Faites un investissement...
Changez des choses
Notes pour une allocution de
Mel Cappe
Greffier du Conseil privé et Secrétaire du Cabinet
devant
l'Association professionnelle des cadres
de la fonction publique du Canada
Ottawa (Ontario)
Le 9 juin 1999
Le texte prononcé fait foi
Introduction
Comme vous le savez, j'occupe ce poste depuis quatre mois et demi. Je suis donc un
expert! En fait, je compte prendre le temps de définir avec précision mon programme.
Ceux qui sont venus ici dans l'espoir de m'entendre leur dire ce que je ferai seront
déçus. Je pourrais vous dire ce que je ferai ou je pourrais vous dire ce en quoi je
crois; je choisis de vous parler de ce en quoi je crois.
C'est la première fois en ma qualité de greffier que j'ai l'occasion d'adresser la
parole à des dirigeants de tous les ministères, et je suis heureux de prendre cette
occasion de le faire. Comme vous le savez, j'ai souvent participé au symposium de
l'Association professionnelle des cadres de la fonction publique du Canada (APEX). Je l'ai
fait parce que vous êtes un auditoire important. La fonction publique profite d'un
leadership fort et sérieux, et l'APEX est une force positive dans ce sens.
Voici tout d'abord ce dont je vais vous entretenir ce matin. J'exposerai brièvement
les défis que la fonction publique doit relever, à mon avis, en matière de politiques
gouvernementales. J'aborderai ensuite certains des défis auxquels la gestion aura à
faire face. Ces deux catégories de défis peuvent sembler être deux sujets distincts et
pourraient faire l'objet de deux discours différents. Mais, en fait, selon moi, l'essence
du message d'aujourd'hui, c'est que ces deux sujets sont liés ensemble, et qu'ensemble,
ils sont liés au rôle de la fonction publique.
Le message que je veux vous transmettre aujourd'hui est que le leadership compte. Je
désire vous faire participer personnellement à l'une des démarches les plus fascinantes
et les plus importantes que vous ayez jamais eu à relever en tant que gestionnaires :
celui de mettre sur pied la fonction publique de l'avenir. Chacun de nous peut changer les
choses. Vos choix de gestion individuelle auront des incidences considérables sur la
façon d'adapter cette grande institution que nous appelons la fonction publique au
nouveau millénaire. Et si le leadership compte, votre personnel compte également. Vous
avez un rôle important à jouer dans le perfectionnement de ses capacités en matière de
leadership.
Au cours de cette conférence, il sera question d'investissement à faire... et de
changements à apporter. Je veux que vous m'aidiez à apporter ces changements. Je crois
fermement qu'une fonction publique professionnelle, non partisane et représentative est
importante. Elle est importante pour la compétitivité future de l'économie du Canada et
la qualité de vie de ses citoyens. Elle est importante pour le maintien des valeurs
canadiennes d'équité et de compassion. Elle est importante également pour maintenir la
position du Canada en tête de tous les pays pour ce qui est de l'indice du développement
humain établi par les Nations unies. L'occasion de façonner notre avenir s'offre à nous
plus que jamais. Ainsi, au fur et à mesure que je vous dévoilerai mes idées
aujourd'hui, je veux que vous songiez à la façon dont vous pouvez faire preuve de
leadership et améliorer la fonction publique, et ainsi faire du Canada un endroit encore
meilleur.
Quelques réflexions sur mon rôle de greffier
Laissez-moi vous raconter quelque chose. Il y a quelques semaines, j'ai rencontré un
groupe intéressant de 20 dirigeants provenant du secteur privé et des milieux
universitaires et bénévoles. Je leur ai parlé de mon emploi comme greffier, secrétaire
du Cabinet et chef de la fonction publique, et je leur ai fait part des défis que je dois
relever.
Le président-directeur général d'une grande institution financière m'a fait
remarquer que je me trompais. Il m'a dit que le poste le plus important que j'occupais
était celui de chef de la fonction publique du Canada. Il m'a affirmé que si je
remplissais bien mes tâches de chef de la fonction publique, les autres suivraient. Il
avait parfaitement raison. (C'est une remarque particulièrement intéressante venant d'un
pdg d'une grande institution financière.)
