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Portraits de Joseph Brant par William Berczy
par Gloria Lesser
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En 1786, Joseph Brant retourna en Angleterre pour négocier
des privilèges fonciers. Il adressa au roi George III une demande
d'aide pour reprendre les hostilités contre les Etats-Unis, mais
le monarque lui opposa un refus diplomatique. Brant rentra au pays pour
consacrer le reste de sa vie aux intérêts de son peuple nouvellement
établi. La province du Haut-Canada, créée en 1791
et gouvernée par John Graves Simcoe, connut une augmentation rapide
de sa population vers la fin du XVIIIe siècle. Cette croissance
démographique était bien accueillie par le gouvernement car
elle permettait de dissuader le Haut-Canada de se joindre à l'Union
américaine. Les nouveaux immigrants se voyaient octroyer des concessions
foncières lorsqu'ils prêtaient le serment d'allégeance.
La pratique du favoritisme dans la concession des terres encourageait la
spéculation, et Joseph Brant ne tarda pas à recourir lui-même
à ce procédé. Par la suite, Brant reçut des
Iroquois une procuration l'autorisant à céder et à
vendre les terrains de la Grande Rivière et à percevoir la
recette, ainsi qu'à réunir un fonds de rente au cas où
le gibier deviendrait rare et où le mode de vie traditionnel des
Indiens disparaîtrait. En 1797, Brant fut cependant accusé
d'avoir abusé de ses pouvoirs de procureur en vendant à des
Blancs, Américains pour la plupart, les trois cinquièmes
de la superficie totale des terres en faisant un énorme profit. (18)
Brant soutint qu'il avait agi dans les intérêts de son peuple,
mais le fait est que sa fortune personnelle s'en trouva considérablement accrue. Il allégua que la concession d'origine était
trop petite pour permettre aux Indiens de subsister grâce à
la chasse et trop étendue pour être cultivée, et que
l'argent provenant de la vente de terres à des fermiers expérimentés
serait plus utile aux autochtones qui pourraient apprendre des techniques
plus avancées. Cependant, les Indiens touchèrent peu d'argent
et la superficie de la réserve fut considérablement réduite.
Rétrospectivement, l'attitude de Brant paraît naïve,
et en profitant de la situation, il fut en partie responsable du préjudice
causé aux Indiens.
Joseph Brant passa les dernières années de sa vie dans la plus grande
richesse. Il conserva son grade d'officier de l'armée britannique
et à ce titre toucha une demie-solde de la part du gouvernement.
Il mena une vie raffinée dans sa maison d'un étage construite
dans le goût de l'époque, qu'il avait baptisée Wellington
Square (le musée Joseph Brant de Brantford, en Ontario, est une
réplique de cette maison, érigée à l'emplacement exact de l'original). Les documents
historiques (19) décrivent
les bijoux et la garde-robe de Brant et de Catherine, sa troisième
épouse, une Agnière qu'il épousa en 1780 à
Niagara et qui lui donna sept enfants. Le couple possédait un beau
mobilier à la toute dernière mode.
Les Indiens des Six Nations méprisaient le sentiment
de fidélité qui liait Brant à la Couronne. En accordant
au gouvernement britannique le droit de regard sur leurs croyances et sur
leurs terres, les Indiens des Six Nations se placèrent sous sa tutelle.
Pris au beau milieu d'une lutte destructive entre une puissance impériale
et une jeune nation expansionniste, les Indiens étaient considérés
comme quantité négligeable par les deux camps. De plus en
plus molle, la résistance indienne finit par céder le pas
à l'impuissance.
