Discours du Premier ministre en réponse au discours du Trône (DDT)
Le texte prononcé fait foi
Monsieur le Président, d’abord, permettez-moi de féliciter
le député de Davenport et la députée de Gatineau d’avoir proposé et appuyé
l’adresse en réponse au discours du Trône.
J’aimerais commencer, au nom de tous les députés et de
l’ensemble des Canadiens et des Canadiennes, par exprimer toute notre
reconnaissance envers ceux et celles qui ne sont pas de retour dans cette
Chambre. Nous les remercions des services qu’ils ont rendus à leurs
commettants et à leur pays.
Je tiens, en particulier, à souhaiter la bienvenue aux députés
qui ont été élus pour la première fois – leurs nouvelles voix fortes
seront entendues dans ces lieux. La population nous a confié la tâche de la
servir, de la représenter, de débattre et de voter ici, dans ses intérêts.
Je vous encourage à lui faire honneur.
Parmi les nouveaux députés, 34 sont nés à l’extérieur
du Canada, dans 20 pays différents. Ils ont tous choisi de venir s’établir
ici – quel bel hommage à la nature diverse, multiculturelle du Canada. Notre
Parlement ne peut qu’être enrichi par leur présence.
Monsieur le Président, la trente huitième législature a
entamé ses travaux. Les représentants élus de ce grand pays sont rassemblés
à nouveau dans cette Chambre, où Lester Pearson avait jadis annoncé la création
du régime public d’assurance maladie, où John Diefenbaker s’était levé
le jour de la Fête du Dominion pour présenter une déclaration des droits, où
Tommy Douglas nous avait dit qu’il était encore temps de construire un monde
meilleur.
En nous levant ici, aujourd’hui, pour prendre la parole,
en participant à cette cérémonie de renouvellement, nous suivons une
tradition encore plus vieille que notre pays. En ce jour, le Parlement est au cœur
du dialogue national. Qu’il puisse y demeurer.
Les réalisations accomplies dans cette Chambre et dans
notre pays ne seront pas celles d’une seule personne ou d’un seul parti.
Nous agissons ici, et nous prenons la parole, au nom de la population canadienne,
près de trente deux millions de personnes. Nos réalisations, nos réussites,
mais aussi nos échecs, feront partie de l’héritage commun de notre époque.
Que transmettrons nous, en tant que Canadiens, à ceux et
celles qui, un jour, travailleront à notre place et vivront là où nous vivons?
De quelle sorte de Canada s’agira t il? Rendrons nous hommage aux sacrifices
consentis dans le passé en léguant un pays encore meilleur aux générations
à venir?
Pour que notre réponse soit oui, et il faut qu’elle
soit oui, nous avons, nous les membres de ce Parlement minoritaire, un rôle
crucial à jouer afin de bâtir une économie du XXIe siècle, de protéger et
de renforcer nos fondations sociales, et d’assurer au Canada un rôle influent
dans le monde qui suscite notre fierté.
Je sais que bon nombre de personnes, dans cette Chambre et
partout au pays, se demande si nous pouvons faire fonctionner ce Parlement dans
l’intérêt des Canadiens. Si, pour ne pas en rester à de belles paroles,
nous pouvons faire de la coopération une réalité.
Ici dans cette Chambre, chacun ressent vivement ses
convictions et les exprime avec vigueur. C’est un lieu où priment la passion
et l’esprit partisan. Cela ne changera pas, et il ne faudrait pas que cela
change non plus.
Cela dit, dans un Parlement minoritaire, nous avons tous
la responsabilité de veiller à ce que le Parlement fonctionne pour le compte
de la population. Et nous nous acquitterons de cette responsabilité – si nous
adoptons et mettons à profit les réformes démocratiques qui ont été lancées
pendant la dernière session, si nous sommes prêts à favoriser le progrès
plutôt que l’esprit partisan.
Monsieur le Président, la gouverneure générale a parlé
hier des valeurs que nous partageons dans ce pays. Elle a mentionné aussi la détermination
du présent gouvernement à rassembler les Canadiens et les Canadiennes dans un
but commun et à bâtir un meilleur avenir pour tous.
Dans la poursuite de ces objectifs, entendons nous pour
dire que tout ce que nous voulons faire au Canada, toute l’aide que nous
voulons apporter ailleurs dans le monde, ne seront réalisables si nous nous
laissons enfermer, une fois de plus, dans le cercle vicieux de
l’irresponsabilité financière.
