Allocution du Premier ministre Paul Martin
Je suis heureux d’avoir de nouveau l’occasion de m’adresser à vous. Certains d’entre vous se souviendront peut-être que nous nous sommes réunis dans cette salle peu après ma nomination à titre de Premier ministre. Je dois vous dire, après avoir gouverné en situation minoritaire pendant une bonne partie de ces quelque 21 mois, que cela présente des défis particuliers. Malgré cela, notre programme d’action pour le Canada est resté le même. En un an et demi, nous avons travaillé sur les priorités d
Septembre 20, 2005
Gatineau (Québec)
Le texte prononcé fait foi Je suis heureux d’avoir de nouveau l’occasion de m’adresser à vous. Certains d’entre vous se souviendront peut-être que nous nous sommes réunis dans cette salle peu après ma nomination à titre de Premier ministre. Je dois vous dire, après avoir gouverné en situation minoritaire pendant une bonne partie de ces quelque 21 mois, que cela présente des défis particuliers. Malgré cela, notre programme d’action pour le Canada est resté le même. En un an et demi, nous avons travaillé sur les priorités dont je vous avais parlé en décembre 2003, et ce sont ces mêmes priorités que nous continuerons de développer cet automne.
Cela ne signifie pas que ces 21 derniers mois aient été faciles à traverser pour nous tous. Les questions soulevées par la Commission Gomery ont eu des incidences sur les élus et les fonctionnaires – et il s’agit d’une situation inacceptable pour une fonction publique honnête, compétente et dévouée envers les Canadiens. C’est ce dévouement qui nous motivera, cet automne et dans les mois qui suivront, à renforcer l’intégrité et la responsabilisation du gouvernement.
À Windsor, où j’ai grandi, j’étais probablement le seul enfant de mon quartier à connaître la différence entre un sous-ministre adjoint et un directeur général. Ainsi, la valeur des fonctionnaires, votre amour pour votre pays et le rôle essentiel que vous jouez pour ce qui est de transformer les rêves en réalité sont autant de choses que j’ai comprises à un très jeune âge. Le Premier ministre est peut-être le visage du gouvernement fédéral, mais vous, vous en êtes le cœur.
Et derrière les chroniques d’intrigues partisanes et de stratégie politique qui ont fait la manchette des quotidiens au cours de la dernière année, nous avons travaillé avec acharnement à la mise en œuvre du programme d’action du gouvernement. Une importante session commencera à l’automne et nous devons tous, politiciens et fonctionnaires, continuer à faire du progrès. Nous devons continuer à travailler sans répit.
Ainsi, avant que le Parlement ne se réunisse, avant le retour des temps intéressants, j’aimerais vous parler de notre programme pour le Canada – pas tant de son contenu que de sa raison d’être. Et je veux vous en parler parce que, vu l’immense portée des forces en branle dans le monde, vu leur signification pour notre pays, il est plus important que jamais de travailler ensemble, de faire en sorte que chacun de vos ministères, en suivant sa propre voie, tienne compte de l’orientation globale du gouvernement.
Commençons par ce que j’estime devrait être le rôle du gouvernement dans un contexte national et international en évolution
Au cœur de notre idée du Canada, se trouve l’union particulière des valeurs liées à la justice sociale et aux possibilités économiques. Ces valeurs sont essentielles à amener le Canada à relever les défis du XXIe siècle. Elles nous rassemblent. Elles font de notre pays un endroit de choix pour des milliers de personnes dans le monde entier. Ces valeurs guident le gouvernement dans la réalisation de ses devoirs en tant que défenseur de l’unité nationale, de notre sécurité et de notre souveraineté.
Nous accordons une grande importance aux libertés individuelles. Nous voulons donner aux individus les outils pour réussir. Nous croyons en notre responsabilité à l’égard de nos concitoyens et à l’égard des générations futures. Une responsabilité qui s’exprime par des réalisations publiques, des assises sociales solides et un engagement permanent envers la dignité humaine.
Nous sommes à l’avant-garde des pays résolus à protéger les droits de la personne. Dans la réalisation de notre projet commun, nous célébrons la diversité, et nous aspirons à assurer l’inclusion et l’égalité des chances; ces éléments qui définissent notre citoyenneté commune. Ces valeurs sont codifiées dans la Charte des droits et libertés, un document qui joue un rôle de pivot depuis plus de 20 ans. C’est un rôle que la Charte continuera de jouer dans l’évolution de notre pays et de notre société.
Ce mélange unique de valeurs contribue à nous définir en tant que Canadiens et à déterminer comment nous nous y prendrons pour atteindre nos objectifs en tant que nation. Ces valeurs résistent au temps et aux changements. Elles donnent corps à notre conception du Canada : une société déterminée à n’abandonner personne dans le besoin; une société qui a l’ambition d’être la norme selon laquelle les autres se jugeront.
Je crois au bien que le gouvernement peut accomplir. Je crois que le gouvernement doit être à la tête d’initiatives nationales qui reflètent nos aspirations les plus grandes et nos valeurs les plus profondes. Si ces derniers mots sonnent comme une recommandation en faveur d’un gouvernement activiste, c’est qu’ils le sont.
Je crois que le rôle du gouvernement est d’établir les objectifs nationaux de son temps, puis de mobiliser la volonté collective nécessaire pour les atteindre. En somme, je crois que le rôle du gouvernement est de préparer le pays pour le monde de demain. Pour ce faire, nous devons comprendre les forces qui exercent une influence sur notre pays et sur le monde, les plaques tectoniques qui bougent sous la plate-forme de notre vie nationale. Certaines – comme les relations entre le Canada et les États-Unis, l’impact des nouvelles technologies, les menaces à la sécurité et à l’unité – sont présentes depuis longtemps et sont bien connues, même si leur nature évolue sans cesse.
Cependant, nous sommes aussi confrontés à de nouvelles forces importantes. Des forces dont les répercussions sont énormes. Aujourd’hui, je voudrais attirer votre attention sur deux d’entre elles alors que nous discutons de la raison d’être de notre programme pour l’avenir du Canada.