Ainsi donc, lorsque je dis que nous ne pouvons séparer les politiques et la gestion,
j'ai toujours cette personne en tête. Exécuter le programme politique signifie exécuter
le programme axé sur les personnes. À titre de chef de la fonction publique, il me faut
axer mes efforts sur ceux qui forment cette institution, parce que ce sont eux qui
comptent et que ce sont eux qui font changer les choses. Chacun de nous fait un
investissement personnel et contribue à changer les choses. C'est la clé d'une fonction
publique solide. C'est le fondement d'un Canada fort.
Une fonction publique axée sur les valeurs
Ainsi, avant d'aborder le travail lié à l'élaboration des politiques à la fonction
publique, je veux d'abord parler des valeurs qui sous-tendent son rôle. Tout ce que nous
faisons à titre de gestionnaires est jugé par nos employés, et si nous voulons les
diriger avec efficacité, ils doivent d'abord connaître nos valeurs.
Un grand nombre d'entre vous m'ont entendu parler des quatre valeurs mentionnées dans
le rapport du Groupe de travail sur les valeurs et l'éthique mené par John Tait. Je
parle de ces valeurs parce que ce sont elles qui distinguent la fonction publique de
toutes les autres institutions canadiennes.
Il y a d'abord nos valeurs démocratiques. Dans notre démocratie parlementaire
inspirée du modèle de Westminster, il importe de faire la distinction entre le rôle des
fonctionnaires et celui des politiciens. Lorsque les ministres prennent des décisions
politiques, ils devraient en tirer satisfaction, parce que c'est pour cela qu'ils sont
élus et c'est ce pour quoi on leur demande des comptes. Le défi pour nous consiste à
reconnaître le rôle que nous jouons face à celui qu'ils jouent. Il est absolument
essentiel de se doter d'une fonction publique professionnelle, non partisane et
représentative, et nous devons comprendre et refléter les intérêts du public afin de
bien conseiller les ministres.
Cela m'amène à mon deuxième point, soit les valeurs professionnelles. Nous devons
aux Canadiens et aux Canadiennes de donner nos meilleurs avis aux ministres de façon
professionnelle et non partisane, d'exécuter les programmes d'une manière
professionnelle et de travailler de façon non hiérarchique et en collaboration avec nos
collègues des provinces, des autres ministères et des autres secteurs.
La troisième catégorie touche nos valeurs éthiques. Ce sont les questions
d'intégrité, d'honnêteté et de probité, qui vont tellement de soi qu'il n'est
pratiquement pas nécessaire d'en parler.
Il nous faut surtout parler de la quatrième catégorie de valeurs : l'appui de
notre personnel. S'occuper de nos employés est notre tâche la plus importante. Si nous
les motivons correctement, ils réussiront. Les valeurs humaines -- le respect de la
personne, le respect de l'équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle --
sont des choses dont il faut tenir compte pour nous-mêmes et pour notre personnel.
Ceux d'entre vous qui ont voyagé savent qu'on ne peut pas toujours compter sur une
fonction publique non corrompue dans d'autres pays et que son comportement dicte souvent
les valeurs à la société. Nous sommes le reflet des valeurs canadiennes et il nous faut
être les premiers à incarner ces valeurs.
Que signifie être un dirigeant dans une fonction publique axée sur les valeurs? Cela
signifie qu'il faut traduire ces valeurs dans nos actions de tous les jours, dans notre
milieu de travail. Nous le ferons -- et c'est là la vraie mesure du leadership -- en
respectant cette primauté du droit et ce qu'elle signifie afin de servir l'intérêt
public; en donnant des conseils honnêtes, clairs et exhaustifs sur les questions qui nous
sont soumises; en recherchant l'excellence grâce à des solutions innovatrices et
créatrices; en respectant les personnes, leurs idées et leurs différences; en faisant
ressortir ce qu'il y a de meilleur dans chacun, incluant sa pleine capacité de
leadership; et en prêchant par l'exemple.
Mais il existe une importante condition : si nos employés n'ont pas confiance dans la
façon dont nous incarnons nos valeurs, ils ne nous appuieront pas ou ne nous suivront pas
jusqu'au bout. Nous devons mériter leur respect.
Le programme du gouvernement
Nous allons devoir faire face à des questions très importantes liées aux politiques
et aux programmes. Elles vont mettre notre leadership à l'épreuve tout en nous obligeant
à concrétiser nos valeurs dans l'action. Notre réunion d'aujourd'hui se tient au début
de la deuxième moitié du mandat du gouvernement, soit un moment fort important. À
l'aube du nouveau millénaire, nous nous posons des questions fondamentales sur l'avenir
du pays. Les Canadiens et les Canadiennes s'attendent à voir leur gouvernement jouer un
rôle de premier plan pour faire du Canada un pays fort et uni. Le chemin qui nous a
conduits ici aujourd'hui, nous l'avons parcouru ensemble. Depuis 1993, des changements
fondamentaux n'ont cessé de se succéder. Vous vous souvenez tous de la réorganisation
du gouvernement en 1993 et de l'Examen des programmes I et II: le changement a été
draconien; il a été pénible et il a affecté les gens personnellement. Mais la fonction
publique en a tiré profit.