Le maintien d’un budget équilibré assure le
foisonnement des possibilités pour les Canadiens. Il traduit la volonté du
gouvernement de tout mettre en œuvre pour créer les conditions dans lesquelles
les Canadiens pourront prospérer.
Je suis membre d’une génération qui, pendant des décennies,
a emprunté sur le lendemain afin de supporter le coût des besoins et des désirs
de son époque. Pendant vingt sept années consécutives,
notre gouvernement national n’a pas voulu, ou n’a pas pu, joindre les deux
bouts. Le résultat : une dette nationale constamment à la hausse et une économie
sous performante. Les Canadiens, quant à eux, éprouvaient de plus en plus de
difficultés à se trouver un emploi et à le garder, à se payer une maison, à
régler leurs factures.
Nous étions pris dans un piège fabriqué par nous mêmes
– un cercle vicieux dans lequel notre déficit chronique contribuait à la léthargie
de l’économie, ce qui augmentait encore davantage les déficits, et créait
ensuite un plus grand malaise.
Nous ne pouvions pas laisser les choses telles quelles.
Nous ne les avons pas laissées telles quelles.
Il y a dix ans, nous apposions une date d’expiration sur
le déficit fédéral. Nous avons alors déclaré notre intention d’éliminer
le déficit, et c’est ce que nous avons fait. Et à mesure que le budget
s’assainissait, à mesure que les Canadiens se sentaient davantage sécurisés
par les finances de leur pays, l’économie reprenait vigueur. Aujourd’hui,
les taux d’intérêt sont bas. L’inflation est faible. Le taux de chômage
est près de 40 pour cent de moins qu’il y a dix ans.
Hausse de notre niveau de vie : nous sommes au premier
rang des pays du G-7.
Création d’emplois : la plus rapide parmi les
pays du G-7.
Surplus budgétaire : nous sommes le seul pays du
G-7 à en avoir un.
Aujourd’hui, une nouvelle confiance anime les Canadiens.
Nous mettons l’accent sur les possibilités. Nous sommes prêts à affronter
la concurrence, à nous dépasser, à montrer ce nous avons à offrir.
Le cercle vicieux a été brisé. Maintenant, les
Canadiens profitent des avantages d’un cercle vertueux. Notre budget équilibré
contribue à l’essor d’une économie dynamique. Une économie qui accroît
la confiance du milieu des affaires et des consommateurs, ce qui, en retour,
renforce encore davantage notre réussite économique.
Ce cercle vertueux nous a permis de baisser les impôts de
façon équitable et d’investir dans les programmes sociaux de base. Nous
allons continuer dans cette veine. Cela dit, le cercle vertueux n’est pas un
droit sacré. Afin de protéger l’avenir collectif des Canadiens, nous
continuerons de prévoir une réserve pour les éventualités – une pratique
qui nous a permis d’éviter les déficits tandis que d’autres pays y sont
retournés. Nous allons suivre un mode de gestion transparent et responsable, et
traiter l’argent des contribuables avec respect. Nous continuerons, en outre,
de rembourser la dette nationale – et nous allons la réduire à 25 % du
produit intérieur brut au cours de la prochaine décennie.
Nous n’agirons pas de la sorte pour épater les économistes
du monde, mais bien pour nous assurer que les générations futures de Canadiens
sont davantage libres de prendre leurs propres décisions.
À cette même fin, en notre capacité de gouvernement,
nous veillerons à ce que le Canada et les Canadiens demeurent concurrentiels
dans l’économie mondiale. Nous aiderons les travailleurs à se perfectionner
et mettrons du capital de risque à la disposition des petites entreprises. Nous
faciliterons l’intégration rapide des nouveaux immigrants au marché du
travail. Nous irons de l’avant avec le Bon d’études du Canada, afin
d’aider les familles à faible revenu à économiser en vue des études
postsecondaires de leurs enfants. Et nous poursuivrons les efforts fructueux de
notre gouvernement dans le financement de l’innovation et de la recherche et développement,
afin que le Canada demeure à la fine pointe des nouvelles technologies.