Ni l’une ni l’autre n’est apparue brusquement, mais toutes deux ont atteint un point qui pourrait faire pencher la balance et exigent toute l’attention et l’action concertée du gouvernement. L’une de ces forces est l’évolution de notre population que reflètent les données démographiques; l’autre est la montée stupéfiante de la Chine et de l’Inde. Notre réaction à ces nouvelles forces modèlera l’avenir du Canada. Elles requièrent toutes deux une action immédiate et soutenue.
Nous devons être prêts à saisir les occasions qui ne manqueront pas de se présenter, à relever les nouveaux défis qu’elles entraîneront. Bref, notre mission doit être de maintenir le Canada à l’avant garde. Cela afin que dans 15 ans – même avec une population vieillissante, même dans un monde où des pays beaucoup plus grands que le nôtre rivalisent entre eux pour accroître leur influence politique et économique – notre niveau de vie reste parmi les premiers, notre qualité de vie soit sans pareille, notre pays soit fort et notre confiance en nous-mêmes inébranlable. C’est notre objectif national – un Canada uni et influent, riche en possibilités, un Canada capable de relever à la fois les défis que nous connaissons bien et ceux que présentent ces nouvelles forces. Tel est le but que nous nous sommes fixé.
Évidemment, ce ne sont pas toutes les activités de chacun de vos ministères qui pourront entrer dans ce cadre. Le gouvernement fait face à des demandes qui existent dans un contexte plus large que mon propos d’aujourd’hui, il devra également s’occuper des exigences à court terme. Nous répondrons à ces deux types de questions cet automne. Cependant, il me paraît absolument essentiel de mettre l’accent sur la prévoyance – sur les préparatifs à faire pour être en mesure de gérer l’impact qu’auront les changements démographiques et la montée de la Chine et de l’Inde – si nous voulons concrétiser nos aspirations pour le Canada. Ainsi, la gestion de ces forces et la préparation nécessaire pour y faire face et en tirer profit se retrouvent au cœur de la plupart des travaux que nous avons déjà entrepris, et de ceux que nous souhaitons accomplir dans l’avenir, en tant que gouvernement.
Ces propos ne sont pas tirés d’un séminaire ou d’une conférence. Cette situation est bien réelle. Et aujourd’hui, nous discutons de la réponse qu’exigeront ces nouvelles forces en ce qui concerne nos responsabilités en tant que décideurs.
En ce qui a trait aux nouvelles réalités démographiques d’abord, deux facteurs doivent être considérés : premièrement, depuis les 30 dernières années, le taux de natalité au Canada est relativement bas, et cette tendance ne semble pas vouloir changer; deuxièmement, la génération du baby-boom approche de l’âge de la retraite. Les répercussions sont considérables : moins de travailleurs qui devront soutenir davantage de personnes âgées. En seulement 10 ans, on ne comptera plus que 3,5 travailleurs pour chaque personne âgée, comparativement à 5 aujourd’hui. D’ici 2015, la population active canadienne commencera à diminuer; la croissance nette devra donc reposer sur les nouveaux Canadiens. Réfléchissez à ce que ce changement signifie : augmentation de la demande de soins de santé et de services publics; pénurie possible de main d’œuvre qualifiée.
Le contexte démographique mondial indique un accroissement important de la population dans les pays les plus pauvres, ce qui limite leur capacité à offrir même les possibilités les plus élémentaires. On constatera davantage de pressions migratoires, un terreau plus fertile pour le terrorisme et des demandes croissantes d’aide au développement. Pendant ce temps, le reste de la planète sera confronté à des défis démographiques semblables aux nôtres, ce qui entraînera une concurrence de plus en plus vive pour les travailleurs qualifiés.
Par rapport à toutes ces questions, il est notre responsabilité, en tant que décideurs, de veiller dès maintenant à ce que nous soyons prêts à y faire face. Que ferons-nous pour nous assurer d’être fin prêts le moment venu?
Dans le domaine de la santé d’abord, le principal objectif de l’accord conclu en septembre dernier avec les provinces et les territoires est de veiller à ce que le système public demeure solide et continue de bien fonctionner au fur et à mesure que la population vieillira et que les nouvelles technologies et percées médicales élargiront la portée des traitements. Ce que nous avons fait, c’est mettre en place une contribution financière fédérale à long terme qui soit prévisible et croissante. Cela afin que les provinces et les territoires puissent mieux planifier et s’adapter à leur réalité démographique en embauchant davantage de médecins, de personnel infirmier et d’autres professionnels de la santé, et se diriger vers une couverture garantie concernant les soins actifs à domicile et une stratégie nationale sur les produits pharmaceutiques.
Mais il est clair que nous mettrons l’accent, au cours des prochains mois, sur la concrétisation de notre engagement concernant la réduction des temps d’attente. Durant la dernière campagne électorale, nous avons fait une promesse aux Canadiens et aux Canadiennes. En signant l’accord sur les soins de santé, les premiers ministres provinciaux ont pris un engagement envers leurs citoyens. Ensemble, nous avons donné notre parole à la population, et maintenant, nous devons la tenir. La décision rendue par la Cour suprême dans l’affaire Chaouilli a évidemment mis en lumière l’urgence de cette situation.
Les temps d’attente exagérés sont symptomatiques de problèmes plus graves dans le système de santé. Pour les résoudre, il faut s’y attaquer – c’est la seule façon d’entreprendre une vraie réforme des soins de santé, d’en améliorer l’accès, et d’accroître la confiance de la population dans la capacité du système public à fournir des soins de qualité et en temps opportun.
C’est pourquoi nous avons nommé M. Brian Postl à titre de conseiller fédéral sur les temps d’attente – afin d’établir un consensus sur les mesures à prendre pour fournir rapidement des soins de santé. Et c’est aussi pourquoi, à la lumière de ses conseils et de son savoir, nous continuerons à travailler fort avec les provinces pour veiller à ce qu’elles respectent leurs engagements concernant la mise en place de points de repère en matière de temps d’attente pour des procédures médicales cruciales.
