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Adresse du Premier ministre Paul Martin en réponse au discours du Trône

[Le texte prononcé fait foi]

Monsieur le président, je voudrais d’abord féliciter le député de Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière et la députée de Kitchener-Centre d’avoir proposé et appuyé l’adresse en réponse au discours du Trône.

Au cours de la dernière année, j’ai passé beaucoup de temps à voyager à travers le Canada afin d’écouter les Canadiens et les Canadiennes parler de leurs espoirs et de leurs préoccupations.

Récemment, on m’a demandé si j’en avais assez des voyages en avion, des dîners, des discours…  La réponse est non.  C’est un privilège incroyable de pouvoir témoigner de la diversité du Canada, de ses régions distinctives et des ambitions qu’ont les Canadiens pour leur pays.

J’ai visité, entre autres, Charlottetown au Labrador.  C’est un petit port de mer avec une population d’environ 350 personnes.  J’ai rencontré un groupe d’enfants là-bas qui m’ont parlé de ce qui les intéressait, de ce qu’ils allaient faire quand ils seraient grands.

À travers leurs yeux, j’ai pu voir que l’avenir était rempli de possibilités. Et que c’était au Canada où ils donneraient corps à leurs ambitions.  Laissez-moi vous le dire : ces jeunes enfants ont de grands projets.

Il y a deux semaines, je me suis rendu à Toronto pour rencontrer une classe de quatrième année à l’école publique Fenside. Deux des élèves sont ici aujourd’hui – Steven Natskoulis, le créateur de « Flat Mark » et Peter Lu – accompagnés de leur enseignant Karlo Cabrera.

Chacun des élèves avait rédigé un texte d’une page ou deux pour me faire part de leurs espoirs et de leurs rêves pour le Canada.

Par exemple, Peter Lu, âgé de 9 ans, a écrit (et je cite) : « Mon vœu est que chacun au Canada soit libre comme les oiseaux qui volent dans le ciel…  Les gens devraient être libres parce tout le monde mérite d’être libre ».

C’est certainement la déclaration de liberté la plus éloquente qu’il m’ait été donné de lire depuis quelque temps.  Les mots du jeune Peter nous invitent à mettre les gens au cœur de chacun de nos efforts.

En effet, c’est ce qu’un bon gouvernement devrait faire. Permettre aux citoyens de prendre leur vie en main; accroître leur liberté en retirant les obstacles auxquels ils se heurtent et en favorisant leurs possibilités de s’épanouir.

Les Canadiens et les Canadiennes veulent être du nombre.  Ils veulent bâtir le Canada.  Ils veulent que leur gouvernement les comprenne et les aide à se réaliser.  Ils veulent que nous « pigions. »

Monsieur le président, ce gouvernement « pige ».  Notre objectif, c’est le succès des Canadiens et des Canadiennes de chacune des régions du pays.

Pour y parvenir, nous devons renforcer nos fondations sociales; nous devons bâtir une économie du XXIe siècle; et nous devons nous assurer que le rôle du Canada dans le monde en soit un d’influence et de fierté.  Notre point de départ est nos valeurs – équité, générosité, respect et bienveillance. 

Donner des chances plus égales à tous – non pas en nivelant au plus bas, mais au contraire en visant toujours plus haut.

Certains prétendront que la voie de la prospérité repose uniquement sur l’intérêt personnel – voilà une vision qui nous diminue tous et qui ne laisse aucune place aux moins bien nantis.

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, rejetons cette vision.  Les Canadiens rejettent cette vision, car la voie que nous privilégions en est une de prospérité partagée, de perspectives d’avenir communes.

À ceux qui disent qu’il faut dépenser, et dépenser encore, nous répondons que plus jamais les Canadiens emprunteront de l’argent à leurs enfants et à leurs petits-enfants.  Plus jamais nous leur demanderons de payer notre passage.

Notre démarche est ambitieuse – mais elle est aussi responsable et équilibrée.  Nous n’allons ni à droite ni à gauche, mais dans la direction qu’ont indiquée les Canadiens et les Canadiennes – droit devant.

Qu’est-ce que nous voulons? Quel genre de pays voulons-nous bâtir?

Nous voulons un Canada où notre système de soins de santé universel constitue un fier exemple de nos valeurs nationales à l’œuvre. Un Canada où les personnes handicapées et leurs familles, où nos aînés et leurs familles disposent du soutien dont ils ont besoin.