C’est pourquoi, Monsieur le Président, j’annonce
aujourd’hui que le gouvernement du Canada confiera un mandat aux académies
canadiennes des sciences. Notre but est de former une alliance nationale
regroupant les sociétés de premier plan dans les domaines des sciences et de
l’ingénierie. Cette alliance autonome recevra des fonds de soutien de 35
millions de dollars sur les dix prochaines années pour ses activités.
Les nouvelles académies des sciences fourniront des
conseils spécialisés sur le volet scientifique d’importants dossiers
nationaux et internationaux, et elles donneront une voix prestigieuse au Canada
au sein du chœur des groupes scientifiques internationaux.
Monsieur le Président, le Canada a entendu cette année
deux discours du Trône. Il y a eu une élection générale. Les Canadiens et
les Canadiennes connaissent les positions de ce gouvernement ainsi que les
engagements nous avons pris auprès d’eux, aux chapitres des soins de santé,
des questions autochtones, de l’apprentissage et de la garde des jeunes
enfants, des villes et des collectivités, de l’environnement et de la scène
internationale. Désormais, notre attention portera exclusivement sur le travail
qui nous attend.
Dès cet été, nous avons répondu à la préoccupation
principale des Canadiens et des Canadiennes : nous avons travaillé avec les
provinces et les territoires afin de conclure un accord de dix ans sur l’amélioration
des soins de santé.
Cet accord sera l’élément central de la réduction des
temps d’attente pour des procédures médicales cruciales comme les soins
cardiaques et oncologiques, les remplacements d’articulations, la restauration
de la vue et l’imagerie diagnostique. Il établit des exigences rigoureuses en
matière de rapport de rendement – des exigences qui comprennent, par exemple,
des points de repère fondés sur des preuves et des cibles qui devront être
rendues publiques. Ces mesures donneront l’impulsion au changement,
augmenteront la responsabilité à l’égard des Canadiens et mettront
l’accent sur les besoins du patient. L’accord permettra aussi d’améliorer
l’accès aux professionnels de la santé et de procéder à l’expansion des
soins à domicile et du programme d’assurance médicaments. Il répondra, de
plus, aux besoins de santé particuliers des Autochtones et des résidents du
Grand Nord.
L’accord sur la santé prend source dans des objectifs
communs tout en reconnaissant les différents besoins et circonstances propres
à chaque province et territoire. En reconnaissant ces particularités,
l’approche asymétrique mise sur la force de notre diversité.
Cet accord de dix ans apportera un changement tangible. Il
a été signé par tous les premiers ministres, et il bénéficie du soutien des
intervenants dans le secteur de la santé, partout au pays.
Au cours des dix prochaines années, la contribution fédérale
aux soins de santé augmentera de 41 milliards de dollars. C’est une forte
somme, mais nous sommes d’avis, en tant que gouvernement, que notre
investissement doit suffire à renforcer le système public et à effectuer une
véritable réforme. Il s’agit de la priorité numéro un de ceux et celles
qui nous ont élu.
En outre, j’ai mis de l’avant, pendant la réunion des
premiers ministres, une proposition visant à répondre aux préoccupations de
mes homologues concernant le financement et la prévisibilité de la péréquation
et de la formule de financement des territoires – des programmes dont
l’inconstance cause des difficultés aux provinces et aux territoires qui ont
à assurer la planification et la préparation des budgets dans les domaines de
la santé, de l’éducation et d’autres priorités publiques.
Le 26 octobre, je rencontrerai les premiers ministres dans
le but d’entreprendre une réforme de la péréquation qui sera la plus
approfondie que nous ayons connue depuis sa création il y a près de cinquante
ans. Cette réforme améliorera les services offerts à la population canadienne.
Essentiellement, le gouvernement fédéral tirera
pleinement parti de ses pratiques prudentes de gestion et de l’assainissement
de ses finances, et il assumera la lourde tâche de prendre une part plus large
du risque qui accompagne la gestion des aléas économiques de ce pays.
Monsieur le Président, avant notre réunion sur la santé,
les premiers ministres et moi même avons rencontré les dirigeants autochtones
et avons convenu de mettre au point un plan visant à améliorer la santé des
Autochtones. Le gouvernement du Canada a alors annoncé un nouvel investissement
de l’ordre de 700 millions de dollars – montant qui servira à promouvoir la
santé, à prévenir les maladies et à donner de meilleurs résultats en matière
de santé chez les Autochtones.
