne viendra prétendre que le monde a réalisé
la vision élaborée là-bas. En un sens, ces dix années ont été consacrées
à l’expérimentation et au renforcement des institutions. Certes, il y a eu
des ratés. Cependant, alors même que nous reconnaissons le travail qu’il
nous reste à faire, nous pouvons également affirmer que des progrès
considérables ont été accomplis sur de nombreux fronts. Nous avons progressé
de façon constante de la théorie à la pratique.
Il convient de noter en particulier le recours de plus en plus répandu aux
partenariats comme moyen d’action concret. Les gens comprennent le pouvoir des
partenariats. Compte tenu de l’ampleur du défi que pose l’objectif du
développement durable, le simple bon sens veut que l’on mette à contribution
les ressources, les idées et l’imagination de toutes les sphères de la
société.
D’ailleurs, la recherche de nouveaux partenariats contribue grandement à
faire avancer l’ordre du jour environnemental du gouvernement du Canada. Par
exemple, la Table ronde sur l’environnement et l’économie que nous avons
créée à l’issue du Sommet de la terre rassemble tous les intervenants dans
un forum neutre afin qu’ils puissent trouver ensemble des solutions. Elle a
également entrepris de mettre au point des indicateurs du développement
durable.
Le progrès accompli par la Table ronde est attribuable en grande partie à l’engagement
du secteur privé. Cet engagement se manifeste dans le monde entier. En fait, il
explique la présence ici aujourd’hui de bon nombre d’entre vous.
Que ce soit en introduisant sur le marché des solutions innovatrices ou en
adoptant de nouveaux procédés pour vos opérations, vous avez fait preuve d’un
leadership important et essentiel. De plus, votre volonté de travailler en
collaboration avec des partenaires dans vos propres industries, avec les
travailleurs et avec le milieu, a eu un impact positif.
La tâche n’a pas été facile ni simple – ni pour vous ni pour les
gouvernements. Passer de la théorie à la pratique en matière de
développement durable a souvent voulu dire apprendre par expérience. Cela
exige de s’attaquer de front à des questions difficiles, de remettre en
question les idées reçues au sujet du rôle de l’entreprise dans la
société, de faire place aux nouvelles technologies et de poursuivre de
nouveaux débouchés.
Nous voici maintenant à Johannesburg pour faire fructifier les réalisations
de tous les partenaires et pour nous fixer de nouveaux défis.
Pour démontrer la volonté du Canada de continuer à faire des progrès, j’ai
le plaisir d’annoncer que nous prolongeons notre Initiative des villes
durables (IVD).
L’amélioration de la qualité de vie dans les villes du Canada est au
coeur du programme d’action de notre gouvernement pour le 21e siècle.
Nous avons effectué de nouveaux investissements considérables dans l’infrastructure
matérielle et économique, dans les espaces verts et dans l’infrastructure
culturelle. Nous sommes déterminés à contribuer à faire de nos villes des
centres propres et dynamiques qui attirent les talents et les investissements.
Le même impératif sous-tend l’IVD, une initiative grâce à laquelle le
Canada se fait une réputation internationale en tant que source par excellence
de technologies, de savoir-faire et de produits durables.
L’IVD facilite les partenariats commerciaux entre les entreprises, les ONG
et les gouvernements. Elle crée des équipes urbaines chargées d’aider les
villes des économies émergentes et en développement à exploiter les nouveaux
investissements et les nouvelles activités économiques d’une manière
durable.
L’IVD a fait ses preuves en Pologne, au Brésil, en Chine, au Costa Rica,
en Argentine, en Afrique et au Chili. Ces résultats prometteurs sont de bonne
augure pour l’avenir.
Cette même volonté de bâtir des collectivités durables dans le monde
entier a incité le Canada à proposer d’accueillir le Colloque mondial des
villes à Vancouver en 2006. C’est à Vancouver qu’avait eu lieu la
première Conférence sur les établissements humains de l’ONU en 1976.
L’IVD illustre de manière concrète le pouvoir des partenariats, le
passage de la théorie à la pratique et le rôle pivot que peut jouer le
secteur privé.
