Allocution du Premier ministre Paul Martin - À l’occasion de la visite de son Excellence le Secrétaire général M. Kofi Annan
Mars 09, 2004
Ottawa (Ontario)
DISCOURS DU PREMIER MINISTRE
Le texte prononcé fait foi Monsieur le Président du Sénat, Monsieur le Président de la Chambre,
Mesdames et messieurs,
J’ai le grand privilège de souhaiter la bienvenue au Parlement au Secrétaire général des Nations Unies, monsieur Kofi Annan.
Votre Excellence, le Canada est peut être un jeune pays, mais nous avons l’un des systèmes de gouvernement ininterrompus le plus ancien au monde, et au cours de notre histoire, nous nous sommes montrés de fervents démocrates.
Cette chambre magnifique, la Chambre des communes, est le moteur de notre démocratie, et parfois… disons que c’est assez bruyant.
J’aimerais bien croire que le calme qui règne dans le moment, chose rare, reflète le ferme soutien que les membres des deux côtés de la Chambre accordent aux politiques du gouvernement, mais en vérité, je soupçonne que ce calme rend surtout hommage à votre personne et à l’institution remarquable que vous dirigez.
Les Canadiens ont été parmi les premiers partisans les plus loyaux des Nations Unies, et ils le sont toujours. Cela ne devrait donc pas surprendre de constater qu’un bon nombre d’entre eux contribue de façon essentielle aux activités de l’ONU.
Permettez moi de vous présenter six de ces Canadiens ici présents aujourd’hui.
Le lieutenant général Roméo Dallaire, défenseur compatissant et éloquent de la responsabilité de protéger qui incombe à la communauté internationale
Le major général Andrew Lewis, revenu dernièrement de l’Afghanistan, où il était commandant adjoint de la Force internationale d’assistance qui apporte de véritables changements là bas, qui aide à reconstruire ce pays déchiré par la guerre
Stephen Lewis – l’envoyé spécial du Secrétaire général pour le VIH/sida en Afrique
Maurice Strong – sous secrétaire général et conseiller spécial auprès des Nations Unies
Un homme qui a beaucoup contribué à faire de l’environnement une responsabilité à l’échelle mondiale.
Louise Fréchette, qui s’est distinguée pendant de nombreuses années au service de la fonction publique du Canada et qui est aujourd’hui Vice-secrétaire générale des Nations Unies.
Louise Arbour – juge à la Cour suprême du Canada, procureur en chef du Tribunal pénal international à La Haye et bientôt Haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.
Votre Excellence, le Canada est un acteur international. Notre sécurité, notre prospérité et notre environnement sont intimement liés à ce qui se passe au delà de nos frontières.
Aucun pays n’est plus ouvert au monde que le Canada, et aucun pays n’a autant intérêt à veiller au fonctionnement équitable et efficace de nos institutions internationales.
Ceci est vital pour le Canada – c’est dans notre intérêt fondamental que la communauté internationale soit guidée par la primauté du droit et qu’elle soit tenue de s’y conformer.
Notre engagement mondial dépasse le simple intérêt propre au sens étroit du terme.
C’est aussi une question de cœur, une croyance en la dignité de chaque personne, et c’est dans leur bien-être qu’il faut trouver des solutions équitables aux problèmes d’envergure internationale.
Notre engagement à l’égard du multilatéralisme est bien plus que l’expression d’un simple vœu; c’est la reconnaissance du fait que le destin du Canada en tant que nation libre exige l’équité à l’échelle planétaire, l’intégrité, le courage et l’imagination.
Voilà les qualités dont le monde a besoin si nous voulons relever les défis d’aujourd’hui et de demain.
Voilà aussi les qualités qui nous viennent spontanément à l’esprit lorsque nous songeons à la vie et à la carrière de notre honorable invité.
En 2001, le prix Nobel de la paix a été attribué aux Nations Unies et à son Secrétaire général.
Et à juste titre, car Kofi Annan témoigne, dans sa personne, des aspirations les plus nobles que nous nourrissons tous pour la communauté des nations.
L’ONU a pu traverser les moments critiques de son histoire grâce à la direction de secrétaires généraux sans pareils.
Il en est de même aujourd’hui, et sans aucun doute, Kofi Annan mérite sa place auprès des grands dirigeants des Nations Unies.
Les temps sont difficiles à l’heure actuelle.
- la menace du terrorisme;
- l’écart grandissant entre les riches et les pauvres dans le monde;
- le besoin de protéger notre patrimoine mondial des ravages de la pollution et de l’exploitation insensée des ressources naturelles;
- la responsabilité de protéger.