Mais une bonne santé n’est qu’un des éléments
requis pour assurer que, dans l’avenir, les Autochtones évoluent
sous le signe de la prospérité plutôt que dans la pauvreté. Notre
gouvernement continuera de cibler les éléments qui sont les plus susceptibles
d’améliorer leurs conditions de vie : l’apprentissage toute une vie durant,
des logements plus salubres et plus abordables, de bons emplois et de l’eau
propre. Nous continuerons aussi de veiller à ce que – petit à petit, de jour
en jour – l’écart entre les perspectives d’avenir des Autochtones et
celles des autres Canadiens diminue. Nous attendons avec intérêt la tenue
d’une deuxième conférence entre les dirigeants autochtones et les premiers
ministres, où nous souhaitons nous entendre sur un plan d’action global pour
le compte de tous les peuples autochtones.
Monsieur le Président, pendant la campagne électorale,
nous avons souvent parlé aux Canadiens du besoin d’un Nouveau Pacte pour
les villes et les collectivités, les endroits où nous vivons, travaillons
et élevons nos familles, où s’épanouissent nos industries culturelles, où
les nouveaux Canadiens enrichissent notre façon de voir les choses, où les
politiques nationales ont des répercussions sur la vie des individus.
C’est une question qui devait être soulevée dans un
contexte national. Les collectivités du Canada, grandes et petites, rurales et
urbaines, se heurtent à des problèmes très variés et les solutions exigées
sont très différentes. Néanmoins, elles jouent toutes un rôle clé dans
l’atteinte de nos objectifs sociaux et dans le maintien de notre compétitivité
économique. Et elles subissent de fortes pressions financières.
Elles ont de la difficulté à trouver les fonds nécessaires
pour construire de bonnes routes, pour entretenir la propreté des parcs, pour
fournir de meilleurs services de transport. Elles sont aux prises avec le besoin
de trouver les moyens de fournir des logements abordables. Notre gouvernement
comprend ce qui se passe. Il est passé de la parole aux actes.
Le Nouveau Pacte pour les villes et les collectivités a
pour but d’améliorer la vie des Canadiens en améliorant les endroits où ils
vivent. Nous l’avons mis en œuvre dans notre premier budget avec le
remboursement de la TPS aux municipalités. Cette mesure représente un
investissement fédéral dans les collectivités de près de 7 milliards de
dollars sur dix ans. Nous continuerons sur cette lancée cet automne.
Nous travaillerons alors avec les provinces, les villes et les
collectivités à mettre au point le mécanisme et les modalités du transfert
d’une part de la taxe fédérale sur l’essence. Lorsque ces mesures seront
en vigueur dans leur intégralité, il s’agira d’un investissement fédéral
supplémentaire de 2 milliards de dollars par année.
Monsieur le Président, avec le remboursement de la TPS et
le transfert d’une partie de la taxe fédérale sur l’essence, les
municipalités pourront compter sur une nouvelle source permanente de revenus.
Notre objectif est de nous assurer que ces fonds sont suffisamment prévisibles
et fiables pour que chaque collectivité, si elle le désire, puisse aller sur
les marchés financiers et utiliser cette contribution fédérale continue, pour
accéder à des fonds de façon plus immédiate. Elles en auront le choix et la
liberté.
Nous allons aussi collaborer avec les autres ordres de
gouvernement en matière d’infrastructure et de développement régional. Nous
restons déterminés à renforcer nos régions ressources, à assurer qu’elles
bénéficient, d’une part, des technologies modernes, et, d’autre part, des
avantages de la valeur ajoutée à nos principales forces, telles que
l’agriculture, les pêches et la panoplie de nos ressources naturelles. Car le
Canada n’est jamais aussi fort que lorsque toutes ses parties sont fortes.
J’aimerais vous parler maintenant d’une région qui présente
des défis particuliers, mais aussi un formidable potentiel : le Grand Nord.
J’ai travaillé, quand j’étais jeune adulte, sur un bateau remorqueur qui
naviguait de la rivière Mackenzie à la mer de Beaufort. Comme tous ceux qui
passent du temps dans le Nord, j’ai été émerveillé par cette terre
majestueuse, par la notion même de son immensité. J’ai renoué avec la mer
de Beaufort cet été pendant un voyage de quelques jours dans les Territoires
du Nord Ouest, au Nunavut et au Yukon. J’ai eu l’occasion de converser avec
des aînés et de me promener dans la toundra. À Whitehorse, un garçon âgé
de huit ans m’a offert une boule de gomme, tout comme son oncle qui, dans sa
propre enfance, en avait donné une à Pierre Trudeau. Je ne savais pas si je
devais la remettre aux Archives nationales ou la manger.