Notre approche est fondée sur des principes complémentaires : la souplesse et la responsabilisation. Par « souplesse », nous entendons que les provinces et les territoires offriront des services adaptés à leurs réalités, dans le respect des objectifs nationaux. Il s’agit d’un principe nécessaire et établi de longue date dans le fonctionnement du fédéralisme canadien. Le fait d’utiliser diverses approches pour atteindre des objectifs communs engendre l’innovation qui alimente le progrès. Lorsque nous respectons ces différences, nous renforçons notre pays.
Mais la contrepartie nécessaire de la souplesse est la responsabilisation. Nous mettons l’emphase sur la transparence et la comparabilité des rapports sur le rendement faits par les gouvernements à leur population respective – non seulement dans le cas des temps d’attente, mais aussi dans les cas d’initiatives touchant, entre autres, l’apprentissage des jeunes enfants et les villes, alors que nous souhaitons faire des progrès nationalement et que les provinces, les territoires et les municipalités assurent les services. Pourquoi? Parce que les repères de rendement fondés sur des preuves attireront l’attention sur les résultats. Tous les gestionnaires savent que ce qui devra être évalué sera accompli. L’établissement de rapports transparents permettra aux Canadiennes et aux Canadiens de demander des comptes à leurs gouvernements, y compris nous.
Le deuxième point sur la démographie touche les Canadiens autochtones. Trop de ces Canadiens, nos concitoyens, sont encore privés des outils et des possibilités dont ils ont besoin pour s’épanouir. Les problèmes – en matière d’éducation, de santé, de logement et d’environnement – sont sérieux et nous sommes déterminés à les régler.
À commencer par la Table ronde du printemps 2004 et la réunion stratégique de mai dernier – nous nous efforçons non seulement d’améliorer les conditions de vie des Autochtones, mais aussi de donner à leurs leaders les moyens de renforcer les capacités de gouvernance de leurs collectivités. C’est le cheminement essentiel qu’il faut suivre pour produire le résultat voulu : Améliorer leur qualité de vie de façon durable.
L’élément crucial de la réalisation de ce projet à long terme est le progrès à court terme. La santé des Autochtones est un domaine où nous avons déjà beaucoup avancé, l’an dernier. Cet automne, en prévision de la réunion des dirigeants autochtones et des premiers ministres, nous allons cibler les secteurs du logement, du développement économique et de l’éducation.
L’éducation des jeunes Autochtones – une génération dont l’avenir reste ouvert à toutes les possibilités – il faut que ce soit notre priorité. Leur réussite sera celle du Canada. Nous ne pouvons pas leur tourner le dos et condamner le segment le plus jeune de notre population, celui qui croît le plus vite, à un cycle de désespoir. Il n’en est pas question.
Troisième point : l’immigration. À la lumière de notre histoire, de nos valeurs et du défi imminent que représentent les changements démographiques, la politique canadienne d’immigration revêt évidemment une importance capitale, surtout en ce qui concerne la sélection, l’intégration et la répartition régionale des nouveaux immigrants.
Tout simplement, le Canada a besoin davantage d’immigrants. Et ces derniers doivent pouvoir réussir. Trop souvent, les nouveaux Canadiens d’aujourd’hui, malgré des taux de scolarisation supérieurs à la moyenne, n’atteignent pas la prospérité économique aussi rapidement que les générations précédentes. Nos portes demeureront ouvertes aux immigrants dans toutes les catégories et aux réfugiés provenant du monde entier, il le faut. Mais à mesure que le taux d’immigration augmentera, nous devrons également recruter plus activement des immigrants dont les compétences correspondent aux besoins du marché, lesquels sont identifiés en consultation avec les provinces, les collectivités, les syndicats, les entreprises et le milieu universitaire.
En même temps, nous devons renforcer l’intégration sociale et économique des néo-Canadiens, notamment en ce qui a trait à la formation linguistique, ainsi qu’à la mise à jour et à la reconnaissance des titres de compétence. En ce qui concerne ce dernier point, nous ne pouvons protéger quelque chasse gardée qui fait obstacle au progrès. Nous devons veiller à que les ressources financières aillent là où elles sont le plus nécessaire; nous nous sommes d’ailleurs engagés récemment à accroître considérablement la capacité financière des provinces concernant l’établissement des immigrants. Tout simplement, notre approche en ce sens peut, et doit, permettre au Canada de se démarquer – elle doit être un élément clé de l’avantage canadien.
La seconde nouvelle force qui façonne notre avenir – à laquelle nous devons nous préparer dès maintenant – est la réorganisation de l’échiquier politique et économique mondial, particulièrement la montée de la Chine et de l’Inde. Sur le plan politique, l’équilibre des pouvoirs à l’échelle internationale se modifiera au cours des prochaines années. Les tensions risquent d’augmenter, et des pressions seront exercées sur nos organisations internationales pour qu’elles reflètent ce changement radical. Sur le plan économique, la Chine et l’Inde, ainsi que d’autres pays qui suivent leurs traces, comme le Brésil, sont en train de développer, à un rythme fulgurant, une nouvelle classe moyenne très vaste. Une toute nouvelle société de consommation de deux milliards de personnes est en voie de naître en l’équivalent d’un clin d’œil en temps historique. Selon le critère de parité de pouvoir d’achat, en 2004, les États-Unis, qui représentaient moins de 5 % de la population mondiale, comptaient pour environ 20 % de l’économie mondiale. De leur côté, la Chine et l’Inde, qui ensemble représentent 40 % de la population mondiale, comptent également pour près de 20 % de l’économie mondiale. On voit bien où se situe le potentiel de croissance.
La « mondialisation » est un mot à la mode qui a pris sa place. Cependant, avec l’émergence de ces nouvelles grandes puissances, il a pris un sens encore plus considérable. Nous nous trouvons à l’aube d’une réorganisation fondamentale du monde. Pour de nombreuses nations établies, l’apparition de ces nouvelles puissances représente une lame à double tranchant faite de promesses et de difficultés. Pour le Canada, ce défi à la compétitivité est bien réel. Mais étant donné la petite taille de notre marché national, notre grande capacité d’exportation et nos innombrables ressources, ce monde en évolution met à notre portée des occasions extraordinaires. Le rôle du gouvernement est de veiller à ce que nous puissions les saisir.
