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L'ancienne
chapelle des Récollets de Trois-Rivières
par John R. Porter et Léopold Désy
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Introduction
Tous s'entendent
pour souligner le caractère hautement historique de l'ancienne
chapelle des Récollets à Trois-Rivières, devenue en
1830 la chapelle anglicane St. James. Toutefois, l'histoire de cette construction
(fig. I), sise au numéro 787 de la rue des Ursulines, demeure passablement
nébuleuse. À quelle époque remonte-t-elle? Que reste-t-il
de l'ancienne chapelle des Récollets? En général,
les réponses à ces questions restent vagues sinon contradictoires.
Les études sommaires qui lui ont été consacrées
jusqu'à maintenant, ont permis d'établir certaines dates.
Cependant, après une recherche approfondie, ces mêmes dates
ne s'avèrent guère concluantes. (1) Comme nous le verrons
plus loin, l'extérieur de la chapelle remonte non pas à l'année 1720, comme on l'affirmait généralement, mais
bien à l'année 1754 pour sa partie basse et à l'année
1823 pour sa partie haute. Quant à l'ancien décor intérieur
que l'on croyait entièrement disparu, nous pouvons désormais
en faire une étude partielle grâce à la découverte
d'un riche maître-autel remontant au premier quart du XVIIIe siècle.
Les premières
constructions
Si l'on en
croit S. Lesage, des Récollets se seraient établis à
Trois-Rivières dès 1615 où le père Le Caron
aurait « improvisé une maison et une chapelle ». (2) On ne
sait rien de plus de ces constructions mais on peut affirmer qu'il s'agissait
vraisemblablement d'abris rudimentaires dénués de quelque
intérêt architectural sérieux.
C'est en 1692, à la suite de donations et d' échanges
avec Pierre Pépin dit Laforce et sa femme Marie-Louise Lemire,
Michel Poulin et sa femme Marie Jutras, que les Récollets obtinrent,
par l'entremise de leur syndic apostolique le marquis Louis de Frontenac, représenté par Claude de Ramesay, le terrain qu'occupent
toujours leurs anciens bâtiments conventuels à Trois-Rivières. (3)
La construction de leur premier couvent commença en mai
1693. (4)
Une lettre de Monseigneur de Saint-Vallier, écrite la même
année au provincial des Récollets, nous renseigne à son sujet:
« Je me suis fait, écrit-il, une satisfaction particulière
de monter à Montréal et aux Trois-Rivières pour voir
les petits établissements que vos Pères y avaient commencés...
« J'ai trouvé celui de Montréal bien plus avancé
que l'autre...
« Le Père Luc qui prend soin de celui des Trois-Rivières
n'a pu en faire autant qu'à Montréal à cause du petit
nombre et du peu de moyens des habitants; on ne laisse pas que d'y avoir
une église et une maison où on peut vivre régulièrement...» (5)
Les bâtiments dont parle Monseigneur de Saint-Vallier étaient
des constructions en bois. Quant à l'église proprement dite,
il s'agissait d'une minuscule chapelle intérieure provisoire. « L'église conventuelle ne fut édifiée qu'au début
du XVIIIe siècle. » (6) En 1699, le frère Didace Pelletier
était occupé à préparer le bois destiné
à sa construction lorsqu'il fut atteint d'une pleurésie qui lui fut fatale.
Le cas du frère Didace mérite qu'on s'y arrête
un instant, car ce personnage a joué un rôle important en
regard de l'architecture religieuse de son époque. Avant de venir
travailler à Trois-Rivières, le frère Didace avait
mis ses talents de menuisier et de charpentier au service de sa communauté
en prenant une part active aux constructions que les Récollets firent
exécuter à Percé et à l'Île de Bonaventure
en Gaspésie (1683-1689), à la Baie de Plaisance, à
Terre-Neuve (1689-1692) et enfin à Montréal (1692-1697). (7)
Les
travaux de construction de la modeste église étaient achevés
en 1703. En effet, le 2 septembre 1704, le notaire Jean-Baptiste Pothier,
écrivant au père Joseph Denys, récollet, pour lui
signaler la guérison de sa femme par l'intercession du frère
Didace, lui confia qu'en novembre 1703 son épouse avait promis,
si le frère Didace la guérissait, « d'aller durant neuf
jours dans votre église où repose son corps ». (8) De plus,
en septembre 1703, une enquête relative à une guérison
attribuée au frère Didace se déroulait dans la sacristie
de cette même église. (9) Ces deux faits attestent, sans l'ombre
d'un doute, l'existence de l'église des Récollets en 1703.
Nous connaissons l'emplacement précis de la chapelle
grâce à deux plans: celui de la ville de Trois-Rivières
en 1704 (10) (fig. 2) et celui des bâtiments conventuels des Récollets,
tracé trois ans plus tard (11) (fig. 3). Les plans montrent que la
chapelle rencontrait à angle droit une aile renfermant un réfectoire,
une cuisine, une « despence » et la sacristie. Les dortoirs
se trouvaient au second étage. Ces constructions, sises du côté
nord-est de la ville et à l' intérieur de ses murailles,
se trouvaient relativement isolées grâce à plusieurs
jardins. En fait, seule la façade de l'église s'ouvrait directement
sur la « grande Rue », c'est-à-dire la rue Notre-Dame,
à l'époque, devenue aujourd'hui celle des Ursulines.
Les simplifications introduites dans le tracé de ces plans
ne nous précisent guère les proportions exactes de la chapelle.
Néanmoins, nous pouvons en déduire qu'elle était constituée
d'un vaisseau sans subdivision se terminant par un choeur à fond
plat dont les murs étaient dans le prolongement de ceux de la nef.
Les documents de l'époque, dans l'état actuel de la recherche, nous fournissent peu de détails sur son apparence extérieure.
Deux vues anciennes, mais contradictoires, nous renseignent a ce sujet.
La première
vue s'inscrit dans un cartouche faisant partie d'une carte de la ville
de Trois-Rivières tracée en 1709 par Jean-Baptiste Decoüage (12)
(fig. 4). Le dessin assez fantaisiste du profil de la ville et de son emplacement
au sommet d'une falaise, nous incite à douter de la fidélité
de cette vue. En effet, on y voit du côté droit une haute
tour cylindrique coiffée d'un clocheton se dresser au-dessus des
bâtiments des Récollets; ce type de traitement n'a aucun
pendant connu dans l'architecture ancienne du Québec.
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deuxième vue date de 1721
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