Un Canada à la fine pointe de l’économie du XXIe siècle. Un Canada où de bons emplois sont accessibles dans toutes les régions du pays.

Un Canada qui déborde de créativité artistique.  Un Canada où les deux langues officielles sont célébrées dans les collectivités, d’un bout à l’autre de notre territoire.

Nous voulons un Canada où chaque enfant est prêt à apprendre, lorsqu’il prend le chemin de l’école.  Un Canada où chaque personne a la possibilité de poursuivre des études postsecondaires, sans égard à son lieu de résidence ou à ses moyens financiers.  Un Canada où l’alphabétisme universel et l’apprentissage à vie font partie du tissu national.

Que voulons-nous?

Nous voulons un Canada où les quartiers sont sûrs et en santé, où l’air est sain et l’eau pure, et où les espaces verts abondent.  Un Canada où nous avons réduit l’écart relativement aux perspectives d’avenir des peuples autochtones.  Un Canada qui respecte et célèbre la diversité de sa population.

Un Canada à l’avant-garde des technologies dans le monde.  Un Canada où les petites entreprises d’aujourd’hui deviendront les leaders mondiaux de demain.  Un Canada où le plafonnement voilé qui fait obstacle aux femmes entrepreneurs n’existe plus.

Un Canada qui s’exprime sur la scène internationale – et qui se fait entendre par nos voisins les plus proches et nos amis les plus éloignés – avec indépendance et une égale conviction.

Que voulons-nous? 

Un Canada où aucun individu, aucune collectivité ou région se voit refuser la possibilité de participer pleinement à l’édification d’une nation encore plus grande.

Ce programme est ambitieux.  Mais les Canadiens n’attendent rien de moins d’eux-mêmes et ne devraient pas s’attendre à moins de leurs gouvernements.
Monsieur le président, c’est aujourd’hui que nous devons réaliser ce programme.

Le discours du Trône a mis de l’avant les premières étapes importantes que nous devons franchir – des mesures concrètes concernant les choses qui comptent le plus.

Les soins de santé constituent la grande priorité de cette nation.  Des soins de qualité, administrés en temps opportun.  Des soins accessibles à tous, sans égard aux revenus, transférables partout au Canada, et financés par les fonds publics.

Nous avons pris un engagement irrévocable à l’égard des principes qui sous-tendent la Loi canadienne sur la santé.  Ces principes sont inhérents à qui nous sommes; ils sont une prise de position morale sur ce qui est fondamentalement équitable – l’idée que tous les Canadiens sont égaux sous notre régime de soins de santé.

Pour la plupart des gens, le temps d’attente exigé pour établir un diagnostic important ou recevoir un traitement qui s’impose constitue l’épreuve décisive pour notre système.

Et ils considèrent que le temps d’attente, facteur si crucial, doit être réduit.  Nous sommes d’accord.  Nous devons nous assurer que reporter des soins ne veut pas dire, dans les faits, priver de soins.

C’est pourquoi le nouveau Conseil national de la santé est si important.  Pour assurer l’imputabilité, nous devons être bien informés de ce qui se passe réellement dans les cabinets de médecin et dans les hôpitaux. Il faut des critères d’évaluation, tout simplement.

Monsieur le président, cette dernière année, les Canadiens ont vu et ressenti les défis posés par le SRAS et le virus du Nil.

Il est clair que nous devons trouver de nouvelles façons de gérer les risques globaux liés à la santé.  La santé publique est plus qu’une question locale. Aucun ordre de gouvernement ne peut, à lui seul, relever ce défi.  Nous devons adopter une approche fondée sur la collaboration, une approche qui s’étend à l’échelle nationale, en fait, à l’échelle internationale.

À cette fin, nous mettrons en place l’Agence de la santé publique du Canada, qui sera au centre d’un réseau d’excellence et d’expertise dans tout le pays, et qui aura des liens avec le réseau international de centres de même nature.

Avec nos partenaires, nous créerons un réseau de laboratoires et de services qui visera à rassembler l’expertise en santé publique de partout au pays pour aider ceux et celles qui sont aux premières lignes et doivent s’occuper des urgences.

Vendredi dernier, j’ai rencontré les premiers ministres des provinces et des territoires et nous avons convenu de travailler étroitement sur toutes ces questions au cours des prochains mois – de travailler comme nous le devons à une cause commune pour le bien commun.

