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OBLATS

50 ans au pays de la neige – Partie II

Bâtir la première mission

Le développement physique de la nouvelle mission n'était pas chose facile. Des bâtiments ont été construits en parallèle avec ses activités de conversion, le fait de pourvoir aux besoins de ses résidants et l'expansion de sa ferme.

Comme c'était le cas de la plupart des missions du nord-ouest, les missionnaires au Lac La Biche se sont empressés de donner l'éducation de base aux enfants des locaux. « Dès le début », selon un historien éminent des missions canadiennes, « l'éducation avait été considérée comme un accessoire indispensable à la mission indienne ». La mission enseignerait non seulement l'évangile et les compétences pratiques, grâce à son exemple, mais fournirait également la formation en civilisation de base pour que les autochtones et les enfants des Métis puissent comprendre plus facilement le monde nouveau.

La première étape a débuté quand Tissot et Maissoneuve ont construit une école résidentielle pour les enfants locaux. Presque rien sur ce service n'est connu et, pour des raisons inconnues, ce dernier a échoué. Peu après, les prêtres avec l'aide efficace de leur charpentier, frère Patrick Bowes, ont commencé à travailler sur la grande maison qui logerait par la suite un groupe des Sœurs de la Charité, ou les Sœurs Grises comme elles sont généralement connues. Ce n'est pas une coïncidence si la construction d'un tel lieu survient peu après une décision des Sœurs Grises de s'associer de manière permanente avec les Oblats afin d'offrir l'enseignement, les services médicaux et charitables dans tous les principaux centres oblats.

Le couvent s'est lentement construit avec les deux prêtres travaillant sous la direction du frère Bowes. Dès l'été 1859, la moitié du travail de maçonnerie sur cette maison en pierre était accompli et 18 mois plus tard, presque toute la finition intérieure avait été faite. Une fois terminée, tôt à l'hiver 1862, la structure était de deux étages et mesurait entre 30 et 50 pieds. Bien qu'il n'y ait pas véritablement de preuves, c'est également pendant ces années que père Tissot, expérimenté dans de tels sujets, a installé le four à chaux à la mission parce qu'il fallait de la chaux pour faire le mortier et le plâtre intérieur du couvent.

En mai 1862, le couvent était occupé par trois Sœurs Grises. Les différences entre le père Tissot et la sœur supérieure n'ont pas permis l'ouverture immédiate de l'école à la mission mais, en 1864, les sœurs ont instrui 53 élèves. Le nombre d'élèves a varié selon les caprices de leurs parents qui n'appréciaient pas l'absence de leurs enfants de la maison et les retiraient souvent de l'école.

Entre 1865 et 1870, par exemple, seulement sept filles et huit garçons résidaient à la mission et tous n'y sont restés que quelques mois. Ceci devait être très décevant pour eux, car comme le frère Bowes l'a noté, l'éducation « est l'un des principaux moyens disponibles à notre religion sainte pour prendre racine dans ce monde non civilisé ». Les sœurs se rendant compte que leur meilleur espoir pour attirer de nouvelles inscriptions résidait avec les orphelins et les enfants malades ont bientôt établi un orphelinat à la mission. Ensuite, le couvent a fonctionné comme l'école résidentielle, l'orphelinat, la chapelle et le réfectoire principal de la mission. Non seulement les sœurs ont-elles même fait toutes ces tâches mais elles ont également accepté la responsabilité de cuisiner, de faire le lavage et de repasser et ont aidé dans l'agriculture, l'ensemencement et la moisson s'il y en avait besoin.

Tandis que le couvent était le plus important bâtiment à être construit pendant ces premières années, ce n'était certainement pas le seul. Ni la maison originale construite par père Remas, ni la maison construite précipitamment par Tissot et Maissoneuve avant l'hiver de 1855-1886 ne convenait au logement à long terme du secrétaire et, en 1858, frère Bowes a construit un presbytère. Un tel bâtiment était fort nécessaire parce qu'en plus des deux prêtres et du frère convers la mission logeait trois ouvriers – probablement les aides permanents – qui étaient décrits simplement comme des « jeunes gens ».

