Allocution du Premier ministre Paul Martin au service commémoratif pour Air India
Aujourd’hui, nous nous souvenons de vos fils et de vos filles, de vos pères, de vos mères, de vos chers parents et amis – tous disparus à bord le vol 182 d’Air India. Nous contemplons la pierre lisse de ce monument. Nous y lisons les noms des disparus, qui resteront gravés pour toujours. Nos pensées se tournent aujourd’hui vers les vies écourtées et les générations de descendants qui ne verront pas le jour, vers le bonheur interrompu et le chagrin qui vous accompagne depuis déjà vingt ans, mais
Juin 23, 2005
Ahakista (Irelande)
Le texte prononcé fait foi
Bonjour.
Aujourd’hui, nous nous souvenons de vos fils et de vos filles, de vos pères, de vos mères, de vos chers parents et amis – tous disparus à bord le vol 182 d’Air India. Nous contemplons la pierre lisse de ce monument. Nous y lisons les noms des disparus, qui resteront gravés pour toujours. Nos pensées se tournent aujourd’hui vers les vies écourtées et les générations de descendants qui ne verront pas le jour, vers le bonheur interrompu et le chagrin qui vous accompagne depuis déjà vingt ans, mais dont vous n’avez jamais voulu. Pour vous, pour ceux et celles que vous aimez, un moment de haine a mené à une perte de durée éternelle.
Devant l’océan majestueux, nous nous efforçons de comprendre, mais ce n’est pas possible. Nous ne sommes pas naïfs, nous n’ignorons pas ce qui se passe dans le monde, son lot de peines, mais l’acte funeste commis il y a vingt ans défie toute compréhension. Ce fut une perte inimaginable. Ce fut votre perte, et ce fut aussi celle de notre pays. Ne vous y trompez pas : Même si le vol était d’Air India, même si les événements se sont déroulés près des côtes d’Irlande, il s’agit bien d’une tragédie canadienne.
De l’autre côté de l’océan, chez nous au Canada, aujourd’hui est un jour de deuil national. Partout dans notre pays, d’un bout à l’autre de ses vastes espaces, les drapeaux sont en berne – par respect, bien entendu, mais davantage en raison de notre désir collectif de vous dire que nous vous accompagnons. Nous vous accompagnons en ce jour de tristesse et de souvenir. Nous condamnons avec vous ceux qui ont perpétré cet acte haineux. Nous qui sommes réunis ici, tous ceux et celles qui écoutent ce service commémoratif de loin – nous vous accompagnons. Nous venons de différents pays, nous sommes d’origines et de cultures diverses – mais nous voici rassemblés, unis par notre humanité commune, pour témoigner devant ce monument éternel. Pour exprimer notre indignation. Pour célébrer ensemble la compassion.
J’aimerais dire aux familles dont les proches voyageaient sur le vol 182 – avec votre aide et vos conseils, nous créerons au Canada un site commémoratif permanent à la mémoire de ceux qui ont péri.
Et pendant des années à venir, nous soulignerons officiellement, le 23 juin, la Journée nationale du souvenir des victimes de terrorisme – ce sera le moment de nous souvenir de ceux qui ont trouvé la mort face à une haine froide et de réaffirmer notre volonté de tenir ferme contre ceux qui voudraient terroriser le monde.
C’est ici, dans ce petit hameau, et partout dans cette région bucolique et battue par les vents, que vous, les Irlandais, avez ouvert votre cœur au monde. Vous avez accueilli des étrangers dans vos foyers. Vous avez réconforté ceux qui venaient en quête de paix – vous les avez écoutés, vous les avez aidés à porter leur fardeau. À vous j’exprime la profonde gratitude de tous les Canadiens.
J’aimerais dire au personnel de sauvetage de ce pays et du Royaume Uni, à ceux qui ont si vaillamment mené des recherches en mer le 23 juin 1985 et pendant les jours qui ont suivi : vous avez fait preuve d’héroïsme et de compassion. Nous avons une dette de reconnaissance envers vous.
Voici un pays connu pour la beauté de ses paysages. Chaque été, de nombreuses collines sont couvertes de fuchsias sauvages à fleurs pourpres et cramoisies. Il existe une très belle expression pour les décrire. On dit que ce sont les « larmes de Dieu ».
Les larmes étaient abondantes ce matin-là, il y a vingt ans. Les familles des victimes ont versé les larmes de toute une vie.
Aujourd’hui, tandis que nous partageons ce moment de tranquillité – et dans l’avenir, pendant les jours difficiles qui s’annoncent, lorsque les pensées se tourneront vers ce qui aurait pu être – rappelons nous toujours que l’acte même du souvenir est un geste d’amour immémorial. C’est ainsi que nous perpétuons le souvenir de ceux qui nous manquent. Que nous sentons leur présence dans notre cœur. Que nous les pleurons et les célébrons. Et que nous gardons leur mémoire, toujours et à jamais.
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