I
Un modèle canadien de réforme
du secteur public
Au cours des dernières années, un important chapitre
concernant la redéfinition du rôle du gouvernement fédéral et la réforme des
institutions publiques a été écrit au Canada afin de mieux répondre aux besoins des
Canadiens. Ce chapitre était le fruit de dix années defforts visant à établir un
large consensus sur la nécessité dopérer des changements afin de vivre selon les
moyens collectifs des Canadiens. La réforme du secteur public sest déroulée
dune façon typiquement canadienne avec calme, compétence et sans fanfare.
Il en est résulté une réorientation majeure du rôle du gouvernement du Canada et un
budget équilibré tout en maintenant un rendement économique élevé et en préservant
une qualité de vie sans égale.
L'histoire de la réforme du secteur public du
Canada mérite d'être racontée |
Lhistoire de la réforme du secteur public du Canada mérite
dêtre racontée. Elle parle de démocratie et du rôle de lÉtat dans une société
moderne. Cest lhistoire dun partenariat entre élus et serviteurs de
lÉtat. Cest une histoire sur limportance du secteur public dans une
société moderne et prospère.
Les efforts de réforme de plusieurs pays sont bien connus. Ceux qui
sintéressent à ladministration publique ont étudié le modèle des
réformes du Royaume-Uni, le modèle de la Nouvelle-Zélande ou celui de lAustralie;
à tout le moins, ils en ont entendu parler. Nous connaissons les efforts déployés par
certains pays pour séparer les politiques et la prestation des services, pour établir
des « agences de la prochaine étape », pour emprunter des pratiques
éprouvées dans le secteur privé, pour cibler le client et ses besoins. Tous les
pays industrialisés font face à des défis semblables. Chacun les relève à sa façon,
tout en tirant parti de lexpérience des autres.
Le « modèle canadien » est moins connu. Aucun de ses
éléments nest propre au Canada, mais pris dans leur ensemble, ils constituent une
approche suffisamment différente de toutes les autres pour mériter lattention.
Le modèle canadien se fonde sur la reconnaissance que le
gouvernement et les institutions gouvernementales sont essentiels à la prospérité de la
société. Il rejette la philosophie que « le moins est synonyme du
mieux », tout en reconnaissant limportance dun gouvernement abordable et
à la mesure des moyens collectifs. Il soutient lidée que la démocratie alliée à
une économie de marché est la clé de la prospérité dun pays et du bien-être de
ses citoyens.
Le modèle canadien propose que la réforme du secteur public
débute par un examen du rôle que le gouvernement sera appelé à jouer dans
lavenir. Le modèle canadien reconnaît que la réforme du secteur public
doit reposer sur une bonne compréhension de la contribution stratégique que le
gouvernement est appelé à apporter au Canada et au bien-être de ses citoyens. Il
reconnaît que lÉtat ne peut agir seul. Le gouvernement, selon les circonstances,
doit diriger, agir comme catalyseur, établir des partenariats, créer des alliances
stratégiques et savoir compter sur lengagement de tous ceux qui ont la volonté et
la capacité de contribuer au bien commun.
Le modèle canadien suggère quun secteur public performant
se fonde à la fois sur des compétences solides en matière délaboration des
politiques et une fonction de prestation des services moderne. Au cours des
dernières années, la fonction publique a cherché à renforcer ses compétences en
matière de recherche, danalyse et délaboration des politiques tout en
modernisant son approche de la prestation des services. Cest ainsi quon a
découvert que les deux fonctions connaissaient des problèmes analogues.
Dans le domaine de la prestation des services, le défi est
dintégrer les services entre ministères et entre gouvernements, détablir
des partenariats et des alliances stratégiques et dexploiter le potentiel de la
technologie de linformation pour mieux répondre aux besoins des citoyens. Dans
le domaine des politiques, le défi est de considérer lintérêt public dune
façon plus générale et plus englobante, au-delà de celui des ministères; il
sagit de travailler de concert à lélaboration de politiques intégrées et
finalement de favoriser des processus délaboration de politiques plus ouverts,
participatifs et transparents.
Le modèle canadien rejette le concept quun modèle unique peut
répondre à toutes les circonstances. Il favorise plutôt lexpérimentation et
lémergence dune variété de modèles institutionnels à la disposition des
décideurs. La gestion de portefeuille est une innovation canadienne récente. Elle
reconnaît quun ministre est responsable, devant le Parlement, dune famille
dorganisations, et elle préconise plus de flexibilité au sein de chaque organisme
et une plus grande cohésion entre les organismes dune même famille.
Le modèle canadien refuse dériger en principe dapplication
générale la séparation de la fonction élaboration des politiques de la fonction
prestation des services. Cependant, et de façon pragmatique, il lenvisage si cela
peut entraîner une amélioration sensible de la qualité des services aux citoyens.
Le modèle canadien reconnaît limportance de se doter
dune fonction publique performante, professionnelle et non partisane.
Il reconnaît que les fonctionnaires ont un rôle clé à jouer dans lélaboration
des politiques et dans la prestation des services. Le modèle canadien tient compte
du fait que pour créer une fonction publique professionnelle moderne et dynamique, il
faut consacrer autant de temps et dénergie à la gestion des ressources humaines
quà lélaboration des politiques et à la prestation des services. Ce
modèle reconnaît que pour garder, motiver et attirer un effectif talentueux et dévoué,
il est nécessaire dopérer des changements profonds. La fonction publique devra
aider son personnel à acquérir léventail de connaissances et dexpériences
dont il a besoin pour conseiller et servir dans un environnement moderne et global.
Le modèle canadien sappuie sur le leadership des élus et
des fonctionnaires. Le leadership politique a été indispensable à la
redéfinition du rôle du gouvernement pour assurer léquilibre et léquité
de lensemble des mesures et finalement pour maintenir le cap pendant un certain
nombre dannées. Le leadership de la fonction publique a permis de soumettre aux
ministres des idées audacieuses et créatives, de rallier lappui au changement et
dassurer une mise en uvre sans heurts. Les deux groupes ont bien rempli leur
rôle et ils peuvent être fiers des résultats auxquels ils sont parvenus ensemble.
Un chapitre important sest écrit au Canada au cours des
dernières années, mais rien nest jamais acquis. Les résultats obtenus
correspondent à une période exceptionnelle où les citoyens sentendaient sur la
nécessité de redéfinir le rôle du gouvernement et de réduire les dépenses pour vivre
selon les moyens collectifs de notre société. Lavenir nous dira si les conditions
qui ont rendu possibles ces réalisations dans un délai si court se maintiendront
à lavenir.
Les ministres et leurs fonctionnaires ont
établi les assises qui leur permettront maintenant d'envisager un
programme encore plus ambitieux |
Les ministres et leurs fonctionnaires ont établi les assises qui leur permettront maintenant denvisager un programme encore plus
ambitieux. À laube du nouveau millénaire, le Canada est en bonne position pour
moderniser les rapports entre gouvernement et citoyens, et pour renforcer son système de
démocratie parlementaire et ses institutions publiques.
Depuis une dizaine dannées, on parle beaucoup des répercussions
de la mondialisation dans une économie de marché. Au cours des dix prochaines années,
on entendra parler encore plus de limportance des institutions démocratiques et
publiques dans une société globale performante. La réforme du secteur public au Canada
se fonde sur la conviction que les institutions publiques ont un rôle important à jouer
dans le succès des nations. Le Canada a une contribution à apporter à ce débat, dont
les répercussions pourraient se faire sentir bien au-delà de ses frontières.
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