Malheureusement, rien n'est su au sujet de ce presbytère si ce n'est qu'il n'était pas construit de manière solide. Après cinq ans, il était dangereusement penché et devait être attaché et, en 1864, sa cheminée de terre s'est effondrée sous la pluie. Par conséquent, Bowes a remis en état un entrepôt en bardeaux (32'x21') qui a été utilisé comme résidence par les nouveaux prêtres. Même si cela semble improbable, ceci est la structure de toit élégante qui a duré jusqu'aux années 1950 et est maintenant généralement connue sous le nom de vieux presbytère; aucune information sur un tel bâtiment n'a été retrouvée.

Le développement rapide de la ferme avec son nombre croissant de bétail et le fait qu'il faille y entreposer des produits rendait nécessaire la construction d'annexes durant les années 1860. Les abris pour les animaux étaient le souci principal et, en 1861, le frère Bowes a construit une grange de bardeaux de quelques 37 pieds par 25 pieds. Deux ans plus tard il a travaillé sur une nouvelle et beaucoup plus grande écurie (60'x25') et a converti la vieille écurie en maison de porcs. En1864, selon l'inventaire de père Tissot, la mission pouvait également se vanter de posséder un grenier (36'x25').

Avec tellement de construction se produisant, la mission était chanceuse de posséder, presque dès le début, une scierie. De nombreuses références à cette dernière dans la correspondance de la mission ne font aucun doute sur sa présence mais, nul ne connaît rien ni sur son endroit, ni sur sa construction. Selon toute probabilité, elle consistait en une fosse de scoeur et peut-être d'un atelier qui permettait aux hommes de la mission de préparer des bois de construction et de faire de plus petits articles tels que des bardeaux, à la main. Aussi, en avril 1863, le frère Bowes qui faisait alors des bois de construction pour un moulin à blé déplorait le manque d'une scie circulaire à la mission.

Cette scierie primitive était apparemment en fonction pendant un certain temps, quoique Tissot et Maissoneuve aient prévu que le moulin à blé, construit pendant l'été 1863 « sur un petit cours d'eau à environ un mille de leur résidence », doive également faire fonctionner une scie circulaire.

En décembre 1863, quand le moulin à blé a été opérationnel, le frère Bowes a écrit à l'évêque Taché pour lui demander une lame de scie. Il est certain que la nouvelle scierie ait été en fonction en 1872. Le moulin est appelé par son nom régional « le Petit Lac du Moulin » qui fait référence au lit sec du lac du réservoir original du moulin.

« Les missions catholiques mettent des machines à blé dans un nouveau moulin sur leur vieux site de scierie près de la mission. Elles comptent moudre du blé cet automne. P. Pruden a abandonné son projet de moulin » – du bulletin d'Edmonton, 1885.

En 1864, quand l'évêque Taché a visité Notre-Dame des Victoires, il a présenté à Tissot et Maissoneuve des plans pour une église qui deviendrait, après la chapelle du couvent, un endroit de culte public. Mais, comme le frère Bowes l'a indiqué, la mission manquait du bois de construction, de pierres et de main d'œuvre qui étaient nécessaires pour une telle entreprise. En conséquence, cette idée a attendu pendant plus d'une décennie.

En dépit de cette déception, la mission avait fait des progrès énormes depuis l'arrivée du Tissot et de Maissoneuve en 1855. La mission ne se retrouvait plus dans un logement simple et grossièrement construit mais dans un groupe impressionnant de différentes structures, réparties sur une large étendue de champ, et servant divers buts tels que le culte public ou le moulin à blé. Elle s'était aussi embarquée dans un de ses plus durables et ambitieux programmes – l'éducation pour les enfants. Et, plus important, son avenir ne présentait plus de doute parce qu'elle était complètement indépendante dans la sphère de l'agriculture. Tissot et Maissoneuve qui sont partis respectivement en 1863 et 1868 de Notre-Dame des Victoires ont incontestablement légué un bel héritage à leur successeur, le père Vegreville.


La mission comme entrepôt de transport

Si les années de 1855 à 1865 peuvent être considérées comme une période d'établissement et de consolidation au Lac La Biche, les vingt-cinq années suivantes était principalement un moment d'expansion dans son nouveau rôle. Notre-Dame des Victoires est devenue, après avoir été une mission autosuffisante aux Indiens et Métis, un entrepôt renommé de transport que l'évêque Taché avait prévu de nombreuses années auparavant.