De toute évidence, tout dépendra de la stratégie financière et économique que nous adopterons pour renforcer notre compétitivité, mais nous parlerons de cela plus tard. Avant, j’aimerais que vous vous demandiez sur quoi cette compétitivité pourra reposer? D’un point de vue statistique, le rendement économique tend à être évalué selon chaque pays. Mais le fait est que de plus en plus, les grands centres urbains se livrent une bataille. Dans un monde où le savoir, le capital et les idées font le tour de la planète, c’est Toronto et Montréal par rapport à Shanghai et Bangalore; Ottawa par rapport à Helsinki; Vancouver par rapport à San Francisco. Bref, c’est chacune de nos grandes villes par rapport à sa contrepartie à l’étranger. Notre avantage réel viendra du fait que nos collectivités sont diversifiées, tolérantes, dynamiques sur le plan culturel, qu’elles offrent un environnement sain et qu’il fait bon y vivre. Elles représentent le point d’ancrage des concentrations d’entreprises où le talent foisonne. Notre Nouveau Pacte pour les villes et les collectivités vise à favoriser ces conditions.
Nous savons également que si la population et l’activité économique sont concentrées dans les grandes villes, l’écart économique est devenu moins un phénomène régional ou provincial en soi qu’un reflet des disparités entre le milieu rural et le milieu urbain. C’est dans les plus petites collectivités et dans leur lien avec l’économie rurale que la mondialisation et les changements démographiques présentent les plus grands défis et possibilités. Nous devons composer avec cette situation, et c’est ce que nous continuerons de faire cet automne; nous négocierons notamment avec d’autres provinces dans le but de conclure des ententes visant à mettre en application le Nouveau Pacte dans toutes les municipalités canadiennes.
L’environnement. Nous avons un devoir moral et une obligation d’agir afin de préserver un environnement sain et durable pour les générations de Canadiens et de Canadiennes à venir. Que devons nous faire? Nous devons faire notre part chez nous. Cet automne, nous travaillerons pour accomplir sans tarder des progrès tangibles sur notre projet vert et notre plan sur les changements climatiques.
Mais ne nous faisons pas d’illusion – la prospérité croissante de la Chine et de l’Inde, combinée à l’appétit toujours aussi fort des États-Unis et d’autres nations, est accompagnée de coûts environnementaux très élevés. Et cela implique d’autres responsabilités aussi pour le Canada. La simple vérité, c’est que, pour apporter un changement réel, il faut non seulement penser mondialement, il faut agir mondialement. Par exemple, pour combattre les changements climatiques, nous devons établir une plate-forme véritablement internationale qui comprend non seulement les signataires de Kyoto, mais tous les grands pays.
La Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques, qui aura lieu à Montréal, en décembre, sera l’occasion clé pour commencer à franchir les étapes nécessaires à créer cette plate-forme. C’est pour cela que nous voulions qu’elle se tienne chez nous et pourquoi le Canada assurera la présidence de la Conférence des parties durant l’année qui suivra. Notre but est d’aider à convaincre le monde de se concerter; d’agir rapidement et globalement pour régler un problème global.
Tout cela m’amène à parler du programme international plus général du gouvernement. De nos jours, les missions internationales ne sont plus l’apanage des seuls ministères des affaires extérieurs traditionnels. Aujourd’hui, presque tout le monde a un rôle à jouer, par exemple le ministère de l’Environnement concernant le changement climatique; Patrimoine canadien concernant les traités culturels et la promotion des artistes canadiens à l’étranger; la GRC à Haïti; le ministère de l’Agriculture en matière de commerce, notamment les négociations de Doha; le ministère de la Justice dans le dossier du trafic de personnes; Pêches et Océans concernant la conservation en haute mer; les Finances en ce qui touche les mouvements mondiaux des capitaux et ainsi de suite. Autrement dit, le rétrécissement de la planète influe sur un nombre croissant d’activités gouvernementales. Nous croyons que nous devons prendre notre place dans le monde, non seulement pour faire bouger les choses à l’échelle internationale, mais pour demeurer solide à l’échelle nationale.
Même si nous pouvions nous retirer du monde, nous ne voudrions pas le faire, surtout maintenant. Nous sommes une nation commerçante dépendante des exportations et désireuse de tirer profit de cette nouvelle classe moyenne asiatique. Nous sommes une nation multiethnique qui souhaite attirer davantage d’immigrants pour enrichir notre diversité et renforcer notre prospérité. Nous sommes une nation progressiste et objective, prête à aider les plus démunis. En outre, la montée du terrorisme international illustre bien que l’orthodoxie des conflits s’est écroulée, de même que toute notion voulant qu’un pays puisse espérer se protéger en s’isolant de la communauté internationale.
Aujourd’hui, nous devons concevoir la sécurité locale non seulement dans un contexte mondial, mais aussi dans l’optique la plus large possible. Songez-y, si le virus de la grippe aviaire subissait vraiment une mutation et devenait facilement transmissible d’un humain à l’autre, il ne resterait pas localisé longtemps. Nous aurions une pandémie mondiale sur les bras. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons mis sur pied l’Agence de santé publique du Canada, laquelle nous procure des moyens d’action de niveau mondial ainsi que l’influence née de l’excellence. Et c’est pour cette raison que des représentants de l’OMS sont venus demander de l’aide au Canada pour mobiliser des mécanismes de défense mondiaux contre la pandémie de grippe. C’est pourquoi nous convoquerons, en octobre, une rencontre des ministres de la santé provenant de près de 20 pays pertinents, une rencontre qui traitera franchement de prévention. Nous avons appris les leçons du SRAS, et auparavant, celles du 11 septembre.
