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Festin d'Absalom de Mattia Preti
par John T. Spike
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Festin d'Absalom, réalisé vers
1665 comme nous le verrons, compte chez Preti parmi ses premières oeuvres du baroque tardif. Preti est reconnu comme l'un des premiers à
avoir amorcé cette évolution: de 1658 à 1666, il se
consacre avec ardeur au perfectionnement de ce style auquel il reviendra
quelquefois. Les difficultés rencontrées dans la réalisation
du cycle des dix panneaux pour les plafonds de la nef et du transept de
l'église San Pietro a Maiella de Naples (mai 1657 à février
1659), (3) semblent être à l'origine de cette recherche de nouveaux
moyens d'expression. Il pense trouver progressivement une solution à
ces difficultés en donnant plus de place à l'effet décoratif
de l'ensemble. Il se peut également
que l'approche de l'échéance fixée l'ait poussé
à changer de style. Quoi qu'il en soit, Preti procède alors
par touches rapides, amples et vigoureuses, esquissant sommairement ses
personnages, moins préoccupé de rendre la perspective que
de remplir ses toiles de couleurs. En 1932, Nikolaus Pevsner estime que
la première fresque peinte par Mattia Preti dans le style du baroque
tardif a été réalisée en 1661, au Palazzo Doria
Pamphili à Valmontone près de Rome. (4) Quelques mois plus tard,
il arrive à Malte où il peindra la toile d'Ottawa.
Avant de tenter de déterminer la date du Festin d'Absalom, il serait utile de résumer les influences
auxquelles a été soumis l'artiste avant son séjour
à Malte. Preti vient à Rome, à peu près en
1630, pour y retrouver son frère, Gregorio, artiste sans grand talent,
qui probablement lui enseigne les rudiments du métier. Cette didactique
qui n'adopte aucun style déterminé peut avoir entravé
sa carrière. En effet, Preti hésitera longtemps entre les
différents courants artistiques de l'époque et n'atteindra
sa pleine maturité qu'au bout d'une période relativement
longue pour un artiste appelé à devenir l'un des plus imaginatifs
de son temps. Par contre, c'est justement parce qu'il ne subit pas l'influence
d'un grand maître que Preti peut, en toute liberté, se livrer
à un remarquable effort de synthèse des divers grands courants,
parfois contradictoires, du baroque italien.
Les premières oeuvres de Preti trouvent un
précédent dans l'oeuvre du Caravage (1570 / 71-1610), ainsi
que dans des oeuvres d'autres artistes issus du caravagisme. Au début
du siècle, le Caravage avait découvert un style tout à
fait personnel de luminisme et de naturalisme inspirés des écoles
lombarde et vénitienne, et son innovation consistait à diriger
sur les éléments du tableau un éclairage qui respectait
les règles de l'optique plutôt qu'en se fondant sur les normes
arbitraires de la composition picturale. Cette conception, tout en donnant
au tableau un aspect particulièrement réaliste permettait
également d'obtenir de très beaux effets dramatiques.
Dans ses premières oeuvres nocturnes de concerts
et de parties de chasse, Preti fait appel à des clairs-obscurs violemment
contrastés, comme l'avait fait le Caravage à la fin de
sa carrière, pour faire surgir son sujet des ombres les plus profondes.
Preti réalise alors un compromis entre le caravagisme et l'adoption
d'une palette plus claire et plus brillante qui lui permettra d'assimiler
les divers courants artistiques de son temps.
Les exemples de Titien, Véronèse et
Tintoret, grands maîtres vénitiens du XVIe siècle,
lui enseignent le traitement de la couleur. Soulignons que ce retour
à la Renaissance vénitienne permettra à plusieurs
générations d'artistes de surmonter les diverses crises qu'ils connaîtront au cours du XVIIe siècle, dès les débuts
de la période baroque et tout au long de son évolution. Au
cours des années 1630 apparaît à Rome le style néo-vénitien,
que plusieurs peintres importants, tels Nicolas Poussin, Pierre de Cortone
et Andrea Sacchi, adoptent dès le début de la décennie,
alors qu'ils atteignent la maturité de leur art. Tout comme les
Vénitiens, ces artistes optent pour l'intensité de couleur,
la liberté d'expression
et la lourdeur perceptible de l'atmosphère. L'esquisse du Martyre
de saint Erasme (1628) de Poussin, qui appartient à la Galerie
nationale du Canada, est un excellent exemple de ce style.
Mattia Preti est rapidement attiré par le
néo-vénitianisme, qu'il cultive à partir du style
du Caravage dont il conserve l'éclairage qui fait alterner les
différents plans de lumière et d'ombre, creusant l'espace
sans casser le plan de la composition. Parmi les autres influences qui
marquent le style de Preti, mentionnons les oeuvres baroques du Guerchin
(1591-1666) et de Giovanni Lanfranco (1582-1647), des peintres d'Émilie.
Les lignes amples, énergiques, la vitalité des personnages,
ainsi que, à certains moments de sa carrière, les textures
fluides que ces artistes utilisent inspirent Preti.
Festin d'Absalom témoigne des études
réalisées par Preti, au cours des années 1640, sur
les oeuvres de ses prédécesseurs vénitiens. Le magnifique
apparat du festin, depuis le décor somptueux jusqu'au page, s'inspire
de Véronèse, dont les oeuvres établirent le modèle
de faste historique. Preti n'emprunte non seulement les détails
du décor mais aussi l'harmonie des tons, les clairs-obscurs vénitiens
et les règles de la plastique du XVIe siècle. Vers 1654,
cette progression le conduit à réaliser des oeuvres comme L'Adoration des Mages
(Holkham Hall) qui vont bien au-delà
de ce qu'expriment ses peintures figuratives romaines des années
1650 pourtant marquées par l'influence vénitienne. Si proche
est-il de Véronèse que l'on pourrait y voir un exemple d'un
retour à l'art du XVIIe s.
Quand il peint Festin d'Absalom, Preti a
maîtrisé le vocabulaire véronésien. Il ne vise
aucune renaissance; en vérité, son style est fougueux, vraiment
original. Cette étape avait débuté lors de son arrivée
à Naples, à la fin de 1656.
Preti a été appelé à
Naples pour peindre des fresques votives aux saints patrons de cette ville
implorant la cessation de la peste meurtrière de 1656. Et c'est
là un temps prospère à la réformation de l'art
napolitain. Les deux plus grands maîtres de l'école napolitaine viennent de mourir
- Giuseppe Ribera en 1652 et Massimo Stanzione,
victime de la peste - comme tant d'autres artistes d'envergure. L'arrivée
de Preti à Naples coïncide avec le retour du prodige napolitain
Luca Giordano (1634-1705) qui revient d'un séjour d'études
à Rome et à Venise.
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