Dans un premier temps, le gouvernement s'était donné pour objectif d'assainir ses
finances. Pour y arriver, il a pris certaines mesures fondamentales : élimination du
déficit, réduction du fardeau de la dette, promotion de la croissance économique, mise
en place de réformes structurelles visant les programmes sociaux. Ces mesures ont
largement contribué à donner au gouvernement les moyens de relever plus efficacement les
défis que l'avenir réserve au Canada.
Dans un deuxième temps, nous nous sommes occupés des relations
fédérales-provinciales. La tâche n'est pas tous les jours facile, mais je crois que
nous en sommes arrivés à un niveau de collaboration avec les provinces dont il faut nous
réjouir. Nous avons fait beaucoup en matière de transferts de responsabilités. Nous
avons limité le pouvoir fédéral de dépenser. Nous avons réussi à établir des
partenariats avec les provinces, des partenariats qui portent surtout sur des questions
sociales comme les jeunes, la pauvreté chez les enfants ou les personnes handicapées,
mais aussi sur l'Accord sur le commerce intérieur. Comme ces questions prioritaires
appartiennent à des domaines où il y a partage des compétences, nous devrons continuer
sur cette lancée avec les provinces, les collectivités, le secteur bénévole et nos
concitoyens pour accomplir de réels progrès.
L'Entente-cadre sur l'union sociale constitue un outil puissant pour former ces
partenariats car il fournit des principes solides et un cadre qui appuie la collaboration.
Le défi des quelques prochaines années consistera à concrétiser cet accord et à
accomplir des progrès manifestes pour répondre aux besoins des Canadiens. Nous avons
reconnu l'interdépendance entre la politique sociale et économique, la politique
intérieure et la politique étrangère et les gouvernements fédéral et provinciaux. Une
gestion constructive et créatrice du chevauchement et de l'intégration est essentielle.
Rappelez-vous qu'au cours de la dernière année, nous avons mené avec succès la
restructuration de tout l'appareil gouvernemental fédéral, éliminé un déficit de
42 milliards de dollars, réduit l'effectif de la fonction publique en faisant preuve
de compassion, consacrant le temps nécessaire pour que tous ceux et celles qui quittent
la fonction publique soient traités avec respect, remis en uvre les négociations
collectives après plusieurs années de gel des salaires, et apporté une importante
amélioration à notre façon de traiter avec les provinces pour ce qui est du financement
et de la prestation des services. Tout ceci a été réalisé dans le cadre d'un
engagement incroyable de la fonction publique et avec votre leadership.
Si nous revenons au discours du Trône de 1997, vous verrez que toutes les propositions
ont été réalisées : objectif commun, accent sur les citoyens et collaboration.
L'objectif commun des Canadiens et des Canadiennes est le renforcement de l'unité
nationale. C'est ce qui fait notre identité. Au cours des dernières années, dans le
cadre de nos efforts pour mieux coordonner l'action des gouvernements et améliorer la
qualité des services, nous avons mis l'accent sur les citoyens. La façon de le faire est
importante : nous y sommes parvenus grâce à la collaboration.
Assez parlé du passé. Passons à l'avenir! Nous avons la chance d'entrer dans un
nouveau millénaire, et de montrer notre leadership en façonnant l'avenir de notre
nation. Laissez-moi vous donner un aperçu général des défis que doit relever le
gouvernement à moyen terme. Il faut garder en tête qu'il existe plusieurs forces
sous-jacentes : la mondialisation et l'intégration nord-américaine, la démographie
changeante, les changements technologiques et la révolution de l'information, et les
pressions environnementales.
Dans trois grands domaines, on assiste à l'émergence d'une action, et tous trois sont
imbriqués. Le premier touche la promotion et le renforcement de la croissance
économique, y compris la productivité. Quelle que soit la façon de la mesurer, quelles
que soient les comparaisons que nous établissons, le défi de l'avenir est d'assurer une
amélioration continue et de donner au Canada une position concurrentielle dans
l'économie mondiale. Le deuxième est de relever les défis sociaux qu'il nous faut
affronter, en particulier de maintenir l'inclusion sociale, à la lumière des changements
démographiques au Canada, entre autres le vieillissement. Le troisième est la position
du Canada dans le monde. Quel rôle jouer et comment le jouer? Les sous-ministres
travailleront sur ces questions au cours de la prochaine année.
