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- Introduction
- Dans ma décision du 19 juillet 2004, je recommandais l'octroi de fonds publics au Parti conservateur du Canada et au Bloc Québécois qui ont le statut d'intervenants devant la Commission. Comme je l'indiquais alors, ils ont droit au paiement des honoraires de leurs avocats limités à trois heures par jour pour un avocat assistant et d'une heure par jour pour un avocat principal, avec des montants additionnels pour la préparation préalable aux audiences, les représentations durant les audiences et les représentations finales. J'avais ajouté que je serais prêt à revoir éventuellement ces recommandations, sur demande, si les circonstances le justifiaient.
- Le Parti conservateur et le Bloc Québécois demandent maintenant tous deux une recommandation d'accroissement de l'aide financière qui leur est consentie. En même temps, le Parti libéral du Canada, qui a obtenu le statut d'intervenant le 13 septembre 2004, demande pour la première fois l'octroi d'une aide financière. Les trois demandes ont été présentées le 20 octobre 2004 et je les ai prises en délibéré. La décision d'aujourd'hui porte sur les trois demandes.
- Analyse
- La demande du Parti libéral du Canada indique que celui-ci tient pour acquis qu'il a droit au minimum à la même recommandation de financement que les deux autres partis politiques. À première vue, cela semble raisonnable, sauf que Parti libéral du Canada est entré en scène tardivement, alors que l'audition des témoins avait déjà commencé, ce qui réduit son besoin d'une aide équivalente pour sa préparation préalable aux audiences. De plus, je n'ai pas l'intention de recommander l'octroi d'une aide financière rétroactive, ce qui signifie que le Parti libéral aura droit à une aide financière pour les services de ses avocats à compter de la date de sa demande seulement; s'il a dû assumer des frais juridiques quelconques avant cette date, il devra les financer lui-même.
- Les trois requérants soutiennent que les sommes que je leur ai accordées dans ma première décision sont insuffisantes pour leur permettre de participer à l'Enquête aussi pleinement qu'ils le souhaitent et pour s'acquitter de leurs responsabilités, telles qu'ils les conçoivent. Ils évoquent la documentation volumineuse qui leur a été communiquée et qui continue de l'être à mesure que les audiences avancent, documentation dont l'analyse attentive prend beaucoup de temps. Ils invoquent par ailleurs la difficulté qu'ils rencontrent à lire et à analyser la transcription quotidienne des audiences lorsque les témoins font référence à des documents qu'ils n'ont pas nécessairement sous la main, et le fait qu'il leur est impossible de suggérer des questions de manière opportune aux procureurs de la Commission afin qu'ils les posent aux témoins.
- À ce sujet, il y a manifestement un malentendu quant au rôle de ces intervenants. Bien que l'article 8 des Règles de procédure et de pratique mentionne " la possibilité de proposer aux avocats de la Commission d'interroger un témoin sur certains points précis ou, à défaut, celle de demander l'autorisation d'interroger le témoin sur ces points ", cette possibilité relève du pouvoir discrétionnaire de la Commission. Il aurait dû être évident aux parties concernées, puisque l'on n'envisageait pas qu'elles seraient présentes durant les audiences mais limiteraient leur participation à l'examen des transcriptions quotidiennes, qu'elles n'auraient pas la possibilité, à toutes fins pratiques, de suggérer des questions sur les détails des déclarations faites par les témoins, qui auraient généralement fini de témoigner avant que ces suggestions puissent être communiquées. Autrement dit, le temps consacré à la formulation de telles questions serait du temps perdu et inutile. Les intervenants devraient plutôt s'intéresser à la suggestion de thèmes d'enquête correspondant à leur position particulière de titulaires de charges publiques ou de parlementaires.
- De manière générale, il me semble, à la lumière des demandes écrites et des représentations orales des avocats de ces trois requérants, qu'ils ont dans l'ensemble méjugé la portée de leur participation à l'Enquête et de ce que la Commission en attend.
