Le séjour des pêcheurs variait
selon qu'ils venaient de France ou de l'archipel Saint-Pierre-et-Miquelon :
Les pêcheurs venus de France, se faisaient déposer
sur l'île par les navires de l'armateur au début de
la saison de pêche, c'est à dire entre mars et début
avril. On débarquait alors les doris dans lesquels on chargeait
le sel et tout le nécessaire pour la campagne. Le bétail,
s'il y en avait, était jeté à l'eau et devait
gagner la grève à la nage. La manœuvre pour les hisser
jusque sur le haut de l'île devait ensuite être épique…
Une fois que tous les biens avaient été débarqués,
la goélette repartait et ne revenait qu'en fin de saison,
soit entre septembre et octobre. Le seul lien entre ces pêcheurs
et la mère patrie étaient les bateaux de la division
navale de Terre-Neuve qui devaient assurer le respect des droits
de pêche français et qui veillaient également
à la distribution du courrier, à la vérification
des établissements de pêche et du respect des nombreux
règlements de pêche imposée par l'Inscription
maritime française.
L'automne,
on faisait alors la manœuvre inverse, on embarquait les quintaux
de morue séchée et on rentrait sur la France, ou vers
Saint-Pierre-et-Miquelon pour y déposer le personnel qui
venait de l'archipel. Pour une colonie de cents hommes et plus,
il fallait sans doute plusieurs navires pour rapatrier tout le monde.
Lorsque
les pêcheurs de l'île-aux-Chiens commencèrent
à fréquenter l'île Rouge et le reste de la péninsule
de Port-à-Port après 1893, leur séjour se fit
plus court. Dans les premiers jours d'avril des goélettes
de l'archipel emmenait au French Shore - on disait «au golfe» à
Saint-Pierre-et-Miquelon - les pêcheurs qui y avaient obtenu
une place; ils embarquaient leur doris, le sel nécessaire
à la production de morue verte, le peu de nourriture qu'il
leur fallait, le bois pour rafistoler les cabanes. La goélette
revenait les chercher dès les premiers jours de juillet;
quelques hommes restaient au golfe jusqu'à la Saint-Michel
- date officielle de la clôture de la pêche pour les
Français - mais la majorité d'entre eux rentraient
dans l'archipel pour entreprendre leur seconde saison de pêche.
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