Monsieur le président, c’est dans nos collectivités que nous faisons l’expérience réelle du Canada.  C’est dans nos quartiers que nous développons nos valeurs personnelles, que nous décidons de nos engagements, et que nous saisissons l’ampleur de nos responsabilités à l’égard de notre pays et du reste du monde.  C’est dans nos quartiers que ceux qui viennent d’arriver au pays apprennent à connaître  leur nouveau foyer.  Et qu’au quotidien, nous cultivons et exprimons notre citoyenneté.

Les administrations municipales au Canada, petites et grandes, urbaines et rurales, ont la responsabilité de créer les conditions qui permettront aux collectivités de s’épanouir.  Et elles sont à court d’argent.

Les municipalités fonctionnent avec des structures financières désuètes – elles ont besoin d’un financement stable, fiable et prévisible.  Il manque à un bon nombre d’entre elles les ressources nécessaires pour fournir des logements abordables, un réseau de transport en commun moderne, des espaces verts, de l’air sain et de l’eau propre – les conditions préalables à la santé et à la sécurité des collectivités. 

Les municipalités portent en bonne partie, et souvent sans les ressources adéquates, le poids de la responsabilité d’intégrer les nouveaux immigrants et d’accueillir un nombre croissant d’Autochtones vivant en milieu urbain.

En tant que pays, nous ne pouvons permettre que cela continue.  Nous voulons tous que nos municipalités soient des endroits où il fait bon vivre; qu’elles puissent faire concurrence pour attirer talents et investissements, et contribuer au renforcement de nos économies régionales. 

Nous voulons que nos petites villes puissent recueillir les fruits de notre prospérité.  Nous voulons que nos grandes villes soient de calibre international, compétitives partout dans le monde; qu’elles soient des centres culturels et commerciaux. Et nous voulons qu’elles soient toutes en mesure d’offrir des maisons solides et sécuritaires à nos familles.

C’est pourquoi nous avons fait d’un nouveau pacte pour les municipalités l’une de nos plus grandes priorités.  C’est pourquoi nous avons créé un nouveau secrétariat. Nous voulons que la voix de nos municipalités se fasse entendre à l’échelle nationale.  C’est pourquoi nous avons demandé à l’ancien premier ministre Mike Harcourt de présider un comité consultatif qui nous aidera à orienter notre politique, tout en respectant les champs de compétence des provinces.

Récemment, certains ont remis en question la profondeur de notre engagement – ils se demandaient si nous allions effectivement passer des beaux discours aux résultats.

Je crois que nous venons de répondre à leurs questions.  Le Nouveau pacte est un véritable pacte. 

Nous sommes prêts à remettre aux municipalités une partie de la taxe sur l’essence, si cela s’avère être la meilleure solution.

Hier, le discours du Trône a fait état d’un acompte substantiel.  Le remboursement intégral de la TPS pour les municipalités.  Celles-ci recevront désormais chaque sou de taxe qu’elles déboursent pour les services municipaux et les infrastructures communautaires.

De plus, nous passons à l’acte dès maintenant – pas dans un an ni même dans un mois.  Je suis heureux d’annoncer que les remboursements pour toutes les municipalités s’accumulent déjà depuis deux jours, depuis le 1er février.  Cela représente 7 milliards $ sur dix ans pour le logement, le transport, l’assainissement de l’air et de l’eau, les routes – dans les collectivités à travers le Canada.

Mais ce Nouveau pacte n’est pas qu’une affaire d’argent.  Il s’agit de traiter les municipalités comme de véritables partenaires.  Cela veut dire aussi se mobiliser autour d’initiatives locales et les mettre à profit.

La qualité de vie dans nos villes, c’est le désir de s’entraider.  C’est la volonté de s’unir pour travailler ensemble à bâtir une collectivité où il fait bon vivre.

Aujourd’hui, cette volonté se manifeste à travers tout le Canada.  Nous la voyons dans les efforts de plus d’un million de Canadiens qui œuvrent dans le secteur bénévole et nous les appuyons.

Nous la voyons dans les efforts de ceux et celles qui déploient un esprit entrepreneurial, non pas dans le but de faire des profits, mais plutôt de promouvoir des objectifs sociaux et environnementaux.  C’est ce qu’on appelle l’économie sociale — une partie de l’économie peut-être peu connue, mais dont il ne faut pas sous-estimer l’importance.

