La
politique englobe l'ensemble des secteurs d'activités d'une société. Pour comprendre
le développement de la communauté francophone en Colombie-Britannique, il faut
donc étudier les relations qui prévalent entre les différents
niveaux
gouvernementaux et la communauté. La revendication et l'égalité des communautés
francophones sont deux éléments en pleine évolution. Avant les années 60,
bien qu'ils furent parmi les premiers arrivants en terrain calédonien, les
francophones devaient compter sur leurs propres ressources afin de se doter
des institutions nécessaires à leur développement.
Les
actions politiques entreprises par certains individus, en quête d'équité ou
d'un meilleur système scolaire, ne sont pas uniformes et sont ignorées plus
d'une fois par la législature à Victoria. L'établissement du système d'éducation
publique dans la province lors de l'entrée dans la Confédération en est un parfait
exemple. Les francophones doivent alors payer des impôts pour financer un système
d'éducation qu'ils n'utilisent pas, puisqu'ils ont déjà leurs propres écoles
et hôpitaux gouvernés par le clergé. Ils sont outrés, envoient des pétitions
qui demeurent sans réponse. La même histoire se répète en 1950, lorsque la communauté
exige la gratuité des services reliés à l'éducation ainsi que l'exemption de
l'impôt foncier. Des actions entreprises dans le cadre de ce dossier ne portent
pas fruit. Il faut attendre la fin des années 70, puis des réformes constitutionnelles
pour que les choses bougent et que certains droits fondamentaux soient respectés.
La Fédération des Canadiens français de la C.-B. est
créée en 1945 en réponse au besoin de ralliement de la communauté ; elle
devient le porte-parole de la communauté francophone. Bien que son élan
initial soit des plus poussés et prometteurs, les grands dossiers auxquels
elle s'attaque dès sa fondation se verront étirés sur plusieurs longues
décennies, signe de l'ampleur des défis qui se dressent devant la collectivité
francophone.
Pendant ce temps, au Québec, les années 60 marquent un changement extraordinaire
dans la conscience populaire. Le système politique prend ses distances par rapport
à l'église. Un sentiment national apparaît et des échos séparatistes émergent
dans la société québécoise. Devant ce que plusieurs observateurs croient être
un schisme entre les deux communautés linguistiques, le gouvernement fédéral
se sent de plus en plus poussé à étudier l'état du bilinguisme et du biculturalisme,
et de proposer des mesures pour que soit respecté le principe d'égalité des
peuples fondateurs.
La commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (aussi
appelée la Commission Laurendeau-Dunton) est alors établie en 1963. Elle
marque
un pas en avant dans la saga des langues officielles. Suite aux nombreuses recommandations
proposées par la Commission, la Chambre des communes adopte en 1969 la Loi sur
les langues officielles. Cette loi reconnaît le français et l'anglais comme
langues officielles de toutes les institutions fédérales, ces dernières se devant,
dès lors, de desservir les Canadiennes et Canadiens dans la langue officielle
de leur choix. La Loi crée aussi le poste de Commission aux langes officielles.
Voilà qu'après cent ans de Confédération, une première victoire semble être
gagnée par les communautés francophones.
Au même moment naît l'Action
socioculturelle du Secrétariat d'État qui se chargera de subventionner les
projets des groupes communautaires. Ce programme d'aide établit un cadre de
responsabilité pour les communautés au sein du gouvernement du Canada, et
vise alors à appuyer les communautés linguistiques minoritaires dans leur
effort de développement et de regroupement. Mais si le Nouveau-Brunswick a,
dès 1969, adopté une loi sur les langues officielles, conférant un statut
égal au français et à l'anglais, ce n'est pas le cas de la Colombie-Britannique.
Celle-ci ignore carrément les propos de l'engagement fédéral. Aucune des lois
passées à cette époque à la législature de Victoria ne contient de disposition
visant les langues officielles; l'anglais est imposé comme la langue d'utilisation
courante. Les tribunaux ne reconnaissent pas les francophones et la loi ne
prévoit pas de recours à un interprète. Dans ce contexte, il n'est pas étonnant
que selon le recensement de 1971, le taux d'assimilation des francophones
de Colombie-Britannique est, pointant à plus de 69 %, le plus élevé au Canada
! Les défis restent entiers !