Introduction
C'est avec plaisir que je soumets ce Douzième rapport annuel au Premier
ministre sur la fonction publique du Canada, qui nous donne cette année encore
la possibilité de passer en revue les principales réalisations, les défis à
relever et les grandes orientations de la fonction publique.
Aussi stimulante qu'elle puisse être, la mission de la fonction publique
devient de plus en plus exigeante. Les défis sont nombreux : nous plier aux
contraintes d'une transparence absolue sans peur du risque; nous montrer en tout
temps à la hauteur des problématiques de l'heure; nous acquitter de nos
responsabilités de façon novatrice et créative; nous ressourcer constamment;
et former une institution à laquelle une nouvelle génération de leaders sera
intéressée à joindre. L'année qui vient de s'écouler nous a rappelé la
complexité de notre mission et elle a justifié notre optimisme.
Une culture de transformation et de réaffectation
La fonction publique se félicite de la façon dont s'est déroulé l'examen
des programmes, qu'il s'agisse des efforts déployés ou des résultats obtenus.
Cependant, nous souhaitons tous que la nécessité d'un exercice aussi difficile
ne se fasse pas sentir de sitôt. En fait, l'examen des programmes et des
dépenses doit dorénavant faire partie intégrante de notre façon de faire.
Au cours de la dernière année, nous avons fait des progrès considérables
vers la réalisation d'une culture d'apprentissage continu et de
perfectionnement. Moteur essentiel de cette transformation, le nouveau Comité
d'examen des dépenses a délibérément visé des changements de portée
générale – du lancement de Service Canada à la réforme du régime
d'approvisionnement. L'examen des dépenses suppose une réévaluation continue
des efforts pour optimaliser les ressources. Il est ainsi possible d'opérer les
virages ou les réaffectations nécessaires pour répondre le plus efficacement
possible aux besoins les plus pressants. Cette nouvelle philosophie doit
orienter en tout temps notre démarche à l'égard de tous ceux et celles que
nous sommes appelés à servir; il faut constamment revoir nos priorités et
améliorer nos méthodes de travail.
L'examen des dépenses nous a déjà permis de réaliser des économies
substantielles, dont presque 90 p.100 proviendront de la mise en application de
méthodes novatrices. C'est d'ailleurs à cet égard que se situe peut-être le
résultat le plus fondamental de cet exercice. La fonction publique est en
pleine métamorphose, dans ses approches auprès des Canadiens aussi bien que
dans la manière dont elle leur rend compte de ses actions.
Cette métamorphose n'est pas dictée par des éléments financiers. Elle a
pour objet d'offrir à un plus grand nombre de Canadiens, et ce, en temps voulu,
les services dont ils ont besoin. Elle doit se traduire par des services
améliorés et plus performants. De création récente, Service Canada a pour
mission de fournir aux citoyens un guichet unique qui leur donnera accès en
personne, par téléphone et par Internet, aux services offerts non seulement
par le gouvernement fédéral, mais aussi, dans la mesure du possible, par les
autres ordres de gouvernement. Les citoyens devraient ainsi pouvoir dès le
premier contact obtenir une réponse à la majorité de leurs questions. La mise
en œuvre de Service Canada ne se fera toutefois pas sans heurt – il faudra gérer
les risques et veiller à établir la collaboration la plus étroite possible
entre la gestion et les agents de négociation, entre les bureaux régionaux et
l'administration centrale. Aucun changement aussi significatif n'a été
apporté à nos modes de prestation des services depuis des décennies, mais les
défis qui l'accompagnent ne nous effraient pas, bien au contraire.
Les effets s'en font déjà sentir : des sites plus conviviaux et des lignes
sans frais permettent d'obtenir plus rapidement les renseignements désirés; un
nombre croissant de services sont disponibles en ligne, qu'il s'agisse de
déclarations de revenus ou de demandes de prestations d'assurance-emploi; le
traitement des demandes se fait plus vite et plus efficacement. Ce ne sont
d'ailleurs là que quelques-unes des raisons pour lesquelles le Canada, depuis
quatre ans maintenant, se classe au premier rang dans le sondage Accenture sur
les services gouvernementaux en ligne à l'échelle internationale. Les
fonctionnaires fédéraux ont tout lieu d'être fiers de cette reconnaissance,
car elle reflète la profondeur de l'engagement qu'ils ont pris à l'égard des
Canadiens. Si nous portons plus loin encore notre regard, la Voie de
communication protégée, mise en place de concert avec le secteur privé, nous
aidera à conserver notre statut de chef de file dans le domaine des services en
ligne sécurisés.