- Le 5 juillet 2004, quand le Parti conservateur du Canada et le Bloc Québécois se sont vu accorder le statut d'intervenants durant l'Enquête, j'ai bien pris soin d'expliquer que cela ne leur donnait pas un droit de pleine participation à cause du danger que cela n'introduise dans les travaux de la Commission un élément de partisanerie politique qu'il est préférable de circonscrire à une autre tribune. Avec l'entrée en scène du Parti libéral du Canada, ce facteur est encore plus pertinent. Les seules raisons pour lesquelles ces partis politiques se sont vu accorder le statut d'intervenants durant l'Enquête sont celles exprimées dans le passage suivant de la décision, concernant le Parti conservateur :
- Le Parti conservateur du Canada représente un important groupe d'opinion au Canada. Il peut offrir un point de vue utile sur les questions d'administration publique, sur le rôle des titulaires de charges publiques et des parlementaires, et sur le processus employé pour verser les deniers publics. En conséquence, la Commission bénéficierait de sa participation, de son assistance et de ses représentations en qualité d'intervenant.
- Le même raisonnement vaut pour le Bloc Québécois et le Parti libéral du Canada.
- Pour aider la Commission dans son travail, il ne me semble pas nécessaire que les intervenants analysent les transcriptions quotidiennes avec autant d'attention que doit le faire un avocat chargé de défendre les intérêts de son client. Les trois requérants n'ont pas d'intérêts propres à défendre dans cette Enquête. Si tant est qu'ils en ont, ceux-ci ne concernent pas tant leurs avocats que le grand public. Ils n'ont à examiner les transcriptions que dans le contexte des représentations qu'ils feront de temps à autre, mais surtout à la fin de l'Enquête.
- Pour ce qui est de la documentation, les seuls documents dont devraient tenir compte les avocats des intervenants sont ceux qui font partie du dossier officiel de la Commission car ce sont les seuls dont je tiendrai compte pour tirer mes conclusions et formuler mes recommandations. Les autres documents transmis aux autres participants peuvent revêtir un certain intérêt pour ces derniers, parce qu'ils sont chargés de défendre les intérêts de leurs clients respectifs, mais les intervenants, qui ne représentent pas des clients détenant des intérêts directs et substantiels pouvant être touchés par l'Enquête, peuvent s'en désintéresser sans aucune crainte.
- Je ne suis pas convaincu que les avocats des intervenants aient besoin d'une aide financière plus élevée que celle qui a déjà été recommandée à leur intention. Il est vrai que résumer les transcriptions quotidiennes prendra probablement parfois plus que les trois heures par jour envisagées mais, dans d'autres cas, moins que ces trois heures. Il appartient aux avocats de chercher d'autres méthodes pour faciliter leur travail, afin d'économiser le plus possible les deniers publics. Il convient de minimiser le fardeau de la Commission sur le trésor public.
- Je n'ignore pas que l'un ou l'autre des requérants jugera peut-être nécessaire à l'avenir de demander le statut de partie à l'Enquête. Si une telle demande était justifiée, cette partie aurait alors le droit de demander une révision de ma recommandation en matière de financement.
- Décision
- Les requêtes du Parti conservateur du Canada et du Bloc Québécois concernant une modification de ma décision du 19 juillet 2004 sur l'aide financière recommandée sont rejetées.
- La requête du Parti libéral du Canada concernant l'octroi d'une aide financière est acceptée avec les modalités suivantes :
- Je recommande qu'une aide financière limitée soit accordée aux avocats du Parti libéral du Canada aux mêmes conditions que celle recommandée pour le Parti conservateur du Canada dans ma décision du 19 juillet 2004, sauf dans la mesure où l'aide relative à la préparation préalable à l'Enquête devrait être limitée à 20 heures de travail pour chaque avocat et où aucune aide ne devrait être consentie pour des services rendus avant le 20 octobre 2004.
__________________________________________ John H. Gomery, commissaire
Ottawa, le 26 octobre 2004
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