La terre du Nord est d’une splendeur mythique – des
montagnes qui percent les nuages, de profondes vallées creusées par les
glaciers, des icebergs sculptés par le vent et les vagues. Mais elle fait
partie aussi d’un monde qui se trouve sur les premières lignes écologiques,
c’est un endroit fragile où l’on peut constater les effets perturbateurs de
la pollution et du réchauffement de la planète.
Si le Nord moderne a conservé les échos d’un monde
ancien, la région est néanmoins très prometteuse pour l’avenir. En tant que
gouvernement, nous travaillerons avec les territoires et les groupes autochtones
afin de développer davantage l’économie du Nord –et nous le ferons d’une
manière qui est respectueuse de l’environnement et à l’avantage des
habitants.
Le gouvernement du Canada s’est engagé à soutenir la
science et la recherche dans le Nord, que ce soit seul ou en collaboration avec
nos partenaires circompolaires. Et que cela ne fasse l’objet d’aucun doute :
nous comptons bien protéger notre souveraineté dans l’Arctique.
En nous tournant vers l’avenir, Monsieur le Président,
nous sommes conscients du fait que notre succès et notre qualité de vie sont
de plus en plus liés à notre relation avec notre environnement. Les décisions
que nous prenons aujourd’hui ont des répercussions profondes sur l’avenir.
Nous devons aligner nos politiques et nos incitatifs pour positionner le Canada
comme un leader dans les domaines de l’énergie renouvelable, de l’efficacité
énergétique et de la conservation.
La gestion de l’environnement est un élément essentiel
de notre patrimoine. Il s’agit à la fois d’une valeur commune et d’un impératif
fondamental. C’est vital non seulement pour notre santé et notre bien être,
mais aussi pour notre économie et notre compétitivité. C’est vital pour la
capacité de nos villes à attirer des individus talentueux et des
investissements.
Voilà pourquoi l’accord de Kyoto sur le changement
climatique est important pour le Canada, un accord encore plus significatif
suite à la décision de la Russie de le ratifier. Voilà aussi pourquoi nous
comptons consacrer une partie importante du produit de la vente de nos actions
dans la société Pétro-Canada, au moins 1 milliard de dollars, au soutien, au
développement et à la commercialisation des technologies environnementales –
des technologies qui aideront non seulement le Canada, mais aussi d’autres
pays, à assainir l’environnement.
Monsieur le Président, pendant la campagne nous avons
fait part aux Canadiens et aux Canadiennes de notre plan concernant la création
d’un programme national d’apprentissage et de garde de jeunes enfants – un
système de haute qualité, ouvert et accessible à tous, abordable et axé sur
le développement.
C’est un projet de taille. Il faudra y consacrer
beaucoup de temps. Mais cela vaudra la peine et cela vaudra l’investissement,
en raison des avantages que cela rapporterait – au chapitre de l’économie,
bien sûr, mais surtout en ce qui concerne la vie et l’avenir des plus jeunes
Canadiens.
L’une des réalisations du gouvernement libéral dont je
suis le plus fier a trait à la création en 1997 de la Prestation nationale
pour enfants. Il s’agissait, là aussi, d’un programme modeste à
l’origine. Mais voyez comme il a progressé. Voyez aussi comment il a réussi
à changer les choses dans la vie des familles et des enfants. D’ici 2007, la
contribution annuelle du gouvernement, par l’entremise de la prestation, s’élèvera
à plus de 10 milliards de dollars – un montant qui aide directement les
enfants qui en ont le plus besoin.
Notre plan pour l’apprentissage et la garde de jeunes
enfants suivra cet exemple. Il évoluera une fois mis en place, pour ainsi aider
plus de familles et favoriser l’apprentissage d’un plus grand nombre
d’enfants.
Comme le programme sera axé sur le développement et
l’apprentissage pendant la petite enfance, les enfants qui y participeront
seront prêts à apprendre dès qu’ils prendront le chemin de l’école.
Cette mesure leur donnera un bon départ et les mettra sur la voie de la réussite
toute leur vie durant.