Parallèlement se déroule l'étape suivante du Projet de recherche sur les politiques,
qui continuera d'être axé sur le vraiment très long terme. Nous devons être en mesure
de répondre aux questions auxquelles nous-mêmes et nos successeurs devrons faire face en
2010.
Pour réussir ce programme dans un tel climat, il ne s'agit pas simplement de définir
ce que nous faisons, mais comment nous le faisons. Tout revient à une question de
leadership. Nous aurons tous un rôle à jouer pour relever ces défis. Ce qui comptera,
ce sont les valeurs et les objectifs que nous formulerons, et le travail d'équipe, les
réseaux et la collaboration dans lesquels nous voulons nous lancer.
Nous devons aligner toutes nos forces sur le travail et utiliser tous les leviers dont
nous disposons comme instruments stratégiques pour collaborer avec tous les ministères
et les autres gouvernements; et en partenariat avec les secteurs privés et bénévole.
L'absence de point final est un autre élément unique de cette sorte de programme. Il y a
toujours quelque chose de plus à faire, étant donné le genre de changement dynamique
dont j'ai parlé.
Les défis de la gestion
Réaliser ces choses et prendre des mesures relativement au programme stratégique que
je viens de décrire ne peuvent se produire sans l'engagement d'une fonction publique des
plus professionnelle et des plus motivée, composée de gens compétents, expérimentés
et enthousiastes qui traiteront ces questions d'orientation complexes. À titre de
dirigeants, nous pouvons être assurés que ce processus durera de cinq à dix ans.
Nous faisons face au défi le plus difficile que nous ayons jamais affronté. Il est
réellement possible que nous n'ayons pas le personnel en place au cours des prochaines
années pour remplir le mandat du gouvernement envers les Canadiens et les Canadiennes.
Peter Harder, Secrétaire du Conseil du Trésor, a déclaré l'autre jour que le
renouvellement de la fonction publique pourrait être le véritable défi du prochain
millénaire. Nous avons lu des articles et nous connaissons les chiffres. C'est le défi
que doit relever chaque secteur de notre société, à l'échelle nationale comme à
l'échelle internationale. La course pour embaucher du personnel sera féroce et elle
l'est déjà dans certains domaines.
En cette ère postindustrielle, l'économie et nos institutions sont de plus en plus
axées sur le savoir. Depuis dix ans, la composition de notre effectif s'est
transformée. Alors qu'il comptait 60 p. 100 de cols bleus, il compte
aujourd'hui 60 p. 100 de travailleurs du savoir. C'est un changement majeur.
Scott Serson, le président nommé de la Commission de la fonction publique, a récemment
déclaré que la bataille des cinq prochaines années porterait sur les travailleurs du
savoir. Lorsque nous nous arrêtons aux questions touchant les travailleurs du savoir de
la fonction publique, c'est-à-dire vous et votre personnel, nous entrevoyons certains
problèmes sérieux.
D'abord, nous avons été clairs à ce sujet. Si rien n'est fait pour améliorer le
milieu de travail, pour mieux répondre aux besoins et aux aspirations de carrière des
employés à tous les niveaux, et pour faire face à de pénibles questions de charge de
travail et d'équilibre, alors un grand nombre d'entre vous et de vos employés voudront
envisager d'autres options. Certains de nos collègues sont déjà partis, et d'autres
cherchent activement à le faire.
Deuxièmement, la composition démographique du Canada et de la fonction publique est
en train de se modifier. D'ici 2005, plus de la moitié des personnes ici présentes
seront admissibles à la retraite, et il en ira de même de beaucoup de nos employés.
Regardez autour de vous. Nous ne sommes pas représentatifs de la société canadienne.
Nous devons faire quelque chose rapidement pour rendre la fonction publique attrayante aux
recrues potentielles. Sinon, qui nous aidera à faire tout ce travail? Nous devons
exploiter stratégiquement cette occasion pour redresser nos déséquilibres
démographiques.
Troisièmement, plusieurs professions souffrent déjà d'un manque aigu de
compétences. Nous n'avons pas assez de personnel en place et la concurrence est vive pour
les rares ressources en sciences et technologie, en informatique et en inspection
technique et aéronautique.