Son apport au tissu social et à la vitalité économique de nos municipalités, urbaines et rurales, est réel et grandissant.  Quelques exemples. 

L’économie sociale, c’est le groupe communautaire RESO dans le sud-ouest de Montréal, avec lequel j’ai œuvré dès mes débuts en politique.  C’est une grande coalition de syndicats, d’entreprises, de groupes communautaires et de citoyens engagés, tous attachés à l’avenir de leur collectivité.   Il y a plusieurs années, ils se sont serré les coudes.  Si le sud-ouest de Montréal était un quartier fragile dans les années 80, il est aujourd’hui vibrant et l’action du RESO y a joué, et joue, un rôle clé. 

L’économie sociale est partout. Par exemple, à quelques pas de ce Parlement, se trouve la Roasted Cherry Coffee House.  Cette magnifique entreprise sociale a été créée dans le but d’offrir des emplois et un environnement accueillant aux jeunes et surtout aux jeunes à risque.  Elle a saisi toute l’importance pour un jeune à risque de pouvoir travailler et de partager son expérience de vie avec d’autres jeunes qui poursuivent leurs études.  Au bout du compte, ces jeunes à risque voient que tout est possible pour eux.   Et ce café va plus loin en convertissant une partie de ses profits en bourses afin d’encourager ces jeunes à raccrocher et à finir leurs études secondaires.   

Le Canada fourmille d’entreprises sociales semblables. 

Les personnes qui consacrent leur vie à ces efforts comprennent le pouvoir de l’économie sociale.  Elles-mêmes constituent une ressource sociale puissante.  Et il est grand temps que le gouvernement fédéral le reconnaisse aussi.   C’est pour cette raison que nous entendons faire de l’économie sociale une composante clé du coffre à outils de la politique sociale canadienne.

Pour la première fois, ces organismes auront accès à nos programmes pour les petites entreprises.

Au cours de la prochaine année, nous travaillerons avec ces groupes pour développer les outils dont ils ont besoin.  Autant les entrepreneurs sont essentiels à une économie vigoureuse, autant les entrepreneurs sociaux sont essentiels à des collectivités dynamiques, et ils ont besoin de notre soutien. 

Ce gouvernement le leur offrira.

Un endroit où il fait bon vivre commence par un environnement qui offre de l’eau pure, des terres intactes et de l’air que nous pouvons respirer sans crainte.  Nous avons du pain sur la planche; il nous faut rompre avec beaucoup de vieilles habitudes.

Le discours du Trône définit un programme ambitieux en ce qui concerne l’eau, l’air et le changement climatique. Il confirme une fois de plus notre intention de relever le défi de Kyoto, et accorde aux technologies environnementales une place importante dans nos programmes social et économique.  Nous devons faire montre d’ambition si nous voulons laisser aux générations futures une planète en meilleur état.  C’est notre devoir.

Le discours du Trône engage le gouvernement à pousser son offensive dans la décontamination des terrains fédéraux afin de retourner les terrains à leur état naturel.  Cela donnera à nos villes la possibilité de bâtir de nouvelles maisons et de nouveaux parcs.

Cela assurera dans le Nord un environnement aussi propre qu’il puisse l’être aux yeux de nos enfants.  Et cela fera en sorte que les communautés autochtones n’auront pas la pollution pour tout héritage.

Nous consacrerons 3,5 milliards $ étalés sur dix ans à cet objectif.  Y a-t-il meilleur investissement?  C’est un investissement dans nos enfants, dans notre avenir, dans notre santé.

Et nous ne nous arrêterons pas là.  Nous devons faire plus.  Faire plus pour Sydney en Nouvelle-Écosse, par exemple, où les étangs bitumineux sont devenus une véritable honte nationale, les vestiges d’un passé non durable.

Monsieur le président, il existe une facette de la société canadienne, une facette de notre histoire, qui jette une ombre sur tout ce que nous avons réalisé.  L’écart qui persiste entre les conditions de vie des Autochtones et celles des autres Canadiens est intolérable.  C’est une offense à nos valeurs.  Nous ne pouvons plus suivre cette voie.

Pour tourner la page, nous devrons établir un nouveau partenariat.  Il faudra, de part de d’autre, la même détermination à améliorer les pratiques de gouvernance autochtones, qui sont essentielles à l’autonomie gouvernementale et au développement économique.