Le programme sera accessible à tous, offrant ainsi des
chances égales aux enfants désavantagés de naissance ou par leurs antécédents.
De plus, le programme sera abordable et de haute qualité.
Il permettra aux parents qui le souhaitent de jouer un plus grand rôle dans la
population active rémunérée, rassurés comme ils le seront de savoir que
leurs enfants sont gardés dans un milieu affectueux et stimulant.
Nous comptons travailler en collaboration avec nos
partenaires provinciaux et territoriaux pour faire de ce programme une réalité.
Nous y tenons, car nous croyons qu’un bon programme national d’apprentissage
et de garde pour nos enfants constitue le meilleur investissement qui soit dans
leur avenir et dans le nôtre.
Je suis convaincu que, à l’instar de ceux qui étaient
ici au moment de la création du système public de santé et qui, des dizaines
d’années plus tard, reviennent avec tant de fierté sur ce tournant dans
l’histoire des politiques sociales au Canada, les membres de cette Chambre se
souviendront, eux aussi, de cette réalisation sociale mémorable.
Monsieur le Président, le gouvernement ne peut pas tout
faire, et il ne devrait pas s’y essayer non plus. Entendons-nous pour dire que
lorsque nous affrontons des défis ensemble, en tant que société, nous réussissons
parce que des citoyens, dans toutes les régions du pays, ont pris leurs
responsabilités et sont passés à l’action. Cela se voit dans le secteur bénévole
florissant. Dans l’économie sociale dynamique et en pleine expansion, où des
Canadiens et des Canadiennes, de tous les âges, s’unissent pour former de
nouvelles entreprises publiques afin de lutter contre la pauvreté et de
promouvoir la responsabilité sociale.
C’est dans le même esprit, Monsieur le Président, que
nous allons travailler de concert avec les provinces, les territoires et les
groupes d’intervenants, à accroître le soutien accordé aux aidants naturels
– aux Canadiens et aux Canadiennes qui se dévouent bénévolement, qui
s’occupent d’un parent âgé ou d’un membre adulte de la famille atteint
d’un handicap.
C’est la raison pour laquelle nous allons bonifier le
Supplément de revenu garanti pour les personnes âgées – afin de tenir
compte du fait que le taux de croissance des salaires est plus élevé que celui
de l’inflation. Cela fera en sorte que nos aînés les plus
démunis puissent mieux vivre, en toute dignité.
Monsieur le Président, nous vivons à une époque où les
changements aux chapitres de la politique, de l’économie et de la sécurité
sont de plus en plus bouleversants, où les lignes de faille dans le monde
apparaissent de plus en plus instables et nombreuses. Cela se voit dans nos
manchettes quotidiennes. Nous éprouvons l’anxiété d’un monde nerveux.
En tant que Canadiens, nous devons intervenir au delà de
nos frontières pour protéger nos valeurs et nos intérêts – notre sécurité
face au terrorisme et à la menace grandissante de la prolifération nucléaire,
et nos relations commerciales avec les États Unis, le Mexique et le monde.
Les intérêts du Canada s’imposeront dans tout ce que
nous entreprenons – et il en sera ainsi dans le cas de la défense antimissile
balistique. C’est pourquoi, comme nous l’avons déjà annoncé, cette
question sera débattue à la Chambre avant que le gouvernement ne prenne sa décision.
Mais, il nous faut aussi mettre de l’avant les préoccupations
des peuples en difficulté, ceux qui recherchent la liberté, la stabilité, la
démocratie et, surtout, une meilleure vie.
Le Canada a répondu à l’appel lancé dans le monde
pour combattre le sida, et il montre la voie à suivre dans la lutte contre
cette maladie dans les pays en développement. Le Canada a répondu à l’appel
lancé en Afghanistan. Il a répondu à l’appel lancé en Haïti. De braves
militaires et policiers canadiens aident actuellement à instaurer la paix et à
édifier des institutions essentielles aux États prospères.
Notre gouvernement élargira la capacité du Canada de
jouer des rôles cruciaux de ce genre en augmentant de 8 000 le nombre de
membres des forces régulières et de l’armée de réserve. Nous continuerons
à exhorter le monde à agir dans un effort collectif fondé sur notre humanité
commune.