Les moulins, les instruments agricoles, les animaux, les vaches et les chevaux en assez grand nombre furent amenés à Saint-Paul au grand déplaisir du cher Père Tissier qui ne nous a jamais pardonné d'avoir pillé, comme il le disait, la mission du Lac La Biche pour enrichir celle de Saint-Paul.

Naturellement la mission avait toujours quelque chose d'un chef dans le développement des systèmes de transport dans le nord-ouest. En fait, dès 1856, les pères Tissot et Maissoneuve avaient entamé la construction d'une route de chariots partant de la mission jusqu'au fort Pitt, qui était sur le chemin des brigades de chariot de l'établissement du fleuve Red. Ce travail a été effectué pour diminuer la dépendance de la mission à l'égard de la Baie d'Hudson.

G. Gullion est arrivé ce vendredi dernier du Lac La Biche où il avait été employé pour construire un bateau pour la mission catholique à York. Le bateau mesurait 32 pieds de long et portait cinq tonnes et demie. Il était utilisé pour naviguer les rivières Athabasca et Mackenzie. Le constructeur a fourni le bois de charpente et a effectué le travail pour 125 $ à 140 $ par bateau. Les matériaux de fer, etc., (...) étant fourni par les groupes qui faisaient construire le bateau – du bulletin d'Edmonton, 1884.

D'autres avancées dans le domaine du transport ont suivi une réorganisation administrative dans l'église catholique. À la mi-1860, les missions avaient été construites au nord-ouest et sur toute la ligne de partage de la rivière Mackenzie du Grand-Nord. Pour les aider dans la gestion, le père Henri-Joseph Faraud avait été élevé, en 1862, à la position d'évêque d'Athabasca-Mackenzie. À l'aise dans cette nouvelle position d'autorité, Faraud s'est montré ambitieux dans la poursuite de circuits d'alimentation plus efficaces pour la mission. Aussi il a eu bientôt un impact important dans l'histoire du Lac La Biche.

Faraud qui connaissait les systèmes efficaces de transport utilisés par la Compagnie de la Baie d'Hudson a adopté ses méthodes. Son moyen de transport de fret préféré était le chaland. Sa conception vaste et profonde convenait admirablement aux eaux peu profondes des petites rivières et des lacs de la région du Lac La Biche. Pendant presque trois décennies, les chalands amenaient des provisions aux missions arctiques éloignées au nord des entrepôts du Lac La Biche. La mission était idéalement située pour jouer un tel rôle; pas uniquement car elle dominait les terres environnantes mais aussi parce qu'elle pouvait être atteinte par les brigades de chariots de la rivière rouge en seulement deux mois; ce qui permettaient aux frets de descendre les rivières d'Athabasca et de Mackenzie pendant l'été court du nord.

En 1867, Faraud a envoyé les premiers chalands en bas du Lac La Biche et dans l'Athabasca, où leur stabilité a été mise à l'essai dans les eaux rugueuses des Grandes Rapides. Sous les conseils d'un Métis de 26 ans du Lac La Biche, appelé Louis Fosseneuve, l'évêque et un groupe de Sœurs Grises destinées au fort providence sont devenus le premier grand groupe à descendre avec succès les rapides. Cette expérience n'en n'était pas une qu'ils souhaiteraient répéter, pourtant la praticabilité d'utiliser la route pour transporter le fret n'était plus en doute.

Faraud a immédiatement amélioré la piste accidentée pour les chariots de la mission jusqu'au fort Pitt et a commencé à transformer le Lac La Biche en un point important de transbordement. En 1868, le père Vegreville, qui était alors responsable de la mission, a utilisé pour la première fois ce système pour embarquer le grain moulu du Lac La Biche aux missions du nord. Ces initiatives ne pouvaient pas arriver à un meilleur moment, parce qu'après que la fin du monopole commercial de la Compagnie de la Baie d'Hudson en 1869, la compagnie a refusé de transporter plus de frets à la mission.

L'importance que Faraud et l'église attachaient à ce travail est devenue évidente en 1870, quand une autre réorganisation administrative a fait de Notre-Dame des Victoires le siège de l'évêque (c'est resté ainsi de 1870 jusqu'en 1889).