De concert avec nos partenaires, nous élargirons l’accès aux soins de santé, à l’éducation, au développement des compétences et à l’entrepreneurship, et nous harmoniserons nos programmes de formation avec des possibilités économiques réelles – de Voisey’s Bay aux pipelines du Nord. 

De concert avec nos partenaires, nous nous attaquerons aux problèmes particuliers auxquels font face les Autochtones, qui sont de plus en plus nombreux à vivre en milieu urbain, et les Métis.  Nous ne nous laisserons pas enliser dans d’interminables disputes sur les compétences, où on refile les problèmes aux autres et où on contourne les besoins de ces populations.

Monsieur le président, qui aurait pu imaginer le succès économique remarquable et pleinement mérité que les Canadiens ont atteint au cours des dix dernières années? 

L’encre rouge s’est changée en noir.  La création d’emplois est à la hausse.  Les taux d’intérêt sont à la baisse.  Nous sommes sur la bonne voie.

Toutefois, nous ne pouvons pas nous asseoir sur nos lauriers.  Les indicateurs continuent à bouger devant la concurrence mondiale et l’innovation technologique.

Nous devons accroître notre compétitivité et notre productivité, non comme une fin en soi, mais plutôt parce que le monde d’aujourd’hui l’exige si nous voulons conserver et créer de bons emplois, bien rémunérés, pour les Canadiens.

Que doit faire le gouvernement pour s’assurer que le Canada continue à afficher l’une des meilleures performances économiques au monde?

D’abord, nos fondations doivent être solides.

Certains dans cette Chambre vous diraient qu’on peut toujours acheter son paradis.  Ils ont tort.  Certains l’ont déjà essayé – et ça ne fonctionne pas.

Ni la justice sociale ni la vitalité économique ne peuvent se réaliser sous un gouvernement qui répond en premier à ses créanciers, et en deuxième seulement, à ses citoyens.

Ce gouvernement s’est engagé à faire preuve de prudence financière – et son engagement est irrévocable.

Nous l’avons démontré en maintenant des budgets équilibrés, même quand d’autres pays sombraient dans les déficits.  Nous l’avons démontré en réduisant régulièrement le ratio du service de la dette.

Nous l’avons aussi démontré en réformant le Régime de pensions du Canada pour faire en sorte que tous les Canadiens – les retraités d’aujourd’hui et ceux de demain – aient un régime de pensions public sur lequel ils peuvent compter. 

Les décisions difficiles que nous avons prises en 1995 afin de mettre de l’ordre dans nos finances nous ont permis de réinvestir dans les secteurs prioritaires aux yeux des Canadiens, comme nos programmes sociaux, la science et la technologie, et de retourner aux particuliers une plus grande partie de leur argent durement gagné.

Depuis l’an 2000, les Canadiens à faible et moyen revenu recueillent les bénéfices.  Notre réduction d’impôt la plus récente a pris effet le 1er janvier 2004, et elle leur permet de dépenser davantage et d’investir dans leur avenir.

Ces réductions d’impôt, jointes à de bas taux d’intérêt, ont permis à un nombre inégalé de Canadiens de s’acheter une maison.  De plus, Monsieur le président, nous avons réduit les impôts des petites et moyennes entreprises.  Cela leur permettra d’embaucher plus de personnes, d’investir dans notre économie, et de bâtir un Canada fort.  Nous avons réduit leurs impôts pour  les aider à créer des emplois et une économie dynamique.  Et il n’y a rien de mal à cela.

Monsieur le président, une société prospère repose sur un pilier : l’égalité des chances. Quel parent ne s’est pas demandé, nouveau-né dans les bras, ce que l’avenir apportera à l’enfant, sachant que la réponse dépend de l’accès à la meilleure éducation possible. 

Les capacités d’apprentissage se forment dans les premières années de la vie d’un enfant.  C’est pourquoi le développement de la petite enfance constitue une priorité nationale.  C’est pourquoi nous voulons accélérer la mise en œuvre de l’entente fédérale-provinciale sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants.

C’est pourquoi aussi nous comptons fournir aux collectivités les outils de diagnostique et de soutien dont elles ont besoin pour évaluer et améliorer la capacité d’apprendre de leurs enfants.

L’égalité des chances nous motive aussi à faire davantage pour encourager les familles à épargner en vue de l’éducation de leurs enfants.  Le Régime enregistré d’épargne-études et la subvention qui s’y rattache ont remporté un grand succès.  Mais ce ne sont pas toutes les familles qui ont pu profiter pleinement des avantages de ces instruments.