La Relève - Une base solide du renouveau
Arrêtons-nous ici quelques instants. J'ai soulevé quelques défis d'une grande
importance. Partons-nous de rien? Non, loin de là. N'oublions pas que nous avons parcouru
un très long chemin et accompli une foule de choses pour renouveler la fonction publique
et pour créer un meilleur milieu de travail. Ne nous dénigrons pas.
La Relève constitue une base solide. Elle a mobilisé les gens à tous les
niveaux, partout au pays, pour renouveler cette grande institution. Nous faisons beaucoup
de choses, et nous en avons déjà fait beaucoup. Je suis certain que chacun et chacune de
vous a contribué à sa façon. Il y a énormément d'énergie dans nos rangs, et beaucoup
d'entre vous êtes capables de changer les choses.
Rappelons-nous où nous étions il n'y a que deux ou trois ans. Les employés se
remettaient des effets de la rationalisation et du flot constant de critiques à l'égard
de la fonction publique. Nous avons eu le courage et la force de relever un nouveau défi,
soit de nous consacrer entièrement au renouvellement et à la reconstruction de cette
excellente institution qu'est la fonction publique du Canada. Beaucoup d'entre vous avez
vu dans cette situation l'occasion de tourner la page, de ramener l'espoir et l'optimisme.
Vous avez transformé un défi difficile à surmonter en une occasion de changer les
choses. Pour la première fois depuis de nombreuses années, nous pouvons porter notre
attention sur les ressources humaines de la fonction publique.
Regardez ce que vous avez réalisé. Voyez les répercussions de votre leadership. Les
plans d'action de La Relève se portent très bien dans les ministères, les
collectivités fonctionnelles et les régions; ils représentent une incroyable diversité
d'activités, à tous les niveaux, dans tout le pays. Les comités consultatifs en
matière d'apprentissage élaborent des plans d'action pour répondre aux besoins
particuliers des gestionnaires uvrant dans le domaine des politiques ou à des
échelons intermédiaires. Les conseils régionaux, ces agents du changement, ont le vent
en poupe d'un océan à l'autre.
Le Milieu de travail de demain -- j'étais personnellement engagé dans cette démarche
-- a servi à amorcer un dialogue avec des milliers d'employés et a été un complément
aux plans d'action. Les sous-ministres champions pilotent les efforts sur les grandes
priorités dans le domaine des ressources humaines : gestionnaires intermédiaires
spécialistes des sciences et de la technologie et collectivité des ressources humaines.
Enfin, l'APEX réalise un travail important et valable afin d'apporter fierté et
reconnaissance à l'effectif de la direction.
Ce sont là seulement quelques exemples des changements très réels que chacun et
chacune d'entre vous avez effectués et continuez d'effectuer. Ne sous-estimez jamais
l'effet que peut avoir votre leadership ni comment il se multiplie grâce à une série de
mesures et d'initiatives, des plus modestes aux plus importantes. Et à ceux qui disent
que La Relève s'adresse seulement aux cadres ou aux ambitieux, je réponds
qu'ils n'ont pas profité des choses extraordinaires que font leurs collègues un peu
partout au Canada. Les leaders à tous les niveaux investissent ce qu'ils ou elles ont de
meilleur et changent des choses : nous le constatons lors de forums de cadres
intermédiaires dans tout le pays.
Lorsque vous traitez vos subalternes et vos collègues avec respect, lorsque vous
donnez des directives à des membres de votre personnel et à d'autres personnes, que vous
les guidez et que vous vous intéressez à leurs besoins, c'est La Relève en
action. La Relève ne s'adresse pas uniquement aux cadres supérieurs. Elle
permet de moderniser la façon dont nous gérons les ressources humaines à tous les
échelons de la fonction publique. La Relève n'est pas une idée à la mode,
c'est le renouveau de l'institution qu'est la fonction publique du Canada.
Recrutement et maintien des effectifs
En substance, mes priorités de gestion sont le recrutement et le maintien des
effectifs. Pourquoi? Parce que si nous n'agissons pas immédiatement sur les deux fronts,
nous mettons en danger la fonction publique. Il y a une chose dont je suis certain. Pour
faire du bon recrutement et réaliser des progrès dans le maintien des effectifs, nous
devons devenir un employeur de choix. Pour ce faire, nous devons être l'option la plus
attrayante et la plus intéressante pour ceux qui sont ici aujourd'hui. Il nous faut un
milieu de travail moderne et stimulant. Il faut améliorer le lieu de travail afin de
mieux répondre aux besoins des travailleurs du savoir.