À son arrivée à la mission en février 1870, Faraud a demandé à ses subalternes de commencer immédiatement la construction « d'un grand hangar » ou d'un entrepôt pour pouvoir y stocker des marchandises en transit destinées aux missions du nord. L'entrepôt mesurant 70 pieds par 20 pieds et situé sur la rive dominant le bord du lac, était subdivisé en compartiments. À la mission, la construction de bateaux a commencé à peu près en même temps. Pour éviter les rapides dangereuses d'Athabasca, Faraud a donné l'ordre qu'une piste pour chariots soit tracée jusqu'au fort McMurray, à environ 140 milles de distance. Mais celle-ci ne serait jamais faisable. Bientôt, un nouveau rythme saisonnier surprendrait la mission car « les caravanes arrivaient régulièrement et, au printemps, les barges partaient pour leurs longs et pénibles voyages ».

La nouvelle importance du Lac La Biche a contribué à d'autres développements. Ainsi sœur Ursuline Charlebois, assistante générale des Oblats, a constaté en 1871 que les Sœurs Grises avaient donné tellement de temps à répondre aux besoins très pratiques de la mission que leur école en avait pâtie. Elle a immédiatement voulu rétablir l'école et ouvrir l'hospice Saint-Joseph qui offrait des soins médicaux de base aux personnes du coin. C'est aussi possible que le nombre de sœurs ait augmenté à cette époque car, pendant la prochaine année, frère Alexis Reynard a construit un nouveau bâtiment pour pouvoir loger deux ou trois soeurs.

Malheureusement les inscriptions scolaires, qui étaient nombreuses au début, ont rapidement décliné et l'école a du fermer ses portes en 1872. Recherchant une plus grande indépendance de la mission propre, les sœurs ont acheté, en 1877, deux parcelles de terre pour contribuer au rétablissement des finances scolaires et à la reconstruction de l'hospice. Ces deux activités ont été réalisées et nous avons pu remarquer que « l'orphelinat et l'école du Lac La Biche sont (...) en voie de prospérité ». Deux sœurs enseignaient au moins de 15 à 20 classes par semaine, en français et anglais, et les élèves étudiaient aussi le cree, le chipewyan, l'anglais, la théologie, le dessin, la peinture et les mathématiques. Malgré que les registres de présence sont rares, nous savons qu'en 1876, 40 filles et un garçon logeaient dans l'orphelinat alors qu'environ 25 ou 30 enfants allaient régulièrement à l'école; en 1879 environ 25 jeunes filles étaient en résidence.

La décennie des années 1870 s'est avérée celle des changements physiques considérables à la mission. Avec le départ de l'évêque Faraud pour l'Europe en 1872, le travail a commencé par une résidence convenant à quelqu'un de sa stature. Peu de détails sont connus sur la construction de cette structure de deux étages, mesurant 40 pieds par 20 pieds, mais elle était terminée lorsque Faraud est revenu d'outre-mer en 1875. L'année suivante, le frère Patrick Bowes est revenu à la mission avec des instructions pour construire une église. Tandis qu'il espérait la construire en une année, ce n'est qu'en 1879 que la charpente de l'église (70'x26 ') a été complétée.

Au printemps 1878, le travail avait déjà commencé sur une nouvelle résidence pour le père Vegreville. Cette structure de 22 pieds par 19 pieds était placée à côté de la chapelle. Puis, pendant les mois d'été, deux grands bâtiments (un mesurant 72 pieds de long et l'autre 75 pieds) ont été bâtis. L'un devait permettre la construction de chalands et la réparation de chariots et l'autre est devenu un entrepôt général avec un grenier pour le stockage de grains ainsi qu'une glacière pour les biens périssables. Un service séparé pour la blanchisserie a été également ajouté sur le site, bien que nul ne sache quand exactement.

Tandis que ce travail avançait, les frères de la mission ont commencé à tracer une nouvelle route du Lac La Biche jusqu'à Athabasca, mais cette fois-ci via la rivière La Biche. Il n'a pratiquement pas neigé pendant l'hiver 1877-1878 et la navigation sur le Lac La Biche était tout à fait impossible pendant le printemps suivant. Ces travaux routiers ont été terminés de manière satisfaisante en 1879. Par la suite, les brigades de chariots ont amené les marchandises en direction du nord, de la mission jusqu'aux chalands, attendant sur les bords d'Athabasca.


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© 2003 Société culturelle Mamowapik et Société d'Histoire de Mission Lac La Biche (Tous droits réservés)

 

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