Un changement s’impose pour faire connaître davantage le Régime d’épargne-études et s’assurer que les familles à faible revenu y ont recours.  À cette fin, le gouvernement créera un nouveau « bon d’apprentissage » pour chaque enfant né dans une famille à faible revenu. 

En s’appuyant sur la Subvention canadienne pour l’épargne-études, nous offrirons une bourse pour commencer, pour inciter les gens à mettre de côté de l’argent pour les études postsecondaires. Au fil du temps, le « bon d’apprentissage » prendra de la valeur, et au fil du temps, la contribution du gouvernement augmentera aussi, selon nos moyens.

L’un des engagements les plus admirables qu’un gouvernement peut prendre est d’asseoir l’éducation future de nos enfants sur des fondements solides.  Nous avons franchi une étape supplémentaire, une étape importante aujourd’hui qui nous permettra de concrétiser cet engagement.

Monsieur le président, il faut remédier sans tarder à la situation à laquelle font face les personnes qui doivent décider de leur avenir postsecondaire, ou qui poursuivent déjà des études à l’université ou au collège.

À cette fin, le discours du Trône a fait connaître les grandes lignes de notre plan de réforme visant le programme de prêts étudiants et de bourses. Nous allons accroître l’accès à l’éducation des familles à faible et moyen revenu, et nous tiendrons compte de la hausse du coûts des études.  Nous donnerons un coup de main à ceux et celles qui travaillent pendant leurs études, et nous gérerons mieux la question de l’endettement des étudiants. Nous offrirons aux étudiants à faible revenu une bourse pour la première année de cours, ce qui leur permettra de mettre un pied dans la porte.

Monsieur le président, dans la nouvelle économie, l’éducation peut prendre bien des formes.  Au cours des dernières années, j’ai visité de nombreux centres de formation mis sur pied par des syndicats.  Ils sont une composante essentielle de notre système d’éducation et devraient pouvoir bénéficier d’une relation plus solide avec le gouvernement. 

J’ai eu l’occasion de travailler avec un bon nombre de chefs syndicaux, dont certains sont ici aujourd’hui, et leur avis pourrait être profitable au gouvernement.  C’est pourquoi nous avons l’intention de travailler avec les syndicats relativement aux centres de formation et avec les entreprises dans le milieu de travail, par l’entremise des conseils sectoriels, pour mettre en œuvre une nouvelle Stratégie de développement des compétences, qui servira à accroître l’alphabétisation des apprentis et d’autres travailleurs et à les aider à développer d’autres compétences essentielles.

Dans la même veine, nous avons tous entendu des histoires au sujet d’immigrants hautement qualifiés qui ne peuvent obtenir un emploi parce que leurs titres de compétences ne sont pas reconnus.  Nous avons entendu parler de Canadiens qui ne peuvent pas faire reconnaître leurs titres de compétences lorsqu’ils déménagent d’une province à l’autre.  Aucune de ces situations n’est acceptable.

J’ai soulevé ces questions auprès des premiers ministres vendredi dernier et nous avons tous convenu qu’il fallait travailler ensemble pour accomplir des progrès concluants le plus rapidement possible à cet égard.

Monsieur le président, un monde devenu plus petit et intégré a changé les règles du jeu international.  Je crois qu’il y a une possibilité inouïe devant le Canada. Celle de montrer le chemin pour développer une nouvelle façon de penser sur la manière dont la communauté internationale se gouverne elle-même.

Nous sommes tous d’accord : pour fonctionner, la mondialisation doit profiter à tous. Il y a peu de pays aussi bien placés que le Canada pour agir comme catalyseur afin d’y arriver.

La liberté et la paix, les droits de la personne et la règle de droit, la diversité, le respect et la démocratie – voilà les valeurs qui constituent la fondation de l’expérience canadienne et de notre succès.  En vérité, elles sont, sans doute, notre bien exportable le plus précieux.

Pour cette raison, nous devons relever le défi de bâtir des sociétés démocratiques – d’aider des pays anéantis par les conflits et leur redonner espoir et vie.

L’une des façons distinctes pour le Canada d’apporter son aide aux pays en voie de développement est de fournir l’expertise et l’expérience des Canadiens – en justice, en fédéralisme et en démocratie pluraliste.