Il est évident que nous vivons dans un monde où la question de la sécurité nationale doit s’inscrire dans un contexte général englobant une gamme de menaces qui vont d’actes de violence délibérés et du terrorisme à un désastre naturel. C’est pourquoi nous avons créé le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile et que nous lui avons confié un vaste mandat. Qu’il s’agisse de réagir rapidement à des attentats terroristes sur notre territoire ou à des situations d’urgence comme l’ouragan Juan ou les feux de forêt en Colombie Britannique – ou plus récemment, d’apporter de l’aide à la Nouvelle-Orléans et aux autres victimes des ravages causés par l’ouragan Katrina, comme le Canada vient de faire – nous devons être en mesure de mobiliser et de coordonner nos ressources à l’échelle nationale afin de répondre à des besoins humanitaires urgents. Cela ne laisse aucune place aux rivalités en matière de compétence. Ce qui prime est la responsabilité qu’ont les gouvernements d’assurer la sécurité de la population de façon cohérente. Voilà ce à quoi nous nous appliquons, de concert avec nos collègues dans les provinces et les municipalités, et au-delà de nos frontières.
Certains prétendent qu’il est temps de sonner le glas de l’influence du Canada à l’étranger. Nous ne sommes pas d’accord. C’est pour cela que nous avons élaboré l’Énoncé de politique internationale du Canada qui présente le cadre de notre engagement. Dans cette optique, nous allons jouer un rôle proactif pour maintenir la pertinence des organisations internationales. Nous étions, bien sûr, satisfaits lorsque l'ONU a adopté l'initiative du Canada sur la responsabilité de protéger. Mais devant l'incapacité de réaliser une réforme plus large de l'ONU la semaine dernière, il est clair que le Canada devra continuer, dans les mois décisifs et les années à venir, à faire pression en faveur d'un multilatéralisme plus effectif. C'est pourquoi nous sommes déterminés à faire notre part dans le monde – et même plus que notre part. Nous avons du rattrapage à faire, mais si nous voulons faire notre marque dans un monde de nouvelles puissances, il faut que le Canada s’oriente dans ce sens.
Notre action doit aller bien au-delà de celle de médiateur traditionnel. Que ce soit au plan diplomatique, militaire ou de l’aide au développement, le Canada a un rôle important à jouer – et nous allons le jouer.
Nous avons annoncé des investissements additionnels de 13 milliards de dollars sur les cinq prochaines années dans la défense. Ces investissements essentiels nous permettront de participer à la défense de l’Amérique du Nord et de remplir nos responsabilités à cet égard. En même temps, ils nous donneront les moyens d’assurer une sécurité minimale dans les États en difficulté que nous avons ciblés. Cela est essentiel à l’instauration de la démocratie ou à la mise en place de systèmes d’éducation et de santé – des conditions préalables à la réduction de la pauvreté.
Comme vous le savez, le Canada sera à la tête d’une force internationale dans le sud de l’Afghanistan. Cette nouvelle mission critique fait partie de notre contribution à l’effort mondial en vue de lutter contre le terrorisme sur un de ses terrains les plus fertiles, de donner à une nouvelle démocratie la chance de prendre pied et d’apporter l’espoir à un peuple assiégé. Ce pourrait être également la première épreuve de ce que nous avons décrit comme une « guerre à trois volets » – une offensive qui combine le combat, la stabilisation et le secours humanitaire.
Concernant notre aide au développement, nous nous sommes engagés à faire d’importantes augmentations annuelles, mais jusqu’à présent, nos dollars ont été trop dilués. Tel qu’annoncé, nous allons focaliser notre attention, diriger plus d’aide vers un plus petit nombre de pays et nous assurer que notre aide contribue à changer la donne. En même temps, nous allons cibler la bonne gouvernance démocratique. Corps canadien est un moyen clé pour aider à développer les capacités de gouvernance. Il n’y a pas de meilleurs et plus différents exemples que les situations de l’Autorité palestinienne et de Haïti pour illustrer le large éventail de besoins qui peuvent être comblés par l’expertise canadienne dans ce domaine.
Notre contribution au Darfour est un autre exemple de notre approche à l’égard de l’aide au développement et de notre promesse de nous engager davantage dans le monde. Si les pays développés, comme le Canada, peuvent apporter de véritables changements en soutenant l’Union africaine, nous aurons franchi une étape majeure en vue non seulement de régler le conflit spécifique du sud du Soudan, mais aussi dans notre capacité plus générale d’offrir notre aide en temps de crise de façon plus rapide et effective à ceux qui en ont besoin.
Permettez-moi maintenant d’aborder la question de notre stratégie économique. Car aucun autre aspect de ce que fait le gouvernement n’exercera aussi clairement une influence sur notre capacité de faire face à la fois aux nouvelles réalités démographiques et au nouvel équilibre des pouvoirs dans le monde. C’est simple, il faut que le Canada continue d’améliorer sa performance économique, qui est déjà excellente. Le maintien d’une performance parmi les meilleures au monde doit être au cœur de la réponse du Canada à ces nouvelles forces de changement.
Tout commence par la responsabilité financière. Les jours de 1994, où un ministre des Finances débutant était assis en face des créanciers internationaux, qui lui faisaient la leçon en lui disant que le Canada allait frapper un mur; pour moi, ces jours sombres servent de rappel inoubliable, que rien de ce que nous voulons faire chez nous, rien de ce que nous voulons accomplir dans le monde, ne peut se réaliser si nous nous laissons prendre dans le cercle vicieux de l’irresponsabilité fiscale.
La discipline financière est un principe de comportement qui nous a menés à huit années consécutives de surplus budgétaires. Notre engagement à équilibrer les budgets permet au Canada d’établir la force économique nécessaire à sa réussite dans le monde de demain. Il donne aussi au gouvernement les assises requises pour réduire les impôts, renforcer les programmes sociaux et faire face, sans être pris au dépourvu, aux imprévus, comme les crises de la vache folle et du SRAS. Même en subissant les pressions d’un gouvernement minoritaire, même avec l’entente que nous avons conclue avec le NPD pour garantir l’adoption du budget, nous sommes restés fidèles au principe de l’intégrité financière. Nous sommes le seul parmi les pays du G7 qui n’a pas de déficit. C’est un avantage énorme pour le Canada, et nous allons maintenir le cap.