Cette démarche exigera que chacun et chacune de nous investisse dans quatre domaines :
la qualité du travail, le milieu de travail, nos processus de travail et le
perfectionnement de nos leaders.
Dans le cas des travailleurs du savoir, la perspective d'un travail stimulant -- la
qualité du travail -- peut faire toute la différence lorsque vient le moment de choisir
un employeur. Il nous faut offrir un travail stimulant et utile; le type de travail que
nous offrons d'accomplir à notre personnel doit être aussi valorisant que possible. En
d'autres mots, nous devons lui donner les responsabilités et les possibilités de changer
les choses. Il nous faut lui offrir des occasions d'innover et de contribuer à améliorer
nos ministères et notre pays. Cela signifie offrir des affectations stimulantes, un
contact avec de nouveaux domaines, une participation aux réseaux, aux échanges. Les
possibilités sont illimitées et la fonction publique peut toutes les offrir.
Et nous devons faire de la fonction publique un milieu de travail moderne. Nous devons
donner aux employés les outils dont ils ont besoin pour accomplir leur travail. Dans une
organisation fondée sur le savoir, cela signifie habituellement l'information; nous avons
besoin d'un milieu de travail où l'information est disponible et accessible, où la
hiérarchie existe pour faciliter les prises de
décision, et non pas pour contrôler l'information, où l'ambiance est professionnelle
et où on encourage les employés à prendre leur travail au sérieux et à s'acquitter au
mieux de leurs tâches, où il est naturel de travailler en équipe pour améliorer la
qualité du milieu de travail et la qualité du service.
Nous devons respecter le fait que les employés ont une vie privée; nous devons les
aider à gérer l'équilibre entre leur travail et leur vie personnelle. Nous devons
examiner pourquoi nous n'utilisons pas les outils existants pour améliorer l'équilibre
entre notre travail et notre vie personnelle; le Secrétariat du Conseil du Trésor a des
politiques qui encouragent le télétravail, les horaires de travail souples, le partage
des emplois, les semaines de travail comprimées, le soin des personnes âgées et le
travail à domicile, par exemple. Manifestement, nous devons en faire plus afin de
concrétiser ces possibilités pour les gens.
Et nos processus de travail? Les nouvelles recrues provenant de diverses organisations
attribuent à la bureaucratie et aux formalités administratives la raison principale de
leur départ. Je suis un bureaucrate et fier de l'être. Mais je ne suis pas «
bureaucratique ». La substance est plus importante que le processus. Il nous faut un
système de dotation rapide et équitable, où le mérite est plus reconnu que la vitesse
et l'efficacité.
De nombreux sous-ministres et leur équipe ont mis en uvre des programmes pour
lever les obstacles. Je vous demande, à titre de leaders principaux de la fonction
publique, d'éliminer dans la mesure du possible les tracasseries administratives.
N'enfreignez pas la loi mais servez-vous-en de façon créative, adoptez de nouveaux
règlements, des règlements sensés. Il nous faut chercher des moyens d'augmenter les
possibilités offertes à chacun de prendre des risques intelligents, de travailler de
façon innovatrice, d'obtenir des résultats, selon des méthodes conformes à nos valeurs
démocratiques et à la primauté du droit.
Et surtout, il nous faut former des leaders. Il nous faut un milieu de travail où nous
pouvons perfectionner notre personnel de façon naturelle et permanente, où le leadership
compte à tous les niveaux, où il importe peu que vous soyez réceptionniste, commis aux
dossiers ou gestionnaire, où vous avez l'occasion de perfectionner vos aptitudes et vos
talents et de devenir un meilleur travailleur du savoir. Chacun et chacune doit pouvoir se
perfectionner et suivre la formation dont il ou elle a besoin. Comme le disait
Jocelyne Bourgon, Présidente, Centre canadien de gestion, à une conférence sur les
ressources humaines il y a quelques semaines, les travailleurs du savoir ont besoin
d'apprentissage continu.
La possibilité d'utiliser l'apprentissage comme moyen d'attirer les bons employés, de
les motiver et de les garder, demeure un avantage énorme et inexploité. Les travailleurs
du savoir - dans une organisation axée sur l'apprentissage où ils bénéficient du
soutien approprié et d'un climat propice - peuvent mieux s'adapter au changement continu
dont j'ai parlé tout à l'heure.