Il y a, là aussi, la possibilité de canaliser plus complètement l’idéalisme des jeunes Canadiens et Canadiennes dans cet effort.  Nous allons donc créer une nouvelle initiative, appelée « Corps Canada » afin d’aider les Canadiens à participer à ce programme d’aide internationale et, plus particulièrement, de canaliser l’énergie des jeunes et leur permettre d’apprendre tout en s’impliquant.

Ce même esprit anime le projet de loi proposé qui vise à procurer à bas prix des médicaments contre le VIH/sida et d’autres maladies aux pays d’Afrique.  Je suis heureux d’informer cette Chambre que nous irons de l’avant avec ce projet de loi.  Et en reconnaissance des efforts de l’ancien Premier ministre, elle sera maintenant appelée la « Loi de l’engagement de Jean Chrétien envers l’Afrique ».

Dans la même veine, le conseiller national en sciences du Canada travaillera avec le milieu de la recherche à cerner les mesures supplémentaires que nous pouvons prendre.  Cela, pour appliquer les bienfaits de la recherche aux défis auxquels font face les pays en développement : des technologies de l’apprentissage aux sciences de la vie et de l’environnement. 

Notre but à long terme, en temps que pays, devrait être de consacrer pas moins de 5 % de nos investissements dans la recherche et le développement à une démarche fondée sur le savoir en vue d’apporter une aide aux pays moins fortunés.

Nous sommes riches en science et en recherche médicale.  Nous avons une obligation morale de partager notre capacité avec ceux et celles qui en ont le plus besoin!

Monsieur le président, notre engagement envers le reste du monde explique l’à-propos de la visite très attendue, le mois prochain, de Kofi Annan, qui prendra la parole devant cette Chambre.  Cela représente bien l’importance pour le Canada du multilatéralisme et de la réforme de son institution la plus fondamentale, les Nations Unies.

Mon premier voyage à l’étranger en tant que Premier ministre a été à Monterrey, où j’ai rencontré les dirigeants des pays faisant partie des Amériques.  Il s’agissait là d’une occasion importante de développer nos relations avec nos voisins de l’hémisphère et, fait notable pour le Canada, d’entreprendre une première étape vers une nouvelle relation avec les États-Unis.

Notre gouvernement veut adopter une approche plus sophistiquée, en vue non seulement de gérer nos objectifs communs, mais aussi de traiter de dossiers difficiles comme ceux de l’ESB et du bois d’œuvre qui ont exigé un lourd tribut d’un bout à l’autre du pays.

Nous voulons étayer notre compréhension mutuelle en favorisant les échanges entre les parlementaires et les membres du Congrès américain; les échanges entre les représentants canadiens et leurs homologues, entre les représentants de nos provinces et de nos territoires et ceux des États américains, et entre les maires. 

Monsieur le président, le dernier examen de notre politique étrangère remonte à dix ans et depuis, la façon dont le monde se perçoit a beaucoup changé – songeons à tous ces facteurs percutants : l’influence extraordinaire des États-Unis dans le monde; l’émergence économique de la Chine, de l’Inde et du Brésil; l’ampleur de la circulation de personnes, de biens et de capitaux à l’échelle mondiale; les nouvelles menaces posées par le terrorisme non étatique; l’essor de nouvelles doctrines comme celle de la « responsabilité de protéger » qui ont évolué dans la foulée des génocides survenus au Rwanda et au Kosovo.

Au cours des dix dernières années, le Canada aussi a changé.  Mais nos politiques internationales n’ont pas suivi.  Elles doivent être mises à jour.

En conséquence, le gouvernement travaille à conceptualiser, dans une optique contemporaine, nos objectifs en matière de politique étrangère, nos besoins aux chapitres du commerce et de l’investissement, nos exigences en matière de défense et nos programmes d’aide au développement.

Cela peut sembler bien loin de nos vies quotidiennes.  Mais en vérité, il y va de notre rôle dans le monde. De nos intérêts et de la façon dont nous pouvons les faire avancer à l’aide du commerce et de la diplomatie.  Et cela consiste à nous assurer, alors que nous investissons dans la défense, que nous le faisons pour être en mesure de relever le prochain défi et non le dernier.  Il y va de nos valeurs, et de la meilleure façon de nous assurer qu’elles sont reflétées dans nos programmes d’aide internationale.