Grâce à notre saine gestion financière et à notre réforme du régime de retraite universel, le Canada est en mesure de tenir compte de la maturité imminente de notre population beaucoup mieux que la plupart des pays. Heureusement, dois-je dire, car il sera déjà assez difficile d’assumer les coûts d’une société vieillissante sans devoir en même temps assumer le fardeau d’une dette excessive et croissante. Il y a à peine 12 ans, le ratio dette fédérale/PIB était de presque 70 % – et continuait à augmenter. Il est maintenant de 38 % et continue à diminuer. Au cours des neuf prochaines années, nous allons le ramener à un niveau acceptable de 25 %. Ce n’est pas d’un chiffre sur une page qu’il s’agit, mais bien de la liberté pour les Canadiens de demain de prendre leurs propres décisions.
Ce n’est pas une coïncidence si le revirement de l’économie canadienne a pris de la vitesse avec l’élimination du déficit il y a huit ans. Ce qui était vrai alors l’est toujours aujourd’hui. Le seul moyen de faire face au double défi d’une population vieillissante et de l’émergence de nouvelles forces économiques consiste à continuer de réduire notre niveau d’endettement pour pouvoir consacrer nos ressources aux besoins croissants de la population et à des réductions d’impôts au lieu de payer des intérêts sur la dette. Au sujet de notre plan fiscal, ne laissons pas planer le doute. Les dés sont jetés. Nous allons continuer sur notre lancée.
Cela dit, un bilan favorable n’est pas suffisant en soi pour faire face à ce que l’avenir nous réserve. Pour des raisons d’histoire et de géographie, le Canada et les États-Unis sont étroitement liés sur le plan économique. Cette situation n’est pas près de changer et nous ne voulons pas qu’il en soit autrement. Cependant, les trois pays – le Canada, les États-Unis et le Mexique – doivent collaborer à l’édification d’un continent nord-américain plus compétitif; une Amérique du Nord capable de relever les défis découlant de l’émergence de la Chine et de l’Inde. C’est ce raisonnement qui a mené au lancement du Partenariat nord-américain pour la sécurité et la prospérité, lancé en mars dernier, avec les présidents Bush et Fox. Il est axé non pas sur les affaires mais sur les personnes. Il vise à assurer de meilleurs emplois, des collectivités plus sûres et une meilleure qualité de vie.
Les économies nord-américaines sont fortement intégrées, c’est un fait. Nous sommes donc tous gagnants lorsque nous collaborons. Nous devenons plus forts. C’est pourquoi il est tellement improductif qu’une nation fasse fi des règles établies. L’ALENA n’est pas une entente que l’on peut ignorer quand cela convient à des intérêts nationaux restreints. Le commerce libre et loyal repose sur une procédure de règlement de différends dont toutes les parties concernées doivent respecter l’esprit et la lettre. Malheureusement, la réaction du gouvernement américain à la suite de la plus récente décision du groupe spécial de règlement de différends de l’ALENA sur le bois d’œuvre bafoue ce principe de base et ce faisant, envoie le mauvais signal au monde. Il est évident que le libre-échange est important pour le Canada et pour le Mexique. Il est également essentiel à la compétitivité de l’Amérique du Nord. Mais en bout de ligne, il est clair que les États Unis dépendront autant que nous et que n’importe quel autre pays d’une économie mondiale libéralisée gouvernée par des règles prévisibles.
On peut tirer d’importantes leçons de nos relations commerciales avec les États-Unis au cours des deux dernières années, particulièrement dans le contexte de l’émergence de la Chine et de l’Inde avec leurs énormes populations et les possibilités inouïes que ces pays présentent. Nous savons tous que le marché américain est indispensable pour le Canada, et il le sera toujours. En outre, vous savez sûrement qu’il est essentiel que le Canada diversifie ses marchés, et l’émergence de l’Asie nous offre la meilleure occasion de le faire depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Par exemple, l’expérience de l’ESB a incité le Canada à se doter d’une plus grande capacité de traitement sur place et à développer énergiquement le marché mondial pour le bœuf canadien. Plus que jamais auparavant, nous devons rechercher, à titre de nation, les occasions inhérentes à de vastes marchés émergents qui ont grandement besoin des ressources du Canada, de ses produits et de son savoir-faire.
À cet égard, nous avons une occasion unique de tirer profit de notre richesse énergétique et du potentiel de notre industrie minière. Dans un monde incertain, où les ressources énergétiques et les matières premières sont insuffisantes, et le seront encore davantage à mesure que la demande de la Chine, de l’Inde et d’autres pays augmentera, les ressources énergétiques et minérales sont parmi nos plus grands avantages comparatifs. C’est pour cette raison aussi que nous devons unir nos forces à celles des provinces, des territoires et d’autres intervenants pour faciliter le développement de nos ressources énergétiques. Nous avons de grandes capacités en ce qui concerne le pétrole, le gaz, l’électricité et l’énergie nucléaire. Et le Canada peut être à la pointe du progrès sur de stimulantes nouvelles technologies vertes allant de la séquestration du charbon à l’énergie éolienne, à la biomasse, au charbon écologique et à d’autres. Nous n’avons qu’à agir plus vite.
C’est également pour cette raison que le Nord canadien est passé à l’avant-plan en matière d’élaboration de politiques, une tâche que nous poursuivrons avec diligence cet automne. Nous ne pouvons plus tenir le Nord pour acquis. Puisque le rétrécissement de la couche de glace mènera graduellement vers l’établissement d’un passage commercial Nord-Ouest viable, et que l’accroissement de la demande de ressources favorise l’exploration et le développement, d’autres pays se tourneront avec envie vers nos régions boréales. Nous devons réaffirmer notre souveraineté dans le cadre de la Stratégie pour le Nord afin de générer la prospérité et de protéger le fragile environnement de l’Arctique. Et nous le ferons.
