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RELIGIEUSES

Vie au Lac La Biche

Lettres de WE. Traill 1874-1881 (Troisième partie)
Édité par EDWARD J. McCULLOUGH et MICHAEL MACCAGNO

C'est le dernier de trois articles comprenant les lettres et réminiscences de W.E. Traill au Lac La Biche. Ceux-ci parlent de la période s'étalant de l'hiver de 1878-1879 à l'été de 1881. Les parties précédentes ont été publiées dans le numéro du printemps 1990 de « l'histoire d'Alberta » (1874-1875) et le numéro d'été 1990 (1875-1878).


Hiver 1878-1879

Ai reçu seulement hier [15 février 1879] la lettre intéressante de bienvenue de Katie datée du 11 novembre. J'en ai également reçu une de notre chère mère sans date mais sûrement écrite au moment de Noël. Ces lettres ont mis longtemps à me parvenir. J'ai également reçu les deux livres (...) [des cadeaux de Noël] [malheureusement] tous les messages pour mes chéris ne seraient jamais distribués... Dieu a repris deux de nos enfants chéris, Katie, le plaisir de mon coeur, et notre jeune et doux Harry. Ils nous ont été repris à dix jours d'intervalle l'un de l'autre.

Chère mère semble avoir presque eu un pressentiment de ma perte quand elle dit en nous souhaitant un joyeux Noël, « on aime peu prévoir longtemps à l'avance dans cette vie incertaine ». Vraiment nul ne « sait pas ce que chaque jour apporte ». Comme notre Noël était différent de celui-là (...) décrit pour nous. Ah, quelle différence! Ma chère Katie couchée dans la tombe froide. Ma chère épouse malade sur son lit, à la porte de la mort et moi-même observant mon Harry chéri expirer son dernier souffle. Walter pas encore hors de danger; seulement notre pauvre petit Willie l'était et ressemblait à un petit orphelin car ni sa mère ni moi-même n'étions capables de nous occuper de lui. Sans la grande bonté des Sœurs de la Charité, je ne sais pas ce que j'aurais fait. Elles ont soigné mon épouse et mes enfants chéris et se sont occupées de petit Willie comme s'il était l'un des leur – en fait, sœur Youville l'appelle son petit-fils. Elle a été fort sympathique à notre égard, face à notre perte. Elle s'était occupée de Harriet et de ma chère Katie mais a été obligée de retourner à la mission. Elle nous a dit de la faire revenir si la situation empirait. Quand elle a dit « au revoir » à Katie, la chère enfant lui a dit à elle « pourquoi êtes vous dans une telle hâte? » – les derniers mots qu'elle ne lui ait jamais dits. Quand la sœur est revenue, ma chérie était déjà un cadavre. Elle a aimé mon cher Harry comme son propre enfant. Quand il est mort, elle a dit à Harriet, « chère Mme Traill, je partageais votre amour pour cet enfant, maintenant laissez-moi partager votre peine », et elle était sincère. Il était le seul enfant qui allait vers elle et ne semblait pas effrayé par elle.

Je vais essayer de vous parler de cette tragédie qui est survenue. Le 12 décembre, mon cher Harry qui était malade depuis un certain temps a eu la scarlatine qui faisait des ravages dans le voisinage depuis quelques mois. Pendant la nuit du 14, Willie et chère Katie l'ont eue; le lendemain matin Harriet est devenu soudainement malade. J'ai été obligé de faire venir la sœur Supérieure du couvent qui nous a beaucoup aidé. Nous avions de la difficulté à empêcher Harriet de s'étouffer; la situation des enfants s'est rapidement empirée et je pensais que je les perdrais tous ensembles. J'ai tout le temps dormi avec ma fille chérie. Elle semblait être moins en danger que ses frères jusqu'au matin du 18, quand sa maladie s'est rapidement empirée et, avant que la nuit ne tombe, je me suis rendu compte qu'elle était morte. Le bébé était également malade, bien qu'il ait vécu pendant plusieurs jours.

Ma fille chérie était tellement bonne malgré sa maladie, ne nous donnant jamais d'ennui, prenant ses médicaments sans un murmure, me remerciant toujours. Chère, chère enfant, c'était très émouvant la prévoyance et la tendresse qu'elle montrait. Elle a pleuré presque toute la nuit quand ce cher petit Harry était malade. Je ne me doutais point que tous deux allaient bientôt rejoindre leur sauveur. La soirée du 18, elle délirait mais me reconnaissait encore. Sa chère mère était trop malade pour pouvoir l'aider. Peu avant sa mort, quand la mort se lisait dans ses yeux, je lui ai demandé, « vous me connaissez ma chérie? ». Elle a répondu, « ne me posez plus cette question – bien entendu je vous connais ». Chère enfant, ce fut les derniers mots qu'elle m'ait dits.

Nous avions peur de le dire à Harriet mais elle l'a immédiatement senti et s'y était résignée. Cependant, elle ne se rendait toujours pas compte de la terrible vérité. En même temps, mon cher Harry se trouvait à la porte de la mort. La sœur supérieure est venue vers moi et m'a dit que nous devions le bouger dans une autre salle, car il allait bientôt mourir et qu'elle ne se prononcerait pas sur le sort de la mère qui était en danger.