Monsieur le président, les idées que je viens de décrire ici aujourd’hui représentent quelques-uns des grands traits du Canada de demain.  Pour réussir son avenir, le Canada exige la participation et l’engagement de tous les Canadiens et Canadiennes, de même qu’un débat actif.

J’entends par cela un débat démocratique, qui repose sur des discussions ouvertes, où les bonnes idées font leur chemin et s’imposent par la persuasion, et non par la contrainte.

Les Canadiens n’envoient pas leurs députés à Ottawa simplement pour remplir des sièges vides.  Ils les envoient ici pour répondre à leurs attentes.

Je crois que cela commence avec l’adhésion aux règles et aux procédures qui assurent l’intégrité de l’institution et des individus.

C’est pourquoi nous avons un code de conduite plus rigoureux et de nouvelles règles en matière d’éthique.

Nous aurons aussi un commissaire à l’éthique indépendant et un conseiller sénatorial en éthique.  Le nouveau commissaire à l’éthique rendra des comptes à cette Chambre et sera autorisé à examiner les gestes posés par tous les députés, y compris les ministres et le Premier ministre.

Le gouvernement a mis en place un nouveau comité du Cabinet chargé de l’examen des dépenses pour s’assurer qu’elles restent maîtrisées et qu’elles correspondent aux priorités des Canadiens.

Nous allons promouvoir une fonction publique fondée sur l’excellence et la réussite. Nous ne visons rien de moins que d’avoir la meilleure fonction publique au monde.  Et je crois que cet objectif est partagé par chaque fonctionnaire.

Nous ferons tout cela, et nous ferons bien davantage.

Nous rétablirons le lien entre les Canadiens et leur Parlement.

En 1901, après tout juste une année passée à la Chambre des Communes britannique,
Winston Churchill a prononcé un discours où il regrettait que la discipline de parti l’emporte sur la libre pensée et le débat ouvert.

« Rien ne saurait être pire, disait-il, que le fait que des hommes indépendants soient écrasés et qu’il n’y ait que deux opinions en Angleterre – l’opinion du gouvernement et l’opinion de l’opposition… Je crois à la personnalité. » (traduction libre)

Ce gouvernement croit aussi à la personnalité, et à la responsabilité qu’ont les députés de représenter leurs commettants selon leur bon jugement.

Il ne fait aucun doute que certains votes n’iront pas dans le sens que nous aurions voulu.  Mais je suis profondément convaincu que du débat naît la force, et du différend, la clarté. 

Certains dans cette Chambre, et peut-être dans les médias, pourront être tentés de vous dire qu’un vote perdu serait embarrassant pour moi ou pour notre gouvernement.

Ne prêtez pas foi à ce qu’ils disent.  Le véritable embarras serait plutôt de voir des députés jouer le rôle de figurants — d’acteurs muets de l’histoire épique du Canada.

Je suis fier d’annoncer que le gouvernement déposera demain un plan d’action pour le Réforme démocratique.

Notre objectif est clair : nous voulons redonner au Parlement sa vocation première de tribune où tous les citoyens du Canada, de toutes les régions de notre vaste pays, puissent faire connaître leurs points de vue et valoir leurs intérêts. 

Que le Parlement soit un endroit où toutes les voix du Canada, celles de toutes ses régions, sont entendues. Qu’est-ce que cela signifie ?  J’ai déjà dit que l’aliénation de l’Ouest et de la Colombie-Britannique n’était pas un mythe. Elle est bien réelle. Et nous devons nous préoccuper de cette réalité – il faut gagner la confiance des gens. De même, nous devons veiller à ce que le Nord puisse décider davantage de son destin.   Nous devons faire en sorte que la population du Québec se reconnaisse au sein du Canada.   Nous devons faire en sorte que les Ontariens voient leurs ambitions se réaliser, et que les espoirs et les rêves du Canada Atlantique, tels qu’exprimés dans le rapport du caucus intitulé « Montée en puissance », se concrétisent.

Monsieur le président, nous entrons dans l’une des décennies les plus importantes de notre histoire. Une décennie où nous saisirons les chances qui s’offrent à nous.

Avec un nouveau Parlement, sous un nouveau gouvernement, nous ferons honneur aux valeurs sans égales de notre nation.

Une nation fière et confiante dans l’avenir. 

Notre pays.  Notre Canada. 

Et, Monsieur le président, ce n’est que le commencement.


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Mise à jour : 2006-07-28 Haut de la page Avis importants