Ainsi qu’en témoigne ce rassemblement, des chefs d’entreprise
visionnaires ont profité des dix années depuis Rio pour démontrer que le
développement durable peut être rentable en se fondant sur les principes
commerciaux reconnus et non sur les sentiments. Les entreprises réduisent le
gaspillage et font une utilisation plus efficiente des ressources. Vous êtes à
l’écoute de vos clients, des consommateurs et du milieu. D’abord et avant
tout, vous faites preuve d’un esprit d’innovation.
L’engagement du secteur privé est plus nécessaire que jamais. Pas
seulement en raison des défis auxquels la planète est confrontée. Il est plus
nécessaire que jamais en raison des défis fondamentaux auxquels les
entreprises sont confrontées de nos jours.
Les chefs d’entreprise font l’objet de questions pénétrantes au sujet
de l’imputabilité, de la transparence et de la responsabilité sociale des
entreprises. Ces questions appellent en réponse un engagement envers des
résultats durables comme celui que démontre le Groupe d’action des
entreprises pour le développement durable.
Les compagnies qui s’engagent à inclure dans leurs rapports financiers
traditionnels les répercussions environnementales et sociales de leurs
opérations envoient un message très clair aux citoyens et aux marchés. Les
compagnies qui reconnaissent l’importance d’adhérer au Pacte mondial de l’ONU
et à l’initiative des rapports mondiaux (GRI) envoient un message tout aussi
clair.
Nous avons souvent été témoins d’un engagement de cette nature au Canada
ces dernières années. Le programme Gestion responsable mis en place par l’industrie
chimique canadienne a essaimé dans 40 pays. Le programme d’éco-étiquetage,
le partenariat d’action pour le changement climatique, l’International
Emissions Trading Association sont autant d’exemples canadiens admirables d’engagement,
de leadership et de partenariat de la part du monde des affaires.
Mais ce n’est pas suffisant. La pression en faveur de la durabilité ne s’atténuera
pas. Les gens vont continuer de s’attendre à ce que les entreprises tiennent
compte des facteurs sociaux et environnementaux dans leurs décisions.
Si nous voyons se multiplier les exemples de compagnies qui rendent compte de
leur rendement environnemental et des répercussions sociales de leurs
activités, la prochaine étape doit être l’établissement de mécanismes de
rapport plus intégrés. En trouvant une façon de relier les rapports
financiers, environnementaux et sociaux, les entreprises pourront mieux
démontrer la rentabilité du développement durable. S’il est raconté en
termes clairs et efficaces, les marchés financiers écouteront le récit des
entreprises durables et profitables. Or, un plus grand intérêt de la part des
marchés financiers pour la durabilité favoriserait grandement l’atteinte des
objectifs sur lesquels porte ce sommet.
Mesdames et Messieurs, au cours des prochains jours, les dirigeants mondiaux
passeront en revue et confirmeront les travaux qui se sont déroulés cette
semaine au Sommet. Nous les comparerons aux engagements que nous avons pris à
Doha, à Monterrey et ailleurs. Ensuite, le travail véritable commencera.
Les gouvernements comme le nôtre emporteront avec eux une idée plus claire
de la voie à suivre et des moyens d’améliorer la gouvernance pour conserver
notre élan.
Le monde des affaires a été un partenaire important dans ce travail au
cours des dernières années, et il continuera de jouer un rôle essentiel. Vous
êtes ici parce que vous l’avez bien compris. Vous êtes ici parce que vos
entreprises sont conscientes de leurs responsabilités. Je salue l’engagement
et le leadership dont vous faites preuve.
Les gouvernements comme les entreprises doivent continuer de montrer l’impact
positif des mesures qu’ils prennent. Nous devons continuer de mettre la
théorie en pratique. Nous devons prêcher par l’exemple. Il nous faut non
seulement proclamer notre succès mais aussi avouer franchement nos erreurs.
Mes amis, nous venons seulement de nous engager dans une voie qui n’est pas
celle de la facilité. Il ne sera ni simple ni rapide d’assurer un avenir
durable. Mais il n’existe aucune autre solution acceptable. Les citoyens de
notre petite planète comptent sur nous. Et il ne faut pas les décevoir.
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