Passer à l'action
Que retenir de tout cela? Nous retenons que passer à l'action en matière de
recrutement et de maintien des effectifs signifie améliorer le lieu de travail pour que
nous devenions un employeur de choix. Nous convenons tous, je pense, que la fonction
publique peut être un lieu de travail exceptionnel. Nous offrons du travail stimulant
dans une grande variété de domaines. La perspective de mobilité à l'intérieur et à
l'extérieur de la fonction publique, au moyen d'échanges et d'affectations, rend le
travail encore plus gratifiant et promet une carrière variée et hautement satisfaisante.
Les fonctionnaires peuvent avoir la satisfaction d'être des agents du changement. Nous
sommes un employeur national unique.
Mais si nous voulons recruter les meilleurs travailleurs du savoir et les garder, nous
devons réfléchir sérieusement à ce que nous offrons à une génération qui peut
choisir et qui est tout à fait préparée à exercer ce choix. Les employés compétents
et qui possèdent des aptitudes pour le leadership sont très recherchés aujourd'hui. Les
étudiants font l'objet d'une intense concurrence en vue de retenir les « plus brillants
». Les grandes entreprises ciblent maintenant les étudiants à haut rendement dès le
début de leurs études universitaires ou collégiales.
Grâce à l'utilisation stratégique et efficace des stages pour étudiants et des
emplois d'été, ces entreprises suscitent l'intérêt de ces étudiants et les
fidélisent. La concurrence ne vient pas uniquement du secteur privé. Les provinces
doivent affronter le même problème de recrutement et de démographie; elles nous feront
donc concurrence pour les mêmes rares ressources.
La rémunération seule ne sera pas la solution. Nous ne pouvons pas surenchérir pour
recruter des gens de talent. Nous ne pouvons pas offrir des primes d'entrée de
recrutement de 50 000 $ comme le font certains employeurs du secteur privé.
Mais nous devons nous assurer que nous faisons tout en notre pouvoir dans ce domaine. Le
Secrétariat du Conseil du Trésor a déjà négocié des avantages sur mesure pour
certains groupes.
Vous jouerez un rôle de premier plan dans ce processus. Lorsque viendra le temps de
visiter les campus, vous devez tous être présents. J'y serai moi-même. Nous parlerons
de la fonction publique et des récompenses qu'elle offre à ceux qui relèvent le défi.
Nous affrontons des problèmes réels de maintien en poste, en particulier dans le cas
des collectivités et des groupes fonctionnels les plus concurrentiels. Nous entendons des
histoires au sujet de diplômés qui arrivent, regardent autour d'eux et se rendent compte
qu'ils n'ont rien à gagner à rester ici. L'étude de Linda Duxbury, le sondage de
l'APEX sur la santé et d'autres études révèlent que bon nombre d'entre vous étudient
sérieusement d'autres options.
Que pouvons-nous faire à titre de dirigeants? Nous pouvons faire preuve de leadership
en protégeant le principe du mérite. Il existe une énorme différence entre protéger
le mérite et le système de mérite qui existe. Conservez-en les principes, et trouvez
les meilleurs moyens de les mettre en application. S'il existe des obstacles à la
protection du mérite, ils doivent disparaître. Il nous faut mettre sur pied un système
de ressources humaines souple axé sur le mérite. Chacun et chacune de nous doit
absolument examiner de près si les obstacles existants sont vraiment nécessaires.
Sont-ils de simples règles que nous nous imposons? Si nous n'agissons pas dès maintenant
sur la façon de gérer les ressources humaines, nous minerons notre propre capacité à
recruter du personnel et à maintenir nos effectifs.
Nous pouvons faire preuve de leadership en encourageant notre personnel de gestion des
ressources humaines à opter pour la professionnalisation, à se reconstruire, à
fournir un service stratégique, ce qui est crucial pour le renouveau d'une institution,
à nous enseigner et à nous conseiller en notre qualité de gestionnaires.
Vous pouvez faire preuve de leadership en améliorant la qualité de la gestion de la
fonction publique. Nous en avons les moyens collectifs, en notre qualité de
gestionnaires, au niveau de chaque unité de travail. Nous tous, des ministères ou des
organismes centraux, pouvons changer les choses pour les employés dans le milieu de
travail.