Nous défendrons, en particulier, la réforme des Nations
Unies. Nous défendrons l’établissement de lignes directrices qui permettront
à la communauté internationale d’intervenir plus rapidement et plus
efficacement dans des États souverains où les dirigeants causent des
souffrances humaines à grande échelle ou ne réussissent pas à y mettre fin,
comme la tragédie qui se déroule au Darfour.
Pendant la fin des années 90, lors de réunions du FMI et
de la Banque mondiale, le Canada a joué un rôle de direction clé dans des démarches
visant à réduire la dette des pays les plus pauvres du monde. Bon nombre
d’entre eux se trouve en Afrique, et nous continuerons de les aider. Au Sommet
du G 8 à Kananaskis, le Premier ministre Chrétien a exhorté les gouvernements
des pays les plus riches à se pencher avec compassion sur les besoins de
l’Afrique et de son peuple. Nous allons poursuivre les efforts en cours.
Nous sommes prêts à aller de l’avant en nous appuyant
à la fois sur notre engagement à l’égard de l’Afrique et sur notre
tradition dans le domaine du maintien de la paix. Je suis fier de pouvoir
annoncer à la Chambre que nous avons offert de former des spécialistes
militaires africains aux meilleures façons de procéder pour gagner la paix et
la maintenir. Ces personnes pourront, en retour, mettre sur pied et former des
forces locales efficaces et adaptées aux réalités culturelles, géographiques
et historiques des conflits sur ce continent.
Il existe tant d’instruments de guerre dans le monde.
Que le Canada puisse continuer d’être un instrument de paix.
Les priorités de notre gouvernement répondent aux
objectifs de notre pays : la prospérité, les possibilités et la sécurité
pour le Canada d’aujourd’hui, pour le Canada de demain. Un système de
soutien à la petite enfance pour que nos enfants aient le meilleur départ
possible dans la vie. Des villes et des collectivités vibrantes où il fait bon
vivre. De meilleurs soins de santé afin que les Canadiens soient assurés que
le système sera en place lorsqu’ils en auront besoin, là où ils en auront
besoin.
Voilà les questions qui figurent aujourd’hui parmi les
grandes priorités des Canadiens. Elles relèvent de secteurs où les provinces
et les territoires exercent des responsabilités de première ligne, de secteurs
où ils sont imputables à l’égard de leur population. En tant que
gouvernement, nous ne souhaitons pas, et nous n’avons pas l’intention,
d’empiéter sur leurs champs de compétence. Mais nous ne croyons pas non plus
que les Canadiens veuillent que le gouvernement fédéral soit absent des
dossiers qui, collectivement, nous tiennent le plus à cœur.
Monsieur le Président, aucune réalisation n’est hors
de notre portée si nous unissons nos efforts dans un même but – si un
gouvernement national fort définit et défend nos intérêts communs, et si
chacun d’entre nous se mobilise autour d’objectifs nationaux.
Lorsque nous, les premiers ministres, nous sommes rencontrés
à Ottawa pour discuter des soins de santé, nous avons trouvé un point commun
dans les besoins et les désirs des Canadiens. Les personnes autour de la table
ont défendu le système public de santé, ont défendu notre pays et ont signé
un accord pour assurer de meilleurs soins de santé aux Canadiens, un accord qui
durera dix ans.
Lorsque le gouvernement du Canada réunit ses treize
partenaires territoriaux et provinciaux, lorsqu’il s’entend avec eux sur un
plan décennal qui permettra de réduire les temps d’attente et d’améliorer
l’accès aux professionnels de la santé – cela témoigne de la force de
notre fédération.
Le Canada est effectivement plus grand que la somme de ses
parties. Exercer un vrai leadership national, c’est reconnaître la diversité
de nos provinces et l’accepter comme atout, comme source de créativité et
d’innovation. Mais en même temps, exercer un vrai leadership national,
c’est proposer une destination, c’est mobiliser la volonté populaire et
obtenir le consensus nécessaire pour y arriver ensemble.
L’importance de la volonté nationale se manifeste dans
l’accord sur la santé. Grâce à cette entente, il faudra rendre plus de
comptes aux Canadiens. Des données sur les temps d’attente seront publiées.
Des points de repères et des objectifs seront établis qui permettront de vérifier
les progrès accomplis et de stimuler l’ingéniosité.