Des démarches similaires devraient s'appliquer à nos services internes.
C'est ainsi que seront instaurés des services partagés en ce qui a trait aux
technologies de l'information, à la gestion des ressources humaines et à la
gestion financière; cela nous permettra d'offrir à moindres coûts des
services mieux adaptés et de meilleure qualité.
D'autres mesures novatrices n'auront pas la même visibilité que Service
Canada, mais elles ne seront pas moins importantes. Par exemple, la réforme de
l'approvisionnement et de la gestion des biens immobiliers a été annoncée
officiellement dans le budget. Naturellement, des mesures de ce genre échappent
à l'œil de la plupart des Canadiens, mais il est essentiel qu'elles soient
mises en œuvre avec un souci d'intégrité et d'optimalisation des ressources.
Il nous faudra pour cela promouvoir une utilisation plus efficace de la
technologie et, de concert avec tous nos fournisseurs, peu importe la taille de
leur entreprise, regrouper nos achats de manière à profiter au mieux de notre
pouvoir d'achat et à obtenir les meilleurs prix possibles. Il nous faudra mieux
gérer nos biens immobiliers en appliquant des normes pour nos locaux et en
procédant à une gestion plus serrée de l'inventaire. Il nous faudra
surveiller de plus près nos immobilisations et travailler à réaliser des
économies grâce à une planification soignée et à un entretien adéquat. Il
nous faudra prendre un engagement plus ferme à l'égard de la gérance de
l'environnement et du développement durable. Par-dessus tout, il nous faudra
établir avec le secteur privé un nouveau partenariat fondé sur un souci
commun d'intégrité, de maintien de la confiance de la population et de recours
aux pratiques exemplaires.
Une gestion fondée sur les résultats
Dans le rapport de l'an passé, j'ai évoqué l'écart qui existait entre nos
aspirations et nos réalisations. Cet écart ne disparaît jamais complètement.
En effet, une organisation performante ne perd jamais confiance en sa mission,
mais elle n'est jamais non plus satisfaite de ce qu'elle a réussi à faire.
La transformation des services et la réaffectation des ressources
s'inscrivent dans un plan général de gestion de la fonction publique qui nous
maintient sur la voie d'une gouvernance plus solide et d'une responsabilisation
accrue. Le nouveau Cadre de responsabilisation de gestion nous offre une base
commune pour la présentation des résultats sur le rendement et propose un
régime de responsabilisation rigoureux. Le Canada est l'un des rares pays à
rendre compte chaque année des indicateurs sociaux grâce auxquels les
parlementaires peuvent mieux juger des progrès que les grandes politiques
gouvernementales ont permis de réaliser. Nos méthodes de transmission de
l'information au Parlement se sont améliorées, mais il reste encore beaucoup
à faire à cet égard. Il nous faudra donc consulter les députés et les
sénateurs sur le type de renseignements dont ils ont besoin et sur le format
qui répond le mieux à leurs attentes.
Depuis sa remise en fonction, le Bureau du contrôleur général a pris la
direction des initiatives destinées à améliorer la gestion des finances. Au cœur
même de notre culture de réaffectation se trouve la capacité de répartir les
ressources en fonction des priorités du gouvernement et de comptabiliser les
dépenses. Nous travaillons à l'heure actuelle à perfectionner nos systèmes
de collecte et d'analyse des données sur les dépenses et le rendement à tous
les niveaux de l'appareil gouvernemental. Nous percevons d'ailleurs avec plus
d'acuité les risques qui nous guettent, et nous concentrons nos efforts sur les
secteurs où ces risques sont les plus élevés.
Servir les Canadiennes et les Canadiens : une vocation
La fonction publique du Canada est un lieu de travail sans pareil qui offre
de réelles perspectives d'apprentissage, de diversification de l'expérience
– gage de croissance professionnelle et personnelle – et, plus important
encore, d'intervention directe dans la vie des Canadiens et de contribution à
un avenir meilleur pour notre pays.
Pour alimenter notre vision, nous devrons attirer dans nos rangs des femmes
et des hommes de grand talent, une nouvelle génération de fonctionnaires qui
illustreront éloquemment la diversité qui caractérise notre nation, qui
apporteront avec eux une somme sans précédent de nouvelles idées et
d'expériences et qui remettront en question des idées bien ancrées.
La Loi sur la modernisation de la fonction publique a pour objet de rendre
notre institution plus compétitive dans la recherche des candidats possédant
les qualités qui nous manquent, et de nous aider à tirer parti des
compétences déjà à notre disposition et à les développer. Elle vise à
établir un rapport nouveau entre le patronat et les syndicats ainsi qu'à
rationaliser les différents paliers de règles et de procédures auxquelles
nous avons recours, afin de donner à la fonction publique une ouverture et une
souplesse accrues.