Tous des défis auxquels il faut faire face et qui exigent que les nations se chargent de leurs responsabilités internationales et qu’elles mettent, ensemble, l’épaule à la roue.
Au cœur de tout cela, il y a les Nations Unies. Si l’ONU ne fonctionne pas, de plus en plus de personnes seront laissées pour compte. Nos problèmes vont s’intensifier et des solutions durables risquent de nous échapper.
Nous vivons dans un seul monde, où toutes nos destinées sont liées.
Kofi Annan, en paroles et en actions, a consacré toute sa vie à nous rappeler cette vérité fondamentale.
Il a traité des dossiers les plus graves de notre temps, qu’il s’agisse des guerres dans le Golfe ou dans les Balkans, du statut du Timor Oriental ou des tentatives d’instaurer la paix au Moyen Orient.
Votre Excellence, le Canada convient avec vous qu’il existe une responsabilité collective de protéger toute personne contre les menaces à leur sécurité.
Kofi Annan est une source d’inspiration dans la lutte visant à mettre fin aux tragédies qui affligent le monde.
Par exemple, il a joué un rôle de direction crucial dans la création du Fonds mondial de lutte contre le VIH/sida et dans la campagne visant à fournir des médicaments peu coûteux à ceux qui en ont besoin dans les pays pauvres.
Le Canada a été à l’écoute. Nous sommes le premier pays membre de l’OCDE à avoir déposé un projet de loi ayant pour objet l’envoi de médicaments génériques à faible prix aux plus démunis parmi les pauvres atteints du VIH/sida.
Je ne peux envisager une meilleure façon de commémorer la visite du Secrétaire général au Parlement que de voir les honorables députés et sénateurs de tous les partis s’unir pour adopter ce projet de loi rapidement.
Il est temps de passer à l’action.
Dans ces domaines et dans tant d’autres, soit, par exemple, la signature en septembre 2000 par les dirigeants de 147 pays de la Déclaration du Millénaire qui énonce les objectifs en matière de développement du XXIe siècle, Kofi Annan nous rappelle que les grandes causes comme la guerre et la paix ne peuvent jamais être séparées des droits de la personne et de la liberté individuelle.
Que Kofi Annan reste calme et résolu au sein de la tempête est étonnant. Non seulement s’attaque t il aux crises dans le monde avec une détermination et une imagination extraordinaires, il est tout aussi direct dans ses appels au changement au sein même des Nations Unies.
Cette grande institution n’est pas brisée, mais elle est mal en point. Les nombreux problèmes auxquels nous faisons face ne peuvent être facilement réglés par des modèles créés il y a 50 ans pour gérer des situations bien différentes.
C’est pourquoi le Secrétaire général a mis sur pied un groupe de haut niveau sur les menaces, les défis et les changements nécessaires qui le conseillera quant à la façon de faire en sorte que l’ONU soit en mesure de mener à bien ses tâches.
Il peut être assuré que le Canada se tiendra à ses côtés pour veiller à ce que la réforme qu’il a entreprise aille de l’avant et qu’elle s’implante. C’est le moins que nous puissions faire.
Il est bien trop facile de critiquer les Nations Unies, comme s’il s’agissait d’une entité lointaine et abstraite. Ce n’est pas du tout le cas. Les Nations Unies, c’est nous. Ceux qui sont responsables, ce sont les 191 États qui en sont membres, et c’est nous qui devons rendre les comptes tant en ce qui concerne ses échecs que de ses réussites.
Le Canada a fait sa part et davantage au fil des ans,
- que ce soit en déployant des efforts incessants aux chapitres des droits de la personne,
- dans le maintien de la paix ou dans d’autres domaines primordiaux.
Là où se manifestent la douleur et la souffrance, vous trouverez des Canadiens et des Canadiennes issus de divers milieux en train d’apporter leur aide. L’Afghanistan et Haïti ne sont que les exemples les plus récents, où les Canadiens et les Canadiennes membres de nos Forces armées défendent la cause de la démocratie avec courage et compassion.
Votre Excellence, cette chambre est divisée par rapport à bien des questions, et cela témoigne de notre esprit démocratique. Mais je peux vous assurer que chaque personne ici présente rejoint ses collègues dans l’admiration que nous vouons au travail que vous accomplissez.
Nous sommes tous unis par le même engagement profond à l’égard du multilatéralisme et du maintien de la santé et de la vitalité des Nations Unies.
Monsieur le Président, j’aimerais vous présenter le Secrétaire général des Nations Unies, Monsieur Kofi Annan.
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