L’importance de la volonté nationale se manifeste aussi
dans la définition de la place qu’occupe le Canada dans le monde. Plus que
jamais, notre prospérité et notre sécurité – la qualité de vie dans nos
collectivités et la vitalité de nos familles – dépendent de notre capacité
d’accéder aux marchés, de faire concurrence avec détermination et débrouillardise,
d’attirer des individus talentueux et des investissements, de concevoir des démarches
multilatérales pour la paix, la sécurité, les droits de la personne et la
gestion de l’environnement.
Enfin, l’importance de la volonté nationale se
manifeste dans la protection des valeurs qui définissent qui nous sommes et
nous inspirent.
Nos libertés fondamentales sont enchâssées dans notre
Charte des droits et libertés – entendons nous pour dire qu’en tant que
nation constituée de minorités, nous ne devons jamais permettre que ces droits
fondamentaux soient compromis si nous voulons conserver notre caractère
national et notre liberté individuelle.
Entendons-nous pour dire que la fierté suscitée par
notre diversité, notre dualité linguistique et la richesse multiculturelle de
notre société, et la satisfaction que nous éprouvons à nous présenter dans
le monde comme un pays inclusif, entendons nous pour dire que ces sentiments
vont, en fin de compte, s’évaporer et disparaître si nous relâchons notre
vigilance, si nous ne luttons pas avec acharnement contre le racisme et
l’exclusion, si nous ne nous tournons pas ensemble vers le visage de la haine
pour déclarer : ce n’est pas le Canada que nous connaissons.
Monsieur le Président, j’aimerais conclure sur le point
suivant : Le 28 juin, chacun d’entre nous s’est vu accordé le privilège de
siéger dans cette Chambre et la possibilité de faire une différence dans la
vie des Canadiens, et dans la vie du Canada. Le message des électeurs est clair
: les Canadiens veulent que leur gouvernement fasse mieux. Nous avons bien
entendu leur message, et nous le garderons à l’esprit. Leurs exigences sont
tout aussi claires : notre gouvernement et tous les partis ici présents devront
assurer le bon fonctionnement de ce Parlement minoritaire dans l’intérêt des
Canadiens et des Canadiennes.
De mon côté, la campagne électorale s’est achevée
dans un sprint de 24 heures d’un bout à l’autre du Canada, dans les deux
sens – une course contre la montre qui a débuté à Halifax et a pris fin à
Montréal, et entre les deux villes, huit arrêts, deux océans, 10 000 kilomètres
et à peu près 30 tasses de café.
Nous nous sommes mis en route tôt le matin. Nous avons
traversé la Nouvelle Écosse en autobus. Ensuite, nous sommes montés à bord
l’avion nolisé pour la campagne et nous sommes arrêtés à Gatineau.
L’avion a atterri aussi à Toronto et à Winnipeg. À la tombée de la nuit,
nous voyagions à destination de Vancouver, où nous avons dîné à minuit.
Pendant le vol qui nous ramenait vers l’Est, le silence
régnait dans l’avion pour la première fois en 36 jours. Oui, Monsieur le Président,
les journalistes eux mêmes avaient finalement succombé à la fatigue. Nous
sommes arrivés à Montréal à l’aube d’une belle journée d’été.
J’ai pu, aux petites heures du matin, réfléchir à tout ce que j’avais vu
et entendu au cours des cinq semaines de la campagne, au cours des sept mois que
je venais de vivre en tant que Premier ministre, au cours des seize années que
j’ai passées comme député.
Et je me souviens d’avoir pensé : Quel pays
extraordinaire. Quel pays vaste, divers et magnifique. Et quel privilège nous
avons tous de vivre ici, de sentir ce vent d’audace qui souffle sur notre
pays, de pouvoir aider notre pays à atteindre l’excellence. Ce sentiment ne
m’a jamais quitté, ni pendant la longue nuit où nous attendions les résultats
électoraux, ni dans les semaines qui ont suivi. Je n’ai jamais perdu ce
sentiment.
Notre objectif pendant cette législature, dans tout ce
que nous entreprendrons, doit être de faire en sorte que les générations
futures aient tout lieu d’éprouver les mêmes sentiments à l’égard de
leur pays. De ressentir ce que nous ressentons. De connaître cet élan de fierté,
cette poussée de confiance, ce sentiment indéfinissable, mais incontestable,
que nous faisons tous partie de quelque chose de spécial.
La construction d’un pays encore meilleur commence dès
aujourd’hui. Mettons nous à l’œuvre.
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