La nouvelle École de la fonction publique du Canada est une institution
appelée à grandement influencer notre avenir. L'apprentissage continu offert
aux nouveaux employés contribue à faire de la fonction publique fédérale un
milieu de travail intéressant et aide à cultiver le genre de compétences dont
nous avons besoin pour répondre aux attentes des Canadiens. Nous veillerons à
élargir les horizons des gestionnaires en leur offrant un programme de
formation moderne qui mettra l'accent sur le leadership et la responsabilité.
Notre programme d'apprentissage comprendra divers volets : orientation des
nouveaux employés, recyclage professionnel et renforcement des capacités
fondamentales, y compris en matière de gestion financière et de gestion des
ressources humaines. L'École de la fonction publique du Canada deviendra le
lieu où tous les fonctionnaires pourront prendre contact avec les idées-force,
les tendances mondiales, les perspectives nouvelles et les défis cruciaux, et
faire de la fonction publique la source privilégiée d'options en matière
d'orientations stratégiques.
Une façon d'élargir nos horizons et de rompre l'isolement de la fonction
publique est de promouvoir les échanges entre les cadres de la fonction
publique et les cadres des autres secteurs. À partir d'échanges qui nous
relient déjà à nos principaux partenaires du secteur privé et d'autres
organisations, le gouvernement a mis en place le Programme de collaborateurs
émérites du Premier ministre, qui continuera de favoriser la compréhension
entre les principales sphères d'activités de la société canadienne.
En définitive, la réussite des efforts déployés pour moderniser notre
régime de gestion des ressources humaines dépendra de la mesure dans laquelle
ces efforts nous auront aidés à nous ressourcer, à recruter et à
perfectionner les personnes dont nous avons besoin, à créer un climat propice
à la quête d'excellence et d'innovation ainsi qu'à être aussi
représentatifs que la nation que nous travaillons à servir.
Risque et transparence
Notre environnement de travail actuel est très différent de celui qu'ont
connu nos prédécesseurs. Les exigences nouvelles de citoyens avisés ainsi que
les possibilités offertes par les technologies de pointe ont entraîné un
degré de transparence qu'on n'aurait pu imaginer il y a à peine 20 ans.
L'accès à l'information, des vérifications externes plus fréquentes et
l'affichage sur le Web – des résultats des vérifications internes jusqu'aux
offres de marché – ont radicalement transformé le milieu de travail. Il y a
toujours, bien sûr, le risque que la transparence et l'application d'une forme
plus personnelle de responsabilisation génèrent la timidité et la crainte de
l'erreur à un moment où la fonction publique doit se montrer novatrice,
ingénieuse et capable non seulement de s'adapter au changement, mais bien de le
provoquer.
De toute évidence, la fonction publique ne saurait tolérer des infractions
à la loi ou des transgressions à nos valeurs ou à notre code d'éthique. Des
vérifications plus rigoureuses et des systèmes d'information plus performants
nous aideront à déceler les actes fautifs et à intervenir de façon plus
efficace.
Cela dit, nous ne pouvons nous permettre de bâtir des systèmes sur la
méfiance. Il n'est pas question de faire marche arrière, c'est-à-dire de
rétablir les paliers hiérarchiques et de réglementer au cas par cas. Il ne
saurait être question non plus de traiter de la même façon toutes les
erreurs. Certaines erreurs, commises en toute bonne foi, sont inévitables, tout
particulièrement dans une organisation qui valorise l'innovation et la
créativité. La responsabilisation suppose un compte rendu honnête et exact de
toutes les décisions prises, y compris des erreurs commises; nous devons faire
la preuve que nous avons appris de nos erreurs et que nous avons appliqué les
mesures qui s'imposaient. Cependant, la responsabilisation ne peut en aucun cas
se limiter à la désignation d'un coupable.
Bâtir l'avenir
La fonction publique fédérale intervient dans la vie de tous les jours des
Canadiens, et elle influence l'avenir du pays. Il faut continuer d'y entrer par
vocation. La fonction publique fédérale doit rester une institution qui se
préoccupe de l'intérêt public et se soucie de maintenir la confiance de la
population, une institution qui se montre à la hauteur des grands défis qui
guettent le Canada dans un monde en constante évolution. Nous ne devons pas
laisser la peur du risque nous rendre hésitants alors que ce que les
Canadiennes et les Canadiens attendent de nous, c'est le courage de faire ce
qu'il faut pour bâtir notre avenir.
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