Cela étant dit, même si l’Amérique du Nord est plus forte, même si de nouveaux marchés se développent pour nos ressources, nous ne pouvons pas nous laisser aller à un sentiment de contentement. Nos ressources naturelles sont limitées, mais le talent et son potentiel ne le sont pas. C’est pourquoi nous devons nous concentrer intensément sur nos ressources renouvelables les plus importantes – les compétences de notre population, l’innovation et l’investissement. Ce sont les facteurs de base menant à une productivité accrue, qui, à son tour, produira de meilleurs emplois, de meilleurs salaires et l’amélioration du niveau de vie.
La condition préalable pour participer à l’économie mondiale de demain est l’éducation – une éducation de qualité qui commence en bas âge et prépare les gens à réussir dans un monde compétitif. Nous devons mettre en place des conditions qui permettront aux Canadiens et aux Canadiennes de réaliser leur potentiel tout au long de leur vie, et c’est pourquoi nous visons à améliorer l’alphabétisation et les compétences en milieu de travail et à élargir l’accès à l’enseignement postsecondaire. Nous devons assurer aux Canadiens et aux Canadiennes dans tout le pays qu’ils auront les outils nécessaires pour réussir puisque la force de notre fédération est liée directement aux occasions offertes à tous de participer à la prospérité et à l’avenir de cette nation.
Voilà en quoi consiste le programme d’apprentissage et de garde des jeunes enfants. Nous pourrions cibler avoir le meilleur système d’enseignement postsecondaire du monde, mais si nous ne nous occupons pas des enfants dès leur plus jeune âge, non seulement seront-ils lésés, mais l’avenir du Canada sera également compromis.
Le programme que nous mettons en place avec les provinces et les territoires ne porte pas seulement sur des services de garde de qualité. En effet, il s’agit essentiellement du développement et de l’apprentissage des jeunes enfants pendant les années cruciales de la petite enfance, alors que l’acquisition et le développement de capacités sont en mode accéléré. Un bon départ est important pour tous les Canadiens et Canadiennes, mais il est essentiel pour les enfants autochtones et les nouveaux Canadiens, qui doivent surmonter les défis particuliers de l’adaptation et de la transition. Lorsque les prochaines générations se tourneront vers le passé, elles reconnaîtront dans notre approche pancanadienne d’apprentissage en bas âge, un projet d’édification de la nation aussi important que l’universalité des soins de santé, j’en suis convaincu. En d’autres mots, à l’avenir, le Canada réussira dans la mesure où les Canadiens et les Canadiennes réussiront. Pour les spécialistes, il s’agit du développement du « capital humain »; peu importe le nom qu’on lui donne, ce doit être notre principale motivation. Les ressources les plus précieuses au Canada ne gisent dans les profondeurs de la terre, mais dans les cerveaux de ceux qui l’habitent.
Nous devons comprendre que la barre est de plus en plus haute. Plusieurs d’entre vous ont lu le livre de Thomas Friedman, The World is Flat. Je me rappelle surtout de l’histoire sur les changements en Asie. Il souligne que lorsque Bill Gates se rend en Chine, les jeunes font la queue pendant des heures et ils se suspendent à des chevrons pour l’écouter parler. En Chine, dit il, Bill Gates est l’équivalent de Britney Spears. En Amérique du Nord, Britney Spears est Britney Spears. Il y a encore ici une certaine nonchalance à l’égard des bouleversements profonds qui s’opèrent et des défis que nous devrons relever. Trop de gens n’ont pas encore compris que la Chine ne signifie plus seulement main-d’œuvre à bon marché. Elle a gagné la course vers le bas avec ses travailleurs à faible salaire. Maintenant, elle et l’Inde sont entrées dans la course vers le sommet. Elles ont établi des douzaines de nouvelles universités. Elles forment les élèves et étanchent la soif de connaissances de ceux qui manifestent un grand désir de soutenir la concurrence mondiale.
Aujourd’hui, nous ne voulons pas seulement que nos enfants réussissent à l’école. Il est essentiel qu’ils réussissent. Nous ne voulons pas seulement qu’ils reçoivent une bonne instruction et qu’ils développent les compétences qu’il faut pour se décrocher un bon emploi. Nous en avons besoin. Nous investissons dans l’apprentissage permanent pour que les Canadiens et les Canadiennes restent en tête du peloton, puisque la technologie ne cesse d’évoluer et que la demande ne cesse de croître pour des compétences spécialisées. Nous voulons nous assurer que l’université est accessible à tous et que le revenu n’est pas un obstacle. Nous voulons également que les Canadiens et les Canadiennes puissent accéder à des possibilités d’apprentissage et de développement en bas âge, et que, là aussi, le revenu ne soit pas un obstacle.
L’accent mis sur l’éducation va de pair avec notre engagement envers l’innovation. L’innovation est le produit de la recherche de base, de sa commercialisation et de l’adoption de pratiques exemplaires. Au cours des dernières années, nous avons établi une base solide grâce à la recherche dans les universités et les hôpitaux, et nous sommes devenus un véritable pôle d’attraction pour les talents de partout à travers le monde. Nous continuerons d’investir pour maintenir cet avantage et promouvoir son application commerciale. Nous nous sommes améliorés, mais ce n’est pas suffisant. Il ne s’agit pas simplement de générer plus de recherche et de démarrages, bien que ce soit très important. Le principal avantage est la formation d’un plus grand nombre de diplômés ayant les compétences avancées qui permettront au Canada de demeurer un chef de file de l’économie du savoir. Je le répète : le succès du Canada sera à la mesure du succès de ses citoyens, et le succès des citoyens sera à la mesure de leurs études et de leurs compétences.
Enfin, pour mettre en valeur le talent des Canadiens et des Canadiennes, nous avons besoin d’une solide participation financière de la part du secteur privé. C’est l’outil le plus efficace pour intégrer l’innovation technologique à l’économie. Notre objectif consiste à veiller à ce que les investisseurs pensent d’abord au Canada lorsqu’ils voudront saisir les meilleures possibilités dans l’avenir.