C'est pourquoi, au moment où je vous parle, nous entreprenons le premier sondage
complet auprès des fonctionnaires sur un grand nombre de questions liées à la qualité
de notre milieu de travail. Vous savez tous que nous avons été critiqués sur ce point
dans les éditoriaux, où l'on affirmait qu'il s'était fait assez d'études et que le
moment d'agir était venu. Honnêtement, nous avons besoin de cette étude pour mesurer
les progrès, élaborer un plan de travail et sensibiliser le public à ces questions,
pour raffiner et ajuster les plans ministériels de La Relève ainsi que notre
programme d'ensemble. J'ai répondu au questionnaire dès que je l'ai reçu, et
j'encourage tous les membres de votre personnel et tous vos collègues à faire de même.
Utilisez les résultats du sondage auprès des employés pour apporter des changements
au sein de votre propre unité. Mis ensemble, ces changements auront un effet dans toute
la fonction publique. N'attendez pas que les organismes centraux vous disent, quoi faire.
Prenez la situation en main et commencez à apporter des changements dès aujourd'hui.
Pour ce faire, il faut faire les petits investissements dont j'ai parlé précédemment,
changer les choses et faire preuve de leadership.
Si vous vous employez à des tâches novatrices et si vous donnez des conseils
judicieux au gouvernement, si vous innovez en appliquant de nouvelles méthodes de
gestion, de prise de risques et d'élaboration de politiques et si vous faites preuve de
leadership dans les pratiques de gestion et dans l'application de valeurs authentiques,
alors je crois que nous serons en mesure d'offrir un milieu de travail attrayant pour ceux
qui sont aussi bons, voire meilleurs, que nous. Je crois qu'il s'agit là d'un défi de
taille et j'attends impatiemment le moment de travailler avec vous pour le relever.
Commencez à investir... et à changer les choses.
Conclusion
Cela nous ramène au message que je vous ai livré aujourd'hui : le leadership compte.
Faites l'investissement. Soyez des agents du changement. Attaquez-vous aux quatre domaines
dont j'ai parlé : la qualité du travail, le milieu de travail, nos méthodes de
travail et, par-dessus tout, la formation de leaders, à tous les niveaux.
Je sais que la portée et le champ d'action des questions que j'ai abordées peuvent
sembler immenses. Mais le problème démographique qu'il nous faut affronter offrira de
nombreuses possibilités à la fonction publique et à tous ceux qui en font partie. Nous
avons des choses intéressantes à communiquer aux jeunes sur les défis que doivent
relever le Canada et le monde, sur le rôle que la fonction publique du Canada a joué
dans le passé et qu'elle continuera à jouer à l'avenir.
La semaine prochaine aura lieu la Semaine nationale de la fonction publique. Voilà une
belle occasion de célébrer nos réalisations. Nous fêterons des fonctionnaires qui,
partout au Canada, offrent chaque jour des services aux Canadiens et aux Canadiennes. Dans
une revue appelée Une journée dans la vie de la fonction publique, publiée par
le Réseau du leadership, vous pourrez lire 56 textes sur autant de ces employés de
l'État qui apportent leur contribution. Je vous recommande fortement de lire le numéro
de la semaine prochaine; vous serez fiers et impressionnés.
Mon objectif est simple. J'ai l'intention de dire au premier ministre que la fonction
publique du Canada est prête à relever les défis du XXIe siècle. C'est en
agissant ainsi que nous maintiendrons un Canada fort. Je vous mets au défi de faire tout
ce qui est en votre pouvoir; de créer les conditions dont votre personnel et vous avez
besoin pour croître, pour apprendre et pour être créatifs; de faire preuve de
leadership dans le recrutement et dans l'accueil des nouveaux employés; de déployer tous
les efforts afin que les organismes centraux vous donnent tout l'appui dont vous avez
besoin; de faire de votre unité de travail un lieu de travail de choix.
Mon engagement envers vous est de faire de mon mieux pour vous aider. Je suis disposé
à vous consacrer temps et énergie et à exercer mon influence. Ensemble, nous pouvons
faire de la fonction publique un employeur de choix. Elle peut être un endroit où vos
employés se sentent valorisés, tout comme vous, et où le leadership individuel et
collectif, la créativité, les innovations et l'excellence sont encouragés et
récompensés. Elle peut être l'endroit où vous aimeriez voir un jour vos enfants
travailler, le genre d'endroit que bon nombre d'entre vous, y compris moi-même, avons
trouvé en y venant. Merci à Jocelyne Bourgon et merci à l'APEX de m'avoir permis de
vous adresser la parole. Je souhaite que ce symposium soit une réussite.
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