Musée des beaux-arts du Canada / National Gallery of Canada

Annual Bulletin 3, 1979-1980

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La Sainte Catherine d'Alexandrie 
de Simone Martini: un retable orviétan
et la théologie mystique de saint Bonaventure

par Joel Brink

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La répétition du champ de pinacle innovateur deux ou trois fois de chaque côté du panneau central produirait un retable gauche par rapport au degré d'excellence visé par Simone en matière de conception. Il est également vrai que la majorité des tableaux d'autel de la dernière partie du XIXe siècle qui imitent la nouvelle disposition de pinacle de Simone, comme celui de Bartolo di Fredi à la Galerie nationale de l'Ombrie à Pérouse (fig. 8), sont en forme de triptyque. (12) Il est donc raisonnable d'avancer (et l'iconographie du tableau soutient cette hypothèse) que le retable produit par Simone Martini pour les Franciscains d'Orvieto avait été conçu à l'origine comme un triptyque comportant un pinacle à trois pignons au-dessus de chaque volet (fig. 9). À l'heure actuelle, on ne connaît pas de panneau qui aurait pu servir de volet de tiroite, de sorte qu'on ignore l'identité du saint ou de la sainte faisant pendant à sainte Catherine.

À en juger d'après la menuiserie du retable bien préservé de Simone à Pise (fig. 10), on peut admettre que les volets du triptyque orviétan aient été unifiés structurellement par quatre puits de maçonnerie continus partant du dessus du cadre basal et rejoignant les bordures du support entre chacun des volets. Les puits latéraux auraient constitué les cadres latéraux du retable, et les colonnettes auraient été insérées à côté de ces éléments verticaux suivant une conception voisine de celle du polyptyque de Pise et du trône de la Maestà du Palais Public (fig. 11). Par sa structure, ce magnifique trône doré proclame le style gothique dans sa plénitude et la lucidité introduits par Simone Martini dans la conception du retable toscan au début du XIVe siècle italien. L'élégante architecture du trône céleste de la Vierge se trouve reproduite dans la menuiserie du polyptyque de Pise et, à n'en pas douter, doit avoir caractérisé la présentation générale des retables du maître à Orvieto. Cela vaut certainement pour le polyptyque démonté de Boston, (13) lequel a été dépouillé de son cadre d'origine, de même que pour le retable des Dominicains au musée de la cathédrale d'Orvieto.

La caractéristique du triptyque reconstitué qui le distingue des autres retables de l'époque est la nouvelle forme du pinacle, sa taille et son importance plus considérables par rapport au champ arcadé au-dessous. On peut admettre que cette disposition avait été dictée par les exigences du programme des mécènes franciscains, de sorte qu'il faut considérer maintenant les problèmes iconographiques posés par le tableau.

Passant de la menuiserie à l'iconographie du retable, on est d'emblée frappé par l'imagerie aussi riche qu'à peine explorée du volet central à Orvieto. Simone Martini n'a présenté dans aucun autre tableau d'autel un tel type didactique et dogmatique du Christ-Enfant (fig. 12). Installé dans les bras de sa mère comme sur un trône, le Christ-Enfant fixe intensément l'observateur, montrant du doigt avec autorité un rouleau portant une inscription. Le Christ, comme s'il voulait dire « Ecoute ces paroles », semble vouloir entreprendre un enseignement qui s'étend à partir du texte jusque dans les niveaux supérieurs du tableau. La citation de la Bible inscrite sur le rouleau provient de l'Évangile selon saint Jean (XIV; 6) qui rapporte la réponse célèbre du Christ à la question de l'apôtre Thomas pendant son dernier discours: « Seigneur, nous ne savons même pas où tu vas. Comment pourrions-nous en connaître le chemin? » Et le Christ de répondre: « Ego sum via, veritas et vita » (Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie). Avec son expression grave et son index pointé, l'Enfant-Jésus semble insister sur la nature de sa mission envers l'humanité: Il est la seule voie de salut et, par conséquent, la seule voie vers le Père aux cieux. (14)

L'iconographie est tout aussi intéressante dans les panneaux supérieurs (voir fig. 4). Au-dessus de la corniche dans le pinacle apparaît le Rédempteur, une main levée dans un geste de bénédiction et l'autre tenant un livre fermé. Dans les champs à pignon plus petits se trouvent deux anges portant chacun des attributs particuliers. L'ange de gauche, tourné vers le Rédempteur, tient deux chandelles allumées (fig. 13), alors que l'ange de droite est représenté de face, couronné de laurier et montre un livre ouvert (fig. 14). Les deux zones picturales, supérieure et inférieure, sont réunies par deux médaillons portant des anges identiques (fig. 15 et 16): l'un et l'autre tiennent le sceptre et l'orbe d'or et un trône vide, drapé, est placé devant eux. Alors que chacun de ces anges est représenté avec deux paires d'ailes, ceux qui se trouvent au-dessus, dans le pinacle, semblent en avoir trois paires, lumineuses et à peine visibles du côté gauche et clairement accusées contre le fond or avec du gris-bleuâtre du côté droit. De même, l'ange de droite dans le pinacle porte un type de vêtement liturgique de couleur bleu froid, tandis que l'ange de gauche est représenté couvert d'un drapé flottant d'un rose chaud. Les anges sont identifiés par des inscriptions peintes en lettres noires partiellement masquées: sous les deux anges dans les deux médaillons, le mot TRONE (trône) et, juste sous la corniche de gauche, - RAP - YM (séraphin), le mot CERUB-M (chérubin) étant placé sous l'ange porteur du livre ouvert. Entre ces identifications, juste sous le Rédempteur se trouve l'inscription ALPH- & O (Alpha et Oméga) de l'Apocalypse. (15)

Cette disposition des anges a ceci de particulier et d'unique que les trônes, chérubins et séraphins, qui forment le plus élevé des trois ordres de la hiérarchie céleste, ne sont pour ainsi dire jamais présentés ensemble de cette façon dans un retable du centre de l'Italie à cette époque. Le fait que le peintre les a si méticuleusement distingués l'un de l'autre par la pose, la couleur et les attributs, et les a même identifiés par des inscriptions mène inéluctablement à la conclusion qu'un programme précis de dogme religieux comprenant probablement les trois ordres de la hiérarchie angélique au complet faisait partie de l'oeuvre d'art originelle. Dans cette disposition iconographique (fig. 17), les deux ordres inférieurs d'anges auraient été placés dans les médaillons et pinacles perdus des volets latéraux. On peut admettre que le premier ordre, notamment les anges, archanges et principautés se trouvait au-dessus de la Sainte Catherine d'Alexandrie d'Ottawa, (16) et que l'ordre intermédiaire, celui des puissances, des vertus et des dominations se trouvait placé au-dessus du saint ou de la sainte inconnu(e) du panneau droit du Aretable.

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