Nous avons pris un bon nombre des mesures nécessaires pour accroître les investissements et aider le Canada à concurrencer de manière à ce qu’il puisse obtenir sa part des investissements volatiles. Le régime d’impôt des sociétés est compétitif et le restera. Nous continuerons d’améliorer l’infrastructure de nos frontières ainsi que les procédures de sécurité pour veiller à ce que les investissements faits au Canada donnent accès au marché américain.
Nous collaborons également avec les gouvernements des provinces de l’Ouest afin de tirer profit de leur situation géographique par rapport à l’Asie – on trouve en Colombie-Britannique les ports en eaux profondes et l’aéroport international de l’Amérique du Nord les plus près de l’Extrême-Orient. Il est donc logique que la Colombie-Britannique devienne la pierre angulaire du commerce avec le Pacifique, la porte d’entrée vers l’Asie. Mais ne vous y trompez pas : le développement de cette porte d’entrée vers le Pacifique sera avantageux non seulement pour la Colombie-Britannique, non seulement pour les provinces de l’Ouest, mais pour tout le Canada. En fait, cela illustre que le Canada est plus grand que la somme de ses composantes.
En résumé, je vous ai fait part aujourd’hui des éléments clés de notre plan pour préparer l’évolution du Canada dans un monde en mutation. Nous sommes confrontés aujourd’hui à deux nouvelles forces importantes – l’évolution de notre population et la montée de la Chine et de l’Inde. Nous devons agir maintenant pour faire en sorte que le Canada se maintienne à l’avant-garde. Pour réussir, une réponse à l’échelle gouvernementale s’impose.
Et nous réussirons – nous resterons à l’avant-garde – si, d’ici 15 ans, nous mettons en place un programme d’apprentissage pour la petite enfance pour nous assurer que nos enfants, quand ils entrent à l’école, sont prêts à progresser; si nous avons un système d’éducation qui, ne tenant pas compte des revenus, favorise le talent et donne aux Canadiens les outils nécessaires pour faire face à la concurrence. Nous réussirons si nos villes sont fortes et dynamiques, viables et capables de saisir le meilleur de ce que les autres pays ont à offrir; si nous donnons des possibilités réelles et durables aux Autochtones et aux Néo-Canadiens. Nous réussirons si notre système de santé financé par des fonds publics peut offrir des soins de santé de qualité en temps opportun, et si le Canada, fier et influent, aura pu prouver de nouveau au monde que nous sommes prêts à consentir l’effort nécessaire pour faire changer les choses.
Voilà le plan, les objectifs à long terme et les priorités sur lesquels nous travaillerons cet automne. C’est le plan que nous proposons pour arriver à destination. Notre tâche commune consiste à le réaliser – à garantir que la politique devienne la pratique. Nous avons fait des progrès considérables au cours des 18 derniers mois, mais bâtir le Canada, le protéger et renforcer les valeurs que nous partageons est une tâche permanente. C’est une tâche collective que doit poursuivre chaque nouvelle génération. Nos réalisations, nos réussites de même que nos échecs feront partie de l’héritage collectif de notre époque.
Ensemble, en reconnaissant les forces qui façonnent notre pays et le monde, nous pouvons nous assurer que les Canadiens, tous les Canadiens, sont prêts à y faire face.
Et les Canadiens et les Canadiennes ont raison d’envisager l’avenir avec confiance et optimisme. Notre pays est venu à bout de tâches qui en ont paralysé plus d’un : équilibrer le budget, accueillir et intégrer les immigrants et maintenir une croissance soutenue de l’emploi. Nos ressources naturelles seront très en demande. Notre population est parmi les plus scolarisées. Notre dualité linguistique et notre diversité ethnique et culturelle font du Canada un microcosme planétaire, ouvert sur le monde. Nous comprenons que les forces et les réussites de chaque province et de chaque région doivent être soulignées, parce qu’elles renforcent le Canada; nous reconnaissons qu'un Canada uni et solidaire est beaucoup plus fort que la somme de ses composantes.
D’ici 15 ans, une population de plus en plus multiethnique et vieillissante transformera notre nation. L’image du Canada sera très différente. D’ici 15 ans, la Chine et l’Inde transformeront la distribution du pouvoir à l’échelle mondiale, tant sur le plan politique qu’économique. L’image du monde sera aussi très différente.
Le Canada n’est certainement pas le seul pays à devoir faire face à ces changements. Ce qui importe – ce qui nous distinguera – c’est notre façon d’y répondre. Il y a 50 ans, les Canadiens partageaient le sentiment qu’il fallait consolider les fondements sociaux de notre pays, que le gouvernement pouvait et devait jouer un plus grand rôle afin de garantir l’égalité des chances, tout en offrant de l’aide à ceux qui en avaient le plus grand besoin. Ce sentiment animait ceux qui aspiraient à entrer à la fonction publique. Ils avaient alors le sentiment de faire partie de ce qui allait se révéler un moment déterminant pour le Canada. Ils bâtissaient le pays.
Je suis profondément convaincu que nous sommes aujourd’hui, en tant que pays, devant une étape comparable. Il nous appartient de nous assurer que le Canada en sorte grandi et plus influent, et que les Canadiens en sortent plus prospères et plus confiants.
En bout de ligne, nous ne serons pas jugés à partir des idées reçues d’aujourd’hui, mais plutôt par les Canadiens et les Canadiennes de demain. Lorsqu’ils jetteront un regard en arrière, ils comprendront que nous avions les moyens de planifier, de préparer le changement à venir. Ils constateront que nous sommes passés à l’action – que nous avons investi à nouveau dans le grand projet collectif que nous appelons le Canada; que nous avons relevé les défis et saisi l’occasion au moment opportun de préparer un avenir meilleur non seulement pour nous, mais aussi pour eux.
Voilà le rôle du gouvernement. Voilà le rôle que nous devons jouer ensemble.
Merci.
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