Le héros classique: l'empereur
Après la guerre de l'Indépendance américaine, les portraits de
héros nationaux et d'hommes d'État furent de plus en plus
recherchés, ce qui favorisa l'apparition d'un très grand nombre de portraits officiels remplissant une fonction analogue à
celle de la peinture d'histoire. Au cours des premières années
de la République américaine, cette forme d'art « utile »
connut donc un grand essor. La république de la Rome antique
et ses citoyens aux vertus patriotes et spartiates séduisaient les
Américains luttant pour la survie de leur nouveau régime
ainsi qu'aux Loyalistes du Haut-Canada de plus en plus nombreux. L'intérêt
suscité par le classicisme antique se manifesta dans l'architecture
et les beaux-arts. La Grèce et Rome symbolisaient la raison et la
justice ancrées non seulement dans le passé, mais également
dans la nature profonde de l'homme à qui elles rappelaient ses
qualités éternelles de dignité, d'honneur, de bonté
et son amour pour la démocratie.
On pourrait étudier rétrospectivement la situation
des Indiens dans l'optique du déclin qu'ils ont subi depuis la guerre
de l'Indépendance, à la lumière du tableau commémoratif
de William Berczy, Portrait de Joseph Brant (Galerie nationale du
Canada) (fig. 5). Le biographe de Berczy, John Andre, (20) croit que le
tableau a été peint peu après la mort du chef indien
à l'âge de soixante-cinq ans. L'artiste présente son
modèle en pied, dans une pose théâtrale au bord d'une
rivière. L'influence néoclassique se fait sentir dans l'allure
pompeuse du personnage, la netteté avec laquelle il se découpe
sur le paysage et son attitude figée et statique. Brant manifeste
dans sa pose et dans son maintien la foi, la loyauté et l'esprit
de conquête, qualités définies en fonction des aspirations
des premiers explorateurs et voyageurs, qualités qui magnifiaient
les contacts entre Européens et Indiens et symbolisaient les aspects
positifs de ces rapprochements. Berczy a peint Joseph Brant comme chef
spirituel d'une nouvelle époque pleine d'espoir à la manière
d'un personnnage de la Rome antique, auquel on s'identifie et dont on
s'inspire. Ce portrait, document historique, social et politique aussi
bien qu'oeuvre d'art, a suscité diverses réactions de la
part des historiens de l'art. Barry Lord s'exprime en ces termes:
Le chef agnier, complètement assimilé...portant tous ses
insignes, se tient devant l'image que se faisait Berczy de la Grande Rivière
et montre du doigt la nouvelle patrie de son peuple. Berczy...a traité
le chef iroquois à la manière d'un aristocrate britannique
présentant son domaine ancestral ou un général anglais
devant le champ de sa plus célèbre bataille. (21)
William Berczy, saxon d'origine, passa sa jeunesse à
Vienne. Il étudia les beaux-arts en Italie, de 1785 à 1790
et en Angleterre, de 1790 à 1792. Au départ, Berczy était
miniaturiste et il exerça son art, après 1785, en Suisse
et en Angleterre avant de s'installer en Amérique. Berczy était
également écrivain, urbaniste, ingénieur, architecte
et exploitant foncier. C'est en cette dernière qualité
qu'il fit la connaissance de Joseph Brant en 1794; l'entente passée
entre les deux hommes et John Graves Simcoe, premier lieutenant-gouverneur
du Haut-Canada leur permit de mener à bien les projets politiques
et financiers qu'ils avaient formés.
En 1792, à titre d'agent foncier du marquis de
Bath, Berczy avait amené un groupe de colons allemands dans l' état
de New York, mais il s'était querellé avec les autorités
à propos de la nature des terres concédées; il avait
donc dirigé ses colons vers le canton de Markham, près de
York (devenue Toronto) dans le Haut-Canada. À partir de 1795, des
clients de York et de Québec commandèrent à William
Berczy des portraits et des tableaux de genre comparables aux oeuvres néoclassiques
produites en Angleterre à la même époque. Berczy
avait séjourné quelque temps à londres en 1799 et
à son retour au Canada en 1801, il avait commencé à
imiter le style néoclassique contemporain. En 1803, Berczy avait
entrepris sa carrière de peintre professionnel.
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