Nous avons bougé le cher petit enfant. Je suis sorti peu de temps après, m'attendant à le retrouver expirant son dernier souffle, mais étonné de constater qu'il était encore vivant. Entre-temps elles avaient couché ma petite fille et étaient en train d'habiller mon garçon chéri avec ses habits mortuaires. Je suis entré à nouveau dans l'autre salle et on m'a dit qu'il allait mieux aller. Sa situation s'est améliorée et je commençais à penser qu'il allait se rétablir, mais le jour suivant sa gorge a commencé à enfler. Walter est alors tombé malade et l'était gravement en effet. Il nous a donné plus de fil à retordre car il semblait souffrir davantage. Petit Willie allait mieux quand la chère Katie est morte. Pauvre petit enfant. Il était très malade pendant 3 jours et pendant ce temps il n'a goûté à aucune nourriture; ensuite il allait mieux et ne nous donnait plus aucun ennui.

Je devais toujours m'occuper de Walter et du cher bébé. Tous deux avaient besoin d'une attention particulière, Walter étant très agité. Il ne pouvait pas supporter la douleur. Quand j'ai constaté qu'Harriet n'allait pas bien du tout et avait un tel besoin de présence, j'ai envoyé quelques hommes à 170 milles, au fort Pitt, pour chercher Mme McKay. Elle est partie du fort Pitt le matin de Noël. J'étais particulièrement mélancolique le jour de Noël. Il est vrai, qu'Harriet allait un peu mieux mais Walter était très malade et mon cher Harry n'allait pas très bien. Je l'ai observé jusqu'à minuit passé, m'attendant à ce que chaque instant soit son dernier, mais après minuit il allait mieux et mes espoirs ont augmenté à nouveau. Cette situation est restée la même jusqu'au soir du 28. Chaque nuit il semblait être mort et par la suite allait tellement mieux. Cette soirée, juste avant qu'il ne fasse noir, Mme McKay est arrivée. Elle était assez fatiguée, après avoir quitté le fort Pitt il y a quatre jours et quatre nuits, par mauvais temps et sans route sur une distance de 170 milles. Elle semblait penser que mon enfant pouvait récupérer. Peu de temps après son arrivée, la sœur que j'avais fait chercher est arrivée. Elle s'est assise avec moi tandis que Mme McKay dormait. Cette nuit, il ne semblait pas allé plus mal que d'habitude, ainsi, après que Mme McKay se soit réveillée vers minuit, je me suis couché car j'étais fort las. À environ trois heures, elles m'ont réveillé pour me dire que mon enfant chéri n'allait pas bien du tout. Sa situation avait empiré d'un coup. Il est mort quelques minutes après. Je suis reconnaissant car j'ai été épargné de voir la douleur qu'entraînent les convulsions chez mes enfants.

C'était un tel réconfort d'avoir cette chère Mme McKay avec nous pendant ces moments difficiles. Harriet était toujours trop faible pour se rendre compte de sa perte. Elle a été incapable de verser une larme pendant quelques jours. Elle n'a pas fermé l'oeil durant quatre jours et quatre nuits. Son ouïe était remarquablement aiguë. Je n'avais jamais rien vu de semblable. Personne ne pouvait parler même chuchoter dans la maison, car elle entendait tout distinctement.

Je suppose que je suis entièrement résigné à la volonté divine et je sais que mes chéris sont infiniment plus heureux où ils sont, mais la chair est faible et le cœur languit des chers êtres absents. Des cinq enfants que nous eummes, deux seulement sont encore vivants maintenant; pas surprenant si parfois nous sentons profondément notre perte. Rappelez-vous, il n'y a pas d'amis ni de voisins aimables pour venir nous voir et nous consoler. Le fardeau tombe pesamment sur ma chère Harriet qui était alors tellement malade qu'elle ne pouvait pas soigner les chères malades ni se rendre compte de la mort de ses enfants. Elle ne pouvait pas pleurer. Elle disait toujours qu'elle ne les croyait pas morts mais qu'ils étaient partis. Maintenant elle prend pleinement conscience de la triste réalité et ressent cette perte deux fois plus fort.

[ Mme McKay ] est restée avec nous pendant environ trois semaines jusqu'à ce qu'Harriet ait entièrement récupéré. Nous étions réjouis de voir M. McKay arrivé quelques jours avant que Mme McKay ne parte. Il a passé environ quatre jours avec nous puis ce vieux couple digne est retourné au fort Pitt.

Walter a été obligé de rester à la maison depuis la mi-décembre. Nous ne pouvons pas nous séparer de lui maintenant. La maison serait insupportablement morne. Le petit Willie met l'ambiance dans la maison. Il est très amusant. Parfois il dit une histoire romantique et si on lui dit qu'il raconte des histoires, il dit, « peut-être qu'elle est vraie, mais seulement peut-être ».

[ le 16 février ] – Harriet et les enfants vont mieux maintenant... Il y a encore de nombreux malades dans le voisinage, principalement de la scarlatine. Il n'y a pas une seule famille qui ne soit épargnée. Il y a des malades dans chaque maison; dans certains logements il y a seulement une ou deux personnes sur leurs jambes. Il n'y a pas encore eu beaucoup de décès jusqu'à maintenant (...) mais je crains que plus ne s'ensuivent. [ Harriet et moi sommes ] avec un ami en train de soigner ses enfants malades... Il y a cinq malades dans la maison. Nous entendons parler de la maladie partout. Nous savons que Mme Hardisty est très malade. Sa sœur également Mme [Harrison] Young, du lac des Esclaves. Nous avons assez de nourriture mais les personnes autour de nous ne mangent que ce qu'elles trouvent.


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